Vit-on la lente fin d’une histoire d’amour entre soleil, humanité et vacances ? - DR : DepositPhotos.com, Syda_Productions
A l’heure où j’écris ces lignes, le département du Gard et celui des Bouches-du-Rhône voient une partie de leurs territoires partir en fumée. Et l’été ne fait que commencer.
En Espagne, au Portugal, en Italie, en Californie… la sécheresse fait rage, les économies d’eau sont donc préconisées et l’on n’en finit pas de lancer des alertes à la population afin d’éviter les gestes maladroits risquant d’enflammer une partie de la région.
Au même moment, le réchauffement climatique fait s’écrouler des glaciers et tue plusieurs vacanciers. De son côté, selon le très sérieux quotidien The Guardian, l’observatoire le plus haut des Alpes est formel : la fonte précoce des glaces sur le pic du Sonnblick, situé dans les Alpes autrichiennes, a près d’un mois d’avance et devrait être complète d’ici quelques jours.
Une situation inédite qui provoque la consternation chez les scientifiques de l’observatoire, d’autant que certaines années les glaces duraient toute la saison estivale.
Autre exemple, le site de Franceinfo nous apprend que le glacier de la Grande Motte à Tignes, seul glacier d’été encore ouvert en saison estivale, a fermé ses portes vendredi 1er juillet, soit un mois à l’avance sur sa date de fermeture initiale.
Une fermeture anticipée due la fonte des glaces qui s’accentue d’année en année.
Et encore : le rafting qui est l’une des activités phares du Verdon est interdit cette année. La baignade qui devait être autorisée au 1er juillet, est finalement interdite elle aussi.
En outre, la plupart des activités sont malheureusement impossibles car le niveau de l’eau est de 5 mètres inférieur à celui habituel !
En Espagne, au Portugal, en Italie, en Californie… la sécheresse fait rage, les économies d’eau sont donc préconisées et l’on n’en finit pas de lancer des alertes à la population afin d’éviter les gestes maladroits risquant d’enflammer une partie de la région.
Au même moment, le réchauffement climatique fait s’écrouler des glaciers et tue plusieurs vacanciers. De son côté, selon le très sérieux quotidien The Guardian, l’observatoire le plus haut des Alpes est formel : la fonte précoce des glaces sur le pic du Sonnblick, situé dans les Alpes autrichiennes, a près d’un mois d’avance et devrait être complète d’ici quelques jours.
Une situation inédite qui provoque la consternation chez les scientifiques de l’observatoire, d’autant que certaines années les glaces duraient toute la saison estivale.
Autre exemple, le site de Franceinfo nous apprend que le glacier de la Grande Motte à Tignes, seul glacier d’été encore ouvert en saison estivale, a fermé ses portes vendredi 1er juillet, soit un mois à l’avance sur sa date de fermeture initiale.
Une fermeture anticipée due la fonte des glaces qui s’accentue d’année en année.
Et encore : le rafting qui est l’une des activités phares du Verdon est interdit cette année. La baignade qui devait être autorisée au 1er juillet, est finalement interdite elle aussi.
En outre, la plupart des activités sont malheureusement impossibles car le niveau de l’eau est de 5 mètres inférieur à celui habituel !
L’offensive climatique est lancée
De tels phénomènes dont l’énumération exhaustive est devenue presque impossible, ne constituent pas, hélas, des accidents conjoncturels.
Tout le monde a bien compris, qu’après avoir menacé pendant des décennies sans être pris au sérieux, le changement climatique lance aujourd’hui son offensive. Laquelle sera de toute évidence longue et pénible pour une partie de l’humanité, dont la nôtre.
Fer de lance de l’offensive, la chaleur, donc son bras armé, le soleil qui, d’astre de vie est en train dans les imaginaires de devenir « astre de mort ».
Trop fort, trop chaud, les dieux Ra de la mythologie égyptienne, Helios dans la mythologie grecque, Huitzilopochtli pour les Aztèques… perdent d’autant plus de leur aura que la médecine, depuis deux bonnes décennies, met en garde contre les excès de l’exposition au soleil et lamine une activité devenue synonyme des vacances estivales : le bronzage.
Une activité à laquelle l’académicien Pascal Ory a consacré un ouvrage particulièrement érudit : « L’invention du bronzage » (Éditions Flammarion).
Une invention somme toute récente puisqu’elle date de la deuxième partie du siècle dernier et traduit un basculement total d’attitudes par rapport aux années précédentes où la blancheur de la peau incarnait l’élégance aristocratique face au teint buriné des ouvriers travaillant en plein air, sous le soleil !
Tout le monde a bien compris, qu’après avoir menacé pendant des décennies sans être pris au sérieux, le changement climatique lance aujourd’hui son offensive. Laquelle sera de toute évidence longue et pénible pour une partie de l’humanité, dont la nôtre.
Fer de lance de l’offensive, la chaleur, donc son bras armé, le soleil qui, d’astre de vie est en train dans les imaginaires de devenir « astre de mort ».
