Tourisme responsable : on assiste Ă "une bipolarisation des discours" selon Julien Buot (ATR) - Depositphotos @bakhtiarzein
TourMaG - Quelle est l'actualité pour ATR (Agir pour un Tourisme Responsable) ?
Julien Buot : Un des gros sujets de l'année pour le tourisme durable, que ça soit pour ATR ou ATD, sont les enjeux d'inclusivité.
Nos événements vont être consacrés à ces problématiques, nous sommes un peu obsédés par cette idée. Nous avons tendance à mettre trop de côté les vertus sociétales du voyage.
Il faudrait éviter que le tourisme durable ne soit réservé qu'à une niche de gens qui peuvent se permettre de voyager.
Si nous sommes convaincus de l'impact positif du tourisme, donc le solde entre les effets négatifs et positifs. Il est indispensable de vouloir le démocratiser.
Il doit être accessible au plus grand nombre. Dans les impacts positifs du voyage, l'éducation est importante : en voyageant, nous apprenons plein de choses et ce serait dommage que cela soit réservé à une population qui est bien souvent issue des CSP+.
Aujourd'hui, nous constatons que les occasions de partir se sont raréfiées, même dans le cadre de l'Education nationale. Il était admis qu'un élève partirait au moins une fois dans sa scolarité, soit dans une classe verte ou une classe de mer, sauf que ce droit n'est plus du tout garanti.
A peine 10% des élèves ont cette chance, c'est dramatique.
Julien Buot : Un des gros sujets de l'année pour le tourisme durable, que ça soit pour ATR ou ATD, sont les enjeux d'inclusivité.
Nos événements vont être consacrés à ces problématiques, nous sommes un peu obsédés par cette idée. Nous avons tendance à mettre trop de côté les vertus sociétales du voyage.
Il faudrait éviter que le tourisme durable ne soit réservé qu'à une niche de gens qui peuvent se permettre de voyager.
Si nous sommes convaincus de l'impact positif du tourisme, donc le solde entre les effets négatifs et positifs. Il est indispensable de vouloir le démocratiser.
Il doit être accessible au plus grand nombre. Dans les impacts positifs du voyage, l'éducation est importante : en voyageant, nous apprenons plein de choses et ce serait dommage que cela soit réservé à une population qui est bien souvent issue des CSP+.
Aujourd'hui, nous constatons que les occasions de partir se sont raréfiées, même dans le cadre de l'Education nationale. Il était admis qu'un élève partirait au moins une fois dans sa scolarité, soit dans une classe verte ou une classe de mer, sauf que ce droit n'est plus du tout garanti.
A peine 10% des élèves ont cette chance, c'est dramatique.
Tourisme responsable : "Un changement au niveau politique"
TourMaG - Et comment faire Ă©voluer les choses ?
Julien Buot : Tout d'abord chez ATR, ces dernières années, nous avons accueilli les deux grands réseaux des voyages jeunes que sont l'UNOSEL et l'Office.
Nous avons la taille critique pour travailler le sujet.
Historiquement, le tourisme social et des jeunes n'était pas à notre agenda, car notre public se résumait aux seniors qui voyageaient via leurs agences de trek. Donc nous allons aborder ce sujet de l'inclusivité dans nos évènements au sein d'ATR et ATD.
Puis, j'ai remarqué aussi un changement au niveau politique, même s'il faut bien l'avouer, le tourisme est grandement ignoré.
Lors des universités d'Ecologie Les Verts, au Havre, une table ronde s'est tenue avec des élus. L'évènement était de grande qualité, les députés avaient vraiment travaillé leur sujet.
François Ruffin a même été convaincu, par ses attachés parlementaires, que le tourisme était un vrai combat politique de premier ordre et qu'il fallait étudier la problématique.
A lire : Qu'est-ce que le projet du "droit aux vacances pour tous" ?
Il a donc décidé de travailler avec Benjamin Lucas sur un projet de loi, ce qui a poussé le gouvernement à agir sur la question du tourisme social, d'où le pass colo et rail.
Cette question est très importante. Lors de l'évènement Place Marketing Forum, le maire de Deauville nous rappelait que le temps libre représente pour près de 80% de nos vies.
Julien Buot : Tout d'abord chez ATR, ces dernières années, nous avons accueilli les deux grands réseaux des voyages jeunes que sont l'UNOSEL et l'Office.
Nous avons la taille critique pour travailler le sujet.
