RH : les nouveaux enjeux de VVF [ABO]

Des multiples professionnels rencontrés depuis de nombreuses années, rares ont été ceux avec lesquels le contact m’a toujours semblé aussi simple et naturel qu’avec Damien Ponsot, le DRH du groupe VVF depuis mars 2024.

C’est à l’occasion d’une chronique publiée dans TourMaG en 2022 que Damien m’a contacté via les réseaux sociaux. Nous avons immédiatement sympathisé dès notre premier échange, tant Damien tout juste arrivé dans le groupe en tant que responsable recrutement et marque employeur semblait sincère et passionné par l’immensité de la tâche qui se présentait devant lui.

Nous avons convenu de travailler quasi immédiatement à la création d’un programme de formation dédié à de futurs dirigeants de villages vacances que j’ai accueillie, avec la petite équipe qui m’accompagnait alors, dans un Campus niçois. C’est en préparant les modules de formation et en détaillant les compétences à apporter à la future promotion que je me suis intéressé à l’histoire de VVF et à ses réalités de leader du tourisme social en France.

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L’entreprise, organisée depuis sa création au tout début de la 5ème République en 1959, est une association parapublique. Tout au long de ces soixante-cinq ans, VVF est devenu le premier opérateur touristique familial solidaire et durable en France. Parmi ses missions, l’une des plus importantes est la contribution au développement économique et social des territoires en proposant des séjours, des vacances et des loisirs accessibles à tous parmi plus de cent destinations dans une soixantaine de départements.

L’association accueille plus de 450.000 clients et emploie 650 salariés permanents (CDI, CDD, alternance et stage) et entre 2.500 et 3.000 saisonniers. Rapidement, les questions RH ont dépassé le strict cadre de ce programme de formation. J’ai découvert en Damien Ponsot un jeune DRH d’à peine 35 ans à l’époque, sportif, motivé par les challenges, sensible aux problématiques humaines. Il était avant responsable recrutement et de la marque employeur, puis chargé du développement RH du groupe.

L’un des premiers enjeux fut pour Damien Ponsot d’apporter de la cohérence et une certaine forme d’uniformisation aux pratiques RH et managériales, tant les sites et les structures lui semblaient nombreuses et diverses, entre le siège social à Clermont-Ferrand, des bureaux à Nantes, à Paris et sur la centaines de sites répartis sur l’ensemble du territoire national.

J’ai eu l’occasion de partager à plusieurs reprises avec Damien Ponsot quelques idées sur la stratégie RH de VVF et ses premiers objectifs et actions : amélioration du cadre de travail, organisation managériale visant à favoriser l’engagement des collaborateurs, travail sur la communication interne, adoption de la symétrie des attentions notamment en matière de recrutement, etc.

Sur le premier point, la qualité de vie au travail, l’enjeu était de rapprocher les sujets RH des missions de l’association que sont la solidarité, l’accessibilité et l’engagement devenus centraux dans la marque employeur. Cela se traduit notamment par la prise en compte des spécificités, des familles et de l’inclusion des salariés mais également des différentes formes de recrutement des collaborateurs.

VVF est ainsi associé à des évènements culturels ou sportifs, comme par exemple le festival du film de comédie à l’Alpe d’Huez et la Grande Odyssée (grande traversée des Alpes par des chiens de traineaux), qui confèrent au groupe une meilleure visibilité et une forte présence médiatique.

L’attention au collaborateur a été source d’une vision que j’ai partagée avec Damien à plusieurs reprises. Cette attention débute, au-delà des éléments de communication et de marketing, dès les premiers contacts et l’accueil des nouveaux salariés, le plus souvent saisonniers. Le « on boarding fait partie intégrante du process de recrutement » selon Damien Ponsot et ce « dès le premier rendez-vous avec le candidat. »

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VVF a développé comme de nombreux acteurs du tourisme des éléments qui permettent de garder un contact fréquent entre la signature du contrat et la prise de poste, un contact qui peut courir sur plusieurs mois. Le processus mérite d’être amélioré selon le DRH, malgré un travail collectif effectué pour harmoniser et améliorer la qualité du livret d’accueil remis ou envoyé à tout nouveau collaborateur.

Cette attention au collaborateur, ou collaboratrice, a constitué l’un des axes des évolutions RH du groupe à partir de 2023 et notamment dans le cadre des négociations entre la direction du groupe et les syndicats. Cela a été particulièrement vrai pour faciliter la parentalité et la vie des femmes dans l’entreprise.

