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Air Austral : les 12 travaux de Hugues Marchessaux [ABO]

Interview de Hugues Marchessaux, le nouveau président d'Air Austral


Il a été nommé à la surprise, un peu général à la tête d'Air Austral, sans avoir réellement de référénce à la direction d'une compagnie aérienne commerciale. Nous avons rencontré Hugues Marchessaux, le nouveau président déterminé du transporteur réunionnais. Pendant près d'une heure, l'ancien de Corsair et Air Caraïbes nous a dévoilé son plan pour rendre la société de nouveau rentable et ses chantiers prioritaires.


Rédigé par le Lundi 16 Décembre 2024

Air Austral : "On a fait des choses que ne font plus d'autres compagnies" selon Hugues Marchessaux - Depositphotos
Air Austral : "On a fait des choses que ne font plus d'autres compagnies" selon Hugues Marchessaux - Depositphotos
Après la tempête, Air Austral retrouve un peu de calme.

La compagnie a connu des turbulences sévères en début d'année, suite aux publications des observations de l'audit d'Aérogestion appelée à la rescousse par les actionnaires.

Elle avait consumé, en l'espace d'une année les 50 millions du tour de table du sauvetage. L'entreprise se retrouvait exsangue et bientôt sans dirigeant, avec le départ devenu inéluctable de Jospeh Brema.

Finalement après 4 mois de recherches, Hugues Marchessaux était nommé président. Directement le SNPL était monté au créneau pour alerter sur la situation et remettre en question cette nomination.

L'ancien de Corsair et Air Caraïbes a pris les rênes serein et confiant.

"J'ai été très bien accueilli, dans une entreprise, où il existe un attachement très fort du personnel.

Je pense que tout le monde a envie de continuer à donner un avenir à cette compagnie.

J'étais optimiste avant de venir et je continue de l'être 2 mois après. Air Austral a un véritable avenir et des atouts à faire jouer pour se démarquer,
" nous a partagé Hugues Marchessaux.


L'interview a été réalisée avant le cyclone dévastateur ayant frappé Mayotte.

Air Austral : "On a fait des choses que ne font plus d'autres compagnies" sur les coûts

Et s'il est optimiste, le nouveau dirigeant doit faire face à une situation complexe.

Tout d'abord Air Austral est soumise à une forte concurrence qui a d'ailleurs rendu la ligne sur laquelle elle remplissait par le passé ses caisses, bien moins rentable qu'auparavant.

Si les autres dérives ont fait chuter les prix, comme pour mettre en difficulté leur concurrente régionale, la compagnie doit régler deux points faibles majeurs.

"Il y en a un qui est lié à la flotte, mais nous reviendrons plus tard sur le sujet, puis un autre qui est lié à ses coûts, notamment en raison de la maintenance aux avions. Je vais être clair, nous sommes pénalisés par des coûts de production qui sont trop élevés au regard de ce que fait la concurrence.

Ce ne sont pas simplement les salaires, vous avez la partie catering, puis le commissariat, etc. On a fait des choses que ne font plus d'autres compagnies.

L'évolution générale est à l'optimisation du rapport qualité-prix, c'est vrai qu'à ce niveau Air Austral est peut-être partie un peu en retard,
" poursuit le dirigeant.

Le premier des 12 travaux se situera à ce niveau.

Actuellement la compagnie est toujours figée par l'APC (Accord de Performance collective). Aucun PSE n'est en discussion, ni aucune vague de départs n'est anticipée, mais ceux qui souhaitent découvrir de nouveaux cieux ne seront pas retenus.

Le directoire a été resserré, passant de 4 à 2 personnes.

De plus, la filiale en charge des escales, Reunion Air Assistance sera "réorganisée et des choses devront être clarifiées."

Air Austral : "Je ne réinvente pas la poudre, nous devons être plus affutés et réactifs"

En avril 2024, une nouvelle société a été créée. Baptisée R2A, elle a pour activité principale "la fourniture de prestations d'assistance aéroportuaire et de services divers aux compagnies aériennes desservant la Réunion."

Cette filiale servira sans doute à rationaliser cette activité.

Une autre succursale, Ewa Air sera bien maintenue, mais aussi plus intégrée au groupe, pour que les horaires, une communication et une politique commerciale qui soient mieux coordonnés.

"Mayotte est un marché important pour nous et sur lequel nous ne sommes peut-être pas suffisamment présents. Ewa Air doit être beaucoup mieux intégrée dans la réflexion générale de l'implantation d'Air Austral dans l'Océan Indien."

Une simplification des produits à bord sera réalisée, sans rogner sur la qualité, il s'agit d'être plus "pertinent".

Même s'il n'a pas les coudées franches, Hugues Marchessaux a sanctuarisé des capacités d'investissement pour permettre une dématérialisation des services et sur le web-servicing.

"Aujourd'hui nous ne sommes pas présents dans les bornes des aéroports, nous n'avons pas vraiment d'application portable. Nous menons à la fois une rationalisation et une modernisation," poursuit-il.

Au niveau du catering, les choix seront réduits, pour limiter les dépenses, un gros travail sera aussi réalisé sur le coût des escales et sur la maintenance.

Face à l'optimisation des charges, le management va aussi devoir augmenter ses recettes.

"Nous devons travailler tout simplement pour améliorer le yield et avoir un pricing amélioré. Il y a des optimisations à faire en termes de remplissage, de grilles tarifaires.

