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Futuroscopie - Œnotourisme : avis de tempête ou d’orages ? 🔑

Le décryptage de Josette Sicsic (Futuroscopie)


Fer de lance de notre offre alimentaire, de luxe, de plaisir, de santé… et d’ivresse, le vin français ne vit pas ses meilleures années. Attaqué par la brutalité du dérèglement climatique, de la concurrence internationale et de toutes autres sortes de maux, il peine à tirer son épingle du jeu. Tant sur le plan de la production que sur celui de l’œnotourisme plus ou moins menacé selon les régions. État des lieux et perspectives.


Rédigé par le Mercredi 25 Septembre 2024

Quel bilan pour l'oenotourisme ? - Depositphotos.com Auteur FreeProd
Quel bilan pour l'oenotourisme ? - Depositphotos.com Auteur FreeProd
L’édition 2024 de Destinations Vignobles se tiendra ainsi les 1er et 2 octobre prochains à Angers. 150 tours opérateurs nationaux et internationaux sont invités à y rencontrer 130 exposants français spécialistes de l’œnotourisme.

Une action qui s’inscrit dans la continuité du plan de bataille engagé par Atout France dès 2009 afin de mettre en valeur une activité entrée très tôt dans les mœurs touristiques mais encore mal structurée en France : l’œnotourisme.

Avec comme point d’orgue le label Vignobles et découvertes attribué pour une durée de 3 ans par Atout France, après recommandation du Conseil Supérieur de l’Œnotourisme, l’Agence nationale entend stimuler les destinations les plus performantes en matière d’offres touristiques tels que l’hébergement, la restauration, la visite de caves, les dégustations, musées, événements et animation diverses…

Au nombre de 72, ces destinations se situent dans 17 régions de France sélectionnées pour la qualité de leur vignoble…


Vins : le leadership français n’est plus ce qu’il était

Est-ce suffisant ? Alors que la bataille des chiffres touristiques se joue contre l’Espagne, celle du vin se joue contre l’Italie.

Selon des chiffres récents publiés en début de mois par la revue Vins de France, la production viticole française s'élèverait à 39,3 millions d'hectolitres, en recul de 18%, alors qu’en Italie, après la "désastreuse" récolte de l'an passé, les vendanges devraient conduire à une augmentation de 8% de la production viticole, qui devrait s'établir "entre 41 et 42 millions d'hectolitres".

Néanmoins, notre voisine ne peut crier victoire car « l’on est bien en-dessous de la moyenne des dernières années », à cause ici comme ailleurs en Europe, des intempéries, inondations, vagues de sécheresse, gel prématuré, maladies diverses…

Lire aussi : Terre de Vins et Atout France célèbrent l’œnotourisme

En Italie, c’est notamment dans le sud des Abruzzes, les Pouilles, la Basilicate, la Calabre, la Sardaigne et la Sicile que celles-ci ont été les plus fortes. Obligeant à des vendanges précoces, les intempéries ont aussi touché le vignoble français avec les baisses les plus marquées dans les vignobles du Jura (-71% sur un an), dans le grand vignoble des Charentes où la production devrait chuter de 35% ainsi que dans le Val de Loire (-30%) et la Bourgogne-Beaujolais qui perdrait un quart de sa production !

Tandis que la Champagne voit sa production reculer de 16% sur un an et que dans le prestigieux Bordelais où l'arrachage de 8.000 hectares de vignes est prévu cette année afin de lutter contre la « flavescence dorée » (une maladie), la réduction de la production est évaluée à 10% !

"Sur les trois dernières années, les ventes en volume de vin rouge ont baissé de 15% en grande distribution, de 3% à 5% pour le blanc et le rosé" (sources : AFP)

Quatre millions de clients internationaux

Avec de telles nouvelles, il est clair que l’œnotourisme qui constitue une thématique majeure de l’attractivité touristique nationale, est et sera de plus en plus menacé. Pourtant, 11 000 caves seraient ouvertes à la visite et les œnotouristes seraient aujourd’hui environ 10 millions dont 4 millions d’internationaux.

Un chiffre sans doute exagéré tant l’approximation reste la règle en matière de statistiques touristiques. Il serait en effet impératif de noter que visites et visiteurs ne désignent pas le même produit et la même personne. Entre ceux qui achètent une bouteille chez un producteur après dégustation et ceux qui séjournent dans un hôtel de luxe installé au cœur d’un vignoble du Bordelais, on compare deux mondes qui ne sont pas vraiment comparables !

Parmi les nationalités le plus représentées au sein des domaines viticoles français, il semble cependant que l’on trouve les voyageurs américains (USA et Canada), et bien entendu les Européens, grands amateurs de « bien boire » notamment les Anglais, Italiens, Belges, Néerlandais, Espagnols.

Lire aussi : La Cité du Vin franchit les 3 millions de visiteurs

Mais on compte aussi de plus en plus de latino-américains et de touristes asiatiques (Chinois, Japonais, Coréens) qui, quand ils reviendront, seront probablement toujours amateurs d’une visite de quelques heures dans un vignoble prestigieux.

