Pour relancer le secteur des colonies de vacances, l'Etat a encore pas mal de problèmes à régler - Photo : alain wacquier-Fotolia.com
A l'approche de l'été 2015, une association spécialisée cherche à inscrire un jeune de foyer - Ahmed 16 ans et demi - en colonie de vacances au mois d'août.
Après des recherches sur Internet, le responsable de la structure trouve une offre qui lui convient.
Le séjour se déroule à Port Leucate pendant une semaine à la fin du mois. Il est destiné à des jeunes de 14 à 17 ans. Il reste encore quelques places, alors l'association décide de réserver directement en ligne. Elle reçoit immédiatement un e-mail de confirmation.
Mais, deux heures plus tard, le vendeur du séjour lui adresse un nouveau courrier électronique dans lequel il lui explique que l'inscription d'Ahmed n'a finalement pas pu être validée.
Raison invoquée : son âge n'est pas en relation avec celui des autres jeunes déjà inscrits. Pourtant le séjour est bien destiné aux 14/17 ans...
Ahmed est alors redirigé vers une autre offre de vacances. En Corse. Mais elle ne correspond pas à sa demande initiale.
Après ce refus, l'association effectue une nouvelle réservation sur le séjour de Port Leucate pour les 14/17 ans aux mêmes dates. Pour Antoine, 17 ans, un peu plus âgé qu'Ahmed, mais pas pris en charge par un foyer.
Et cette fois, ça passe sans problème. La réservation est validée. Antoine est parti en vacances fin août.
"Ceci montre bien que l'âge d'Ahmed n'est qu'un prétexte pour le refus, regrette le responsable de l'association. Peut-on refuser de vendre un séjour à un enfant issu de structure sociale sous n'importe quel prétexte ?"
Après des recherches sur Internet, le responsable de la structure trouve une offre qui lui convient.
Le séjour se déroule à Port Leucate pendant une semaine à la fin du mois. Il est destiné à des jeunes de 14 à 17 ans. Il reste encore quelques places, alors l'association décide de réserver directement en ligne. Elle reçoit immédiatement un e-mail de confirmation.
Mais, deux heures plus tard, le vendeur du séjour lui adresse un nouveau courrier électronique dans lequel il lui explique que l'inscription d'Ahmed n'a finalement pas pu être validée.
Raison invoquée : son âge n'est pas en relation avec celui des autres jeunes déjà inscrits. Pourtant le séjour est bien destiné aux 14/17 ans...
Ahmed est alors redirigé vers une autre offre de vacances. En Corse. Mais elle ne correspond pas à sa demande initiale.
Après ce refus, l'association effectue une nouvelle réservation sur le séjour de Port Leucate pour les 14/17 ans aux mêmes dates. Pour Antoine, 17 ans, un peu plus âgé qu'Ahmed, mais pas pris en charge par un foyer.
Et cette fois, ça passe sans problème. La réservation est validée. Antoine est parti en vacances fin août.
"Ceci montre bien que l'âge d'Ahmed n'est qu'un prétexte pour le refus, regrette le responsable de l'association. Peut-on refuser de vendre un séjour à un enfant issu de structure sociale sous n'importe quel prétexte ?"
Manque d'encadrement en colonies pour les jeunes de foyers
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Son désarroi est nourri par une autre expérience vécue quelques semaines plus tôt.
Son association voulait inscrire plusieurs adolescents de foyers, tous âgés d'environ 17 ans, à un séjour vendu sur le site Internet de 2M Mer et Montagne. Il contacte l'agence pour vérifier les disponibilités.
Le vendeur se rapproche alors de l'organisateur des vacances. Ce dernier rappelle directement l'association pour lui expliquer que les inscriptions de ses jeunes sont refusées : il n'accepte plus les enfants issus de structures sociales de plus de 15 ans et sur plus d'une semaine.
