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Patrick Pourbaix : Costa veut faire de la France un "Source Market" et s'en donne les moyens...

l'interview de Patrick Pourbaix DG adjoint de Costa Croisières France


Costa Croisières a décidé de faire de la France son "Market Source" et d'investir en priorité sur la distribution traditionnelle. Un plan ambitieux que Patrick Pourbaix, directeur général adjoint de Costa France nous dévoile en détails.


le Lundi 30 Septembre 2013

P. Pourbaix : "Nous avons toujours été très traditionnels dans la distribution : nous avons historiquement développé nos ventes par le canal de la distribution traditionnelle.   Et ce canal reste aujourd'hui, extrêmement important pour Costa. Non seulement par les chiffres, mais également par notre vision stratégique du développement de Costa". - DR
P. Pourbaix : "Nous avons toujours été très traditionnels dans la distribution : nous avons historiquement développé nos ventes par le canal de la distribution traditionnelle. Et ce canal reste aujourd'hui, extrêmement important pour Costa. Non seulement par les chiffres, mais également par notre vision stratégique du développement de Costa". - DR
TourMaG.com: Comment en êtes-vous arrivés à concevoir de telles ambitions pour le marché français?

Patrick Pourbaix:
C'est une grande évolution pour Costa qui veut faire de la France un "Source Market". Pour le siège de la compagnie, la France est devenue un enjeu très important, ce qui n'est pas foncièrement nouveau, mais dorénavant, nous avons les moyens de concrétiser cette volonté.

Et pour les agences de voyages, c'est vraiment un message très important. En termes commerciaux, c'est la plus grande nouveauté de Costa.

Depuis le lancement de "Prima" en 2006, nous n'avions pas connu de grands changements dans l'organisation commerciale.

Nous sommes bien entendu devenus, comme tous les grands opérateurs du marché, "multi canaux", parce que c'est devenu une réalité économique.

Comme d'ailleurs, pour les agences, il faut être "multi acteur" : le temps où les agences pouvaient revendiquer leur position de distributeur "unique" est terminé.

Aujourd'hui, les agences ont compris cette réalité, elles sont aussi devenues "organisateur de voyages" et leur activité est devenue multiple.

L'agence doit s'occuper de rechercher des clients, être "micro" organisateur de voyages, avoir une présence sur internet, etc. Tout a changé.

Bref, tout a changé. Mais, ce qui est important, c'est qu'il y a des stratégies qui peuvent varier… Certains producteurs ont adopté des stratégies "mono" canal… Chez Costa, pas du tout.

Nous avons toujours été très traditionnels dans la distribution : nous avons historiquement développé nos ventes par le canal de la distribution traditionnelle.

Et ce canal reste aujourd'hui, extrêmement important pour Costa. Non seulement par les chiffres, mais également par notre vision stratégique du développement de Costa.

Mais depuis 2009 et la naissance de la crise, nous avons vécu dans un monde un peu compliqué, particulièrement chez nous. La crise a engendré une certaine "prudence" dans notre fonctionnement, une rationalisation des moyens, des économies…

Entre 2009 et 2013, nous avons vécu des années compliquées, puisqu'il nous a fallu continuer à produire sans avoir de moyens supplémentaires. Un peu compliqué !

Patrick Pourbaix : Costa veut faire de la France un "Source Market" et s'en donne les moyens...
TourMaG.com : Difficile à gérer ?

P.P. :
Un peu, mais nous avons réussi. Malheureusement, en 2012, avec l'affaire du Concordia, nous avons été retardés dans notre développement qui est arrivé… en 2013 !

2013 a été un tournant chez Costa. Il nous fallait réorganiser notre service commercial, avec des moyens conséquents. Ce qu'a accepté le siège.

TourMaG.com : Concrètement, quel est ce nouveau plan?

P.P.:
Nous avons mis le temps car nous voulions analyser les "process" chez nous.

Nous nous sommes aperçus que notre équipe commerciale est très expérimentée et possède une véritable expertise de notre compagnie.

D'ailleurs je remarque que, après l'expérience tragique du Concordia, toute l'équipe est restée en place : il n'y a eu aucune défection !

Il y a un véritable esprit d'équipe et une véritable "école de vente" Costa ! Mais il est vrai que notre Président, Georges Azouze, a su insuffler cet esprit depuis toujours !