D’autant que celles-ci sont de plus en plus sophistiquées. Stimulée par les opérateurs de tourisme et Atout France, l’offre touristique viti vinicole s’est considérablement améliorée incluant au-delà des hébergements, une restauration haut de gamme, des centres de bien-être, des visites guidées du vignoble, des stages, des dégustations, des cours de yoga, du théâtre et des concerts dont le succès ne se dément pas.

Autres éléments d’attractivité : l’architecture des chais. Autrefois totalement traditionnelle ou installée autour de châteaux et autres belles demeures, la conception des chais est désormais confiée à des architectes de renom internationaux comme Norman Foster, Santiago Calatrava, Christian de Portzampac…) qui ne lésinent pas sur des créations audacieuses valant à elles-seules le détour.

Stimulée par la concurrence des Espagnols et Italiens, la France a en effet réagi avec brio et peut aujourd’hui ne pas rougir de son patrimoine architectural contemporain.

Mieux, selon la plateforme Winalist.fr (la plateforme vedette de la filière) : 33% des visiteurs affirment avoir acheté du vin pour un total compris entre 50 et 100 euros et 33% ont dépensé entre 100 et 500 euros. De quoi donner une idée de recettes que peut générer ce tourisme.

Autres chiffres : le prix moyen des visites varie grandement d’une région à l’autre, de 17€ dans le Languedoc à 79€ en Cognac, reflétant la diversité des expériences proposées et la richesse des terroirs français. Quant à la Champagne, le prix moyen d’une expérience viticole par personne est de 46€, contre 30€ dans le Bordelais et 55€ en Bourgogne, où là encore, l’affluence d’un tourisme international haut de gamme demande aux professionnels d’avoir une offre qualitative avec des standards plus hauts.

Œnotourisme, la concurrence internationale s’organise

Concurrencée en Europe, la France l’est aussi par des destinations lointaines comme l’Afrique du Sud, la Californie, le Chili, l’Argentine… et désormais même l’Inde où un immense vignoble s’étale à quelque trois heures de route de Bombay.

Quarante-deuxième productrice mondiale avec 17 millions de litres dont 60% de blanc et 40% de rouge provenant de cépages nobles, l’Inde compte deux régions tirant leur épingle du jeu : le Karnataka et le Maharastra. où l’on trouve non seulement de quoi étancher sa soif mais aussi des hôtels, restaurants fréquentés par la jeunesse indienne de la classe supérieure qui y découvre un nouveau moyen de se distraire.

En matière de concurrence, le champagne a aussi fort à faire. Savez-vous que nos voisins anglais n’ont pas attendu l’alerte climatique pour passer à l’action et planter leurs propres cépages dans plusieurs régions : le Sussex, le Kent, le Surrey, l’Hampshire et même les Cornouailles qui se rapprocheraient de ceux de la Champagne, avec leurs plateaux calcaires et climat désormais tempéré ?

Quant à l’Argentine de plus en plus populaire, elle a adopté la même dynamique, l’exotisme de ses terres lointaines en plus. Très richement dotée notamment dans la région de Mendoza, elle offre restaurations, dégustations, séjours et animations de qualité. Selon le site : lesgrappes.com l’on y déguste le meilleur malbec du pays mais aussi du cabernet sauvignon de très bonne qualité.

Le Chili de nouveau sur les rangs pour attirer la clientèle française, n’est pas en reste. De la vallée de Casablanca à celle de l’Aconcagua, le pays déroule ses routes semées de bodegas et d’auberges entre Pacifique et cordillère des Andes. Le Pérou désormais positionné sur sa gastronomie revendique également la qualité de ses vins. Une agence de voyages, Peru exception emmène même les touristes vers les trésors des vignobles de la région d’Ica, où se concentrent les bodegas.

« Les raisons de la colère »

Mais, il est d’autres menaces et non des moindres. La journaliste Ixchel Delaporte par exemple s’est attachée à montrer comment « les milliards d'euros générés par les plus grands châteaux ne bénéficient pas aux régions qui les abritent où les villes sont en déshérence et les services publics en voie de disparition. »

C’est ainsi le cas de Pauillac et de son centre historique qui ont des allures de ville fantôme. Seule la boutique du Secours populaire ne désemplit pas, sollicitée par les saisonniers du château Lafite Rothschild qui viennent s’y restaurer. Un scandale dont les vins français pourraient se passer.

Dissuasive pour certaines clientèles la situation sociale des vendangeurs n’est pas la seule à ternir l’image du tourisme viticole.

Les pesticides dont l’utilisation massive est régulièrement évoquée par la presse sont plus nombreux que les cultures de vin bio. Ce qui n’encourage pas beaucoup à s’offrir des randonnées à travers le vignoble aussi beau soit-il.

Et puis, surtout, ne négligeons pas une composante majeure des menaces pesant sur le vin, à savoir celle concernant la consommation par les jeunes. Aujourd’hui et probablement encore demain, les jeunes clientèles ont découvert le goût et le tarif très abordable de milliers de marques traditionnelles et nouvelles de bière. Un tourisme brassicole se met en place dans de nombreux pays.

Nous y reviendrons…

Josette Sicsic - DR
Josette Sicsic - DR
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.

Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com

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