TourMaG.com, le média spécialiste du tourisme francophone

logo Futuroscopie  




Futuroscopie : le bonheur n'est pas encore dans le prĂ© 🔑

Décryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


TrĂšs rĂ©guliĂšrement citĂ© parmi les effets immĂ©diats de la pandĂ©mie, l’exode rural a toujours droit aux faveurs de la presse. Surtout au moment oĂč le Salon de l’agriculture bat son plein. Or, selon une Ă©tude sĂ©rieuse intitulĂ©e « Exode urbain, mythe et rĂ©alitĂ©s » rĂ©alisĂ©e par la plateforme d’observations des projets et stratĂ©gies urbaines en partenariat avec le RĂ©seau rural français, la ruĂ©e des urbains vers les campagnes n’a pas du tout eu les dimensions qu’on lui a prĂȘtĂ©es. Le bonheur est donc certes dans le prĂ©. Mais, pas encore dans les proportions estimĂ©es un peu trop hĂątivement.


Rédigé par le Mardi 28 Février 2023

Les reportages se sont multipliés mettant en avant un monde post covid dans lequel les néo ruraux vivaient (et vivent) un bonheur simple - Depositphotos.com Auteur RasulovS
Les reportages se sont multipliés mettant en avant un monde post covid dans lequel les néo ruraux vivaient (et vivent) un bonheur simple - Depositphotos.com Auteur RasulovS
Effet d’optique ? Une fois de plus, la rumeur n’est qu’une rumeur non vĂ©rifiĂ©e. De celle que les mĂ©dias colportent en humant l’air du temps et fournissant quelques exemples loin d’avoir une valeur statistique. Donc, selon les mĂ©dias, les rĂ©seaux sociaux et toutes sortes de pseudo observateurs, la pandĂ©mie a créé un vĂ©ritable exode rural.

Notamment parmi les jeunes, dĂ©sireux de rompre avec le stress des grandes villes et de s’inventer une nouvelle vie, au vert, dans une maison vaste et accueillante, retapĂ©e patiemment, proche d’un carrĂ© de permaculture produisant une nourriture saine et Ă©conomique en eau, Ă©nergie, pesticides ! L’image d’Épinal Ă©tait et est parfaite.

Les reportages se sont multipliĂ©s mettant en avant un monde post covid dans lequel les nĂ©o ruraux vivaient (et vivent) un bonheur simple. Soit sans changer d’activitĂ© professionnelle grĂące au tĂ©lĂ©travail. Soit en crĂ©ant toutes sortes de nouvelles activitĂ©s destinĂ©es en grande partie Ă  l’accueil de vacanciers.

Tables d’hĂŽtes, gĂźtes, stages de cuisine, permaculture, sĂ©jours de dĂ©veloppement personnel, relaxation, et Ă©videmment cyclo tourisme, rando, pĂȘche etc. Les nĂ©o ruraux, reconnaissons-le, font preuve d’inventivitĂ©, originalitĂ© et compĂ©tence afin d’accueillir une clientĂšle en quĂȘte de nature, de naturel mais aussi, ne l’oublions pas, de confort et de divertissement.

Sauf que, si les faits sont lĂ , les chiffres ne le sont pas. On a eu tendance Ă  avancer des statistiques exorbitantes et Ă  considĂ©rer comme une tendance lourde ce qui finalement n’était parfois qu’un dĂ©placement Ă©phĂ©mĂšre de tĂ©lĂ©travailleurs ayant la chance de possĂ©der une rĂ©sidence secondaire ou les moyens de s’offrir un sĂ©jour long dans les milliers de maisons dĂ©sormais fournies par Airbnb dans le territoire rural.*


* Rappelons qu’Airbnb multiplie les initiatives pour encourager le dĂ©veloppement du tourisme rural en France et encourager la dispersion du tourisme sur le territoire.

En 2019, Airbnb a lancé la campagne "la premiÚre nuit est pour nous" afin d'offrir aux Français la possibilité de découvrir des destinations hors des sentiers battus. Le géant de la location collabore également depuis quatre ans avec l'Association des maires ruraux pour promouvoir la campagne française.

