Le long du cap Sizun, l’Atlantique guide depuis toujours la vie des habitants… et le quotidien des touristes - DR : J.-F.R.
« L’homme n’est pas fait pour vivre là, pour supporter la nature à haute dose ». Gustave Flaubert l’a écrit à propos de la Pointe du Raz et force est de reconnaître que la violence des éléments ferait fuir bien des Terriens.
Ils sont là, pourtant, les « capistes », 17 000 environ, qui ont fait de ce territoire « impossible » leur havre de vie.
Douarnenez, déjà, annonce les tourments de la péninsule. Cité portuaire et ouvrière, la sardine fit la fortune des conserveurs - plus rarement des pêcheurs. Non sans remous.
A trois heures de mer, au plus, de l’entrée de la baie, des générations de marins ont traqué ce poisson gras que les épouses (les Penn Sardin) serraient ensuite dans des boîtes, à l’usine.
Leur révolte en 1924 contre leurs conditions de travail est restée dans les mémoires. Pas étonnant que cette ville fut la première en France à porter un communiste à sa tête, en 1921 !
Les conserveries Connétable, Petit Navire et Kerbriant sont toujours en activité mais travaillent désormais des poissons venus d’ailleurs.
Les fresques à l’étage des Halles exaltent cette vie maritime et la belle revue Chasse-Marée siège encore sur le port.
Mais le départ en février 2015 de la conserverie Chancerelle, présente en cœur de ville depuis 1853, signe, avec la fin des effluves sardinières dans la rue, un changement d’époque irréversible.
Il ne faudrait pas que le splendide Port-Musée de Douarnenez ne soit demain qu’un hymne au passé.
Ils sont là, pourtant, les « capistes », 17 000 environ, qui ont fait de ce territoire « impossible » leur havre de vie.
Douarnenez, déjà, annonce les tourments de la péninsule. Cité portuaire et ouvrière, la sardine fit la fortune des conserveurs - plus rarement des pêcheurs. Non sans remous.
A trois heures de mer, au plus, de l’entrée de la baie, des générations de marins ont traqué ce poisson gras que les épouses (les Penn Sardin) serraient ensuite dans des boîtes, à l’usine.
Leur révolte en 1924 contre leurs conditions de travail est restée dans les mémoires. Pas étonnant que cette ville fut la première en France à porter un communiste à sa tête, en 1921 !
Les conserveries Connétable, Petit Navire et Kerbriant sont toujours en activité mais travaillent désormais des poissons venus d’ailleurs.
Les fresques à l’étage des Halles exaltent cette vie maritime et la belle revue Chasse-Marée siège encore sur le port.
Mais le départ en février 2015 de la conserverie Chancerelle, présente en cœur de ville depuis 1853, signe, avec la fin des effluves sardinières dans la rue, un changement d’époque irréversible.
Il ne faudrait pas que le splendide Port-Musée de Douarnenez ne soit demain qu’un hymne au passé.
Rochers cisaillés, granits entaillés
La côte nord se déploie très vite, sitôt quittée la ville. Une côte de pointes et de falaises, tourmentée et sauvage.
Le ciel y est souvent bas et le crachin tenace réveille les senteurs de lande et d’herbe grasse, sous le jaune des ajoncs et le rose printanier des arméries maritimes.
Nature, ce littoral met par précaution les habitants à distance.
De l’éminence de Leydé à celle du Van, tout n’est que rochers cisaillés, granits entaillés, verticalité minérale. Le vent en raffole, comme à la Pointe du Millier.
L’avifaune aussi, protégée à la réserve du Cap Sizun, dans le vacarme des vagues.
A la Pointe de Brézellec, plus avancée, les falaises frisent les cent mètres de haut et des fous de Bassan dansent dans les courants ascendants.
A celle du Van, l’homme a construit la chapelle Saint-They. A l’abri dans son enclos de pierres, c’est un ultime défi chrétien lancé à la fureur des flots. Peu d’humains arpentent ce tracé septentrion, hormis les forçats volontaires du GR 34.
La Pointe de la Chèvre, au large, sur la presqu’île de Crozon, paraît en comparaison presque douce… Sous le soleil, toutefois, l’eau reste froide mais prend un joli ton translucide.
Les ports-abris de Pors Théolen, du Vorlenn, de Bestrée, microscopiques refuges pour embarcations chahutées, deviennent soudain accueillants, tout comme la baie des Trépassés, au nom pourtant sinistre.
Le ciel y est souvent bas et le crachin tenace réveille les senteurs de lande et d’herbe grasse, sous le jaune des ajoncs et le rose printanier des arméries maritimes.
Nature, ce littoral met par précaution les habitants à distance.
