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Aérien : le chantage aux slots pour en finir avec les prix bradés ?

la chronique de Jean-Louis Baroux


Jean-Louis Baroux, notre expert aérien revient une nouvelle fois sur les tarifs "prédateurs" ou prix bradés affichés par certaines compagnies aériennes. Pour l'ancien président d'APG (Air Promotion Group), il faut que ces pratiques cessent. Comment ? Pourquoi ne pas obliger les transporteurs coupables à rendre leurs slots ?


Rédigé par Jean-Louis Baroux le Lundi 11 Octobre 2021

Compagnies aériennes et prix bradés : "la seule manière de freiner voire d’éradiquer de telles annonces consisterait à ne plus attribuer de créneaux aéroportuaires aux transporteurs coupables, voire de les obliger à en rendre" - Depositphotos.com
Compagnies aériennes et prix bradés : "la seule manière de freiner voire d’éradiquer de telles annonces consisterait à ne plus attribuer de créneaux aéroportuaires aux transporteurs coupables, voire de les obliger à en rendre" - Depositphotos.com
Décidément les stupidités ont la vie dure. La semaine dernière encore Vueling récidivait avec des tarifs promotionnels à 9,99 € TTC. Cela ne veut strictement rien dire car le seul montant des taxes est supérieur au prix annoncé.

D’ailleurs en navigant sur le site de la compagnie, on se rend très vite compte que les prix n’ont rien à voir avec les tarifs annoncés. Par exemple, le meilleur tarif pour un aller/retour de Paris à Madrid aller le 03 novembre, retour le 19 novembre est de 170 €. J’ai pris volontairement un exemple sur des dates éloignées.

Lire aussi : Transport aérien : où s'arrêtera donc la folle course aux prix bradés ?

Je note d’ailleurs que les autres transporteurs sont contraints à emboiter la même politique tarifaire qui consiste à promouvoir des prix introuvables sur le site de la compagnie.

Mais j’ai tout de même vu, au hasard des Beauvais-Marseille à prix bradés à 20 € aller/retour avec Ryanair, et même des Paris-Malaga à 91 € aller/retour chez Transavia, toutes taxes comprises cela va sans dire. Sur le site de Vueling, on trouve aussi des locations de voitures à 10 € par jour ou des hôtels à 20 € par nuit, ces derniers réservés avec Booking.Com qui prélève au mois 20% du montant.

Petite question : que reste-t-il aux réels prestataires de service, qu’ils soient loueurs de voitures ou hôteliers ?

Prix bradés : de qui se moque-t-on ?

De qui se moque-t-on et comment peut-on encore autoriser de telles pratiques surtout après la pandémie que nous avons traversée et la nécessité d’appliquer une meilleure pratique écologiste ? Ces effets d’annonce confirment bien que leurs auteurs considèrent leurs clients comme des imbéciles.

Leur seul but consiste à les attirer sur leur site pour leur « refourguer » c’est bien le mot, des tarifs 10 fois au moins supérieurs à leurs annonces.

Certes les autorités de Bruxelles avaient bien obligé les compagnies à réserver au moins 10 sièges aux tarifs les plus bas, ceux largement promotionnés, mais qui va contrôler que cette injonction est suivie d’effet ?

Pour tout dire, je suis scandalisé par cette pratique et cela ne date pas d’aujourd’hui.
Cela fait des années que je la dénonce, sans d’ailleurs qu’il y ait un quelconque effet. Le plus terrible est que les clients finissent par croire à ces boniments.

Et lorsqu’ils ne trouvent que des prix normaux, ils s’estiment lésés. Il est effectivement difficile de comprendre que l’on trouve des vols transatlantiques moins chers que des Paris-Rome voire même des Paris-Nice. Et c’est d’ailleurs bien incompréhensible.

Que fait la DGCCRF ?

Alors ces pratiques entrainent une spirale perverse pour le transport aérien tout entier. Les prix normaux ne peuvent plus être affichés, petit à petit le prix moyen diminue et pour arriver à équilibrer les comptes, les transporteurs sont conduits à augmenter le coefficient de remplissage ce qui a pour effet de multiplier les voyages inutiles et d’entasser les passagers dans des appareils toujours plus densifiés.

Le tout pour arriver à des résultats économiques très moyens, le transport aérien n’arrivant pas à rémunérer convenablement les énormes capitaux qu’il faut bien investir. C’est ainsi que de très beaux appareils passent à la trappe, comme par exemple l’A 380, car il est de plus en plus délicat d’équilibrer ses coûts alors que c’est le modèle préféré des voyageurs.

Il est urgent que ces pratiques s’arrêtent. On ne peut hélas pas compter sur la profession, chaque compagnie ayant peur des annonces de ses concurrents, procède de la même manière. Il faudra bien s’en remettre à la réglementation. Celle-ci existe d’ailleurs. La vente à perte est interdite dans la quasi-totalité des pays européens. Alors pourquoi n’est-elle jamais sanctionnée.

