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Turquie : le monde fascinant des troglodytes de Cappadoce

La Cappadoce est une région historique de Turquie


Située sur le plateau anatolien, dans l’actuelle Turquie, la Cappadoce n’en finit pas d’étonner le visiteur avec ses paysages uniques au monde, ses églises peintes, son histoire chahutée, son artisanat varié et sa gastronomie haute en couleurs et saveurs. Voyage dans le monde fascinant des troglodytes de Cappadoce.


Rédigé par le Jeudi 10 Octobre 2024

Etrange ville en vérité que la ville souterraine de Kaymakli, en Turquie !

Creusée dans la roche tendre sur plusieurs étages, Kaymakli possède tout ce dont une ville pouvait avoir besoin au quotidien : étables, greniers à grains, caves pour fabriquer le vin, entrepôts de jarres pour le conserver, cellier, cuisines, réfectoire, pièces de vie mais aussi église et cimetière...

Des escaliers et d’étroites -et interminables- galeries dans lesquelles il faut marcher courbés -mieux vaut ne pas être claustrophe !- permettent de passer d’un étage à l’autre. Des trous ménagés dans les plafonds assurent la circulation de l’air frais emmené dans les profondeurs de la terre par une longue cheminée d’aération.

A Kaymakli, tout avait été prévu pour que plusieurs milliers d’habitants puissent, jadis, vivre à l’abri des dangers extérieurs. Des puits –impossibles à empoisonner- assuraient de l’eau potable. Quant à la lourde porte coulissante en pierre (pas moins de 500 kilos !) de l’entrée, elle ne pouvait s’ouvrir que de l’intérieur !

A lire aussi : Turquie : j’ai testé la Cappadoce en montgolfière

Kaymakli : d'insolites cônes rocheux

Troglodytes de Cappadoce : Avec le temps, l'eau et le vent ont sculpté dans la roche tendre des milliers d’insolites cônes rocheux (©PB)
Troglodytes de Cappadoce : Avec le temps, l'eau et le vent ont sculpté dans la roche tendre des milliers d’insolites cônes rocheux (©PB)
Kaymakli se trouve en Cappadoce, une région au centre de l'Anatolie. C’est entre le Ve et le Xe siècles de notre ère que Kaymakli et d’autres villes souterraines –personne ne sait avec certitude combien il en existe- ont été réalisées. Utilisées jusqu’au début du XXe siècle, elles étaient souvent si secrètes qu’à l’image de Kaymakli, elles ont été redécouvertes seulement dans les années 1960.

Pour surprenantes qu’elles soient, ces villes souterraines s’inscrivent dans une pratique qui remonte à la Préhistoire : dès cette époque, les premiers habitants de la Cappadoce ont commencé à creuser la roche. La géologie, il est vrai, s’y prêtait.

En effet, il y a plus de 10 millions d’années, des volcans – les actuels monts Erciyes, Hasandaği et Göllüdaği -, sont entrés en éruption, déversant une couche très épaisse de tuf tendre sur les plateaux et les vallées. Par la suite, d’autres éruptions ont jeté par-dessus une couche plus résistante.

Au fil des millénaires, l’eau s’infiltrant dans le sol et le vent érodant les reliefs ont, patiemment, creusé des sillons et sculpté des milliers d’insolites cônes rocheux. Les plus impressionnants atteignent jusqu’à quarante mètres de hauteur.

L’érosion en fait disparaître certains et en crée de nouveaux. Ici, ces cônes ont l’allure de « cheminées coiffées » ; ailleurs, ils ont perdu leur chapeau ; plus loin, d’autres risquent de s’écrouler faute d’entretien ou, alors, sont presque complètement érodés.

Troglodytes de Cappadoce : des paysages uniques au monde

La Cappadoice se prête à de belles découvertes à pied, mais mieux vaut être bien chaussés ! (©PB)
La Cappadoice se prête à de belles découvertes à pied, mais mieux vaut être bien chaussés ! (©PB)
Ces paysages unique au monde, tout en camaïeux de beige, sont devenus l’une des attractions principales de cette région historique d'Asie Mineure qui, pour être semi-aride, n’en est pas moins traversée par le plus long fleuve de Turquie - le Kizilirmak, souvent appelé le « fleuve rouge ». S'y trouvent donc aussi de vastes étendues fertiles où sont cultivées céréales, légumes et arbres fruitiers, parmi lesquels grand nombre d’abricotiers qui embaument au début du printemps.