"Sur la question des foyers, nous sommes bien conscients qu'il y a un vrai sujet. En tout cas, pour les mineurs qui relèvent de la protection judiciaire, nous explique-t-on dans l'entourage de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
Ces structures ferment généralement au mois d'août et ont tendance à inscrire leurs jeunes dans des séjours de vacances. Cela permet de fermer la structure et de mettre les éducateurs en congés, ce qui est bien normal.
Mais les jeunes se retrouvent dans des séjours de vacances qui, eux, sont encadrés par des animateurs BAFA ou BAFD et qui ne sont pas forcément prêts à prendre en charge des jeunes qui, le reste de l'année, sont encadrés par des professionnels spécialisés."
Certaines équipes d'animateurs se laissent déborder et finissent par faire face à de gros problèmes de discipline et de comportement. Les services de l’État doivent alors intervenir dans des situations parfois catastrophiques.
Des difficultés identifiées par le ministère et qu'il compte résoudre dans le cadre de son dispositif #InstantColo lancé en avril 2015. Il prévoit notamment une collaboration entre les conseils départementaux, la protection judiciaire de la jeunesse et les organisateurs de séjours pour anticiper, en amont, les éventuels problèmes.
Parmi les solutions envisagées : mieux répartir les groupes de jeunes de foyers pour éviter une concentration sur certains séjours, mieux informer les jeunes sur le contenu des vacances et intégrer aux équipes d'animation des éducateurs spécialisés capables de gérer les éventuels problèmes de comportement.
Son association voulait inscrire plusieurs adolescents de foyers, tous âgés d'environ 17 ans, à un séjour vendu sur le site Internet de 2M Mer et Montagne. Il contacte l'agence pour vérifier les disponibilités.
Le vendeur se rapproche alors de l'organisateur des vacances. Ce dernier rappelle directement l'association pour lui expliquer que les inscriptions de ses jeunes sont refusées : il n'accepte plus les enfants issus de structures sociales de plus de 15 ans et sur plus d'une semaine.
"Sur la question des foyers, nous sommes bien conscients qu'il y a un vrai sujet. En tout cas, pour les mineurs qui relèvent de la protection judiciaire, nous explique-t-on dans l'entourage de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
Ces structures ferment généralement au mois d'août et ont tendance à inscrire leurs jeunes dans des séjours de vacances. Cela permet de fermer la structure et de mettre les éducateurs en congés, ce qui est bien normal.
Mais les jeunes se retrouvent dans des séjours de vacances qui, eux, sont encadrés par des animateurs BAFA ou BAFD et qui ne sont pas forcément prêts à prendre en charge des jeunes qui, le reste de l'année, sont encadrés par des professionnels spécialisés."
Certaines équipes d'animateurs se laissent déborder et finissent par faire face à de gros problèmes de discipline et de comportement. Les services de l’État doivent alors intervenir dans des situations parfois catastrophiques.
Des difficultés identifiées par le ministère et qu'il compte résoudre dans le cadre de son dispositif #InstantColo lancé en avril 2015. Il prévoit notamment une collaboration entre les conseils départementaux, la protection judiciaire de la jeunesse et les organisateurs de séjours pour anticiper, en amont, les éventuels problèmes.
Parmi les solutions envisagées : mieux répartir les groupes de jeunes de foyers pour éviter une concentration sur certains séjours, mieux informer les jeunes sur le contenu des vacances et intégrer aux équipes d'animation des éducateurs spécialisés capables de gérer les éventuels problèmes de comportement.
Poursuite de la baisse en 2015
Parmi ses autres objectifs, #InstantColo vise à "rassurer les parents" pour les inciter à inscrire leurs enfants en colonies de vacances. Et ainsi en finir avec la baisse du nombre de séjours dans le secteur depuis une vingtaine d'années.
Après les périodes fastes des années 70, les effectifs d'enfants en colonies de vacances n'ont eu de cesse de diminuer. Une tendance qui s'accélère depuis 2008. Cette année-là, le secteur totalisait 1,8 million de jeunes. En 2014, ils n'étaient plus que 1,3 million.