C'est lui qui m'a demandé de rejoindre cette équipe, alors que je m'occupais des marchés Benelux, (dont je m'occupe toujours d'ailleurs) parce que nous avons cet esprit similaire.

Nous sommes des vendeurs sur le terrain et nous avons donc la même vision du terrain. Ce que nous inculquons à notre équipe commerciale !

En fait, nous sommes avant tout des gens de terrain et c'est ce qui fait notre force. Nous n'avons pas de grands "diplômés de grandes écoles". Notre richesse vient de notre culture du terrain et des relations humaines…

Aussi, même si nous ne négligeons pas une présence commerciale "multi canal", nous avons décidé d'investir d'abord et avant tout sur la distribution traditionnelle.

Je crois que, par rapport aux autres acteurs du marché, c'est une démarche assez atypique. Parce que, franchement, aujourd'hui, des producteurs qui investissent sur les réseaux de distribution traditionnelle, je n'en connais pas beaucoup…

Donc, nous nous sommes aperçus, que tout en connaissant une croissance constante, nos commerciaux passaient de moins en moins de temps sur le terrain au profit de taches annexes…

Nous avons constaté que cette équipe, de 15 personnes, ne consacrait que 27% de son temps au "terrain" ! Pas de leur faute, loin de là, mais parce que non seulement nos commerciaux s'occupaient de leurs agences, mais en plus, faute d'assistance commerciale, géraient tout un tas de problèmes administratifs…

De plus, comme Costa gère un grand nombre de groupes en France, (plus d'un tiers des ventes Costa en France sont générées par les groupes), nos commerciaux étaient un peu "dépassés" par l'ampleur de la tâche. Il est vrai que nous n'avions pas de cellule "groupes".

TourMaG.com : Donc, vous avez tout reconstruit ?

P.P. :
Oui, nous avions perdu, c'est vrai, le contact humain. Concrètement, nous avons donc recréé une véritable assistance commerciale, composée de quatre personnes.

Le service est quasiment en place et nous en sommes à installer un système de téléphonie qui permettra de reconnaitre directement les agences concernées, capable de donner une priorité d'accès à certaines agences "qualifiées"…

Et tout ceci va dégager les commerciaux de tâches administratives au profit de leur présence dans les agences !
Autre chantier, encore en cours aujourd'hui, la gestion des groupes.

Nous allons, outre la gestion "back office" des groupes, mettre en place un "front office" groupes. C’est-à-dire que des commerciaux, sédentaires, vont pouvoir, dès la demande d'une agence, fournir devis et cotations aux agences concernées ! Sans attendre un temps infini.

Tout ceci se met en place actuellement et cette cellule sera capable de répondre immédiatement à toute demande.

Enfin, nous allons renforcer les équipes commerciales. Nous avons chiffré le nombre de visites nécessaires afin d'offrir à nos distributeurs le maximum de services.

Et comme nous voulons "redéfinir" nos relations avec les agences, nous allons désormais confier chaque région de France à deux personnes par région. Nous sommes en train d'engager sept personnes supplémentaires, ce qui va nous donner une équipe de 22 commerciaux !

Y compris un commercial à temps plein sur les Antilles. Les Antilles sont d'ailleurs pour nous un véritable marché, très important.

Et notre objectif est de faire passer l'occupation du terrain par nos commerciaux de 27% à 80%. Ce qui veut dire qu'avec cette nouvelle organisation, Costa sera trois fois plus présent sur le terrain des agences de voyages françaises!

TourMaG.com : Est-ce à dire que votre concurrent "direct" est plus agressif que vous sur le marché français ?

P.P. :
Oui, nos concurrents, même s'ils sont un peu moins nombreux que nous, sont davantage présents sur le terrain.

Nous devions donc réagir. Mais ce n'est pas notre motivation première: nous avons l'ambition, sur le marché français de connaitre une croissance très importante.

Vraiment importante. Il est vrai que le marché de la croisière est en retard par rapport au reste de l'Europe. Nous voulons combler ce vide et atteindre ce qui se passe sur notre marché italien.

Nous voulons vraiment faire de la France un "Marché Source" et nous nous sommes donné trois ans pour y parvenir.

TourMaG.com : Par rapport à ce qu'avait déclaré Georges Azouze à Rome, qui voulait rétribuer les agences "au mérite", c'est un peu différent ?