C’est évidemment depuis le ciel -et au lever du jour- que se dévoilent le mieux les spectaculaires reliefs de la Cappadoce. Pas étonnant que, désormais, de nombreuses compagnies proposent des vols en montgolfières.

Si, ensuite, on préfère s’éloigner de la foule, on s’écartera de Göreme et de Uçhisar pour marcher un peu : de nombreux sentiers balisés n’attendent que d’ être découverts. Bien se chausser : le sol peut être glissant !

Si on n’a pas le pied très alerte, la découverte se fera tout simplement en voiture. De nombreuses agences et TO proposent des tours organisés, notamment dans la très prisée vallée de Göreme -elle s’étend de Uçhisar, à l’ouest, à Ürgüp, à l’est- qui abrite un « musée de plein air » inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco.

Des cheminées coiffées aux formes phalliques

Des cheminées coiffées aux formes suggestives (©PB)
Des cheminées coiffées aux formes suggestives (©PB)
Dans les environs de Göreme, on découvrira ainsi, pour commencer, la « vallée de l’Amour », célèbre pour ses nombreuses cheminées en tuf à la forme de champignons, explicitement phalliques, car coiffées de chapeaux en roche plus dure.

Puis, on verra la « vallée des pigeons » où de nombreux boulins sont creusés sur les hauteurs des falaises de tuf tendre et des cheminées coiffées ! Pendant des siècles, les fientes de ces oiseaux ont servi d’engrais pour fertiliser les champs...

Enfin, à l’entrée de Zelve, s'étend la vallée de Pasabag, encore appelée « vallée des moines ». Parmi les vignes et les arbres fruitiers s’élèvent des cheminées de fée creusées au Xe siècle par des moines pour y cacher leurs ermitages.

Partout, des habitats troglodytiques

Même le poste de gendarmerie de Paşa Bağlari est troglodytique !( ©PB)
Même le poste de gendarmerie de Paşa Bağlari est troglodytique !( ©PB)
Si, partout, des habitats ont été creusés dans la roche -même le poste de gendarmerie de Paşa Bağlari est troglodytique ! -, les formes un peu baroques des cônes -ils sont percés d'ouvertures, souvent habillées de portes et de fenêtres-- varient beaucoup.

Ici, les cheminées sont très effilées et toujours coiffées ; ailleurs, elles ont perdu leur chapeau ; plus loin, d’autres risquent de s’écrouler faute d’entretien ou, alors, sont déjà presque complètement érodées.

D’autres encore restent si massifs qu’il est d’usage, comme à Uçhisar ou à Ortahisar, de les qualifier de « châteaux » ! En réalité, ces « châteaux » sont de véritables gruyères. Jadis, ils servaient de refuges et de lieux de défense contre les invasions. Aujourd’hui, ils peuplés de maisons, de restaurants et même d’hôtels troglodytiques !

D'inombrables églises et chapelles chrétiennes

Les décors rouges assez primitifs de l'église dédiée à Sainte Barbara (©PB)
Les décors rouges assez primitifs de l'église dédiée à Sainte Barbara (©PB)
Les étonnants reliefs de la Cappadoce dissimulent également près de 3000 églises et chapelles chrétiennes creusées dans le tuf entre le VIe et le XIVe siècle. Quelques-unes des plus remarquables se visitent, notamment dans la "vallée de Pasabag" –la fameuse « vallée des moines »- sur laquelle l’Unesco veille depuis 1985.

Souvent cachées dans des canyons, haut perchées à flanc de falaises, elles ne sont parfois accessibles seulement par des échelles en fer ou des escaliers. La plupart du temps, leurs façades de pierre, quelquefois ornées de croix sculptées, ne dévoilent guère leur splendeur intérieure : colonnes, arches, voûte de plein cintre, coupoles peintes.

Les fresques qui les ornent -aux couleurs souvent magnifiquement préservées grâce à l'absence d'éclairage- sont un témoignage irremplaçable du plus beau style byzantin. Elles représentent des scènes de la vie de Jésus, des portraits d’apôtres, de saints, de martyrs.

Les décors rouges de l’église dédiée à sainte Barbara -une martyre grecque décapitée par son père qui tolérait pas sa conversion au christianisme - sont assez primitifs.

