G V-Thomas : "Il faut que les pouvoirs publics nous donnent un coup de main car nous sommes assez démunis face au problème de la fraude. Et je ne mentionne que la fraude on line. Il y a aussi la fraude off line. C’est un combat sans fin." - DR : Photo-libre.fr
La semaine dernière, un agent immobilier est passé chez Jean-Claude Journeau, ex-patron de l’agence Jovitour afin de faire une estimation avant saisie de sa maison.
C’est le dernier et douloureux chapitre en date d’une gigantesque escroquerie à la carte bancaire dont a été victime Jean-Claude Journeau.
L’affaire remonte à 2009. Le soit-disant patron d’une agence immobilière parisienne veut établir un compte client dans cette agence de l'Yonne. Jean-Claude Journeau s’en réjouit tout en prenant, pense-t-il, toutes les précautions d’usage : photocopie d’une pièce d’identité, Kbis de l’entreprise, rib, etc.
Il s’en suit une série de commandes de billets pour les USA, Le Caire et surtout Casablanca et Abidjan avec paiement par correspondance via une carte bancaire.
Là encore, l’agent de voyages se réfère aux conditions générales de vente à distance en exigeant un bon de commande signé et la photocopie recto/verso de la carte bancaire en question. Ce qui est fait.
C’est le dernier et douloureux chapitre en date d’une gigantesque escroquerie à la carte bancaire dont a été victime Jean-Claude Journeau.
L’affaire remonte à 2009. Le soit-disant patron d’une agence immobilière parisienne veut établir un compte client dans cette agence de l'Yonne. Jean-Claude Journeau s’en réjouit tout en prenant, pense-t-il, toutes les précautions d’usage : photocopie d’une pièce d’identité, Kbis de l’entreprise, rib, etc.
Il s’en suit une série de commandes de billets pour les USA, Le Caire et surtout Casablanca et Abidjan avec paiement par correspondance via une carte bancaire.
Là encore, l’agent de voyages se réfère aux conditions générales de vente à distance en exigeant un bon de commande signé et la photocopie recto/verso de la carte bancaire en question. Ce qui est fait.
Contraint de déposer le bilan
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Évidemment, au bout d‘un mois et demi, les paiements sont rejetés. Il y en a pour 100 000 euros. La banque coupe les lignes de crédit de l’agence qui n’a d’autres solutions que de déposer son bilan, incapable de rembourser ses dettes.
Comme Jean-Claude Journeau a mis en garantie son bien immobilier au moment de la création de son entreprise en 1972, il est aujourd’hui menacé d’expulsion tandis que les escrocs courent toujours…
En cas d’escroquerie à la carte bancaire, autant le détenteur de la carte peut exiger que sa banque rembourse les sommes détournées de son compte, autant le commerçant assume entièrement le risque commercial lié à ce mode de paiement.
Comme nous l’avons évoqué la semaine dernière (Vols Abidjan : des agences victimes d'une tentative d'escroquerie d'envergure), les fraudeurs ne relâchent pas la pression et les agences sont nombreuses à être tombées dans le piège, même si les sommes concernées sont nettement moins importantes.
Jean-Claude Journeau a même créé, en septembre dernier, un collectif de défense avec les agences de voyages qui ont été escroquées. Une cinquantaine d’entre elles sont partantes pour porter l’affaire devant les pouvoirs publics et exiger un dédommagement puisque les plaintes n’aboutissent jamais.
L’association dispose d’une adresse électronique : ave-cb@orange.fr .
Et ce n’est pas tout : notre agent de voyages profite de la période électorale actuelle pour interpeller les responsables politiques. Mais il constate amèrement que les personnalités contactées bottent en touche.
Comme Jean-Claude Journeau a mis en garantie son bien immobilier au moment de la création de son entreprise en 1972, il est aujourd’hui menacé d’expulsion tandis que les escrocs courent toujours…
En cas d’escroquerie à la carte bancaire, autant le détenteur de la carte peut exiger que sa banque rembourse les sommes détournées de son compte, autant le commerçant assume entièrement le risque commercial lié à ce mode de paiement.
Comme nous l’avons évoqué la semaine dernière (Vols Abidjan : des agences victimes d'une tentative d'escroquerie d'envergure), les fraudeurs ne relâchent pas la pression et les agences sont nombreuses à être tombées dans le piège, même si les sommes concernées sont nettement moins importantes.
