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Futuroscopie - "Le ski n’a pas d’avenir" clament les acteurs de la montagne italienne 🔑

Décryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


Pour la première fois, le Comité olympique a reporté le choix des prochains jeux d’hiver de 2030. Une indécision historique liée aux risques de manque de neige ! Certes, les jeux asiatiques d’hiver auront lieu en Arabie Saoudite et leur attribution n’a pas suscité d’états d’âme ! N’étant pas à une contradiction près, le monde de l’événementiel reflète en tout cas la révolution en train de modifier le visage de nos montagnes.
Alors que la menace de grèves des remontées mécaniques se précise et que le Salon Grand Ski de Chambéry réfléchit à l’avenir de la montagne, nous avons choisi de zoomer sur la montagne italienne qui a, vous le verrez, les mêmes problèmes que toutes les montagnes européennes. La nouvelle était connue. Elle se confirme !


Rédigé par le Vendredi 27 Janvier 2023

Quel avenir pour la montagne et le ski avec le réchauffement climatique ?
Quel avenir pour la montagne et le ski avec le réchauffement climatique ?
… Un télésiège menant à une piste de la station de ski de Campitello Matese est fermé en raison du manque de neige et des températures élevées en Italie, le 7 janvier 2023 !

La station suisse de Gstaad a fini par faire venir de la neige par hélicoptère depuis d'autres régions de Suisse lorsque les températures ont atteint 20°C début janvier ! La montagne européenne n’échappe donc pas à la pénurie et comme ailleurs, bien des stations affichent des pistes couvertes de boue et de vilaines touffes d’herbes humides. Mais, ce n’est pas la première fois.

Ce qui est exceptionnel c’est que pour la première fois, les canons à neige, du moins depuis leur premier déploiement dans les années 80, n’ont pas pu compenser le manque de neige causé par des températures élevées.

Même à Campitello Matese, ce fut le cas ! Les stations de ski italiennes se sont donc rendues à l’évidence d’un hiver sans neige, miné de risques de déclin économique pour de nombreux villages et stations. Seul, selon une enquête du magazine Time, le président du ski club italien de Cortina d’Ampezzo est persuadé que sa station sera exemptée de l’apocalypse qui a vidé les stations italiennes en fin d’année.

« Située à 1600 mètres d’altitude, Cortina fabrique sa propre neige et pourra pour sa part accueillir les épreuves des jeux d’hiver de 2026 ! » rassure-t-il. Alors que, dans le même temps, une étude de l’Université d’Innsbruck estime que sur les stations qui ont accueilli les J.O d’hiver du siècle passé, il n’y en aurait plus que 3 demain qui pourraient encore le faire !

Pire, poursuivent de nombreux acteurs de la montagne : « la neige artificielle est un pis-aller sur le plan environnemental, que l’on ne saurait encourager ». Le plus grave étant que la température pendant deux mois se réchauffe et que l’on n’ait pas assez ni de froid ni d’eau.


Ski : pas de neige, pas de touristes !

<img src="https://www.tourmag.com/my/tourmag/site/version2020/regie-video/pixel.png" width="1" height="1" style="border:0px" id="debloquage_article_abonnement">La situation est d’autant plus dramatique que la neige est la locomotive de la montagne italienne. Quand il n’y a pas de neige, il n'y a pas de touristes skieurs, lesquels dépensent chaque année des fortunes pour s’élancer sur des pistes, louer du matériel, se loger, se nourrir.

Ainsi, un directeur de remontées mécaniques de la station d’Abetone (Appenins), affirme que son exploitation a perdu 2 millions d'euros par rapport à la même époque l'année dernière, en raison du manque de neige.

Pour l'ensemble de la région, il estime à environ 10 millions d'euros le manque à gagner en termes d'hébergement, de restauration et de shopping. Et, selon lui, les exploitants de téléphériques ont perdu environ 40 % de leur chiffre d’affaires au cours de la période de Noël.

Une situation qui ne devrait pas s’arranger car, comme le rappelle une étude de l’Université d’Innsbruck (parmi tant d’autres) « la période d’enneigement naturel diminuerait de 70 % d’ici l’an 2 100 à une altitude de 1 000 mètres si le réchauffement climatique venait à ne pas être limité à 2 degrés ».

La montagne en hiver n’est plus la montagne !

Chez nos voisins, la crise est donc tout aussi cuisante qu’en France. Et tout suggère qu’il n’y aura pas de retour possible en arrière. Les pistes de ski boueuses feront désormais partie intégrante du paysage montagnard et de l’avenir de nos massifs. Et c’est bien cela qui pose problème.