A contrario, les fresques d'autres églises, par exemple celles de l'église dite "de la sandale" (Çarıklı Kilise) ou celles de "l'Église sombre" (Karanlik Kilise) sont bien plus sophistiquées.

L’église dite du Serpent contient, elle, une fresque représente Saint Georges se battant contre un dragon. L’église de la Pomme, quant à elle, tient son nom du globe rouge que l’archange saint Michel tient dans sa main, que l’on peut confondre avec une pomme.

Toutes ces représentations chrétiennes surprennent dans une Turquie aujourd’hui quasi exclusivement musulmane. Pour comprendre, il faut, une fois encore, traverser l’épaisseur des siècles.

Une succession d'empires

Typiques de l'art byzantin du XIIe siècle, les fresques de l'église de Çarıklı Kilise qui représentent notamment des scènes de la vie de Jésus, sont parmi les mieux conservées © PB.
Typiques de l'art byzantin du XIIe siècle, les fresques de l'église de Çarıklı Kilise qui représentent notamment des scènes de la vie de Jésus, sont parmi les mieux conservées © PB.
Très convoitée dès l’Antiquité, cette région, proche des grandes routes marchandes reliant l’Orient-et l’Occident, a vu s'installer des colonies de commerçants assyriens dès 2000 ans avant Jésus-Christ.

Deux cent ans plus tard environ, la Cappadoce a été englobée dans l’empire des Hittites, avant de l’être, plus tard, dans celui des Perses bientôt vaincus par Alexandre le Grand qui s’est quand même heurté à une farouche résistance en Cappadoce !

Plus tard encore, l’empire romain s’y imposera, à son tour.

Dès les premiers siècles de notre ère, le christianisme s’est enraciné en Cappadoce. Selon la tradition, les apôtres Paul et Pierre y seraient venus prêcher l’Evangile.

La résistance des autorités romaines locales –ils y voyaient une menace pour leur pouvoir- et trois siècles de persécutions ne changèrent pas la donne, bien au contraire : la Cappadoce servit de refuge aux premiers chrétiens.

Lorsqu’au IVe siècle après J-C., l’empire romain embrassa officiellement la foi chrétienne, la Cappadoce devint même un haut lieu du christianisme et du monachisme. Basile le Grand, un des pères de l’Eglise, fut ainsi l’évêque de Césarée, l’actuelle Kayseri, principale ville de la région.

Restée dans le giron de l’empire d’Orient - auquel succéda bientôt l’empire byzantin- après la partition de l’empire romain, la Cappadoce fut de nouveau, très vite, victime de troubles. En cause, d'abord des dissensions théologiques entre communautés chrétiennes; ensuite, la « guerre des icônes » qui fit rage dans l'Empire byzantin.

Des chrétiens, des origines aux débuts du XXe siècle

Dans l’église dite du Serpent, une fresque évoque Saint Georges se battant contre un dragon (©PB)
Dans l’église dite du Serpent, une fresque évoque Saint Georges se battant contre un dragon (©PB)
A partir du VIIe siècle, pour résister aux invasions arabes, les communautés chrétiennes de Cappadoce durent se réfugier dans des villages troglodytiques ou des cités souterraines comme Kaymakli.

Plus tard, aux Turcs Seljoukides arrivés en 1071 succédèrent les Turcs ottomans (tous deux, des peuples venus d’Asie centrale) : lorsqu'ils achevèrent la conquête de l'empire byzantin avec la prise de Constantinople en 1453, la Cappadoce devint terre d’Islam.

Malgré tout, une forte communauté chrétienne y subsista jusqu’au début du XXe siècle. Au lendemain d’une Première guerre mondiale qui avait vu les Ottomans se ranger au côté du Reich allemand et l’hostilité entre les Grecs et les Turcs redoubler, une série de traités achevèrent d’organiser le démantèlement de l’empire ottoman, fixant les frontières actuelles de la Turquie.

Parmi ceux-ci, le traité de Lausanne imposa des échanges forcés de populations, basés exclusivement sur la religion : 400 000 musulmans durent quitter la Grèce pour la Turquie tandis qu’environ 1,5 million de Grecs durent faire le chemin inverse.

Depuis, il reste seulement quelques milliers de chrétiens en Turquie et aucun en Cappadoce : dans cette région d'Anatolie, seules les églises chrétiennes témoignent encore d’une civilisation et d’une langue (le cappadocien était un dialecte du grec) totalement disparues, sauf peut-être dans la petite bourgade de Sinasos : elle est habitée depuis 1924 par des Turcs qui, forcés de quitter leur Macédoine natale. Restés fidèles à leur langue et à leur culture d'origine, ils continuent de parler le grec...

