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Liste Noire des Compagnies aériennes : attention à la responsabilité du professionnel du voyage

La chronique de Me David Sprecher (*)


Le 14 décembre 2005 a été promulgué le Règlement (CE) 2111/05 du Parlement Européen et du Conseil. Comme tous les règlements communautaires celui-ci a force au sein de chaque Etat membre. Ce Règlement communautaire est la résultante d’une action entreprise par l’Union européenne ayant pour but d’avertir les passagers des transporteurs aériens assurant leur vol.


Rédigé par David Sprecher le Mardi 26 Novembre 2019

Liste noire : Il est impératif que chaque professionnel non seulement consulte mais encore conserve la liste et la consulte régulièrement - Depositphotos.com beawolf
Liste noire : Il est impératif que chaque professionnel non seulement consulte mais encore conserve la liste et la consulte régulièrement - Depositphotos.com beawolf
Y est annexée une liste des transporteurs interdits d’exploitation de vols au sein de l’Union Européenne et sur l’ensemble du territoire des Etats membres. La liste actualisée cette semaine est consultable via le lien suivant : https://ec.europa.eu/transport/sites/transport/files/air-safety-list_fr.pdf

Il est essentiel de bien maîtriser les fondements du Règlement et ses implications. De même il est fortement conseillé à tous les professionnels du voyage d’imprimer, de lire et de conserver ce document.

Un petit avion de ligne de la compagnie congolaise Busy Bee s’est écrasé ce dimanche 24 novembre à Goma en République démocratique du Congo (RDC).

L’appareil, un Dornier-228, qui se dirigeait vers la ville de Beni, à 350 km au nord de Goma, serait tombé une minute après son décollage. A son bord, dix-neuf personnes dont deux membres d’équipage, sont au nombre des victimes. Auxquelles il faut ajouter dix personnes habitant sur le lieu du crash, le quartier de Biréré.

Il est extrêmement important de noter que cette compagnie comme toutes celles de RDC se trouvent sur la Liste Noire. Un tel accident aurait pu avoir des conséquences désastreuses si l’une des victimes était un client d’agence de voyages.

Rappel des principes de base du Règlement

  • Alors que le premier chapitre présente de manière générale les dispositions du Règlement et le second la Liste Noire, le troisième chapitre traite des aspects d’information aux passagers. Il constitue un élément fondamental du Règlement.

  • Il est établi une liste communautaire des transporteurs qui font l’objet d’une interdiction d’exploitation sur le territoire des Etats membres et ce, sur la base de critères communs fondés sur les normes de sécurité applicables.

  • La liste communautaire est mise à jour pour :
    - prononcer une interdiction d’exploitation à l’encontre d’un transporteur,
    - rayer le nom de ce transporteur de la liste,
    - modifier les conditions d’une interdiction d’exploitation.

Attention :
En cas d’urgence, chaque Etat membre est libre de prendre des mesures exceptionnelles à l’encontre d’un transporteur aérien non listé.
Cependant, cet Etat doit en informer immédiatement les autres Etats et introduire une demande de rectification de la liste des compagnies bannies.

L’information aux passagers

Champ d’application

Les dispositions du chapitre s’appliquent au transport aérien de passagers lorsque le transport débute dans un aéroport situé au sein de l’Union Européenne, de la Suisse, de la Norvège et de l’Islande.

Ce qui sous-entend que le passager décolle pour son premier vol d'un aéroport européen. Le règlement s’applique pour tous les segments d’un tel billet et notamment pour les segments suivants :

Le vol est au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un Etat membre (exemple : un vol Lyon Tunis)

Le vol est à destination d’un aéroport situé sur le territoire d’un Etat membre. (exemple : un vol Le Caire Paris faisant partie d’un billet avec commencement du voyage par exemple à Rome)

Le vol est au départ d’un état tiers et à destination d’un tel état. (exemple : un vol New York Montréal dans le cadre d’un billet Bruxelles Montréal via New York).

Le chapitre s’applique à TOUS les vols qu’ils soient réguliers, low cost ou charter.

L’information

Au moment de la réservation, le transporteur, l’organisateur de voyage et l’agent de voyages ont pour obligation d’informer le passager de l’identité du ou des transporteurs aériens effectifs !

Si l’identité du transporteur aérien effectif n’est pas encore connue, il faut tout de même donner, le nom du ou des transporteurs susceptibles d’assurer le vol concerné et le lui confirmer dès lors que l’identité est effective.