Trop fort, trop chaud, les dieux Ra de la mythologie égyptienne, Helios dans la mythologie grecque, Huitzilopochtli pour les Aztèques… perdent d’autant plus de leur aura que la médecine, depuis deux bonnes décennies, met en garde contre les excès de l’exposition au soleil et lamine une activité devenue synonyme des vacances estivales : le bronzage.
Une activité à laquelle l’académicien Pascal Ory a consacré un ouvrage particulièrement érudit : « L’invention du bronzage » (Éditions Flammarion).
Une invention somme toute récente puisqu’elle date de la deuxième partie du siècle dernier et traduit un basculement total d’attitudes par rapport aux années précédentes où la blancheur de la peau incarnait l’élégance aristocratique face au teint buriné des ouvriers travaillant en plein air, sous le soleil !
« L’invention du bronzage » selon l’historien Pascal Ory
Comment l’historien explique-t-il ce phénomène si radical et si rapide ?
Un peu d’histoire. Pour Pascal Ory, « ce n’est certainement pas l’économie qui a provoqué le changement : les instituts de beauté, façon Helena Rubinstein, dépassés par les événements, mettront du temps à se caler sur la nouvelle tendance et la célèbre « ambre solaire » accompagnera et amplifiera un phénomène commencé avant et sans elle.
La clé du mystère n’est pas non plus à chercher du côté d’une avant-garde chic (Coco Chanel) ou, au contraire, d’un vaste mouvement populaire (les « congés payés »), poursuit l’historien.
Non, cela se passe là où cela doit se passer : dans les profondeurs de la société, donc de la culture, résultante et cristallisation de trois tendances :
• La plus explicite est d’ordre médical. Elle témoigne de l’extension d’une nouvelle conception, « naturiste » de la santé, physique et mentale, de l’être humain, qui chante le sport, les bains de mer (on parlera de « bains de soleil ») et pense découvrir dans l’exposition au soleil quantité de vertus thérapeutiques.
• La seconde est proprement sociale : désormais la distinction des élites, soucieuses de prouver leur capacité de loisir face au commun des mortels, va se faire non plus par rapport au paysan et ses coups de soleil mais par rapport à l’ouvrier et à l’employé, condamnés à la blafardise.
• La troisième est, au fond, politique : le bronzage passe par le dévoilement, chaque jour plus étendu, du corps féminin, condamné à la clandestinité par des millénaires de puritanisme. Il est contemporain des cheveux coupés, de la libération du corset et du raccourcissement des jupes. »
Un peu d’histoire. Pour Pascal Ory, « ce n’est certainement pas l’économie qui a provoqué le changement : les instituts de beauté, façon Helena Rubinstein, dépassés par les événements, mettront du temps à se caler sur la nouvelle tendance et la célèbre « ambre solaire » accompagnera et amplifiera un phénomène commencé avant et sans elle.
La clé du mystère n’est pas non plus à chercher du côté d’une avant-garde chic (Coco Chanel) ou, au contraire, d’un vaste mouvement populaire (les « congés payés »), poursuit l’historien.
Non, cela se passe là où cela doit se passer : dans les profondeurs de la société, donc de la culture, résultante et cristallisation de trois tendances :
• La plus explicite est d’ordre médical. Elle témoigne de l’extension d’une nouvelle conception, « naturiste » de la santé, physique et mentale, de l’être humain, qui chante le sport, les bains de mer (on parlera de « bains de soleil ») et pense découvrir dans l’exposition au soleil quantité de vertus thérapeutiques.
• La seconde est proprement sociale : désormais la distinction des élites, soucieuses de prouver leur capacité de loisir face au commun des mortels, va se faire non plus par rapport au paysan et ses coups de soleil mais par rapport à l’ouvrier et à l’employé, condamnés à la blafardise.
• La troisième est, au fond, politique : le bronzage passe par le dévoilement, chaque jour plus étendu, du corps féminin, condamné à la clandestinité par des millénaires de puritanisme. Il est contemporain des cheveux coupés, de la libération du corset et du raccourcissement des jupes. »
Les paradoxes comportementaux
Une fois cela expliqué, nous aurions pu en rester là et continuer tranquillement de vendre avec succès des plages écrasées de soleil à des femmes et hommes aux corps délicieusement halés.
Nous aurions pu continuer à vendre des maisons de vacances et des hôtels confortablement installés dans les décors ensoleillés de destinations elles-mêmes ensoleillées toute l’année…
Sauf que le balancier sociétal entrainé par le balancier climatique est en train d’en décider autrement. Sauf que tout le monde ne le voit pas encore.
En effet, les paradoxes de notre société font que, bien qu’alertés des dangers du soleil pour la peau et de la menace avérée de cancer, 10% seulement de la population déclarent se protéger toute l’année.
