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Raouf Ben Slimane : "Il y a de quoi paniquer pour les tour-opérateurs et les agences de voyages"

L'édito du rédacteur en chef de novembre du MemberShip Club


Il est, avec son épouse Samia, le rédacteur en chef du mois de novembre du MemberShip Club. Raouf Ben Slimane, à qui nous avons demandé de rédiger un édito, aurait préféré parler de la reprise qui s'opérait dans le secteur pour les fêtes de fin d'année. A la place, il réagit à chaud aux différentes décisions gouvernementales qui sont venues, encore une fois, plomber un peu plus notre industrie...


Rédigé par Raouf Ben Slimane le Jeudi 2 Décembre 2021

Raouf Ben Slimane : "Il est à craindre que les réservations, toutes destinations confondues, poursuivent leur baisse entamée depuis 2 semaines…" - DR : Thalasso n°1
Raouf Ben Slimane : "Il est à craindre que les réservations, toutes destinations confondues, poursuivent leur baisse entamée depuis 2 semaines…" - DR : Thalasso n°1
Chers lectrices, chers lecteurs,

Cet édito tombe très mal, notamment pour moi car je dois faire attention à ce que j’écris, alors que je suis censé être encore sous l’effet de l’émotion suscitée par la décision de la France de passer l’Île Maurice en rouge écarlate !

Or, nous savons tous qu’il est déconseillé dans ses relations, aussi bien professionnelles que personnelles, de s’exprimer sous le coup de l’émotion.

J’aurais donc souhaité ne pas avoir à rédiger cet édito, mais comme je n’ai pas le choix, je vais essayer d’exprimer ma pensée sans rien trahir de mes convictions, avec mesure et sincérité - les propos ci-dessous étant purement subjectifs et personnels - ils n’engagent en rien la personne morale que je représente.

Panique à bord ! Ou pas ?

Au moment donc où je m’adresse à vous, j’ai fait l’effort de chercher et d’interroger des « sachants », de confiance, médecins (des vrais, pas ceux qui sont présents sur les plateaux de certaines chaînes TV) et deux politiques (côté LREM que je soutiens avec fierté car nos entreprises y doivent leur survie ! et ça s’appelle aussi la reconnaissance du ventre), pour comprendre ce qu'il se passe…

Pourquoi ce mouvement de panique mondiale, qui part du Japon en passant par Israël jusqu’au Maroc, où les pays, les uns après les autres, ferment leurs frontières ?

Et aujourd’hui la France qui en fait de même avec l’Île Maurice...

Pas un seul n’a été en mesure d’affirmer le danger représenté par le variant Omicron, par contre ils constatent tous la coïncidence de son apparition avec la « recrudescence mécanique » des infections presque partout dans le monde.

J’ai demandé aux médecins ce que veut dire « mécanique », la réponse a été cinglante, limpide, et surtout crédible pour le profane que je suis, puisque certains pays qui étaient jusque-là fermés ou quasi fermés depuis le début de la pandémie ont rouvert et ont donc connu une situation inquiétante au regard du nombre de malades (par exemple l’Ile Maurice justement).

Et d’autres qui, après avoir connu une baisse durant l’été, ont aussi connu une recrudescence des cas du fait de la baisse des températures (comme partout en Europe, y compris en France !).

"La situation de notre secteur doit justifier des mesures exceptionnelles"

Mais à aucun moment on ne m’a parlé ou bien fait comprendre que nous étions dans la même situation qu’avant l’arrivée du vaccin.

En clair, la situation est préoccupante, voire inquiétante, non pas en raison du nombre de décès, mais surtout en raison de l’absence de certitudes quant à ce variant, certes très fortement contagieux.

Force est de constater que les décisions sont donc prises principalement par précaution.

Face à cette situation il y a plusieurs postures :

- on peut adopter celle du nombriliste, égoïste qui s’imagine qu’il est seul sur Terre et que sa superbe entreprise performante, bla bla bla, est la seule affectée économiquement. Et je dois avouer que cela a été ma première réaction ! Des confrères et amis de la profession m’ont même entendu éructer sur une et même deux personnalités du gouvernement...

- ou bien une fois l’instinct primaire passé, se demander s’il y a réellement bien un vent de panique de la part des Etats ou bien si ce n’est pas nous-mêmes, les victimes économiques directes de cette situation, qui ne sommes pas en train de paniquer ? Et
à juste titre !

Je sais bien que l’exercice est compliqué pour tous les dirigeants de notre secteur (et aussi et surtout pour moi), qui avons la passion du métier et l‘amour de nos entreprises.

