Pascal de Izaguirre : « Si la demande baisse, nous ne pouvons garder nos stocks. Nous devons réduire nos engagements et faire évoluer notre modèle vers plus de sélectivité en ce qui concerne nos partenaires… » /photo JDL
Les Journées des dirigeants Manor avaient démarré sur un registre plutôt feutré avec un sujet intéressant mais politiquement correct : « Quel avenir entre modèle industriel et modèle artisanal ? ».
Un sujet illustré par deux tables rondes, respectivement consacrées au voyage d’affaires et au tourisme.
Si le modèle artisanal a ses limites face aux exigences croissantes des grandes entreprises et aux budgets déployés, cela tient essentiellement à une question de taille et de surface financière.
Au niveau technologique, certaines agences Manor n’ont rien à envier aux majors du secteur, mais elles ont intérêt à se concentrer sur leur cœur de cible plutôt que de se bagarrer sur des dossiers qui, de toute façon ne seront jamais à leur portée.
Si des divergences apparaissent sur le rôle de l’agent de voyages, prescripteur ou conseil neutre de son client, selon les points de vue (fournisseurs ou agences), globalement le débat n’engendre pas de polémique majeure.
L’agence indépendante doit continuer de creuser son sillon en matière de business travel, et jouer sur ses atouts de proximité et d’« intimité ». Le potentiel restant est énorme. On ne dira pas la même chose du tourisme, même si certains acteurs tirent mieux leur épingle du jeu que d’autres.
Un sujet illustré par deux tables rondes, respectivement consacrées au voyage d’affaires et au tourisme.
Si le modèle artisanal a ses limites face aux exigences croissantes des grandes entreprises et aux budgets déployés, cela tient essentiellement à une question de taille et de surface financière.
Au niveau technologique, certaines agences Manor n’ont rien à envier aux majors du secteur, mais elles ont intérêt à se concentrer sur leur cœur de cible plutôt que de se bagarrer sur des dossiers qui, de toute façon ne seront jamais à leur portée.
Si des divergences apparaissent sur le rôle de l’agent de voyages, prescripteur ou conseil neutre de son client, selon les points de vue (fournisseurs ou agences), globalement le débat n’engendre pas de polémique majeure.
L’agence indépendante doit continuer de creuser son sillon en matière de business travel, et jouer sur ses atouts de proximité et d’« intimité ». Le potentiel restant est énorme. On ne dira pas la même chose du tourisme, même si certains acteurs tirent mieux leur épingle du jeu que d’autres.
S’auto produire et s’auto-distribuer, ça marche !
La table ronde tourisme d'affaires avec Aurélien Rath (Cap5), Philippe Korcia (Setiex-Eurafrique), Soline de Montremy (AF), Georges Rudas (Amadeus), Valérie Assayag (SNCF) et Romain Cluis (Orsud) /photo JDL
Dans la table ronde qui y était consacrée, plusieurs business models s’affrontaient : José Martinez (Amplitudes) qui réalise 80 millions d’euros de chiffre d’affaires a fait le choix de s’auto produire et de s’auto-distribuer.
Il a compris le distinguo il y a une douzaine d’années à propos des clients qui voulaient des vacances et ceux qui souhaitaient voyager.
Et ça marche : depuis des années, cet acteur atypique connaît des croissances à deux chiffres avec des marges alléchantes : 25% sur le sur mesure, 17% sur le package dynamique, et… 10,95% dans la revente producteurs ! Cherchez l’erreur…
Christine Crispin, (Climats du Monde), elle, a commencé à produire pour les agences en ligne avant de s’ouvrir au B2B il y a à peine trois ans. Solide business model et rude école : avoir du stock en permanence, faire du sur-mesure et répondre à J-2 aux requêtes.
Bilan : Climats du Monde le panier moyen a été multiplié par 2 en 5 ans et son chiffre d'affaires devrait atteindre 15 M€ en 2012, contre 11M€ en 2011.
Idem pour Bruno Peynichou (Voyages Gallia) qui a fait de la niche du voyage golfique une spécialisation à outrance avec des résultats (+15%) en 2012 qui passent largement le cut.
A côté, les TO industriels font peine à voir. Dieu seul sait ce qu’il adviendra de Thomas Cook. Quant à Voyages Fram et TUI France ce n’est guère plus fringant.
Pascal de Izaguirre qui vient de terminer un PSE de 500 salariés, persiste et signe : pour lui il y aura toujours une place pour les TO industriels à condition de savoir proposer des produits différenciés voire exclusifs et de faire du sur mesure.
Il reconnaît : « Oui, on est voué à disparaître si l’on propose les produits que l’on trouve partout… »
Mais ce n’est pas ce qu’il compte faire. TUI France (1,6 milliard de CA contre 4 mds pour TUI Allemagne et 5 pour TUI Grande Bretagne) qui aujourd’hui produit 80% de main stream et 20% de sur mesure, veut inverser la vapeur à terme.
Il a compris le distinguo il y a une douzaine d’années à propos des clients qui voulaient des vacances et ceux qui souhaitaient voyager.