Et pour 2015, même si les chiffres consolidés ne sont pas encore connus, "nous nous inscrivons encore sur une tendance à la baisse", assure-t-on au ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
Cet été, dans le cadre d'#InstantColo, l’État a ainsi communiqué pour expliquer aux parents que les risques d'accidents ne sont pas plus importants en colonies de vacances qu'à la maison.
Il a également veillé à rassurer les parents sur leurs craintes liées aux questions de pédophilie en détaillant ses moyens de contrôle et d'intervention pour protéger les jeunes et faire en sorte qu'il ne se retrouvent jamais encadrés par des individus dangereux.
Mais il y a un autre phénomène qui contribue à désorienter et décourager les parents.
Sur Internet, certains organisateurs et vendeurs se regroupent sur des plates-formes de réservation communes et distribuent tous les séjours des uns et des autres. Sur l'une d'entre elles, il est, par exemple, possible de trouver 3 organismes différents présentés comme organisateurs d'un même séjour.
"Du coup, nous ne savons plus qui organise le séjour de nos enfants", déplore une mère de famille.
"Les familles sont inquiètes et elles ont des raisons de l'être, répond un conseiller de Patrick Kanner.
Il faut que l'organisateur et l'équipe pédagogique qui se trouve en présence des enfants pendant le séjour soient en relation directe et transparente avec les familles, sur le projet éducatif, sur les méthodes pédagogiques mises en œuvre, sur la manière dont va se passer le séjour, sur les règles de vie..."
Un sujet qui sera pris en compte par le futur label « Génération Camp Colo » qui sera créé en 2016, via une collaboration entre l’État et les acteurs du secteur.
Après les périodes fastes des années 70, les effectifs d'enfants en colonies de vacances n'ont eu de cesse de diminuer. Une tendance qui s'accélère depuis 2008. Cette année-là, le secteur totalisait 1,8 million de jeunes. En 2014, ils n'étaient plus que 1,3 million.
Et pour 2015, même si les chiffres consolidés ne sont pas encore connus, "nous nous inscrivons encore sur une tendance à la baisse", assure-t-on au ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
Cet été, dans le cadre d'#InstantColo, l’État a ainsi communiqué pour expliquer aux parents que les risques d'accidents ne sont pas plus importants en colonies de vacances qu'à la maison.
Il a également veillé à rassurer les parents sur leurs craintes liées aux questions de pédophilie en détaillant ses moyens de contrôle et d'intervention pour protéger les jeunes et faire en sorte qu'il ne se retrouvent jamais encadrés par des individus dangereux.
Mais il y a un autre phénomène qui contribue à désorienter et décourager les parents.
Sur Internet, certains organisateurs et vendeurs se regroupent sur des plates-formes de réservation communes et distribuent tous les séjours des uns et des autres. Sur l'une d'entre elles, il est, par exemple, possible de trouver 3 organismes différents présentés comme organisateurs d'un même séjour.
"Du coup, nous ne savons plus qui organise le séjour de nos enfants", déplore une mère de famille.
"Les familles sont inquiètes et elles ont des raisons de l'être, répond un conseiller de Patrick Kanner.
Il faut que l'organisateur et l'équipe pédagogique qui se trouve en présence des enfants pendant le séjour soient en relation directe et transparente avec les familles, sur le projet éducatif, sur les méthodes pédagogiques mises en œuvre, sur la manière dont va se passer le séjour, sur les règles de vie..."
Un sujet qui sera pris en compte par le futur label « Génération Camp Colo » qui sera créé en 2016, via une collaboration entre l’État et les acteurs du secteur.
L'organisateur du séjour est le seul responsable
La confusion entre vendeur et organisateur ou la méconnaissance de l'identité réelle de l'organisateur ne pose pas de problème tant que le séjour se déroule sans encombre. Mais, en cas de blessure ou d'exclusion, par exemple, qui est responsable ?