Jean-Claude Journeau a même créé, en septembre dernier, un collectif de défense avec les agences de voyages qui ont été escroquées. Une cinquantaine d’entre elles sont partantes pour porter l’affaire devant les pouvoirs publics et exiger un dédommagement puisque les plaintes n’aboutissent jamais.
L’association dispose d’une adresse électronique : ave-cb@orange.fr .
Et ce n’est pas tout : notre agent de voyages profite de la période électorale actuelle pour interpeller les responsables politiques. Mais il constate amèrement que les personnalités contactées bottent en touche.
La seule solution : la prévention
Le président du réseau Tourcom n’est pas étonné de l’absence de réaction au plus haut niveau. « La filière Abidjan est connue depuis des lustres par la police mais les relations politiques avec la Côte d’Ivoire sont particulières. C’est pour cela que personne ne bouge ».
Pour Richard Vainopoulos, la seule solution tient dans la prévention : faire une piqûre de rappel régulièrement à toutes les agences sur les risques à accepter un paiement par carte à distance.
« Par correspondance, une carte bancaire n’est jamais garantie. C’est pour cela que les agences en ligne se sont décidées à ouvrir des points de vente physiques où les clients effectuent leurs paiements.
Quant aux agences traditionnelles, les managers sont au courant des précautions à prendre, mais l’information ne descend pas nécessairement vers les vendeurs. Et puis, l’appât du gain est parfois plus fort que la prudence ».
Alors, si vous recevez un mail de commande d’un certain Monsieur Lecoutre pour un billet Casablanca pour sa fille en février, soyez prudents. Il semblerait que, après Monsieur Le Goff, ce soit la nouvelle usurpation d’identité utilisée par la même filière d’escrocs…
Pour Richard Vainopoulos, la seule solution tient dans la prévention : faire une piqûre de rappel régulièrement à toutes les agences sur les risques à accepter un paiement par carte à distance.
« Par correspondance, une carte bancaire n’est jamais garantie. C’est pour cela que les agences en ligne se sont décidées à ouvrir des points de vente physiques où les clients effectuent leurs paiements.
Quant aux agences traditionnelles, les managers sont au courant des précautions à prendre, mais l’information ne descend pas nécessairement vers les vendeurs. Et puis, l’appât du gain est parfois plus fort que la prudence ».
Alors, si vous recevez un mail de commande d’un certain Monsieur Lecoutre pour un billet Casablanca pour sa fille en février, soyez prudents. Il semblerait que, après Monsieur Le Goff, ce soit la nouvelle usurpation d’identité utilisée par la même filière d’escrocs…
« La fraude est l’un des deux chantiers sur lequel le SNAV veut avancer »
3 questions à Guillaume Victor-Thomas, président de la commission informatique du SNAV
TourMaG.com - Les agences en ligne disposent-elles d’outils performants pour éviter les escroqueries à la carte bancaire ?
Guillaume Victor-Thomas : "Dans le secteur du voyage comme dans les autres activités de commerce en ligne, la Fevad estime que le volume des fraudes représente 0,28% du chiffre d’affaires total.
Alors que c’était sur la vente de vols secs qu’elle portait il y a quatre ou cinq ans, aujourd’hui elle s’est également déplacée sur la vente de séjours.
Et il est assez difficile de lutter contre les agissements des escrocs. Les outils de contrôle classiques comme Ogone ou Payline ne suffisent plus aux banques pour assumer le montant des fraudes.
Et la technologie 3D Secure (proposée par le GIE Cartes Bancaires) implique un parcours plus compliqué pour l’acheteur. Les marchands qui s’en sont équipés ont constaté une baisse de 20 à 25% des ventes. Certes les fraudeurs se sont découragés mais les acheteurs honnêtes aussi !
AirFrance.fr - du fait de son caractère incontournable - est le seul à l’avoir déployé systématiquement pour les cartes Visa et a réussi ainsi à endiguer massivement la fraude.
Certaines agences en ligne disposent aussi d’outils de scoring qui peuvent détecter un comportement d’achat à risques mais cela nécessite d’avoir en interne une cellule antifraude, comme c'est le cas chez Go Voyages ou Ecotour.com."
D'autres outils existent, mais leur cout reste prohibitif."
TourMaG.com - N’y a t -il pas un intérêt commun aux commerçants de mutualiser la lutte contre la cybercriminalité ?
