Le voyage d’affaires renoue avec les tendances d'avant covid

Croissance molle, inflation maîtrisée, dette publique élevée, incertitudes géopolitiques, mais aussi politiques… Des paramètres macroéconomiques avec lesquels les acteurs du voyage d’affaires et les entreprises doivent composer cette année.

Le baromètre 2024 d’EPSA révèle de nombreux défis, dont une distribution complexifiée avec la mise en place de NDC et la poursuite de consolidation.

Un environnement incertain qui n’empêche pas American Express Global Business Travel de réaliser une grosse performance avec un chiffre d’affaires en progression de +24% versus 2023, notamment dû au rachat d’Egencia en 2021.

Si la fusion entre CWT et American Express se concrétise, « les CA d’affaires des deux TMC représenteraient 45 milliards d’euros, soit trois fois plus que le troisième acteur global BCD Travel », souligne Christophe Roth, directeur associé chez EPSA.

L’aérien enregistre également de beaux résultats. Selon le baromètre EPSA, 5Md de passagers* se déplaceront en avion d’ici la fin de l’année, sur les segments du corporate et du loisir. Un record.

Air France a retrouvé ses capacités de 2019 au pic de l’été. « L’Asie pèche toujours, principalement la Chine », précise Vincent Audusseau, directeur des ventes corporate d'Air France, qui pointe également du doigt l’embargo russe.

Le déploiement de NDC s’est accéléré ces derniers mois. A date, 73 compagnies aériennes ont adopté NDC, selon EPSA.

« Le taux d’adoption en France est de 46%, mais avec des disparités selon les segments, précise le directeur des ventes corporate d'Air France, avant d’ajouter : S’il est inférieur sur le corporate, le taux d’adoption a doublé entre avril (4%) et avril (8%). »

La surcharge GDS Air France devrait être en place au 1er janvier 2025. Si la distribution évolue avec le déploiement de NDC, le modèle économique des agences de voyages d’affaires, lui, n’évolue pas.

« Nous avons proposé des forfaits, ça n’a pas fonctionné. Nous sommes toujours sur un modèle transactionnel », explique Clarisse Sounillac, Directrice commerciale France chez American Express Global Business Travel.

Le montant de la taxe, initialement de 13€, est désormais fixé à 24€. Pour autant, Air France promet à travers NDC de nombreux avantages dont un contenu enrichi et une tarification continue, qui permettra des économies de 10 à 15€ sur le moyen-courrier, 70 à 100€ sur le long-courrier et entre 150 et 200€ sur l’affaire.

Le secteur poursuit lui aussi sa consolidation, après le rachat d'ITA Airways par Lufthansa et le Ministre italien de l'économie et des finances, Tap Portugal sera-t-elle la prochaine sur la liste ?

*selon un panel représentatif de 58 clients sur les périodes janvier à juin 2024 vs janvier à juin 2023.

Le ferroviaire a lui aussi le vent en poupe. La SNCF a enregistré un bénéfice net de 143 millions d'euros pour le premier semestre 2024.

Un choix décarboné qui séduit les Français, alors que de l’autre côté de la frontière, en Allemagne comme en Italie, les opérateurs accumulent les dettes et une inflation de 7,2% sur les trajets domestiques et 4,5% en Europe entre le premier semestre 2023 et 2024.

2024 aura été marquée par le déploiement de l’offre Ouigo, cet été, dans les agences corporate. « 150 000 billets ont été vendus cet été. Le rendez-vous a lieu maintenant, à la rentrée », affirme Frédéric Laurent-Miel, directeur distribution, entreprises et agences de voyages.

Pour rappel, Ouigo va monter en puissance et représentera 30% de l’offre TGV en 2027 contre 20% aujourd’hui.

L’heure du bilan des JO a sonné pour l’hôtellerie. « Alors que les prévisions annonçaient -20% de réservation en juin et un chiffre d’affaires en retrait de 26%, il y a eu un rattrapage fort, avec trois milliards de visiteurs. Le prix moyen a plus que doublé en Ile-de-France et le taux d’occupation est passé de 75% à 85% », se félicite Ziad Minkara, PDG de CDS Groupe, marketplace de l'hôtellerie d'affaires.

Châteauroux, Lille ou encore Marseille, villes hôtes des Jeux ont profité de l’engouement pour l’événement mondial, au détriment de la côté Atlantique et de la Bretagne.

Le premier semestre 2024, a marqué un retour à plus de stabilité des prix et des baisses à Paris sur le segment économique (2 et 3 *) selon un baromètre mené en partenariat avec MKG et CDS Groupe.

La fin d’année sera plus incertaine. « Nous sommes dans une période de renégociation propice aux acheteurs », note Ziad Minkara.

L’Europe connaît également un retour à plus de modération tarifaire sur le premier semestre 2024, mais avec des exceptions notables.

Avec 29,8 milliards de dépenses de travel en expense en France, l’exercice 2024 a permis de retrouver la dépense préCOVID. L’inflation cumulée a compensé la baisse durable de volumes (-20% soit un voyage sur cinq).

« Le marché du voyage d’affaires en France renoue avec une stabilité globale, tendance qui devrait se poursuivre en 2025. Nous anticipons une hausse de +3,5%, malgré les nombreuses incertitudes économiques », conclut Christophe Roth, directeur associé chez EPSA.