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Cyril Dion : en matière d’aérien, "il faut réduire et choisir" 🔑

Rencontre au So Good Festival, à Marseille


Le 15 septembre dernier, Marseille accueillait le So Good Festival. L’occasion de rencontrer Cyril Dion, figure de l’activisme écologique. Quel regard porte-t-il sur le tourisme durable ? Réponse en 5 points.


Rédigé par le Mercredi 20 Septembre 2023

Parmi ses dernières activités, le prolifique Cyril Dion signait cette année une série documentaire pour Arte : « un monde nouveau » autour de 3 notions : résister, s’adapter et régénérer - DR : Cyril Dion
Parmi ses dernières activités, le prolifique Cyril Dion signait cette année une série documentaire pour Arte : « un monde nouveau » autour de 3 notions : résister, s’adapter et régénérer - DR : Cyril Dion
Première édition réussie pour le So Good Festival, qui réunissait 6 500 personnes, vendredi 15 septembre 2023, à la Friche de la Belle de Mai à Marseille.
 
Les organisateurs du festival s’étaient donné les moyens, en invitant des personnalités engagées pour des lives et des one-(wo)man show, comme Izïa, Eddy de Pretto, Vitalic ou Fanny Ruwet.

On y retrouvait aussi la fine fleur des intellectuels, sociologues, journalistes ou artistes qui réfléchissent sur les thématiques du développement durable aujourd’hui : Rob Hopkins, Jean Viard, d'autres venus parler des défis du journalisme face à l'urgence climatique.

Et enfin, des "stars" du développement durable en France, comme Camille Etienne ou Cyril Dion, venus pour des performances artistiques.
 
Lire aussi : Le So Good Festival s’installe à Marseille

Nous avons profité de cette occasion pour rencontrer Cyril Dion, poète, réalisateur, écrivain, activiste, bref : un humain engagé.


Il est venu à Marseille pour présenter Résistances Poétiques, une prestation musicale et poétique (avec des morceaux entiers d'humour 100% bio dedans) autour de poèmes écrits par lui-même et mis en musique par son acolyte Sébastien Hoog.

Alors, quand on lui a demandé de nous parler tourisme durable, il nous a regardé avec des yeux ronds. Après un blanc d’étonnement, il a dit :" ça n’est pas du tout ma spécialité...".
 
Oui, on sait. On sait, mais sa voix porte au-delà de sa "spécialité", si spécialité il y a.

Ancien compagnon de route de Pierre Rhabbi, cofondateur du magazine Kaizen, homme médiatique et porte-voix d’un mouvement vers une sobriété heureuse, son discours raisonne bien au-delà et son discours a toujours une portée particulière.
 
Pas une conférence d’expert, mais un regard de penseur, qu’il nous livre, en cinq questions.

Trajets en avion : "réduire et choisir"

TourMaG - Bon nombre de professionnels du tourisme justifient le recours à l’avion par l’ouverture à d’autres cultures. Quel est votre regard sur la question ? 

Cyril Dion :
C’est vrai, ils ont raison. Il y a quelque chose de beau dans le voyage. Traverser des contrées, sentir les kilomètres et le temps, évidemment que c’est beau et enrichissant. 

Mais le problème, c'est que nous sommes face à une réalité à laquelle il faut bien répondre, que nous sommes bien obligés de traiter.

Concrètement, je ne sais pas s’il faut un nombre limité d’allers-retours en avion, comme préconise Jean-Marc Jancovici, mais en tout cas ce qui est clair, c'est qu’il faut réduire et choisir.

Il faut que nous soyons capables de revoir notre rapport au temps.

Slow tourisme : "on a besoin de transformations structurelles"

TourMaG - Le slow tourisme semble être la meilleure solution, mais comment faire quand notre travail, l’âge de la retraite, nos moyens tout simplement nous empêchent de prendre le temps ?

Cyril Dion :
Notre rapport au temps, on peut le repenser chacun de notre côté, mais l’individu lui-même est un peu impuissant.

On a besoin de transformations structurelles : les individus ne peuvent pas réinventer leur relation au travail, à l’argent, aux kilomètres et au temps tout seul.

C’est une question démocratique. C'est bien beau de dire "débrouillez-vous, faites des petits gestes", mais on est obligé d’avoir des politiques courageuses en matière de tourisme durable comme ailleurs.

On a trop souvent des solutions ponctuelles, mais ça n’est pas suffisant : il faut de nouvelles personnes pour faire de la politique autrement et transformer les modalités politiques durablement.


Lire aussi : Le slow tourisme peut-il s'ancrer dans nos sociétés ?

"2h en avion ou de 10h en train, ça n’a pas la même densité"

TourMaG - De manière plus générale, prendre le temps reste quand même la meilleure manière de rencontrer l’autre ?

Cyril Dion :
C’est un peu ce qu’on disait tout à l’heure sur le voyage et le temps de voyage. Un trajet de deux heures en avion ou de dix heures en train, ça n’a pas la même densité. On va plus vite, mais c’est aussi plus abrupt.

Être à pied ou à vélo permet de reprendre le temps et d'être en contact.

Dans la nature ou dans la ville, c'est pareil : on a la possibilité d’observer, de parler aux gens, de voir ce qu’il se passe, d’avoir une attention à ce qu’il se passe.

"Il faut être très attentif quand on investit un territoire"

TourMaG - De manière générale, on s’intéresse beaucoup au climat et moins à la biodiversité, pourtant les activités de tourisme sont basées sur la découverte d’un paysage, d’une nature préservée, et impactent fortement la biodiversité…

Cyril Dion :
On ne se préoccupe pas beaucoup de biodiversité de manière générale. C’est un angle mort, on parle du climat et tant mieux, mais on aborde peu le vivant. Alors que c’est essentiel !

Quand on va quelque part, on ne peut pas se contenter de, simplement, y aller.

Il faut être très attentif quand on investit un territoire, repenser nos infrastructures et comprendre qui vit ici, quels sont les circuits que toutes les espèces vivantes empruntent et comment vivre toutes et tous en bonne intelligence.

"Le mot biodiversité est un terme un peu clinique"

TourMaG - Vous êtes venu parler de poésie. Les mots sont importants, qu’en est-il des mots qu’on utilise pour parler du vivant ?

Cyril Dion :
Les mots véhiculent des idées et des représentations.

Le mot biodiversité est un terme un peu clinique, c’est une liste du monde vivant sur laquelle l’humain a le pouvoir, il décide de ce qu’il va garder ou pas.

La nature, c’est le non-humain, donc ça crée une démarcation.

L’environnement, c’est un peu pareil, c'est ce qu’il y a autour de nous, c’est un décor, il n’y a pas de lien.

Parler du vivant, c’est une manière de nous inclure. Nous sommes une espèce parmi d’autres et nous devons prendre la mesure de ça : nous sommes le vivant et nous sommes en lien.

"... Il reste encore 4h de vol..."


Juliette Pic Publié par Juliette Pic Responsable rubrique Voyages Responsables - TourMaG.com
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