Guillaume Victor-Thomas : "C’est pour cela que le SNAV se rapproche de la Fevad et de l’Acsel pour mener des actions de lobbying auprès des pouvoirs publics notamment afin que ces derniers prennent la vraie dimension de la cybercriminalité et mettent en place des moyens adéquats.
Le problème, c’est que les pouvoirs publics n’ont pas pris la véritable dimension de la fraude et les moyens affectés à ce problème sont notoirement insuffisants.
En fait, c’est un cercle vicieux. Les agences escroquées savent qu’il n’y aura pas de suite si elles portent plainte et les fonctionnaires de police sont incompétents à prendre ou traiter la plainte. Elles cessent donc de le faire. En conséquence de quoi les pouvoirs publics sous-estiment les besoins de la police sur ce sujet..."
TourMaG.com - Quelles sont les solutions que vous pouvez suggérer aux pouvoirs publics ?
Guillaume Victor-Thomas : "Nous souhaiterions notamment créer une banque de données centralisée des fraudeurs comme l’IATA l’a fait aux Etats-Unis avec Pegasus. Mais en France, la CNIL s’opposerait immédiatement à ce type d’initiative… à moins de jouer les barons noirs...
Il faut que les pouvoirs publics se mobilisent concrètement car nous sommes assez démunis face au problème de la fraude. Et je ne mentionne que la fraude on line. Il y a aussi la fraude off line. Nous assumons cependant que ce sera un combat sans fin."
TourMaG.com - Les agences en ligne disposent-elles d’outils performants pour éviter les escroqueries à la carte bancaire ?
Guillaume Victor-Thomas : "Dans le secteur du voyage comme dans les autres activités de commerce en ligne, la Fevad estime que le volume des fraudes représente 0,28% du chiffre d’affaires total.
Alors que c’était sur la vente de vols secs qu’elle portait il y a quatre ou cinq ans, aujourd’hui elle s’est également déplacée sur la vente de séjours.
Et il est assez difficile de lutter contre les agissements des escrocs. Les outils de contrôle classiques comme Ogone ou Payline ne suffisent plus aux banques pour assumer le montant des fraudes.
Et la technologie 3D Secure (proposée par le GIE Cartes Bancaires) implique un parcours plus compliqué pour l’acheteur. Les marchands qui s’en sont équipés ont constaté une baisse de 20 à 25% des ventes. Certes les fraudeurs se sont découragés mais les acheteurs honnêtes aussi !
AirFrance.fr - du fait de son caractère incontournable - est le seul à l’avoir déployé systématiquement pour les cartes Visa et a réussi ainsi à endiguer massivement la fraude.
Certaines agences en ligne disposent aussi d’outils de scoring qui peuvent détecter un comportement d’achat à risques mais cela nécessite d’avoir en interne une cellule antifraude, comme c'est le cas chez Go Voyages ou Ecotour.com."
D'autres outils existent, mais leur cout reste prohibitif."
TourMaG.com - N’y a t -il pas un intérêt commun aux commerçants de mutualiser la lutte contre la cybercriminalité ?
Guillaume Victor-Thomas : "C’est pour cela que le SNAV se rapproche de la Fevad et de l’Acsel pour mener des actions de lobbying auprès des pouvoirs publics notamment afin que ces derniers prennent la vraie dimension de la cybercriminalité et mettent en place des moyens adéquats.
Le problème, c’est que les pouvoirs publics n’ont pas pris la véritable dimension de la fraude et les moyens affectés à ce problème sont notoirement insuffisants.
En fait, c’est un cercle vicieux. Les agences escroquées savent qu’il n’y aura pas de suite si elles portent plainte et les fonctionnaires de police sont incompétents à prendre ou traiter la plainte. Elles cessent donc de le faire. En conséquence de quoi les pouvoirs publics sous-estiment les besoins de la police sur ce sujet..."
TourMaG.com - Quelles sont les solutions que vous pouvez suggérer aux pouvoirs publics ?
Guillaume Victor-Thomas : "Nous souhaiterions notamment créer une banque de données centralisée des fraudeurs comme l’IATA l’a fait aux Etats-Unis avec Pegasus. Mais en France, la CNIL s’opposerait immédiatement à ce type d’initiative… à moins de jouer les barons noirs...
Il faut que les pouvoirs publics se mobilisent concrètement car nous sommes assez démunis face au problème de la fraude. Et je ne mentionne que la fraude on line. Il y a aussi la fraude off line. Nous assumons cependant que ce sera un combat sans fin."