En effet, une montagne en hiver sans neige, ce n’est pas la montagne mythique qui fait rêver. Les stations ont donc beau tenter de faire tourner leurs remontées mécaniques et de proposer du VTT et des festivals, le succès n’est pas au rendez-vous.

En fin d’année, les touristes qui avaient envie de braver la pluie, le brouillard, la brume et le froid n’étaient donc guère nombreux, malgré les images diffusées abondamment sur les chaînes de télévision (et les promotions tarifaires) cherchant à inciter quelques téméraires à tenter l’expérience.

En fait, reconnaissent les professionnels : « il ne faut pas se faire d’illusions. Quand il ne neige pas en hiver, les paysages n’ont rien de séduisant comme en été ! ».

Et regarder la pluie tomber depuis les fenêtres d’un chalet loué à grands frais devient vite déprimant. Surtout quand on sait qu’à quelques dizaines de kilomètres, un temps radieux en bord de mer peut permettre de passer de délicieuses vacances : marche sur la plage, pêche aux crevettes, bronzette, cyclotourisme… !

Certes, avec un peu de neige, on peut s’essayer à la luge et aux raquettes et les plus sportifs peuvent randonner. Mais, les options pour sauver la saison d’hiver hors canons à neige, sont bien plus limitées qu’on veut le dire et l’envisager !

Préserver les populations locales

Le problème consiste donc à réinventer une fonction et une économie à cette montagne qui s’était montrée trop confiante dans la pérennité de l’or blanc.

Pour Marco Bussone, président de l'Union des communautés de montagne, dans une interview au Corriere della Sera, la solution serait la suivante : « Si nécessaire, nous devons investir dans la reconversion touristique, avec des téléphériques et des télésièges utilisés davantage en été, et dans des installations hôtelières plus modernes faites pour la saison estivale ».

Pour les Italiens, il conviendrait aussi de miser sur la reconversion d’installations existantes plutôt que sur la construction de nouvelles installations qu’il faudrait destiner à d’autres cibles que des skieurs seuls !

Enfin et surtout, il faudrait penser en termes de « dessaisonalisation » en introduisant le concept de mobilité durable. Deux cents millions d'euros ont été alloués au Fonds italien des remontées mécaniques et de l'enneigement.

Des ressources destinées à la modernisation et à l'entretien des installations des stations de montagne, à la mise hors service des remontées mécaniques obsolètes, ainsi qu'à l'amélioration des systèmes de stockage de la neige.

L’été sera plus facile à gérer

Pour sauver l’économie locale et un pan entier de l’offre touristique, la saison d’été est bien évidemment plus adaptée à de nouvelles pratiques de loisirs. Comme elle l’a déjà démontré.

Certaines remontées mécaniques ont abandonné leur vocation purement skiable, restant ouvertes pour emmener les randonneurs vers des altitudes plus élevées.

D'autres (comme dans les Préalpes du Vercors en France, sur les pentes du Dobratsch autrichien ou encore dans la vallée piémontaise de Germanasca) ont mis en place des itinéraires cyclistes, pédestres, de nombreuses activités pour les familles avec enfants, la valorisation du patrimoine historique et culturel des environs et surtout leurs atouts alimentaires qui, surtout en Italie, sont très prisés.

Là encore, sur des territoires (tels que Val di Sole, dans le Trentin), on a aussi misé sur les lignes ferroviaires, comme alternatives à la voiture, pour transporter les touristes entre les stations existantes et être quittes avec les stratégies de tourisme durable.

Autre idée : construire des réservoirs pouvant fournir de l’eau pour les canons à neige en hiver et se transformer en lacs en été où pêcher, faire du bateau, se promener… Cela permettrait également de combattre les incendies au cas où !

Enfin, les Italiens ont du talent pour développer des manifestations culturelles, traditionnelles ou contemporaines, capables d’attirer et fidéliser le public.

Mais, très pragmatique, nos voisins affichent une unique certitude commune : « les investissements dans le tourisme de montagne ne peuvent plus se permettre de suivre une voie différente de la réalité de la crise climatique et de ses conséquences à moyen terme ».

Et pour eux, il faut absolument « cesser d’être aveugles » ! déclarent-ils dans le magazine Linkiesta qui, encore plus pessimiste, clame : « l’avenir du ski n’existe pas. Il est mort et ceux qui œuvrent dans le secteur du tourisme en montagne l’hiver doivent l’accepter ».

En fait, même dans les Dolomites, on ne skiera plus en 2036 !

Josette Sicsic - DR
Josette Sicsic - DR
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.

Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com

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Tags : montagne, sicsic, ski
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Commentaires

1.Posté par Domi le 23/02/2023 08:57 | Alerter
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Le ski c'est comme les retraites, ça va disparaitre.

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