On m’oppose toujours le fait que le prix marginal peut toujours s’expliquer et qu’un siège occupé vaut mieux qu’un siège vide. C’est faux ! Un siège occupé coûte de l’argent. D’abord il faut bien payer les taxes et elles sont en moyenne de 13 € par vol, et puis chaque passager contribue aux coûts directs d’un vol ne serait-ce que par son poids sans compter les coûts de distribution payés aux GDS, 7 dollars par vol en moyenne.

Il ne me paraît pas impossible de prouver la vente à perte tant elle est évidente ou si on ne trouve pas les tarifs annoncés, la publicité mensongère laquelle est tout aussi interdite.

Pourquoi donc la DGCCRF qui est l’organisme régulateur du commerce français ne s’occupe-t-elle pas du sujet. Et puis comment expliquer que l’on puisse attribuer des « slots » aux transporteurs qui usent de telles pratiques au détriment de compagnies plus vertueuses.

A vrai dire la seule manière de freiner voire d’éradiquer de telles annonces consisterait à ne plus attribuer de créneaux aéroportuaires aux transporteurs coupables, voire de les obliger à en rendre. Après tout c’est bien ce que les autorités européennes demandent aux compagnies auxquelles les Etats ont pu consentir des prêts ou des apports en capital.

Encore une fois, revenons au bon sens.

Jean-Louis Baroux - DR
Jean-Louis Baroux - DR
Jean-Louis Baroux est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com.

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Tags : aérien, baroux
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Commentaires

1.Posté par SERGE13 le 12/10/2021 04:38 | Alerter
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C'est bizarre pour quelles raisons ne parlez vous pas des tarifs affichés avec les programmes de fidélités??? Il en va de même. Vous oubliez que les low cost n'en ont pas. Il ne s'agit que de quelques places. De plus, avec le tarif affiché, je vous rappelle que rien n'est inclus ce qui n'est pas le cas avec les cartes de fidélités. Vous comparez ce qui n'est pas comparables. Pour un professionnel du tourisme, c'est un peu juste comme article et comme témoignage.
S'il on prend n'importe quel segment avec une low cost et qu'on rajoute un bagage, un siège et une boisson (même de l'eau) vous verrez que quelques fois le tarif total dépasse celui des légacies.

2.Posté par Eric 13 le 12/10/2021 11:09 | Alerter
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Air France perd actuellement 25 millions d'euros par jour , ne devrait-elle pas plutôt que de les perdre , faire voler ses appareils en fesant des promotions afin de relancer la demande. Le taux de pénétration du voyages à forfait ou consommation touristique , affaires , est un muscle qui n'a pas travaillé depuis deux ans , si personne ne le rééduque il ne re fonctionnera pas ou pas comme avant .

3.Posté par Fred le 12/10/2021 12:23 | Alerter
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Et si il n y avait pas Ryanair,Vueling, Easyjet ou Volotea en France......?......on voyagerait à dos de chameau....? car Air France a choisi de se désengager des régions et de tout recentrer sur son hub de CDG....
Et même si il y a eu des abus (notamment FR avec les aides indirectes des régions) n oublions pas que ces compagnies ont ouvert la démocratisation du transport aérien !! Mr Baroux, vous souvenez vous des années 80 quand AF était en situation de monopole et l'arrivée tant décriée de AOM AirLIB.....qui eux aussi ont ENFIN ouvert le ciel a ceux qui n'avaient pas les moyens de payer les tarifs souvent exhorbitants d'AF (qui s'est faut il le préciser en a bien profité pendant des decennies !!) ?...Cette époque est révolue !!

4.Posté par julien le 12/10/2021 17:42 | Alerter
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Lorsque les cnies font des opérations promotionnelles elles sont obligées de proposer quelques sièges au tarif indiqué, mais bien entendu il "yieldent" leurs vols, il y en a une certaine quantité, donc tout le monde ne peut pas les réserver. Sachant que si personne ne pouvait réellement les réserver, la publicité serait très mauvaise pour la cnie donc ils n'auraient aucun intérêt à faire cela.
Ils ne vendent pas à perte sauf si justement le coef de remplissage est mauvais in fine, mais ça serait juste une erreur de yield et non une volonté de vendre à perte.
Les cnies low cost ont permis à bcp de gens de pouvoir voyager, à des jeunes par ex qui grâce à cela ont pu tester le plaisir de voyager et pourraient avoir envie de se payer des voyages plus chers par la suite.
Votre vision des choses est élitiste, elle pousserait vers encore plus d'inégalités car seuls les plus riches pourraient voyager.
Laissez les cnies gérer leur yield comme elles le souhaitent, les meilleures resteront. Le plus gros pb c'est le favoritisme dont bénéficient certaines cnie versus d'autres, celles qui ont pu bénéficier par exemple d'énormes aides gouvernementale sans contrepartie et sans surveillance de gestion, et je ne parle pas de la période covid car dans ce cas les aides sont justifiées.

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