De l’éminence de Leydé à celle du Van, tout n’est que rochers cisaillés, granits entaillés, verticalité minérale. Le vent en raffole, comme à la Pointe du Millier.
L’avifaune aussi, protégée à la réserve du Cap Sizun, dans le vacarme des vagues.
A la Pointe de Brézellec, plus avancée, les falaises frisent les cent mètres de haut et des fous de Bassan dansent dans les courants ascendants.
A celle du Van, l’homme a construit la chapelle Saint-They. A l’abri dans son enclos de pierres, c’est un ultime défi chrétien lancé à la fureur des flots. Peu d’humains arpentent ce tracé septentrion, hormis les forçats volontaires du GR 34.
La Pointe de la Chèvre, au large, sur la presqu’île de Crozon, paraît en comparaison presque douce… Sous le soleil, toutefois, l’eau reste froide mais prend un joli ton translucide.
Les ports-abris de Pors Théolen, du Vorlenn, de Bestrée, microscopiques refuges pour embarcations chahutées, deviennent soudain accueillants, tout comme la baie des Trépassés, au nom pourtant sinistre.
Saint-Pierre-et-Miquelon, à 3 700 km…
Parce que la Pointe du Raz est un site unique, la foule s’y presse en saison.
Non, ce n’est pas, pour quelques mètres seulement, l’ultime cap ouest de la France, titre revenant à la pointe Saint-Mathieu.
Mais c’est réellement la dernière poussée du plateau continental européen vers le large. Prochain arrêt, Saint-Pierre-et-Miquelon, 3 700 km !
Flaubert avait raison, l’homme n’est pas fait pour vivre ici. Sur cette langue plate, la mer vous englobe, phagocyte, étouffe.
Aucune terre à l’horizon si ce n’est la galette de Sein et les phares-vigies de la Vieille, Tévennec et Ar Men. Il faut être ligneur de bar pour s’aventurer là, comme le fait la petite trentaine de pêcheurs d’Audierne, dont c’est le quotidien.
Seul à la barre avec ses lignes, le marin danse dans le redoutable raz de Sein. Les vents dépassent souvent les 100 km/h.
Observer un frêle esquif franchir, moteur à bloc, le terrible Trouz Yar, courant d’eau ouvert entre les ultimes rochers du Raz, mérite d’accorder à jamais le respect à tous les pêcheurs du monde.
Non, ce n’est pas, pour quelques mètres seulement, l’ultime cap ouest de la France, titre revenant à la pointe Saint-Mathieu.
Mais c’est réellement la dernière poussée du plateau continental européen vers le large. Prochain arrêt, Saint-Pierre-et-Miquelon, 3 700 km !
Flaubert avait raison, l’homme n’est pas fait pour vivre ici. Sur cette langue plate, la mer vous englobe, phagocyte, étouffe.
Aucune terre à l’horizon si ce n’est la galette de Sein et les phares-vigies de la Vieille, Tévennec et Ar Men. Il faut être ligneur de bar pour s’aventurer là, comme le fait la petite trentaine de pêcheurs d’Audierne, dont c’est le quotidien.
Seul à la barre avec ses lignes, le marin danse dans le redoutable raz de Sein. Les vents dépassent souvent les 100 km/h.
Observer un frêle esquif franchir, moteur à bloc, le terrible Trouz Yar, courant d’eau ouvert entre les ultimes rochers du Raz, mérite d’accorder à jamais le respect à tous les pêcheurs du monde.
La révolte de Plogoff
En comparaison, la côte sud du cap Sizun parait presque tranquille.
Sauf à Feunten Aod et à Pors Loubous, où la configuration tourmentée des lieux a été source d’aventures.
Le monument Pierre Brossolette rappelle que ces ports-abris jouèrent un rôle clef dans l’embarquement et le débarquement secret de résistants, pendant la seconde guerre mondiale.
Juste à côté, d’autres combattants, les habitants de Plogoff, lèveront violemment le bouclier à la fin des années 1970 contre le projet nucléaire.
Désormais pacifiés, les deux ports accueillent des barques de pêcheurs que l’on remonte vite au treuil, avant les coups de vent. Un bon alibi pour se retrouver entre hommes et boire le pastis dans une cahute improvisée…
Si l’on parle de littoral tranquille, c’est que passé Plogoff, la côte s’apaise d’un coup. Moins de falaises, plus de plages (Loc’h, Cabestan…) et un enchaînement de lotissements à maisons blanches bretonnantes qui ne resteront pas, hélas, dans les annales.
Au milieu de cette côte « touristisée », se tient Audierne. 2 200 habitants se tassent au fond d’un port qui constitue le centre commercial de la péninsule, à l’embouchure du Goyen. Peu flamboyante, l’économie du Cap Sizun rejaillit sur une cité qui a connu des jours meilleurs.