Je ne réinvente pas la poudre, simplement nous devons être plus affutés et réactifs par rapport au marché. C'est peut-être ce qui a manqué par le passé.

A cela s'ajoute toute la partie recettes ancillaires ou recettes annexes. Nous sommes à moins de 3% de recettes supplémentaires, c'est trop peu. Entre 3 et 15%, comme chez les low-cost, nous avons une marge de manoeuvre.

Nous avons des recettes à aller chercher, pour inverser la situation et redevenir rentable,
" estime Hugues Marchessaux.

Air Austral : "Je veux renouveler la flotte, mais..."

Et l'objectif de rentabilité est fixé au prochain exercice.

La nouvelle équipe va devoir faire vite et fort, pour redresser la pente. Il ne faut pas s'attendre à une révolution, ni un changement de fonds, d'image et de marque.

Air Austral restera ce qu'elle est, par contre elle subira des petits changements. La somme des ajustements lui permettra d'atteindre la pérennité souhaitée par les actionnaires.

"Nous avons deux ans et demi pour remettre l'entreprise au carré, donc sur les rails d'une gestion économique vertueuse.

Puis nous allons mettre à profit cette période pour réfléchir à notre avenir, car au-delà de 2027, nous aurons un gros sujet qui est celui de la flotte à venir,
" se projette le président.

Le plan de l'ancien de la CMA-CGM Cargo est clair.

La première étape consiste à rationaliser les coûts et les recettes, pour atteindre la rentabilité, si possible autour de 2 ou 3%, afin d'aborder sereinement le dossier des futurs appareils.

Air Austral est en partie en grande difficulté à cause des choix passés, sur les avions composant sa flotte. Les Airbus A220 jouissent d'une corrosion accélérée, mais aussi d'une usure anormale des moteurs.

Cette défaillance des réacteurs Pratt & Whitney cloue régulièrement au sol les appareils de la compagnie et entraine une explosion des coûts de maintenance.

Par chance cette semaine et fait exceptionnel, les 3 A220 seront en service.

Air Austral veut développer ses lignes en Thaïlande

"Ce n'est pas si simple de changer une flotte. Il faut être dans des conditions pour pouvoir le faire.

Je veux renouveler la flotte, mais nous devons d'abord, nous soucier des avions que nous sortons.

Et je ne vais pas vous trahir un secret en vous disant que les coûts de restitution des avions chez Air Austral ont été extrêmement élevés ces dernières années.

Ils ont fortement pénalisé le résultat de la compagnie,
" détaille le dirigeant.

Cela a grevé les bilans de plusieurs dizaines de millions d'euros. A chaque fois qu'une compagnie rend un avion à un loueur, elle doit le remettre dans son état initial.

A titre de comparaison, Corsair a rendus dernièrement 2 appareils, dont l'opération globale a été facturée un peu plus de 10 millions d'euros.

De plus, au moment de renouveler sa flotte, une compagnie en difficulté n'obtient pas les mêmes contrats, qu'une autre en bonne santé, c'est tout l'enjeu Hugues Marchessaux.

Alors la flotte ne pourra jamais avoir un seul type d'avion, puisqu'elle exploite 2 réseaux, un régional et l'autre long courrier. Ce dernier a aussi ses contraintes, notamment à Mayotte, où la piste est courte.

Et cette réflexion sur la flotte sera bien évidemment à moyen terme, pour revenir au quotidien, le management va devoir repenser le réseau.

"Sur le long-courrier, on a clairement une présence affirmée sur les axes liant La Réunion et Mayotte à l'Hexagone.

Et nous entendons bien y rester.


En ce moment, nous avons une bonne surprise avec Bangkok. Sauf que nous ne savons pas si ça va durer dans le temps ou pas. Là où nous avons un travail important à effectuer, c'est sur le réseau moyen courrier.

La compagnie y perdait de l'argent, ces dernières années.

Notre objectif est de se concentrer sur un nombre de destinations déterminées, jouer sur les effets de fréquence et sur la saisonnalisation,
" affirme le président.

Air Austral : nouer des partenariats en Thaïlande et Afrique du Sud

Pour maintenir son objectif de rentabilité, ou à minima l'équilibre sur les destinations proches, la compagnie ne maintiendra pas des vols pour faire plaisir à des élus, communautés ou autres parties prenantes.

Les liaisons desservies ne seront que celles qui ont un public et remplissent les avions, rien d'autre. Saint-Pierre Pierrefonds Pierrefonds à Maurice a d'ores et déjà été saisonnalisée.

Air Austral suit de près le dossier de l'Afrique du Sud, une destination pas évidente, mais sur laquelle, elle entend bien investir. Un développement qui passera sans doute par des partenariats.

"Nous allons essayer à l'avenir de développer certaines alliances.

Nous essayons de travailler avec Thaï Airways, pour desservir d'autres villes que Bangkok, je me pose aussi la question sur l'Afrique du Sud.

Des compagnies régionales locales pourraient vouloir nouer des liens avec nous, puisque leurs ressortissants n'ont pas besoin de visa pour visiter la Réunion,
" nous dévoilent le responsable.

Après Bangkok, Air Austral pourrait proposer Chiang Mai ou Chiang Rai.

Tout développement court, moyen ou long courrier sera mesuré et évalué sur le seuil de la rentabilité. Il n'est plus question de faire plaisir aux uns ou aux autres, mais d'offrir un avenir à la compagnie.

L'Air Austral instrument politique s'efface pour devenir un véritable transporteur régional, au service de la collectivité.


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