Tout autant que les « cheminées de fée », ce passé complexe et douloureux justifie le voyage dans cette région d’Asie mineure où, désormais, l’appel à la prière s’élève, cinq fois par jour, des innombrables minarets pointus, typiques de l’islam turc.

Les précieuses poteries de Avanos

Fabrication d'une poterie traditionnelle à Avanos (©)
Fabrication d'une poterie traditionnelle à Avanos (©)
Si le voyageur s’y perd souvent un peu dans les tourbillons de toute cette histoire, il tombe inévitablement sous le charme des villages pittoresques d’une Cappadoce parfois appelée « le pays des beaux chevaux » mais réputée surtout pour sa viticulture, ses céramiques et ses tissages.

Ce n’est pas par hasard qu’Avanos est jumelée avec Nuits-Saint-Georges, en Bourgogne ! Cette ville de 13 000 habitants baignée par le fleuve Kizilirmak est, en effet, la capitale de la viticulture régionale. Ses vignobles sont gaillardement établis dans le tuf depuis des milliers d'années !

Avanos est aussi, tout comme Ürgüp, réputée depuis près de 3000 ans pour ses poteries à base d’argile rouge. Ses artisans utilisent des méthodes ancestrales transmises de père en fils, de tribu en tribu, pour réaliser des objets dont les formes s'inspirent parfois de traditions très anciennes, comme la « cruche hittite » dont le milieu était laissé vide pour pouvoir rendre hommage au soleil -c’était le premier des dieux des Hittites.

Décorées à la main de motifs précieux, leurs créations –bols à mézés, assiettes, plats, mais aussi cruches hittites, etc.- valent parfois de petites fortunes. Les amateurs peuvent aussi s’offrir, sur place, une démonstration ou, mieux encore, un cours de poterie dans un atelier.


Une gastronomie riche en couleurs et en saveurs

Une cuisine et des vins réputés (©goturkiye)
Une cuisine et des vins réputés (©goturkiye)
Les passionnés de tapis et de tissages seront également comblés : en Cappadoce, des ateliers travaillent le coton et la soie depuis des millénaires. Dans la plupart des villages et villes touristiques, il est d'ailleurs possible d’acheter des kilims et d'autres tapis, pour quelques centaines ou - selon la taille et la qualité- quelques milliers d’euros.

Juste à côté, des échoppes vendent des souvenirs plus classiques, par exemple des vases, bols, jeux d’échecs et bijoux façonnés dans l’onyx –une pierre volcanique de la famille de l’agate- ou des amulettes rondes en verre bleu et blanc censées protéger contre le « mauvais œil ».

Si tous ces objets prolongeront, une fois rentrés chez soi, le souvenir de la Cappadoce, la gastronomie locale renforce l’agrément du voyage.

Comment décrire en peu de mots cette cuisine riche en couleurs et en saveurs mise en valeur de nombreux restaurants ? Elle est faite de ragoût aux abricots, de mantis (raviolis), de pastirma (charcuterie à base de jarrets de bœuf séchés), de dolmas (feuilles de vigne farcies avec un mélange de riz et d’épices), de coings farcis, de berek (feuilletés au fromage), de kebabs, de tandooris à base d’agneau, oignons, tomates, poivrons cuits au four. Et, bien sûr, de baklavas (pâtisserie orientales) et de halva. Le tout précédé d’un verre de raki -un apéritif anisé- et accompagné, pourquoi pas ?, d’un verre de vin local, blanc ou rouge.

Pour un séjour encore plus "couleur locale", on se logera dans un des nombreux hôtels troglodytiques. Par exemple le Harem Cappadocia au pied du château d’Uçhisar ! Les chambres et suites sont décorées dans un style un tantinet oriental. Et, depuis le rooftop, la vue sur la vallée de Göreme est bluffante !

Bon à savoir : Turkish Airlines dessert Nevşehir et Kayseri, en Cappadoce, à partir d'Istanbul. Et, bien sûr, Istanbul à partir de Paris.

PAULA BOYER Publié par Paula Boyer Responsable rubrique LuxuryTravelMaG - TourMaG.com
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Tags : cappadoce
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