
Christophe Mathieu, président du directoire de Brittany Ferries, ne s'alarme pas outre-mesure de la mise en place de l'ETA - Crédit photo : Lou Benoist
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TourMaG - Le 2 avril 2025, l’ETA devient obligatoire pour les Français qui souhaitent se rendre au Royaume-Uni. Quel impact anticipez-vous ?
Christophe Mathieu : Ce n’est pas tant le montant qui pose problème que l’effet cumulé avec l’obligation de passeport.
Le surcoût peut néanmoins décourager certains voyageurs, notamment les familles en court séjour qui pourront préférer la Belgique ou l'Allemagne.
Cela dit, je ne suis pas trop inquiet même si cela reste quand même une barrière. Beaucoup de Français ont un passeport et sont déjà habitués à ce type de formalités, comme l’ESTA pour les États-Unis.
TourMaG - Vous venez de publier de bons résultats en 2024. Est-ce à dire que les cicatrices des crises Covid et Brexit se referment ?
Christophe Mathieu : Le Covid a été brutal et a laissé des séquelles. Nous avons encore un peu de PGE à rembourser et les aides régionales - 30 millions d’euros pour la Bretagne, 50 millions pour la Normandie - sont soldées.
Le Brexit, lui, agit plus lentement, mais il pèse sur les flux : nous n'avons toujours pas retrouvé les volumes de 2019, surtout côté français.
L’ETA vient s’ajouter à une tendance de fond où les scolaires voyagent moins, pour de multiples raisons, dont la responsabilité des professeurs. Nous sommes très loin d'avoir retrouvé les volumes de 2019, même si nous avons rebondi en 2024 par rapport à 2023.
Et les réservations vers l’Angleterre depuis la France sont actuellement en hausse de 5% par rapport à l’an dernier.
Par ailleurs, les Anglais vont peut-être se détourner des Etats-Unis et le tourisme de proximité peut être une réponse à la baisse de leur pouvoir d'achat.
Deux nouveaux navires hybrides en service

Christophe Mathieu : Le Guillaume de Normandie, comme le Saint-Malo entré en service en février, est propulsé au gaz naturel liquéfié (GNL) et équipé de batteries. Cela permet de fonctionner sans émissions dans les ports, ni de CO2, ni de dioxyde de soufre ou d'azote.
Ces investissements s’inscrivent dans une trajectoire claire. En 2026, nous aurons réduit de 25% nos émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2019. Nous avons sorti cinq bateaux en cinq ans.
TourMaG - Cette transition fait écho à une autre actualité : l’entrée du transport maritime dans le système ETS européen en 2024. Que cela change-t-il pour vous ?
Christophe Mathieu : L’ETS nous oblige à acheter des quotas carbone.
En 2025, ce sera un surcoût de 13 millions d’euros pour Brittany Ferries versus quand le système n'était pas en place. En 2026, ce sera 18 millions d'euros, des surcoûts que nous sommes obligés d'intégrer dans le prix du billet.
Nous plaidons pour que les fonds collectés - des milliards d'euros - soient d'une manière ou d'une autre réinjectés dans la décarbonation du transport maritime, par exemple pour aider les ports à s’équiper de systèmes de recharge pour les ferries hybrides. Mais il ne faudrait pas que le prix de l'électricité soit plus élevé que la tonne de GNL.
Aujourd’hui, on est souvent dans une logique de l’œuf et de la poule : les ports attendent que les armateurs s’équipent, et les armateurs attendent que les ports soient prêts. Nous, on a pris les devants.
L'esprit croisière des navires "longue distance"

Le Saint-Malo, navire hybride, va être rejoint le 28 mars par le Guillaume de Normandie, qui sera inauguré à Caen - Photo : Brittany Ferries
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TourMaG - En novembre 2025, un nouveau contrôle européen (EES) entre en vigueur. Vous êtes inquiet ?
Christophe Mathieu : Oui, clairement. L’Exit Entry System (ESS) est un registre européen des entrées et sorties pour les voyageurs venant de pays tiers - les Britanniques en font désormais partie.
À leur arrivée dans nos ports, ils devront subir un contrôle biométrique, avec empreintes et photo. Ce sera un contrôle physique, ce qui nous fait redouter des attentes de deux heures à la sortie nos ports. Même si ce n’est pas de notre ressort - ce sont des moyens régaliens - c’est nous, Brittany Ferries, que les clients associeront à cette mauvaise expérience.
TourMaG - Vos navires ne sont plus de simples moyens de transport. Peut-on parler d’un esprit "croisière" ?
Christophe Mathieu : Absolument. Nos longues lignes, vers l’Irlande ou l’Espagne, représentent 50% de notre chiffre d’affaires. Et on voit bien que les passagers recherchent autre chose : de l’espace, du temps, du confort. C’est l’expérience du voyage qui compte.
Les Français peuvent embarquer pour des mini-croisières, de Roscoff vers Plymouth et Santander. On voit des dauphins ou même des baleines dans le golfe de Gascogne, on profite d’une traversée calme. Ce sont des moments de suspension, c'est presque du luxe aujourd’hui d'avoir ces quelques heures devant soi.
C’est notre réponse au "slow tourisme", et une vraie alternative à l’aérien ou à la route, notre principale concurrente.
Nos destinations sont toutes belles, hors des sentiers battus. On arrive dans de très beaux ports à Saint-Malo, face aux remparts, Santander ou Cork…
Christophe Mathieu : Oui, clairement. L’Exit Entry System (ESS) est un registre européen des entrées et sorties pour les voyageurs venant de pays tiers - les Britanniques en font désormais partie.
À leur arrivée dans nos ports, ils devront subir un contrôle biométrique, avec empreintes et photo. Ce sera un contrôle physique, ce qui nous fait redouter des attentes de deux heures à la sortie nos ports. Même si ce n’est pas de notre ressort - ce sont des moyens régaliens - c’est nous, Brittany Ferries, que les clients associeront à cette mauvaise expérience.
TourMaG - Vos navires ne sont plus de simples moyens de transport. Peut-on parler d’un esprit "croisière" ?
Christophe Mathieu : Absolument. Nos longues lignes, vers l’Irlande ou l’Espagne, représentent 50% de notre chiffre d’affaires. Et on voit bien que les passagers recherchent autre chose : de l’espace, du temps, du confort. C’est l’expérience du voyage qui compte.
Les Français peuvent embarquer pour des mini-croisières, de Roscoff vers Plymouth et Santander. On voit des dauphins ou même des baleines dans le golfe de Gascogne, on profite d’une traversée calme. Ce sont des moments de suspension, c'est presque du luxe aujourd’hui d'avoir ces quelques heures devant soi.
C’est notre réponse au "slow tourisme", et une vraie alternative à l’aérien ou à la route, notre principale concurrente.
Nos destinations sont toutes belles, hors des sentiers battus. On arrive dans de très beaux ports à Saint-Malo, face aux remparts, Santander ou Cork…