Sauf à Feunten Aod et à Pors Loubous, où la configuration tourmentée des lieux a été source d’aventures.
Le monument Pierre Brossolette rappelle que ces ports-abris jouèrent un rôle clef dans l’embarquement et le débarquement secret de résistants, pendant la seconde guerre mondiale.
Juste à côté, d’autres combattants, les habitants de Plogoff, lèveront violemment le bouclier à la fin des années 1970 contre le projet nucléaire.
Désormais pacifiés, les deux ports accueillent des barques de pêcheurs que l’on remonte vite au treuil, avant les coups de vent. Un bon alibi pour se retrouver entre hommes et boire le pastis dans une cahute improvisée…
Si l’on parle de littoral tranquille, c’est que passé Plogoff, la côte s’apaise d’un coup. Moins de falaises, plus de plages (Loc’h, Cabestan…) et un enchaînement de lotissements à maisons blanches bretonnantes qui ne resteront pas, hélas, dans les annales.
Au milieu de cette côte « touristisée », se tient Audierne. 2 200 habitants se tassent au fond d’un port qui constitue le centre commercial de la péninsule, à l’embouchure du Goyen. Peu flamboyante, l’économie du Cap Sizun rejaillit sur une cité qui a connu des jours meilleurs.
Chapelles aux clochers fins
Le Goyen, fleuve côtier, donne enfin l’occasion de découvrir le cap intérieur, en remontant son cours.
Tous les capistes ont eu un jour maille à partir avec l’océan mais même hors d’atteinte des vagues, il a façonné les âmes de ces hameaux en K, Kerlévesq, Kerbrat, Kespern, Kergonvan, Kerennec.
En témoignent ces dizaines de chapelles aux clochers fins, Saint-Conogan, Saint-Tremeur, Sainte-Espérance, Landuguentel, Lannourec… On se doute que leurs curés ont invoqué plus qu’ailleurs les foudres divines pour expliquer les naufrages, condamnant leurs ouailles à la contrition éternelle pour des péchés inavouables peut-être imaginaires.
Même Pont-Croix n’échappe pas au goût de l’océan. Sur le Goyen, le moulin à mer rappelle la force des marées, à l’entrée du vieux quartier de Kerydreuf.
Depuis le haut village, ancien bastion des seigneurs de Pont-Croix et Rosmadec, de jolies voies pavées (comme la rue Chère) dévalent vers le fleuve, tel un appel subliminal à rejoindre ensuite l’Atlantique.
Quelques kilomètres au sud-est d’Audierne, la frontière avec le Pays Bigouden ne peut être manquée. Après la nécropole du Souc’h et la grotte de Menez Dregan (on a retrouvé ici une des plus anciennes preuves de la maîtrise du feu par l’homme), le mini port de Pors Poulhan affiche sa fière statue de bigoudène, respirant malgré elle les odeurs de goémon de la baie.
C’est la fin subite d’un territoire à grand spectacle, quasi insulaire et à la force magnétique.
Pour aller plus loin : www.finisteretourisme.com/
Tous les capistes ont eu un jour maille à partir avec l’océan mais même hors d’atteinte des vagues, il a façonné les âmes de ces hameaux en K, Kerlévesq, Kerbrat, Kespern, Kergonvan, Kerennec.
En témoignent ces dizaines de chapelles aux clochers fins, Saint-Conogan, Saint-Tremeur, Sainte-Espérance, Landuguentel, Lannourec… On se doute que leurs curés ont invoqué plus qu’ailleurs les foudres divines pour expliquer les naufrages, condamnant leurs ouailles à la contrition éternelle pour des péchés inavouables peut-être imaginaires.
Même Pont-Croix n’échappe pas au goût de l’océan. Sur le Goyen, le moulin à mer rappelle la force des marées, à l’entrée du vieux quartier de Kerydreuf.
Depuis le haut village, ancien bastion des seigneurs de Pont-Croix et Rosmadec, de jolies voies pavées (comme la rue Chère) dévalent vers le fleuve, tel un appel subliminal à rejoindre ensuite l’Atlantique.
Quelques kilomètres au sud-est d’Audierne, la frontière avec le Pays Bigouden ne peut être manquée. Après la nécropole du Souc’h et la grotte de Menez Dregan (on a retrouvé ici une des plus anciennes preuves de la maîtrise du feu par l’homme), le mini port de Pors Poulhan affiche sa fière statue de bigoudène, respirant malgré elle les odeurs de goémon de la baie.
C’est la fin subite d’un territoire à grand spectacle, quasi insulaire et à la force magnétique.
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