Est-ce que notre société et nos mœurs ont vraiment changé depuis 52 av. J.-C. ? Le Président Macron singeait les « Gaulois réfractaires » lors d’un déplacement en 2018 au Danemark. Était-ce un héritage antique ou l’expression d’une préscience ? - Photo : DepositPhotos.com
Dans les rues des villes françaises s’ébrouent des défilés et des cortèges au rythme de slogans et de refrains entendus depuis de longues années. Les mots scandés exigent le retrait de la réforme des retraites.
Pour les plus anciens, cette fin d’hiver n’est pas sans rappeler celle de l’année 1995.
Les routiers faisaient alors barrages sur les routes, les transports publics n’avaient pas encore de service minimum. Et la paralysie du pays dura de longues semaines hivernales.
La neige tombait à Paris, des solutions de dernière minute furent proposées pour dépanner un pays qui refusa la « plan Juppé » de réforme des retraites. Je me souviens qu’à Paris, des navettes fluviales transportaient des passagers sur la Seine.
Une certaine forme de tourisme fluvial, imposée, inattendue et sympathique. Près de trente ans plus tard, les refrains pourraient être repris à l’identique. Ou presque.
Pour les plus anciens, cette fin d’hiver n’est pas sans rappeler celle de l’année 1995.
Les routiers faisaient alors barrages sur les routes, les transports publics n’avaient pas encore de service minimum. Et la paralysie du pays dura de longues semaines hivernales.
La neige tombait à Paris, des solutions de dernière minute furent proposées pour dépanner un pays qui refusa la « plan Juppé » de réforme des retraites. Je me souviens qu’à Paris, des navettes fluviales transportaient des passagers sur la Seine.
Une certaine forme de tourisme fluvial, imposée, inattendue et sympathique. Près de trente ans plus tard, les refrains pourraient être repris à l’identique. Ou presque.
Notre société et nos mœurs ont-elles vraiment changé depuis 52 av. J.-C. ?
En changeant simplement le nom du destinataire des quolibets, de « Juppé » à « Dussopt », « … si tu savais, ta réforme, où on se la met » ! Cette réaction épidermique face à tout projet de réforme, ou présenté comme tel, n’est pas nouvelle.
On pourrait se souvenir de la description que fit Strabon dans sa « Géographie » au début du Ier siècle av. J.-C. de nos ancêtres, ces fameux Gaulois.
« La race qu’on appelle gauloise a la manie de la guerre, elle est irascible et prompte à en venir aux mains, mais au fond simple et pas méchante. »
Comme on pourrait rappeler ce que Jules César écrivait, dans la « Guerre des Gaules », au sujet de la société gauloise.
« Dans toute la Gaule, il y a deux classes d’hommes importantes : l’une est celle des druides, l’autre celle des chevaliers. Les gens du peuple sont presque des esclaves. On ne leur demande jamais leur avis. Quand ils sont écrasés par leurs dettes ou par les impôts, ils se mettent au service des nobles. »
Est-ce que notre société et nos mœurs ont vraiment changé depuis 52 av. J.-C. ? Le Président Macron singeait les « Gaulois réfractaires » lors d’un déplacement en 2018 au Danemark. Était-ce un héritage antique ou l’expression d’une préscience ?
De récents échanges avec des amis de différents pays d’Europe ou d’Amérique du Nord montrent que notre image demeure celle, à quelques traits près, esquissés par les auteurs romains. Le secteur du tourisme en est l’un des vestiges et l’un des témoins les plus visibles.
On pourrait se souvenir de la description que fit Strabon dans sa « Géographie » au début du Ier siècle av. J.-C. de nos ancêtres, ces fameux Gaulois.
« La race qu’on appelle gauloise a la manie de la guerre, elle est irascible et prompte à en venir aux mains, mais au fond simple et pas méchante. »
Comme on pourrait rappeler ce que Jules César écrivait, dans la « Guerre des Gaules », au sujet de la société gauloise.
« Dans toute la Gaule, il y a deux classes d’hommes importantes : l’une est celle des druides, l’autre celle des chevaliers. Les gens du peuple sont presque des esclaves. On ne leur demande jamais leur avis. Quand ils sont écrasés par leurs dettes ou par les impôts, ils se mettent au service des nobles. »
Est-ce que notre société et nos mœurs ont vraiment changé depuis 52 av. J.-C. ? Le Président Macron singeait les « Gaulois réfractaires » lors d’un déplacement en 2018 au Danemark. Était-ce un héritage antique ou l’expression d’une préscience ?
De récents échanges avec des amis de différents pays d’Europe ou d’Amérique du Nord montrent que notre image demeure celle, à quelques traits près, esquissés par les auteurs romains. Le secteur du tourisme en est l’un des vestiges et l’un des témoins les plus visibles.
La réforme, souvent annoncée, se transforme en réformette...
