Aérien : l’Arabie saoudite accélère !

C’est un impressionnant cortège de plus de 20 limousines noires qui s’est présenté ce mercredi aux portes des installations « Airbus » à Toulouse.

À son bord une importante délégation du groupe Saudia dont le Directeur général Ibrahim Al-Omar, qui venait honorer et enrichir une méga commande passée au mois de mai dernier et célébrer une coopération avec l’avionneur pour un « avenir ambitieux » du royaume dans le secteur aéronautique.

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Cette commande de 2024 finalisée avec Airbus est le plus important contrat aéronautique de l'histoire de l'aviation saoudienne, portant sur 105 appareils de la famille A320neo.

Le contrat attribue 54 A321neo à Saudia et, 51 (12 A320neo et 39 A321neo ) à sa filiale de vols intérieurs flyadeal qui en 2019 avait annulé sa commande de 30 Boeing 737 MAX auprès du constructeur américain alors en pleine tempête à la suite des deux crashs des ces appareils.

La livraison du premier appareil est prévue pour 2026, et le contrat stipule que toutes les livraisons seront achevées d'ici 2032. Mais ce n’est pas tout et lors de cette journée à Toulouse, Ibrahim Al-Omar, le Directeur général du groupe a annoncé une nouvelle commande constituée de 10 A330neo pour sa filiale flyadeal, la dotant ainsi pour la première fois de gros porteurs.

Pour les Saoudiens cette commande est plus qu’une simple augmentation de la flotte.

En venant nombreux à Toulouse alors que les avions ne sont pas encore construits, les dirigeants de Saudia veulent mettre à profit cette visite pour communiquer sur la contribution du groupe à « favoriser les passerelles entre les continents et renforcer les liens stratégiques et diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Europe » selon un communiqué.

Une diplomatie par les ailes en quelque sorte puisque toujours selon le communiqué remis à la presse, ce contrat et cette visite « constituent la pierre angulaire d'échanges culturels et de partenariats éducatifs plus approfondis, renforçant la compréhension mutuelle et favorisant des relations bilatérales à long terme.

Ce partenariat souligne l'importance stratégique des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Europe, renforçant ainsi les engagements en faveur de la stabilité régionale et de la coopération mondiale. »

Depuis son arrivée aux commandes du royaume il y a 10 ans le Prince héritier d’Arabie Saoudite Mohammed ben Salmane qu’on appelle souvent MBS à la volonté de révolutionner son pays, changer l’image du royaume qui avait une réputation austère avec un islam rigoriste, et entamer des réformes sociétales.

Un début de règne bien mal commencé avec l’horrible assassinat d’un journaliste dissident, Jamal Khashoggi, étranglé, découpé, et dissous à la soude au consulat saoudien d’Istanbul en 2018.

Une tâche indélébile, mais l’indignation semble être passée et le pays regarde vers le futur avec ce plan ambitieux baptisé « Vision 2030 » qui vise entre autres à transporter 330 millions de visiteurs d'ici 2030, dont 150 millions de touristes, 30 millions de pèlerins et relier plus de 250 destinations dans le monde.

Faire du Royaume une plaque tournante du divertissement, du sport et des grands événements, renforçant ainsi son influence mondiale.

Rappelons aussi que ce pays, grand comme quatre fois la France, est un géant comparé aux autres royaumes qui l’entourent avec une population de 36 millions d’habitants, dont un tiers d’étrangers.

Dans ce contexte d’ouverture physique, culturelle et sociétale au monde et qui, c’est vrai, commence à progresser, le groupe Saudia ne devrait plus être seul dans les mois qui viennent.

La nouvelle compagnie Riyadh Air va bientôt lancer ses premiers vols au départ de sa base de Riyad. Compagnie d’État lancée à coups de milliards et dirigé par le britannique Tony Douglas, (ancien dirigeant d’Etihad Airways), elle a, déjà passé commande, en ce qui la concerne, de 130 appareils chez Boeing (pour les gros porteurs) et Airbus dans la famille A321neo.

Elle affiche de très grandes ambitions, se voulant être une des meilleures du monde et qui, à l’inverse des autres compagnies du Golfe, veut fonctionner dans une logique de HUB, pour relier Riyad, la capitale du Royaume au Monde.