Sur ce point, le Code de l'action sociale et des familles est clair : l'organisateur est le seul responsable juridique de tout ce qui se passe pour les mineurs pendant les vacances.
Il est obligé légalement de gérer la question de l'information des familles et de s'assurer que les informations sur les séjours sont bien transmises aux parents dans le cas d'une sous-traitance.
Les informations à fournir obligatoirement sont : les coordonnées de l'organisateur, une présentation claire du projet éducatif, les éventuelles options philosophiques et religieuses de l'organisateur, la nature des activités proposées, les règles de comportement et les conditions d'exclusion.
Sur ce dernier point, l'entourage du ministre de la Jeunesse et des Sports précise qu'il est "interdit de relâcher un jeune dans la nature. Derrière la question de l'exclusion, se joue celle du transfert des responsabilités.
Tant que le responsable légal n'est pas en mesure d'accueillir le jeune, l'organisateur du séjour reste responsable et doit garder le mineur avec lui."
Mais l’État ne réglemente pas la question de la justification d'une exclusion. Cela reste à la charge de l'organisateur du séjour.
Ce qui conduit à d'autres situations problématiques auxquelles a été confronté un autre opérateur intermédiaire qui gère des inscriptions en colonies de vacances pour des jeunes de foyers.
"A plusieurs reprises, on a utilisé la fragilité et la réputation des jeunes de foyers pour justifier leur exclusion et libérer une place pour un autre enfant, raconte le responsable de la structure.
Le séjour du jeune exclu n'est pas remboursé et nous devons alors nous organiser en urgence pour le récupérer. C'est dommage de voir que l’État finance des structures sociales qui, ensuite, se font abuser par des opérateurs privés sans scrupules."
Quand on sait que le dispositif #InstantColo s'est aussi fixé l'objectif de favoriser la "mixité sociale" dans les colonies de vacances, on se dit qu'il y a encore pas mal de boulot à accomplir !
Sur ce point, le Code de l'action sociale et des familles est clair : l'organisateur est le seul responsable juridique de tout ce qui se passe pour les mineurs pendant les vacances.
Il est obligé légalement de gérer la question de l'information des familles et de s'assurer que les informations sur les séjours sont bien transmises aux parents dans le cas d'une sous-traitance.
Les informations à fournir obligatoirement sont : les coordonnées de l'organisateur, une présentation claire du projet éducatif, les éventuelles options philosophiques et religieuses de l'organisateur, la nature des activités proposées, les règles de comportement et les conditions d'exclusion.
Sur ce dernier point, l'entourage du ministre de la Jeunesse et des Sports précise qu'il est "interdit de relâcher un jeune dans la nature. Derrière la question de l'exclusion, se joue celle du transfert des responsabilités.
Tant que le responsable légal n'est pas en mesure d'accueillir le jeune, l'organisateur du séjour reste responsable et doit garder le mineur avec lui."
Mais l’État ne réglemente pas la question de la justification d'une exclusion. Cela reste à la charge de l'organisateur du séjour.
Ce qui conduit à d'autres situations problématiques auxquelles a été confronté un autre opérateur intermédiaire qui gère des inscriptions en colonies de vacances pour des jeunes de foyers.
"A plusieurs reprises, on a utilisé la fragilité et la réputation des jeunes de foyers pour justifier leur exclusion et libérer une place pour un autre enfant, raconte le responsable de la structure.
Le séjour du jeune exclu n'est pas remboursé et nous devons alors nous organiser en urgence pour le récupérer. C'est dommage de voir que l’État finance des structures sociales qui, ensuite, se font abuser par des opérateurs privés sans scrupules."
Quand on sait que le dispositif #InstantColo s'est aussi fixé l'objectif de favoriser la "mixité sociale" dans les colonies de vacances, on se dit qu'il y a encore pas mal de boulot à accomplir !