La France constitue pour eux un savant mélange de traditions et de conservatismes. Ce qui contribue à l’attractivité du pays, sa culture, son sentiment d’unicité héritée des Lumières, peut apparaître comme un anachronisme moderne. Qui vit encore dans des cadres définis depuis des décennies, voire des siècles ?
On ne parlera pas ici du Code civil, dit « code Napoléon », dont les premières lignes ont été publiées en 1804. Mais deux exemples qui font la saveur du tourisme français peuvent étayer mon propos. La France est le pays de la gastronomie, le pays du vin et du fromage. Elle l’incarne, chaque Français en est tellement convaincu.
Dans ces deux domaines, nos règles ou codifications font notre fierté. Napoléon III décida d’organiser en 1855 la première Exposition universelle des produits de l’agriculture, de l’industrie et des beaux-arts. Chaque département se dota d’un comité pour recenser les produits à présenter à Paris.
Le fameux classement de 1855 codifie les cépages qui font encore jurisprudence dans le Bordelais. L’attachement historique à nos fromages est du même acabit, illustrant les identités locales et l’ancrage territorial de notre culture.
Souvenons-nous du célèbre mot attribué au Général de Gaulle, « comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 246 variétés de fromage ? ».
Ce qui semble être notre force et constituer notre éternel pouvoir d’attraction, pourrait s’avérer l’un des socles de notre inadaptation aux évolutions du monde. Comment interpréter ce maintien de culture et de formalisme séculaire ? Comment pouvons-nous ne pas comprendre incarner un conservatisme à la fois sympathique et incongru ?
Les métiers de la restauration relèvent encore de la fameuse codification Escoffier. La brigade de cuisine est-elle encore adaptée ? Notre savoir-faire est-il dépassé et refuse-t-il, par essence, toute forme d’évolution ?
En serait-il pour la cuisine comme il en est, à intervalles réguliers, pour les retraites ? La réforme, souvent annoncée, se transforme en réformette.
Et tel Cyrano, nos coups d’épée et coups de menton, grandiloquents, finissent par accoucher au mieux d’une souris. Ou en hommage à l’état de notre capitale, future ville olympique, d’un « surmulot », qui n’est aucunement un hommage à « Ratatouille », gambadant à travers les rues de Paris sous les yeux d’habitants habitués, ou pire, désabusés.
On ne parlera pas ici du Code civil, dit « code Napoléon », dont les premières lignes ont été publiées en 1804. Mais deux exemples qui font la saveur du tourisme français peuvent étayer mon propos. La France est le pays de la gastronomie, le pays du vin et du fromage. Elle l’incarne, chaque Français en est tellement convaincu.
Dans ces deux domaines, nos règles ou codifications font notre fierté. Napoléon III décida d’organiser en 1855 la première Exposition universelle des produits de l’agriculture, de l’industrie et des beaux-arts. Chaque département se dota d’un comité pour recenser les produits à présenter à Paris.
Le fameux classement de 1855 codifie les cépages qui font encore jurisprudence dans le Bordelais. L’attachement historique à nos fromages est du même acabit, illustrant les identités locales et l’ancrage territorial de notre culture.
Souvenons-nous du célèbre mot attribué au Général de Gaulle, « comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 246 variétés de fromage ? ».
Ce qui semble être notre force et constituer notre éternel pouvoir d’attraction, pourrait s’avérer l’un des socles de notre inadaptation aux évolutions du monde. Comment interpréter ce maintien de culture et de formalisme séculaire ? Comment pouvons-nous ne pas comprendre incarner un conservatisme à la fois sympathique et incongru ?
Les métiers de la restauration relèvent encore de la fameuse codification Escoffier. La brigade de cuisine est-elle encore adaptée ? Notre savoir-faire est-il dépassé et refuse-t-il, par essence, toute forme d’évolution ?
En serait-il pour la cuisine comme il en est, à intervalles réguliers, pour les retraites ? La réforme, souvent annoncée, se transforme en réformette.
Et tel Cyrano, nos coups d’épée et coups de menton, grandiloquents, finissent par accoucher au mieux d’une souris. Ou en hommage à l’état de notre capitale, future ville olympique, d’un « surmulot », qui n’est aucunement un hommage à « Ratatouille », gambadant à travers les rues de Paris sous les yeux d’habitants habitués, ou pire, désabusés.
Se transformer, n’est-ce pas accepter de se remettre en question ?
Devons-nous pour autant nous vivre notre destin sans réagir sauf par convulsions collectives de masse et sans réelle proposition d’avenir et de prospective si ce n’est retirer un texte de loi pour au final ignorer les évolutions du monde et revenir à une situation originelle souvent insatisfaisante ?
Se transformer, n’est-ce pas accepter de se remettre en question ? Se transformer, est-ce seulement parler d’innovation comme on scande des reliques ? Ou bien est-ce embrasser une méthodologie collective et globale, fondée sur notre raison d’être, notre stratégie et au final notre organisation ?