Mais si nous essayons de mettre l’aspect économique et financier de côté, est-ce que ces décisions en forme de yoyo, intempestives et prolongées dans le temps pour tenter d’enrayer la pandémie, seraient considérées de la même façon, aussi émotive, et ressenties de façon aussi brutale et injuste ? Evidemment non.

Mais une fois qu’on a dit ça, une fois qu'on a compris l’intérêt sanitaire supérieur et majeur des décisions sur l’intérêt économique, quand bien même elles seraient inadaptées ou excessives, que fait-on ?

Devons-nous attendre béatement le jour du jugement dernier ? Evidemment non

L'exception de la situation de notre secteur doit justifier des mesures exceptionnelles.

3 ans ferme !

Le réalisme doit nous amener au préalable à nous poser la seule question qui vaille concernant ce type de situation - à défaut de pouvoir prévoir l’avenir, nous devons imaginer des hypothèses réalistes de sortie de crise.

La question étant de savoir quand pouvons-nous imaginer raisonnablement une date minimale d’une amélioration certaine et
durable ?


Et à cette question, il y a une industrie qui a été la première à émettre des hypothèses, celle de l’aérien qui, aidée par des prévisionnistes aguerris aux études intégrant des paramètres divers et variés, a clairement indiqué une sortie de crise en 2023 (2023/24 pour être précis), ce qui paraissait loin pour le commun des mortels.

A présent, personne n’osera penser que cette hypothèse est pessimiste.

Nous avons donc encore au moins « un an à tirer » comme disent les prisonniers, soit une durée de galère et de complications en tout genre qui aura duré en tout près de 3 ans !

Pour autant, sommes-nous condamnés ? Evidemment non, nous vivrons de belles, voire très belles périodes de reprise, de reprises continues et certaines, mais nous aurons à vivre avec ce virus et ses contraintes aléatoires encore un an, voire deux ans avant que les gouvernements et les personnes finissent par s’y habituer et comprennent que tout comme la grippe, il ne partira jamais !

A bon entendeur !

Fort de ce constat, et donc de cette certitude que notre métier va rester affecté, il revient à nos instances professionnelles de faire valoir le péril majeur qui guette la profession si jamais le robinet du « quoi qu'il en coûte » venait à être fermé à notre secteur, le seul à ce jour fortement et constamment impacté depuis le début de la pandémie.

Pour prendre l’exemple de la fermeture de l'Île Maurice, je veux rappeler les conséquences financières immédiates pour les tour-opérateurs et les agences de voyages :

- annulation de tous les séjours du mois de décembre, qui est la période de pic des réservations et surtout la plus rentable en terme de marge ;

- perte de marges et donc menace de pertes au bilan ;

- gestion des annulations et des reports éventuels par l'ensemble du personnel avec un reste à charge ou une charge totale selon que l'entreprise est en APLD ou pas - bref des charges sur une activité qui ne rapporte plus rien à l’entreprise ;

- privation d’une grande partie des réservations sur le printemps 2022 et menace sur l’année 2022.


Et il y a une autre conséquence majeure dont l’onde sismique risque de nous toucher tous, sans exception et pas seulement les opérateurs programmant Maurice, qui est la perception ultra négative que peuvent avoir les Français de toutes ces décisions émanant de la France et des autres pays quant à la possibilité de pouvoir se projeter avec sérénité et certitude.

Il est à craindre que les réservations, toutes destinations confondues, poursuivent leur baisse entamée depuis 2 semaines… alors que nous espérions tous compter sur cette fin d année pour apporter encore plus d’équilibre dans nos comptes et que c'est maintenant que va se jouer 2022…

A présent, il faut comprendre qu’il y a de quoi paniquer pour les tour-opérateurs et les agences de voyages.

Les Entreprises du Voyage (EDV) et le Syndicat des Entreprises du Tour-Operating (Seto) ont pris du poids, de la crédibilité et de l'audibilité auprès des pouvoirs publics et on peut compter sur eux pour faire entendre raison si besoin était à nos dirigeants, pour faire de notre profession l’exception à la fin du « quoique qu'il en coûte », car il en va de l’avenir de centaines de milliers d'emplois, et parce que notre situation est exceptionnelle.

Et parce que les Français ont besoin de professionnels dont ils apprécient l’expertise, l'assistance et la couverture juridique qui leur est apportée en cas de défaillance du prestataire de service que nous sommes.

Raouf Ben Slimane
Président / CEO de Ôvoyages, Ôclub, Thalasso n°1


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