"Plus les expériences se succédaient, plus l’évidence était là : le voyage commence en bas de chez soi" - DR : Mathieu Mouillet
Le 11 septembre 2001, j’étais en Iran. Un tour du monde à vélo entamé six mois plus tôt m’avait conduit là, dans un petit village perdu dans les monts Elbourz.
Coupé du monde, je n’apprenais la nouvelle des attentats que trois jours plus tard.
Des mails alarmistes me sommaient de fuir le pays pour sauver ma peau et échapper au jihad.
De jihad, il n’était pas question. De quitter le pays encore moins. L’accueil des Iraniens était incomparable. L’écart entre l’image du terrain et sa réalité, abyssal.
Coupé du monde, je n’apprenais la nouvelle des attentats que trois jours plus tard.
Des mails alarmistes me sommaient de fuir le pays pour sauver ma peau et échapper au jihad.
De jihad, il n’était pas question. De quitter le pays encore moins. L’accueil des Iraniens était incomparable. L’écart entre l’image du terrain et sa réalité, abyssal.
Peut-on faire un voyage exotique dans son propre pays ?
"Vue de Paris, la campagne française se divise en deux catégories : paysans au bord du suicide, ouvriers au chômage. Le reste intéresse qui ?" - DR : Mathieu Mouillet
Autres articles
Un an plus tard, j’étais de retour en France et traverser le pays me semblait la meilleure manière d’achever ce voyage au long cours.
Lors de mes pérégrinations aux quatre coins du monde, les gens s’étonnaient : « Mais pourquoi venir chez nous alors que vous habitez le plus beau pays du monde ? »
Pourquoi au fait ? Parce que l’herbe est toujours plus verte ailleurs. Pour découvrir le monde. Parce que je croyais connaître la France.
Et plus les expériences se succédaient, plus l’évidence était là : le voyage commence en bas de chez soi. Peut-on faire un voyage exotique dans son propre pays ? C’était le pari de ce voyage en France.
L’automne est pluvieux, mon compte en banque perd ses dernières feuilles. Je remets le projet à plus tard.
Plus de dix ans ont passé. À Paris, je tente de lier ma vie de sédentaire et ma vie de voyageur.
Une activité de consultant finance mes échappées et renfloue les caisses lorsque mon banquier - compréhensif - me fait les gros yeux. Je ne m’y retrouve pas. La grande lessiveuse a eu peu à peu raison de mon optimisme et de ma bonne humeur.
Il est temps de fuir et ce voyage est un parfait alibi.
Lors de mes pérégrinations aux quatre coins du monde, les gens s’étonnaient : « Mais pourquoi venir chez nous alors que vous habitez le plus beau pays du monde ? »
Pourquoi au fait ? Parce que l’herbe est toujours plus verte ailleurs. Pour découvrir le monde. Parce que je croyais connaître la France.
Et plus les expériences se succédaient, plus l’évidence était là : le voyage commence en bas de chez soi. Peut-on faire un voyage exotique dans son propre pays ? C’était le pari de ce voyage en France.
L’automne est pluvieux, mon compte en banque perd ses dernières feuilles. Je remets le projet à plus tard.
Plus de dix ans ont passé. À Paris, je tente de lier ma vie de sédentaire et ma vie de voyageur.
Une activité de consultant finance mes échappées et renfloue les caisses lorsque mon banquier - compréhensif - me fait les gros yeux. Je ne m’y retrouve pas. La grande lessiveuse a eu peu à peu raison de mon optimisme et de ma bonne humeur.
Il est temps de fuir et ce voyage est un parfait alibi.
Être le touriste le plus lent de France pendant un an, voilà mon objectif
Vue de Paris, la campagne française se divise en deux catégories : paysans au bord du suicide, ouvriers au chômage.
Le reste intéresse qui ?
C’est la crise. La France a le moral dans les chaussettes. Mais comme le dit le proverbe africain : « Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu'une forêt qui pousse ». J’ai envie de vérifier sur le terrain si tout va si mal que ça. Envie de vérifier une nouvelle fois si l’écart entre l’image du terrain et sa réalité est toujours aussi grand.
Pour sortir des sentiers battus, un itinéraire s’impose à moi : une randonnée dans le désert, celui qui traverse la France des Ardennes au Pays Basque et que les géographes, qui sont parfois poètes, ont baptisé « la diagonale du vide ».
J’ai envie de liberté. Je veux prendre mon temps, faire un voyage à tâtons, m’en remettre aux hasards de la route.
Je sais qu’ils sont souvent bienvenus. Ce sera une aventure lente, un road-trip à 4 km/h pour estimer le temps à hauteur d’homme et laisser la place aux rencontres dont la route a le secret.
Les brochures touristiques parlent de slow tourisme. Être le touriste le plus lent de France pendant un an, voilà mon objectif.
Le reste intéresse qui ?
C’est la crise. La France a le moral dans les chaussettes. Mais comme le dit le proverbe africain : « Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu'une forêt qui pousse ». J’ai envie de vérifier sur le terrain si tout va si mal que ça. Envie de vérifier une nouvelle fois si l’écart entre l’image du terrain et sa réalité est toujours aussi grand.
Pour sortir des sentiers battus, un itinéraire s’impose à moi : une randonnée dans le désert, celui qui traverse la France des Ardennes au Pays Basque et que les géographes, qui sont parfois poètes, ont baptisé « la diagonale du vide ».
J’ai envie de liberté. Je veux prendre mon temps, faire un voyage à tâtons, m’en remettre aux hasards de la route.