Pourrons-nous encore longtemps refuser cette évidence qu’une somme d’égos et d’individualismes ne forme pas un collectif puissant, volontaire et efficace ? Est-il par exemple envisageable d’appréhender une nouvelle culture du travail en lieu et place d’une réforme sclérosée et sclérosante des retraites ?
Le monde du tourisme pourrait y contribuer. Les questions de nouveaux modèles, de flexibilité, de modes de rémunération, de participation des salariés aux résultats ne pourront pas être longtemps encore mis sous le tapis.
Si la France refuse en partie la standardisation qu’incarne notamment l’Amérique du Nord, cela ne lui garantit aucune particularité et bien entendu aucun leadership dans le monde.
Nous devons espérer un renouveau collectif, aspirer à trouver un nouvel élan qui pourrait, comme ce fut le cas à la fin du 18ème siècle, lui conférer un statut exemplaire. Ce n’est pas la technologie qui nous fera prendre de l’avance. Mais c’est bien par une culture différente, à la fois comportementale et managériale, que notre culture peut réécrire son propre génie.
En inventant de nouveaux codes, en proposant de nouvelles habitudes et surtout en chassant les non-dits qui tuent à petit feu le « génie français », directement hérité de nos ancêtres à la fois lointains et si proches, les peuples de Gaule, Arvenes, Deciates ou Eduens.
Se transformer, n’est-ce pas accepter de se remettre en question ? Se transformer, est-ce seulement parler d’innovation comme on scande des reliques ? Ou bien est-ce embrasser une méthodologie collective et globale, fondée sur notre raison d’être, notre stratégie et au final notre organisation ?
Pourrons-nous encore longtemps refuser cette évidence qu’une somme d’égos et d’individualismes ne forme pas un collectif puissant, volontaire et efficace ? Est-il par exemple envisageable d’appréhender une nouvelle culture du travail en lieu et place d’une réforme sclérosée et sclérosante des retraites ?
Le monde du tourisme pourrait y contribuer. Les questions de nouveaux modèles, de flexibilité, de modes de rémunération, de participation des salariés aux résultats ne pourront pas être longtemps encore mis sous le tapis.
Si la France refuse en partie la standardisation qu’incarne notamment l’Amérique du Nord, cela ne lui garantit aucune particularité et bien entendu aucun leadership dans le monde.
Nous devons espérer un renouveau collectif, aspirer à trouver un nouvel élan qui pourrait, comme ce fut le cas à la fin du 18ème siècle, lui conférer un statut exemplaire. Ce n’est pas la technologie qui nous fera prendre de l’avance. Mais c’est bien par une culture différente, à la fois comportementale et managériale, que notre culture peut réécrire son propre génie.
En inventant de nouveaux codes, en proposant de nouvelles habitudes et surtout en chassant les non-dits qui tuent à petit feu le « génie français », directement hérité de nos ancêtres à la fois lointains et si proches, les peuples de Gaule, Arvenes, Deciates ou Eduens.
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Brice Duthion - DR
Brice Duthion est manager du projet Campus sud des métiers tourisme de la CCI Nice Côte d'Azur. Il est également consultant et expert indépendant en tourisme, culture et développement territorial. Il intervient auprès de nombreux acteurs publics et privés, est expert auprès de l'Open Tourisme Lab, du CNFPT et de l'INSET de Dunkerque et fait partie de l'équipe des blogueurs du site etourisme.info.
Il a été auparavant maître de conférences au Conservatoire national des arts et métiers (Le Cnam), enseignant et tuteur à l'Ecole Urbaine de Sciences Po Paris, vice-président de la Conférence des formations d’excellence en tourisme (CFET) et membre fondateur de l'Institut Français du Tourisme (IFT).
Brice Duthion est l'auteur de nombreux ouvrages et articles spécialisés en tourisme. Il a assuré la direction de la collection "tourisme" aux éditions de Boeck supérieur. Il est, enfin, l'auteur de plusieurs MOOC mis en ligne sur France Université Numérique (FUN).
brice.duthion@cote-azur.cci.fr
Il a été auparavant maître de conférences au Conservatoire national des arts et métiers (Le Cnam), enseignant et tuteur à l'Ecole Urbaine de Sciences Po Paris, vice-président de la Conférence des formations d’excellence en tourisme (CFET) et membre fondateur de l'Institut Français du Tourisme (IFT).
Brice Duthion est l'auteur de nombreux ouvrages et articles spécialisés en tourisme. Il a assuré la direction de la collection "tourisme" aux éditions de Boeck supérieur. Il est, enfin, l'auteur de plusieurs MOOC mis en ligne sur France Université Numérique (FUN).
brice.duthion@cote-azur.cci.fr