« Ce n’est pas le cas aujourd’hui. La Capitale est mal desservie » nous confiait Tony Douglas lors du salon du Bourget en juin 2023.
Elle vise 100 destinations et 30 millions de passagers par an d’ici 2030.

Ses avions ne sont pas encore arrivés, mais déjà la compagnie communique sur son site et nous présente de très beaux intérieurs avec une classe « Affaires », une « Prémium Economy » et une « Economy ».

Concurrence ou complémentarité avec Saudia ? « Aujourd'hui, le but est de mettre le paquet sur les ouvertures de lignes et le nombre de vols de et vers le pays pour accompagner Vision 2030, la rentabilité, pour l’instant est secondaire », confiait ce mercredi à Toulouse un observateur avisé.

TourMaG – Une nouvelle compagnie , Riyadh Air a vu le jour dans votre pays. Comment la considérez-vous ? Complémentaire ou concurrente ?

Abdullah Mohammed Alshahrani : Je vais répondre à votre question en deux temps et avec ma casquette du Groupe Saudia puis celle de Saudia Airlines.

Comme vous le savez, le groupe Saudia compte plusieurs sociétés et propose de très nombreux services aéronautiques à ses clients. Nous disposons de Saudia Technic, Saudia Ground Services, Saudia Catering et Saudia Cargo. Riyadh Air est un client.

Nos collègues de Riyadh Air, ont déjà signé avec Saudia Technic, Catering et Saudia SGS. Donc, pour le groupe, ils sont un client du groupe Saudia. Mais pour la compagnie Saudia et sa filiale flyadeal, oui c’est un compétiteur et il y aura une concurrence que nous respecterons.

Mais vous savez, avec les prévisions du plan « Vision 2030 » en termes de volumes, il y aura une synergie entre Saudia et Riyadh Air. Nous travaillons tous deux dans le cadre d'une stratégie appelée « Saudia Aviation Strategy ». Cette stratégie prévoit que Saudia se concentrera progressivement sur Djeddah tandis que Riyadh Air assurera ses vols au départ de Riyad.

TourMaG – À propos de Riyadh Air et de ses objectifs de concurrencer les grandes compagnies du Golfe, on évoque parfois un service à bord avec la possibilité de boire de l’alcool, est-ce envisageable aussi pour Saudia ?

Abdullah Mohammed Alshahrani : Je ne suis pas d’accord avec vous et je n’ai vu aucune déclaration officielle de Riyadh Air à ce sujet. Chez Saudia, nous continuerons à respecter nos valeurs et à y croire. Nous croyons en notre culture et nous la perpétuerons donc tout en étant plus avancés en technologie et en expérience client.

Je peux vous dire que l’absence d’alcool n’a jamais affecté notre image ni notre activité.

TourMaG – J’ai vécu à Djeddah il y a 10 ans. Si je reviens aujourd’hui, vais-je voir des changements dans votre pays ?

Abdullah Mohammed Alshahrani : Oui, bien sûr. Et je peux dire que le changement ne se produit pas mois après mois, mais jour après jour.
Si vous visitez l'Arabie saoudite en avril, et que vous y retournez en mai, vous constaterez d'autres changements positifs.

Avec la vision 2030 dirigée par le prince Mohammed ben Salmane, nous avons senti que chaque Saoudien, ainsi que ceux qui aiment l'Arabie saoudite, ressentaient l'impact positif de ces objectifs et de nos classements mondiaux, en termes de débit, d'internet, d'exportations, et de nombreux objectifs qui deviennent tous réalisables. On le sent. Avec plus de dirigeants, de jeunes dirigeants, le pays est devenu jeune, très vite.

TourMaG – Plus de places pour les femmes aussi ?

Abdullah Mohammed Alshahrani : Oui exactement : une véritable émancipation et ce n’est pas juste de la propagande. Vous voyez, certains de mes collègues venus ici à Toulouse sont des femmes, et pas seulement des spécialistes, mais aussi des managers, et des cadres. Une véritable autonomisation pour les femmes, une véritable autonomisation pour les jeunes. On est à la page !