En cas de changement du transporteur effectif, le passager doit en être informé dans les meilleurs délais et ce quelle qu’en soit la cause.

Il est de la responsabilité du transporteur aérien ou de l’organisateur de voyages d’informer l’agent de voyage concerné de l’identité du transporteur aérien effectif ou de son changement.

Droit au remboursement ou au réacheminement

• Le Règlement n’affecte pas le droit au remboursement ou au réacheminement prévu dans le Règlement 261/2004 (exemples : retards, overbooking, annulation etc…)

Dans quels cas :

Lorsque le transporteur aérien effectif notifié au passager a été inscrit sur la liste communautaire et a fait l’objet d’une interdiction d’exploitation ce qui a conduit à l’annulation du vol concerné ou qui aurait conduit à une telle annulation si le vol avait été assuré dans la Communauté ,

Lorsque le transporteur aérien effectif notifié au passager a été remplacé par un transporteur qui a fait l’objet d’une interdiction d’exploitation qui a conduit à l’annulation du vol concerné ou qui aurait conduit à une telle annulation si le vol avait été assuré dans la Communauté

Quels sont les droits du passager ?

Dans ces deux cas, le passager aura droit au remboursement du billet ou au réacheminement à son choix si ce dernier décide de ne pas emprunter le vol qui n'a pas été annulé.

Le Règlement précise un point capital :

L'article 13 du Règlement 261/2004 est aussi d'application et permet donc de demander "réparation" à des tiers pour les dommages payés aux passagers, par exemple de la part d'organisateurs de voyages (TO et producteurs) comme indiqué dans cet article :

Article 13
Droit à la réparation des dommages

Lorsqu'un transporteur aérien effectif verse une indemnité ou s'acquitte d'autres obligations lui incombant en vertu du présent règlement, aucune disposition de ce dernier ne peut être interprétée comme limitant son droit à demander réparation à toute personne, y compris des tiers, conformément au droit national applicable. En particulier, le présent règlement ne limite aucunement le droit du transporteur aérien effectif de demander réparation à un organisateur de voyages ou une autre personne avec laquelle le transporteur aérien effectif a conclu un contrat. De même, aucune disposition du présent règlement ne peut être interprétée comme limitant le droit d'un organisateur de voyages ou d'un tiers, autre que le passager avec lequel un transporteur aérien effectif a conclu un contrat, de demander réparation au transporteur aérien effectif conformément aux lois pertinentes applicables.

Les implications au niveau de l’agent de voyages

Il est impératif de suivre l’évolution de la liste annexée au Règlement, qui peut être sujette à modifications.

Les listes actualisées sont consultables sur le site https://ec.europa.eu/transport/sites/transport/files/air-safety-list_fr.pdf

Il est impératif de différencier le transporteur effectif du transporteur marketing.

Quelles sont les différences :

Le transporteur effectif est celui qui effectue le vol tant au niveau de l’appareil (suivant son enregistrement au registre) que de son équipage.

Le transporteur marketing est celui qui vend le vol mais ne l’effectue pas. C’est le cas des vols en partage de code (Code Share). Vous retrouvez ces informations sur le GDS !

Conclusions pratiques

Les implications de ce Règlement peuvent être très importantes au niveau du professionnel du voyage.

En effet, d’une part la responsabilité financière du professionnel au cas où le client désire annuler son vol et notamment dans le cas précis de la vente de voyages forfait et ensuite, la responsabilité pénale peut être engagée en cas d’accident aérien.

Il est donc impératif que chaque professionnel non seulement consulte mais encore conserve la liste et la consulte régulièrement.

Me David Sprecher est avocat spécialisé dans le droit du tourisme et de l’aviation civile et par ailleurs avocat du CEDIV et membre de l’International Forum of Travel and Tourism Lawyers et du World Airport Lawyers Association.

Il est Senior Lecturer en droit du tourisme et de l’aviation civile au sein d’universités et écoles supérieures de commerce et également référent en régulation aérienne pour institutions et Parlement.

Les informations contenues dans cet article ne peuvent en aucun cas servir de conseils juridiques et tout lecteur doit recourir aux services d’un avocat avant d’engager toute action. Les textes de loi sont disponibles aux professionnels du tourisme sur simple demande à david.sprecher@sprecher-legal.eu

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