Historiquement, le tourisme social et des jeunes n'était pas à notre agenda, car notre public se résumait aux seniors qui voyageaient via leurs agences de trek. Donc nous allons aborder ce sujet de l'inclusivité dans nos évènements au sein d'ATR et ATD.
Puis, j'ai remarqué aussi un changement au niveau politique, même s'il faut bien l'avouer, le tourisme est grandement ignoré.
Lors des universités d'Ecologie Les Verts, au Havre, une table ronde s'est tenue avec des élus. L'évènement était de grande qualité, les députés avaient vraiment travaillé leur sujet.
François Ruffin a même été convaincu, par ses attachés parlementaires, que le tourisme était un vrai combat politique de premier ordre et qu'il fallait étudier la problématique.
A lire : Qu'est-ce que le projet du "droit aux vacances pour tous" ?
Il a donc décidé de travailler avec Benjamin Lucas sur un projet de loi, ce qui a poussé le gouvernement à agir sur la question du tourisme social, d'où le pass colo et rail.
Cette question est très importante. Lors de l'évènement Place Marketing Forum, le maire de Deauville nous rappelait que le temps libre représente pour près de 80% de nos vies.
"Une grande cacophonie autour du tourisme durable"
TourMaG - Pour revenir Ă ATR, vous allez fĂŞter vos 20 ans...
Julien Buot : Nous allons fêter cet anniversaire lors de notre séminaire à Chamonix.
Un évènement durant lequel nous allons dévoiler notre projet 2030. Ce sera aussi l'occasion pour nous de prendre la parole, car nous remarquons une grande cacophonie autour du tourisme durable.
Les médias parlent enfin du sujet, ce qui n'était pas le cas il y a encore 5 ans. Nous n'allons pas nous plaindre, mais nous voulons faire entendre notre voix.
TourMaG - Pourquoi parlez-vous de cacophonie ? Sous entendez-vous qu'il y a du greenwashing ?
Julien Buot : Vous avez du greenwashing, mais l'avantage, même si cela est maladroit ou malhonnête, c'est que le sujet est à l'agenda médiatique.
A lire : Greenwashing à l’insu de son plein gré : comment l’éviter ?
Quand je dis cacophonie, je veux dire que les principes du tourisme durable sont appropriés par des gens qui s'autoproclament et qui détournent le sujet.
Certains nouveaux entrants et acteurs créent de la polémique, je ne remets pas en cause la sincérité de leur démarche, mais c'est aussi une stratégie marketing que de snober tout ce qu'ont fait ou essaient de faire les acteurs historiques.
Ce que nous faisons depuis 20 ans et pour les 20 prochaines années, c'est de raccrocher tous les wagons. Nous voulons que les anciens acteurs, mais aussi les nouveaux entrants qui sont très en retard ou en avance sur le sujet, s'unissent.
Nous arriverons Ă agir pour un tourisme plus responsable seulement en Ă©tant tous ensemble.
Julien Buot : Nous allons fêter cet anniversaire lors de notre séminaire à Chamonix.
Un évènement durant lequel nous allons dévoiler notre projet 2030. Ce sera aussi l'occasion pour nous de prendre la parole, car nous remarquons une grande cacophonie autour du tourisme durable.
Les médias parlent enfin du sujet, ce qui n'était pas le cas il y a encore 5 ans. Nous n'allons pas nous plaindre, mais nous voulons faire entendre notre voix.
TourMaG - Pourquoi parlez-vous de cacophonie ? Sous entendez-vous qu'il y a du greenwashing ?
Julien Buot : Vous avez du greenwashing, mais l'avantage, même si cela est maladroit ou malhonnête, c'est que le sujet est à l'agenda médiatique.
A lire : Greenwashing à l’insu de son plein gré : comment l’éviter ?
Quand je dis cacophonie, je veux dire que les principes du tourisme durable sont appropriés par des gens qui s'autoproclament et qui détournent le sujet.
Certains nouveaux entrants et acteurs créent de la polémique, je ne remets pas en cause la sincérité de leur démarche, mais c'est aussi une stratégie marketing que de snober tout ce qu'ont fait ou essaient de faire les acteurs historiques.
Ce que nous faisons depuis 20 ans et pour les 20 prochaines années, c'est de raccrocher tous les wagons. Nous voulons que les anciens acteurs, mais aussi les nouveaux entrants qui sont très en retard ou en avance sur le sujet, s'unissent.
Nous arriverons Ă agir pour un tourisme plus responsable seulement en Ă©tant tous ensemble.