Je sais qu’ils sont souvent bienvenus. Ce sera une aventure lente, un road-trip à 4 km/h pour estimer le temps à hauteur d’homme et laisser la place aux rencontres dont la route a le secret.
Les brochures touristiques parlent de slow tourisme. Être le touriste le plus lent de France pendant un an, voilà mon objectif.
Les rencontres sont le sel du voyage
"De mes voyages précédents, je sais que les meilleurs souvenirs sont toujours les rencontres" - DR : Mathieu Mouillet
Sur mon dos, tente, réchaud, rechange, de quoi tenir plusieurs jours en autonomie et bivouaquer où bon me semble.
Dans la poche, une carte de France des sentiers de randonnée pour m’indiquer grossièrement le cap à suivre.
Pour le détail, un fichier Excel plein de noms, d’adresses et de numéros de téléphones. Quelques-uns m’ont déjà donné leur accord. Je viendrai les questionner sur ce qu’ils font là. Pourquoi là plutôt qu’ailleurs ?
De mes voyages précédents, je sais que les meilleurs souvenirs sont toujours les rencontres. Les rencontres sont le sel du voyage. Elles relèvent le plat de la géographie, subliment des endroits quelconques en moments inoubliables.
Durant ce voyage, je traverserai les endroits les moins connus, les plus reculés, ceux où il n’y a rien à voir.
Je rencontrerai des acteurs de terrain, des gens qui ont une relation particulière avec l’endroit où ils vivent. Politiciens, chefs d’entreprises, artistes, jardiniers, je veux les laisser me parler de chez eux. Ils sont bien plus légitimes que moi.
À la pointe des Ardennes, frontalier avec la Belgique, un village s’appelle Givet. « J’y vais », ça sonne bien pour commencer un voyage.
Dans la poche, une carte de France des sentiers de randonnée pour m’indiquer grossièrement le cap à suivre.
Pour le détail, un fichier Excel plein de noms, d’adresses et de numéros de téléphones. Quelques-uns m’ont déjà donné leur accord. Je viendrai les questionner sur ce qu’ils font là. Pourquoi là plutôt qu’ailleurs ?
De mes voyages précédents, je sais que les meilleurs souvenirs sont toujours les rencontres. Les rencontres sont le sel du voyage. Elles relèvent le plat de la géographie, subliment des endroits quelconques en moments inoubliables.
Durant ce voyage, je traverserai les endroits les moins connus, les plus reculés, ceux où il n’y a rien à voir.
Je rencontrerai des acteurs de terrain, des gens qui ont une relation particulière avec l’endroit où ils vivent. Politiciens, chefs d’entreprises, artistes, jardiniers, je veux les laisser me parler de chez eux. Ils sont bien plus légitimes que moi.
À la pointe des Ardennes, frontalier avec la Belgique, un village s’appelle Givet. « J’y vais », ça sonne bien pour commencer un voyage.
A suivre...
Dans la Nièvre, la découverte des cabinets de poésie générale (!)
LIRE AUSSI : La France, ce pays si exotique...
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Retrouvez tous les articles de notre série consacrée à la Diagonale du vide, avec Mathieu Mouillet, en cliquant ici.
A propos de l'auteur
Mathieu Mouillet arpente la planète depuis plus de 15 ans. En 2001, il part à vélo enregistrer les musiques du monde. Le voyage durera 18 mois et 25 000 km à travers l’Asie, l’Amérique du sud et l’Afrique.
Stylos, appareils photos et enregistreurs deviennent ses compagnons de voyage et ses outils de travail, entre deux missions de conseil pour des acteurs de l’e-tourisme.
Du Cap-Vert à l’Afrique du sud, il rédige et illustre une dizaine de guides pour un site qui veut devenir le Facebook du voyage. Un échec regrettable mais une expérience éclairante.
Avaler les kilomètres sans prendre le temps de savourer le paysage lui donne envie de lenteur. Pendant 18 mois, il traverse la France à pied à travers la diagonale du vide pour vérifier que « le voyage commence en bas de chez soi ».
Le récit de cette expérience, « La diagonale du vide, un voyage exotique en France » paraît en 2018.
Il partage ses carnets de voyages sur son blog : www.lesvoyagesdemat.com.
De l’Irlande au Botswana, de Cuba à l’Ouzbekistan, le globe trotter a écrit et photographié dans plus de 45 pays. Privilégiant les voyages sans moteur et les rencontres aux destinations, il croit en l’idée que « le vrai voyageur ne sait pas où il va ».
Pour aller plus loin : www.lesvoyagesdemat.com/blog-voyage-france/
Stylos, appareils photos et enregistreurs deviennent ses compagnons de voyage et ses outils de travail, entre deux missions de conseil pour des acteurs de l’e-tourisme.
Du Cap-Vert à l’Afrique du sud, il rédige et illustre une dizaine de guides pour un site qui veut devenir le Facebook du voyage. Un échec regrettable mais une expérience éclairante.
Avaler les kilomètres sans prendre le temps de savourer le paysage lui donne envie de lenteur. Pendant 18 mois, il traverse la France à pied à travers la diagonale du vide pour vérifier que « le voyage commence en bas de chez soi ».
Le récit de cette expérience, « La diagonale du vide, un voyage exotique en France » paraît en 2018.
Il partage ses carnets de voyages sur son blog : www.lesvoyagesdemat.com.
De l’Irlande au Botswana, de Cuba à l’Ouzbekistan, le globe trotter a écrit et photographié dans plus de 45 pays. Privilégiant les voyages sans moteur et les rencontres aux destinations, il croit en l’idée que « le vrai voyageur ne sait pas où il va ».
Pour aller plus loin : www.lesvoyagesdemat.com/blog-voyage-france/