Pire, selon une enquête d’Ipsos pour les laboratoires de la Roche-Posay, 7 français sur 10 estiment que « le bronzage est sexy ! ». Certes on protège plus les enfants qu’avant, mais cela reste le fait d’une minorité.
Par ailleurs, les enquêtes sur les vacances estivales démontrent toutes un engouement stable pour les destinations balnéaires offrant chaleur et soleil. Le spectacle des plages en été le confirme.
Quant aux agents immobiliers, ils ne voient pas encore faiblir la demande de locations et achats de résidences dans des régions garantissant un climat plutôt chaud et du soleil à l’année !
Nous aurions pu continuer à vendre des maisons de vacances et des hôtels confortablement installés dans les décors ensoleillés de destinations elles-mêmes ensoleillées toute l’année…
Sauf que le balancier sociétal entrainé par le balancier climatique est en train d’en décider autrement. Sauf que tout le monde ne le voit pas encore.
En effet, les paradoxes de notre société font que, bien qu’alertés des dangers du soleil pour la peau et de la menace avérée de cancer, 10% seulement de la population déclarent se protéger toute l’année.
Pire, selon une enquête d’Ipsos pour les laboratoires de la Roche-Posay, 7 français sur 10 estiment que « le bronzage est sexy ! ». Certes on protège plus les enfants qu’avant, mais cela reste le fait d’une minorité.
Par ailleurs, les enquêtes sur les vacances estivales démontrent toutes un engouement stable pour les destinations balnéaires offrant chaleur et soleil. Le spectacle des plages en été le confirme.
Quant aux agents immobiliers, ils ne voient pas encore faiblir la demande de locations et achats de résidences dans des régions garantissant un climat plutôt chaud et du soleil à l’année !
Les mentalités sont en retard sur le présent
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Une fois de plus, les mentalités sont donc en retard sur la réalité présente aussi alarmante soit-elle, et surtout sur la réalité à venir.
Une fois de plus, les comportements mettent du temps à évoluer. Et ils prennent d’autant plus le temps de changer que le soleil reste, malgré tout, un conditionneur de bonne humeur, de vitalité et de mieux vivre. Peu cherchent donc à en voir les excès et les dangers.
Cependant, des régions comme l’Andalousie où les températures excèdent désormais régulièrement les 40 degrés sont d’autant plus obligées de modifier leur promotion touristique et de la basculer sur l’hiver que la presse espagnole ne cache pas ses inquiétudes et multiplie les alertes.
Ainsi, dans le Diario de Sevilla, un article alertait sur des prévisions terrifiantes : 50 degrés sur une partie de la péninsule, cet été !
Quant à l’observatoire de Météo France, il prévoit aussi que des villes comme Annecy, Lyon, Avignon, Valence, Dijon, Chambéry seront parmi les plus atteintes par les canicules à l’avenir (voir le site : www.drias-climat.fr) Sans compter la médiatisation d’innombrables travaux existants sur le sujet.
Alors, vit-on la lente fin d’une histoire d’amour entre soleil, humanité et vacances ? Probablement.
A moins que les épisodes de fin n’accélèrent leur rythme sous le feu des catastrophes climatiques et signent plus tôt que prévu la mort d’un astre et d’un paradigme bien ancré dans nos sociétés.
L’histoire proche nous le dira. Mais, en attendant, le sujet ne peut être pris à la légère…
* Lire : Pascal Ory : L’invention du bronzage. Editions Flammarion.
Une fois de plus, les comportements mettent du temps à évoluer. Et ils prennent d’autant plus le temps de changer que le soleil reste, malgré tout, un conditionneur de bonne humeur, de vitalité et de mieux vivre. Peu cherchent donc à en voir les excès et les dangers.
Cependant, des régions comme l’Andalousie où les températures excèdent désormais régulièrement les 40 degrés sont d’autant plus obligées de modifier leur promotion touristique et de la basculer sur l’hiver que la presse espagnole ne cache pas ses inquiétudes et multiplie les alertes.
Ainsi, dans le Diario de Sevilla, un article alertait sur des prévisions terrifiantes : 50 degrés sur une partie de la péninsule, cet été !
Quant à l’observatoire de Météo France, il prévoit aussi que des villes comme Annecy, Lyon, Avignon, Valence, Dijon, Chambéry seront parmi les plus atteintes par les canicules à l’avenir (voir le site : www.drias-climat.fr) Sans compter la médiatisation d’innombrables travaux existants sur le sujet.
Alors, vit-on la lente fin d’une histoire d’amour entre soleil, humanité et vacances ? Probablement.
A moins que les épisodes de fin n’accélèrent leur rythme sous le feu des catastrophes climatiques et signent plus tôt que prévu la mort d’un astre et d’un paradigme bien ancré dans nos sociétés.
L’histoire proche nous le dira. Mais, en attendant, le sujet ne peut être pris à la légère…
* Lire : Pascal Ory : L’invention du bronzage. Editions Flammarion.
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.
Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.
Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com
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