Et ça marche : depuis des années, cet acteur atypique connaît des croissances à deux chiffres avec des marges alléchantes : 25% sur le sur mesure, 17% sur le package dynamique, et… 10,95% dans la revente producteurs ! Cherchez l’erreur…
Christine Crispin, (Climats du Monde), elle, a commencé à produire pour les agences en ligne avant de s’ouvrir au B2B il y a à peine trois ans. Solide business model et rude école : avoir du stock en permanence, faire du sur-mesure et répondre à J-2 aux requêtes.
Bilan : Climats du Monde le panier moyen a été multiplié par 2 en 5 ans et son chiffre d'affaires devrait atteindre 15 M€ en 2012, contre 11M€ en 2011.
Idem pour Bruno Peynichou (Voyages Gallia) qui a fait de la niche du voyage golfique une spécialisation à outrance avec des résultats (+15%) en 2012 qui passent largement le cut.
A côté, les TO industriels font peine à voir. Dieu seul sait ce qu’il adviendra de Thomas Cook. Quant à Voyages Fram et TUI France ce n’est guère plus fringant.
Pascal de Izaguirre qui vient de terminer un PSE de 500 salariés, persiste et signe : pour lui il y aura toujours une place pour les TO industriels à condition de savoir proposer des produits différenciés voire exclusifs et de faire du sur mesure.
Il reconnaît : « Oui, on est voué à disparaître si l’on propose les produits que l’on trouve partout… »
Mais ce n’est pas ce qu’il compte faire. TUI France (1,6 milliard de CA contre 4 mds pour TUI Allemagne et 5 pour TUI Grande Bretagne) qui aujourd’hui produit 80% de main stream et 20% de sur mesure, veut inverser la vapeur à terme.
TUI France veut réaliser 50% de ses ventes en ligne
Dans la table ronde qui y était consacrée, plusieurs business models s’affrontaient : José Martinez (Amplitudes), Christine Crispin, (Climats du Monde), Bruno Peynichou (Voyages Gallia) et Costa Croisières et TUI France. /photo JDL
« Nous avons besoin de nous remettre en cause car une partie de notre business a glissé sur Internet… »
Il martèle ses ambitions : « Nous voulons d’ici 3 ans réaliser 50% de nos ventes en ligne ! »
Clairement, TUI France va réduire ses stocks et ses points de distribution. Ce faisant n’est-ce pas se tirer une balle dans le pied quand on veut continuer à jouer dans la cour des généralistes ?
« Si la demande baisse, nous ne pouvons garder nos stocks. Nous devons réduire nos engagements et faire évoluer notre modèle vers plus de sélectivité en ce qui concerne nos partenaires… »
Pour y parvenir, TUI France va jouer à fond les synergies Groupe : supprimer un hôtel à Marrakech qui passe dans le giron de TUI Grande Bretagne, revoir son offre en Thaïlande, etc.
« L’avenir est à la consolidation, estime Pascal de Izaguirre. Aujourd’hui nous ne sommes pas candidats au rachat de quelque TO que ce soit. De toute façon le marché se consolidera de façon naturelle et c’est souhaitable… »
Mais le patron de TUI France veut aussi agir sur un autre levier : les commissions versées aux agences. « Il faut faire évoluer les relations entre agences et tour operateurs. Les producteurs sont aujourd’hui dos au mur et si rien ne change ils vont mourir ! »
Pour lui, cela ne peut plus durer. Le montant des commissions et le « toujours plus » des réseaux, la règle des 45 jours de règlement, les points marketing et le reste est devenu quelque chose d’intenable.
« Nous ne pouvons continuer à payer comme ça parce que nous sommes ceux qui aujourd’hui gagnons le moins d’argent... »
Il martèle ses ambitions : « Nous voulons d’ici 3 ans réaliser 50% de nos ventes en ligne ! »
Clairement, TUI France va réduire ses stocks et ses points de distribution. Ce faisant n’est-ce pas se tirer une balle dans le pied quand on veut continuer à jouer dans la cour des généralistes ?
« Si la demande baisse, nous ne pouvons garder nos stocks. Nous devons réduire nos engagements et faire évoluer notre modèle vers plus de sélectivité en ce qui concerne nos partenaires… »
Pour y parvenir, TUI France va jouer à fond les synergies Groupe : supprimer un hôtel à Marrakech qui passe dans le giron de TUI Grande Bretagne, revoir son offre en Thaïlande, etc.
« L’avenir est à la consolidation, estime Pascal de Izaguirre. Aujourd’hui nous ne sommes pas candidats au rachat de quelque TO que ce soit. De toute façon le marché se consolidera de façon naturelle et c’est souhaitable… »
Mais le patron de TUI France veut aussi agir sur un autre levier : les commissions versées aux agences. « Il faut faire évoluer les relations entre agences et tour operateurs. Les producteurs sont aujourd’hui dos au mur et si rien ne change ils vont mourir ! »
Pour lui, cela ne peut plus durer. Le montant des commissions et le « toujours plus » des réseaux, la règle des 45 jours de règlement, les points marketing et le reste est devenu quelque chose d’intenable.