P.P.
: Il y a effectivement chez nous, une vocation de "transformer". Et quand nous disons que nous voulons travailler avec les agences, nous le prouvons. Je viens de l'expliquer. Ça, c'est le quantitatif.

Maintenant, il y a aussi la qualitatif. Et, dans cette forme, nous voulons revoir et redéfinir la relation avec la distribution. Cette relation doit parvenir à une autre maturité par rapport à ce qu'elle était avant.

Il y a toute une évolution que nous menons depuis quelques années, parce que la mentalité de nos commerciaux a évoluée.

Avant, le rôle de nos commerciaux était un rôle d'animation de réseau. Maintenant, nous voulons les former à devenir de véritables "consultants" professionnels, plus "business".

Nous espérons pouvoir, grâce à eux, établir auprès de chaque agence (qui le souhaite, bien sûr) des "micro-contrats" entre partenaires.

Avec un partenariat équilibré, dans lequel chacun trouve son avantage. Pas question que l'un ou l'autre (producteur ou distributeur) impose sa loi.

D'ailleurs, ce qui fait le succès d'un bon business, c'est un partenariat équilibré. Et nous espérons pouvoir conclure avec chaque agence ce type de relation : nous rémunérons, l'agence vend et bénéficie en plus de notre expertise.

Nos commerciaux sont formés pour devenir des "consultants" qui mettent leur expertise au service des agences.

Et les agences qui se contenteront, en pur distributeurs, de vendre la croisière simplement, tant mieux, mais nous leur apporteront le "service minimum". Celles qui vont s'investir dans une attitude proactive, nous allons leur fournir une aide très importante.

Et tout cela va mener à une sorte de sélection naturelle…

C'est vrai, pour répondre plus précisément à la question, que, depuis deux ans, nous étudions comment revoir notre relationnel avec nos distributeurs.

C'est un "process" qui est en cours. Nous avons rencontré la majorité des grands réseaux pour leur présenter ce modèle que nous avons baptisé "Costa Pro", qui est modèle de "segmentation des agences". Parce qu'il est évident que nous ne pouvons pas mettre sur le même pied toutes les agences.

Elles ont chacune leurs spécificités. Elles ont des potentiels différents aussi. Sans oublier le facteur humain qui existe dans chaque agence.

En fait, chaque agence est différente et nous devons apporter à chaque agence un service différent. Nous avons discuté dans cet esprit-là avec les grands réseaux.

Il n'était évidemment pas question d'imposer quoi que ce soit, mais plutôt de réfléchir ensemble à un modèle plus dynamique.

Étonnamment, la réaction était très positive, de la part des têtes de réseau!

TourMaG.com : Pas de levée de bouclier ?

P.P :
Mais non ! Bien sûr, nous comprenons les réticences, mais cela n'empêche pas d'avoir une réflexion commune.

Peut-être que le modèle que nous connaissons actuellement est un modèle qui a vécu et qu'il faudrait passer à autre chose ? Ou du moins que c'est un modèle qui a évolué et que nous pouvons étudier ensemble. C'est en tout cas notre message.

En fait, sans avoir d'accord à proprement parler, les réseaux ont fait valoir la complexité d'un tel changement, mais sans agressivité, bien au contraire.

D'ailleurs, dans "Costa Pro" il existe aussi un système d'incentive, plus pointu par agence et selon le type d'agence. Ce que nous sommes capables de gérer grâce à nos systèmes informatiques.

Et nous proposons de verser les "commissions" de ces incentives trimestriellement, pas à la fin de l'année. Nous avons également la possibilité de rétribuer en fonction du "nouveau client croisiériste". Bref, toute une panoplie intéressante pour les agences…

Et pas mal de points ont été pris très positivement par les réseaux… Mais toujours bloqué sur un point: la commission différenciée.

TourMaG.com : Rien n'est donc figé ?

P.P. :
Non, nous allons continuer à réfléchir et nous nous reverrons.

Il est indispensable de parvenir à des contrats équilibrés. Costa est maintenant un acteur suffisamment important pour qu'on ne lui dicte pas certaines volontés.

Mais nous sommes aussi capable de comprendre certaines choses et sommes toujours prêts à avancer… ensembles.

Car nous n'oublions pas, que si Costa est dans la position de leader en France, c'est grâce à la distribution. Et nous toujours aussi convaincus que c'est par la distribution traditionnelle que nous irons chercher nos nouveaux clients… Dans toutes les régions de France.


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