Quand les sondages font le beau temps… et oublient les non partants ! [ABO]

Etes-vous plutôt spritz ou mojito ? Tongs ou espadrilles, glace à l’eau ou crème glacée ? Avec l’arrivée de l’été, voici revenu le temps des sondages sans intérêt ; des études d’opinion idiotes qui vont alimenter nos journaux jusqu’à la fin du mois d’août.

Remarquez, je ne les blâme pas ! Entre deux reportages sur les chassés-croisés de l’été, les pauses fraîcheurs sur les aires d’autoroute ou les vendeurs ambulants sur les plages, il faut bien que les journalistes trouvent des sujets pour noircir du papier pendant les vacances…

Le tourisme n’échappe pas au phénomène si l’on en croit ma boîte mail, noyée par une multitude de sondages. Je ne résiste pas à vous livrer en vrac les conclusions des derniers sujets essentiels : « planifier un voyage est bénéfique pour la santé mentale » ou « quelle est la pire ville de France pour dormir ».

Derrière ces enquêtes se cachent la plupart du temps des acteurs du tourisme en ligne qui, en alimentant les médias et sites internet, trouvent l’opportunité de se faire de la pub à moindre frais. Pour peu que les conclusions de ces sondages aillent dans le sens de leur positionnement marketing et politique commerciale ce qui est, étrangement, toujours le cas !

Les organismes professionnels, d’Atout France aux Entreprises du Voyage, n’échappent pas à la règle, en nous livrant régulièrement des études qui ont pour mérite de proposer des analyses plus rigoureuses et pertinentes, à défaut d’être toujours passionnantes ou inédites.

A ce titre, le traditionnel « Baromètre des Vacances » d’un célèbre assureur est attendu chaque année – ou presque – comme le messie. Dévoilé le 27 mai, l’édition 2025 enfonce des portes ouvertes : les périodes de vacances préférées des Français sont les mois de juin à septembre et les moins plébiscitées sont novembre et janvier. Incroyable, non ?

Tout aussi étonnant (!), cet été encore, nos compatriotes partiront majoritairement en France, avec leur voiture, et à la mer. Lorsqu’ils choisissent l’étranger, ils plébiscitent l’Espagne, l’Italie et le Portugal. Un vrai scoop ! Et cette année comme toutes les autres, le baromètre nous révèle que le principal frein au départ en vacances est… financier.

Dans ce florilège d’études, chiffres et sondages, s’il est une donnée que l’on oublie souvent de commenter, c’est le taux de départ annuel des Français en vacances, qui plafonne depuis 40 ans autour de seulement 60%.

Après le boom des vacances dans les décennies 70/80, une partie importante de la population reste à la maison chaque année ; une partie invisibilisée, que les grands médias oublient régulièrement, trop occupés à mettre en images le bonheur estival des Français.

Certes, tout le monde n’a pas envie de transhumance. Il y a les retraités qui préfèrent rester au frais devant la télé ou sont contraints par des problèmes de santé ; il y a les étudiants qui bossent durant l’été pour financer leur rentrée…

Mais, alors que les professionnels n’ont que le mot « montée en gamme » à la bouche, que tous parient sur la valeur plutôt que sur le volume, de plus en plus de Français n’ont plus les moyens de partir en vacances, sauf à squatter la maison de tante Yvette et d’oncle Robert perdue dans une campagne reculée.

En ces temps de disette budgétaire, le tourisme social est « oublié ». Pire, c’est presque devenu un gros mot… En hôtellerie de plein air (c’est plus chic que camping !), « le plantage de toile » - façon Patrick Chirac dans le film « Camping » – devient difficile, supplanté par le mobile-home qui dépasse les 1000 € la semaine durant l’été.

Même les spécialistes du tourisme social - résidences et autres clubs de vacances – ont fortement augmenté leurs prix ces dernières années, contraints par la nécessité de rénover des établissements vieillissants, mais excluant du même coup une frange grandissante de vacanciers.

Chaque année, le baromètre Opodo/Raffour Interactif rappelle cette réalité qui ne semble plus émouvoir grand monde, alors même que chacun s’accorde à dire que les vacances sont désormais essentielles au bien-être, presque un besoin vital.

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Selon une étude américaine (encore une !) de Framingham Heart Study, prendre une semaine de vacances réduirait même les risques de faire une crise cardiaque de 30 % en permettant au cœur de se reposer…

« Il est important de continuer les aides aux départs. Les professionnels doivent également proposer des offres de prix plus larges, alors que l’on constate une tendance à la montée en gamme » commentait Guy Raffour il y a quelques semaines, lors de la livraison de l’édition 2024 du baromètre. Sera-t-il entendu ?

En attendant que les vacances soient remboursées par la sécurité sociale, j’ai trouvé une solution pour arrondir mes fins de mois et pouvoir m’offrir quelques jours de vacances : l’année prochaine, j’ouvre un cabinet d’audit et je me lance dans les sondages. Je peux même vous divulguer en avant-première les résultats : en 2026, pour les vacances d’été, les Français partiront majoritairement dans l’Hexagone… à la mer.