Damien Ponsot cite plusieurs avancées significatives : la subrogation du congé paternité, l’autorisation d’absence dans le cadre de la PMA étendue au second parent, la rémunération par VVF de l’absence pendant cinq jours ouvrés d’une femme subissant une fausse couche (ainsi que le deuxième parent), la mise à disposition de protections menstruelles dans les sanitaires accessibles aux salariées et la mise en place d’un congé menstruel depuis janvier 2024 (deux jours d’arrêt de travail par mois) rémunéré par VVF sur présentation d’un certificat médical et ce valable une année. Enfin, un dispositif est proposé aux salariés devenus proches-aidants d’un parent ou d’un enfant malade.

Damien Ponsot défend l’idée d’une « approche holistique » de la notion de bien-être des salariés et de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, accompagnée « d’une communication claire, transparente et inclusive. »

Sur ce dernier sujet de l’inclusivité, VVF a créé VVI (Villages Vacances Inclusifs), une structure d’insertion professionnelle par le tourisme, dans la continuité de la mission de tourisme social d’accessibilité aux vacances pour tous et de soutien au développement économique des territoires. Sous la marque commerciale « La Belle Vie », VVF compte offrir à des personnes éloignées du monde du travail, la possibilité de prendre part à la construction de leur propre trajectoire professionnelle, de permettre à chacun de se révéler dans la dignité et de faire sa place dans la société.

VVF défend, pour Damien Ponsot, depuis toujours des valeurs universelles, « la justice sociale, la lutte contre la pauvreté, la création d’emplois non délocalisables, la liberté individuelle, l’épanouissement individuel et collectif. » VVI accompagne ainsi des personnes fragiles en leur permettant d’accéder à des emplois et des compétences dans les différents métiers du groupe, à savoir l’hébergement, la restauration, l’animation, l’accueil ou l’entretien du patrimoine.

Un premier VVI a été inauguré en Alsace, à Orbey et a accueilli 5 salariés en parcours d’insertion, une dizaine d’autres devrait voir le jour d’ici la saison 2026. Pour que initiative fonctionne, elle doit rencontrer le soutien des salariés des villages, et susciter un partenariat avec les associations et les structures d’insertion locales.

D’autres défis RH sont identifiés par Damien Ponsot d’ici 2026.

Le premier porte sur la formation des saisonniers et de leurs compétences. C’est un sujet clé dans un contexte sociétal encore complexe, même si les difficultés de recrutement sont moins importantes qu’aux lendemains du Covid. Après un travail de cartographie des métiers et des compétences au sein du groupe, une deuxième étape méthodologique a constitué à créer des référentiels de formation adaptés aux compétences clés spécifiques de chaque métier, principalement saisonnier.

Cela vaut notamment pour les compétences relationnelles et client dans les métiers de réception, bar et service. Damien Ponsot explique « que les entreprises commerciales doivent adopter les mêmes codes que leurs clients. » Bien entendu, le temps de formation ne peut pas être celui d’un programme de formation traditionnel. D’où l’importance de créer des modules de formation rapides et flexibles pour répondre aux besoins des saisonniers.

Auparavant VVF faisait appel à des organismes externes de formation. Désormais, c’est VVF Formation, l’école de formation permanente pour le développement des compétences et la professionnalisation des salariés du Groupe VVF et des saisonniers, qui s’en charge.

Le deuxième enjeu porte sur la digitalisation des processus administratifs. VVF travaille sur un projet de digitalisation incluant un SRH pour améliorer l'efficacité administrative. Ce projet sera opérationnel au début de l’année 2026. Il permettra d’alléger réellement les charges administratives des directeurs sur la gestion par exemple des plannings, des contrats, des absences, etc.

Leur charge mentale est trop happée encore par ces sujets. Cela souligne l’importance de la gestion du temps pour les directeurs et les managers et devrait leur permettre de consacrer une plus grande part de leur activité à la relation avec l’équipe et les clients. Ce projet de digitalisation et d’ajout d’un SRH au logiciel de paye devrait signifier pour l’entreprise des économies significatives.

Enfin, un autre enjeu sur lequel le groupe souhaite se pencher est bien entendu la stratégie data et les KPI pour mesurer et améliorer les performances. Le pilotage RH ne peut s’entendre qu’en lien avec le volume d’affaires et doit permettre de mener des actions immédiates. Un travail sur les data est en cours, avec la création d'une équipe en charge des indicateurs de gestion.

Ce travail est essentiel, la précision des données doit être qualitative pour permettre des mesures correctives efficaces mais aussi optimiser les performances et les résultats financiers. Ce travail autour de la donnée doit enfin donner l’occasion à l’entreprise d’améliorer la communication interne, en insistant sur la transparence des données, et de renforcer la marque employeur.

Brice Duthion est président - fondateur de l'agence "Les nouveaux voyages extraordinaires" (LNVE) spécialisée en conseil, conférences et communication.

Il intervient auprès de nombreux acteurs publics et privés dans ses domaines d'expertise : le tourisme et l'hospitalité, la culture et les patrimoines, les territoires et les politiques publiques.

brice.duthion@gmail.com