L'année derniÚre, il a lancé une campagne conjointe pour mettre en lumiÚre les destinations rurales particuliÚrement propices au télétravail.

Une réalité de « petits flux »

Dans l’étude « Mythes et rĂ©alitĂ© », les chercheurs, qui ont notamment travaillĂ© Ă  partir des contrats de rĂ©expĂ©dition souscrits auprĂšs de La Poste, confirment ce qu'ils avaient dĂ©jĂ  observĂ© lors de leur Ă©tude intermĂ©diaire publiĂ©e un an plus tĂŽt.

Selon eux : « Plus qu'un mouvement massif qui ressemblerait en mode inversé à l'exode rural vécu par la France fin XIXe siÚcle-début XXe siÚcle, il s'agirait davantage de "petits flux" et surtout d'une accélération de tendances préexistantes ».

La messe est dite ! Elle est d’autant plus audible que les mĂ©tropoles reprĂ©sentent toujours 43% des dĂ©mĂ©nagements et ce, malgrĂ© une baisse de 0.93 points. Autre constat sans appel : l’essentiel des dĂ©parts se fait surtout entre villes de mĂȘme taille ou des dĂ©placements depuis des territoires urbains trĂšs denses vers des villes plus petites et des territoires pĂ©riurbains Ă  l’habitat moins concentrĂ©, sur lesquels les nouveaux arrivants peuvent avoir un jardin.

Chiffres Ă  l’appui, les auteurs de l’étude notent que tous les espaces pĂ©riurbains ou presque enregistrent ainsi un effet covid positif sur leur solde migratoire. Lequel augmente de 1.9 point dans les communes de la couronne de l'aire de Paris. Mais, il ne s’agit pas de « dĂ©mĂ©tropolisation » et d’exode rural !

Il s’agirait surtout de « campagnes urbaines »

De plus, derniÚre tendance, cette renaissance de pratiques remontant aux années soixante-dix se montre « géographiquement sélective ».

A l'Ă©chelle nationale, indiquent les chercheurs : les communes rurales reprĂ©sentent 18% des installations, soit une progression de 0,1 point sur l'annĂ©e qui a suivi le confinement de mars 2020. Sans qu'il y ait de grand bouleversement, on a constatĂ© de « petits flux », en particulier dans le cƓur du Massif central, au nord de la rĂ©gion Nouvelle-Aquitaine, ou dans le piĂ©mont des PyrĂ©nĂ©es.

Mais, là encore, les géographes soulignent que ces flux concernent en particulier des territoires proches des centres urbains.

Soit des campagnes urbaines capables de proposer des services spécifiques, une dynamique économique et une accessibilité en termes de mobilités. Plusieurs villages connaissent ainsi un vrai regain de population et peuvent bien évidemment en faire profiter les touristes.

Par ailleurs, on observe cependant un nouveau modĂšle d'investissement immobilier dans les territoires ruraux.

Des investissements (achats de biens anciens) qui sont réalisés pour placer son épargne et la valoriser à travers la création de gßtes afin de disposer d'une résidence de vacances ou d'un refuge en cas de reconfinement.

Cette forme de "parisianisation des marchĂ©s locaux", comme la dĂ©nomme le rapport, se manifeste par des achats sans nĂ©gociation et des paiements comptants, des pratiques peu courantes dans ces territoires oĂč les marchĂ©s Ă©taient jusque-lĂ  dĂ©tendus.


Le littoral reste le gagnant des déplacements

En revanche et surtout, notons que les conséquences de la crise sanitaire se sont et se reflÚtent toujours dans l'attractivité des zones littorales qui se confirme, dans une sorte de « ruée vers l'Ouest ».

Laquelle doit, selon le ministre, inquiĂ©ter car il convient dĂ©sormais de trouver un modĂšle d'attractivitĂ© durable » mĂ©nageant les cĂŽtes, les sols, les plages
 dĂ©jĂ  malmenĂ©es par le changement climatique et ses consĂ©quences. Et par les vacanciers qui, bien Ă©videmment, n’entendent pas changer de paradigme est chercheront toujours (voire de plus en plus) les bords de mer pour passer leurs vacances.