Tourisme responsable : "une bipolarisation des discours"
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TourMaG - A l'image de la société et de la politique, le tourisme n'est-il pas en train de se diviser avec deux extrêmes irréconciliables ?
Julien Buot : Bien sûr et pas que dans le tourisme durable.
Malheureusement, nous avons une bipolarisation des discours. Le parti du milieu n'existe plus vraiment.
Nous assumons que le milieu ait le droit d'exister. ATR prétend organiser le dialogue entre toutes ces personnes, aussi bien ceux très en avance que ceux très en retard. C'est ce qui fait notre force.
Le postulat de départ d'Agir pour un Tourisme Responsable était de se dire que chacun des acteurs doit travailler dans son coin, mais il est important de se retrouver pour mutualiser les bonnes pratiques, identifier les impasses dans lesquelles nous sommes enfermés, pour essayer de nous faire la courte échelle, et passer le mur.
Nous nous sommes pas mal enfermés dans le tunnel du carbone, de la pollution, nous devons le dépasser, il faut aussi assumer l'empreinte carbone et parler d'ombre climatique.
TourMaG.com - Vous comptez 80 membres. Le prochain objectif est d'atteindre la barre des 100 et de sortir de l'idée du club des tour-opérateurs. A force d'agréger autant d'entreprises, ne craignez-vous pas de diluer le message d'ATR ?
Julien Buot : En France, vous avez 6 000 opérateurs de voyages, c'est notre plafond de verre.
Nous n'arriverons jamais Ă embarquer tout le monde, mĂŞme si c'est l'objectif.
Demain, à l'image de ce qu'il se passe dans l'hôtellerie, pour conserver ses étoiles, les formations à l'écologie seront devenues obligatoires. Pour être immatriculé opérateur de voyages en France, Atout France pourrait ajouter des formations obligatoires au tourisme responsable.
Cela me parait ĂŞtre le sens de l'Histoire.
D'ailleurs, nous n'allons pas nous priver d'aller voir les parlementaires pour que cette exigence de formation figure dans les futurs textes de loi.
La formation aiderait les professionnels Ă comprendre un peu mieux les enjeux, le tourisme responsable ne se limite pas seulement Ă l'Ă©cotourisme ou aux questions environnementales.
Cette connaissance permettrait de ne pas tomber dans le greenwashing, mais aussi ĂŞtre plus solide dans sa production, dans son discours et dans sa communication.
Julien Buot : Bien sûr et pas que dans le tourisme durable.
Malheureusement, nous avons une bipolarisation des discours. Le parti du milieu n'existe plus vraiment.
Nous assumons que le milieu ait le droit d'exister. ATR prétend organiser le dialogue entre toutes ces personnes, aussi bien ceux très en avance que ceux très en retard. C'est ce qui fait notre force.
Le postulat de départ d'Agir pour un Tourisme Responsable était de se dire que chacun des acteurs doit travailler dans son coin, mais il est important de se retrouver pour mutualiser les bonnes pratiques, identifier les impasses dans lesquelles nous sommes enfermés, pour essayer de nous faire la courte échelle, et passer le mur.
Nous nous sommes pas mal enfermés dans le tunnel du carbone, de la pollution, nous devons le dépasser, il faut aussi assumer l'empreinte carbone et parler d'ombre climatique.
TourMaG.com - Vous comptez 80 membres. Le prochain objectif est d'atteindre la barre des 100 et de sortir de l'idée du club des tour-opérateurs. A force d'agréger autant d'entreprises, ne craignez-vous pas de diluer le message d'ATR ?
Julien Buot : En France, vous avez 6 000 opérateurs de voyages, c'est notre plafond de verre.
Nous n'arriverons jamais Ă embarquer tout le monde, mĂŞme si c'est l'objectif.
Demain, à l'image de ce qu'il se passe dans l'hôtellerie, pour conserver ses étoiles, les formations à l'écologie seront devenues obligatoires. Pour être immatriculé opérateur de voyages en France, Atout France pourrait ajouter des formations obligatoires au tourisme responsable.
Cela me parait ĂŞtre le sens de l'Histoire.
D'ailleurs, nous n'allons pas nous priver d'aller voir les parlementaires pour que cette exigence de formation figure dans les futurs textes de loi.
La formation aiderait les professionnels Ă comprendre un peu mieux les enjeux, le tourisme responsable ne se limite pas seulement Ă l'Ă©cotourisme ou aux questions environnementales.
Cette connaissance permettrait de ne pas tomber dans le greenwashing, mais aussi ĂŞtre plus solide dans sa production, dans son discours et dans sa communication.