« Nous ne pouvons continuer à payer comme ça parce que nous sommes ceux qui aujourd’hui gagnons le moins d’argent... »
Il faut arrêter les tabous et négocier
Pour lui, « Le modèle actuel de la distribution est amené à évoluer de façon profonde. Quand nous accordons des commissions nous voulons en avoir pour notre argent… »
L’arrivée d’Apple et de Google dans le secteur du voyage seront le prochain choc qu’aura à subir le secteur. « Nous avons intérêt, Producteurs et agences à nous appuyer les uns sur les autres.
Il faut arrêter les tabous et nous mettre autour d’un table et négocier car nous ne pouvons continuer à payer de telles commissions et les différences que nous constatons avec les autres canaux de distribution sont très importantes… »
Une vision partagée par Georges Azouze « On est arrivé à un point de non retour avec la situation sur le marché. La difficulté actuelle c’est le manque de visibilité et d’engagement des réseaux… »
Pour Georges Azouze, ce qui coince c’est l’absence de vision industrielle. « Plus que les commissions c’est le prix global du contrat avec le Réseau qui nous pénalise… »
Il regrette par exemple qu’après 30 ans d’investissement ses concurrents débarquent et se positionnent exactement au même niveau que lui dans les négociations avec les réseaux.
« Pourquoi traiterais-je de la même manière l’agence qui nous vend beaucoup et celle qui ne nous vend quasiment jamais ?
L’arrivée d’Apple et de Google dans le secteur du voyage seront le prochain choc qu’aura à subir le secteur. « Nous avons intérêt, Producteurs et agences à nous appuyer les uns sur les autres.
Il faut arrêter les tabous et nous mettre autour d’un table et négocier car nous ne pouvons continuer à payer de telles commissions et les différences que nous constatons avec les autres canaux de distribution sont très importantes… »
Une vision partagée par Georges Azouze « On est arrivé à un point de non retour avec la situation sur le marché. La difficulté actuelle c’est le manque de visibilité et d’engagement des réseaux… »
Pour Georges Azouze, ce qui coince c’est l’absence de vision industrielle. « Plus que les commissions c’est le prix global du contrat avec le Réseau qui nous pénalise… »
Il regrette par exemple qu’après 30 ans d’investissement ses concurrents débarquent et se positionnent exactement au même niveau que lui dans les négociations avec les réseaux.
« Pourquoi traiterais-je de la même manière l’agence qui nous vend beaucoup et celle qui ne nous vend quasiment jamais ?
« faut-il tuer notre business model parce que le votre est mort ? »
photo JDL
Il faut une fois pour toutes faire une segmentation pour récompenser ceux qui font du business et nous permettent d’avancer et les autres… ».
Pour Lotfi Tazi (Voyages Paris Normandie) responsable de la Commission Tourisme de Manor, la réponse est courte mais cinglante face à la grogne des producteurs : « Messieurs, faut-il tuer notre business model parce que le votre est mort ?
Plus vous baisserez vos commissions et plus nous nous organiserons différemment. Vous allez gagner quelques points mais perdrez des millions… »
Georges Azouze qui a estimé que les choses étaient peut-être allées un peu trop loin, s’est empressé de recadrer le débat et de calmer le jeu. Il préconise le dialogue mais une chose est sûre : les négociations très tendues d’AS Voyages avec ses fournisseurs en général et TUI France en particulier (Marmara notamment), engendrent des tensions.
Le congrès de Manor était probablement le ballon d'essai de la nouvelle "real politik" des producteurs. Iront-ils au clash avec AS Voyages et les autres ?
Cela reste peu probable même si Pascal d’Izaguirre, remonté comme une pendule, n’exclut pas « des surprises… » sans dire, évidemment lesquelles, sinon ce n'en serait plus une...Cqfd.
Affaire à suivre...
Pour Lotfi Tazi (Voyages Paris Normandie) responsable de la Commission Tourisme de Manor, la réponse est courte mais cinglante face à la grogne des producteurs : « Messieurs, faut-il tuer notre business model parce que le votre est mort ?
Plus vous baisserez vos commissions et plus nous nous organiserons différemment. Vous allez gagner quelques points mais perdrez des millions… »
Georges Azouze qui a estimé que les choses étaient peut-être allées un peu trop loin, s’est empressé de recadrer le débat et de calmer le jeu. Il préconise le dialogue mais une chose est sûre : les négociations très tendues d’AS Voyages avec ses fournisseurs en général et TUI France en particulier (Marmara notamment), engendrent des tensions.
Le congrès de Manor était probablement le ballon d'essai de la nouvelle "real politik" des producteurs. Iront-ils au clash avec AS Voyages et les autres ?
Cela reste peu probable même si Pascal d’Izaguirre, remonté comme une pendule, n’exclut pas « des surprises… » sans dire, évidemment lesquelles, sinon ce n'en serait plus une...Cqfd.
Affaire à suivre...