Un programme-action "France Ruralités"

On le voit, les effets d’optique sont trompeurs. Le territoire français change, c’est un fait et un programme d’actions est en train d’ĂȘtre mis en place par le gouvernement, portĂ© par l’ANCT (Agence nationale de la cohĂ©sion des territoires) afin de donner une nouvelle attractivitĂ© aux territoires.

De plus, un conseil scientifique sera aussi créé pour continuer Ă  objectiver les phĂ©nomĂšnes Ă  l'Ɠuvre. A la maniĂšre du Giec les chercheurs travailleront sur l'Ă©tat des ruralitĂ©s, a prĂ©cisĂ© la ministre.

Dix-sept villages, sĂ©lectionnĂ©s le 17 fĂ©vrier dans le cadre du programme Popsu Territoires, et dont les noms seront communiquĂ©s en mars, seront aussi accompagnĂ©s par ces chercheurs, dans des Ă©tudes financĂ©es par l'État pour mieux avancer sur leurs problĂ©matiques, notamment en ce qui concerne les mobilitĂ©s rurales et la transition Ă©nergĂ©tique.

Enfin, a été annoncée la création d'un palmarÚs des étudiants et chercheurs de la ruralité dans les territoires, avec des premiers lauréats à l'automne 2023 !

Les quatre profils de néo ruraux

Les retraités et pré retraités.
Ce profil peu mĂ©diatisĂ©, regroupe les retraitĂ©s et prĂ©-retraitĂ©s. Il s'agit de ceux qui reviennent au pays aprĂšs leur vie professionnelle effectuĂ©e en ville, ou de personnes extĂ©rieures au territoire, en quĂȘte d'un cadre de vie de qualitĂ© et qui connaissent le lieu pour y avoir passĂ© des vacances.

Les professions intermédiaires et classes populaires
Ils s'installent en général dans les couronnes périurbaines éloignées (lointaines périphéries de Perpignan ou de Carcassonne par exemple) et profitent des possibilités que leur offre le télétravail.

Les cadres supérieurs et professionnels
C’est indĂ©niablement la catĂ©gorie la plus mĂ©diatisĂ©e. Mais, elle est loin de concerner la majoritĂ© des cas, expliquent les chercheurs qui notent en revanche une recrudescence de familles de diplĂŽmĂ©s alliant tĂ©lĂ©travail et reconversion professionnelle (autoentreprise de services, artisanat, maraĂźchage
).

Les marginaux et autres déclassés
Enfin, derniĂšre catĂ©gorie, qui est elle aussi passĂ©e sous les radars : les « marginaux » et mĂ©nages en situation de prĂ©caritĂ© plus ou moins choisie, qui cherchent un mode de vie alternatif. Ils s'installent dans des territoires oĂč il est possible de vivre de peu grĂące Ă  la solidaritĂ© locale, la dĂ©brouille ou l'autosuffisance.

Josette Sicsic
Josette Sicsic
Journaliste, consultante, confĂ©renciĂšre, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les consĂ©quences sur le secteur du tourisme.

AprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualitĂ© oĂč elle dĂ©code le prĂ©sent pour prĂ©voir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com

TourMaG lance le 1er "Guide Partez en France des nouveautés et projets touristiques"

PrĂ©facĂ© par Olivia GrĂ©goire, Ministre dĂ©lĂ©guĂ©e auprĂšs du ministĂšre de l’Economie, chargĂ©e des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme? IL EST EN VENTE ICi


Lu 3447 fois

Notez

Nouveau commentaire :

Tous les commentaires discourtois, injurieux ou diffamatoires seront aussitÎt supprimés par le modérateur.
Signaler un abus













































TourMaG.com
  • Instagram
  • Twitter
  • Facebook
  • YouTube
  • LinkedIn
  • GooglePlay
  • appstore
  • Google News
  • Bing Actus
  • Actus sur WhatsApp
 
Site certifié ACPM, le tiers de confiance - la valeur des médias