Le pré voyage : entre euphorie et stress
Le futur touriste cherche à visualiser la réalité avant de la voir afin de déclencher en lui une mécanique de plaisir - DR : Depositphotos.com, nenetus
En fait, voyager ne signifie pas simplement se déplacer dans l’espace.
Parallèlement aux gestes et aux mouvements indispensables au voyage « réel », un autre déplacement s’accomplit. Il se situe entièrement au niveau mental, et notamment avant le voyage.
Constituant une période d’autant plus délicate que le cerveau est extrêmement actif voire obsessionnel par rapport au projet de voyage, celui-ci déclenche deux types de sensations de nature opposée :
1 - Le plaisir du projet de voyage : Une majorité de voyageurs sont dynamisés, voire totalement euphorisés dès lors qu’ils ont des billets d’avion dans la poche. Peu importe la date de départ, la perspective de partir suffit souvent à leur insuffler énergie et optimisme, tout en leur permettant d’afficher leur statut privilégié de « partant ».
Pour intensifier le plaisir, deux outils s’imposent : d’une part, le futur voyageur en parle beaucoup et, par la parole, parvient à décupler les sensations d’ordre positif. D’autre part, il multiplie les recherches d’images afin de nourrir son imaginaire de compléments visuels susceptibles d’augmenter son information mais surtout d’accroître son futur plaisir.
Le cerveau est alors le siège d’un défilé permanent d’images. Et plus on en a, mieux c’est.
L’imaginaire est d’autant mieux alimenté que les images fournies par les écrans sont aujourd’hui légions. On en use, on en abuse, quitte à en saturer ses centres de mémoire et à faire se télescoper images positives et négatives.
En fait, le futur touriste cherche à visualiser la réalité avant de la voir afin de déclencher en lui une mécanique de plaisir.
2. L’angoisse du départ : à l’inverse, surtout par les temps qui courent et transforment le sujet touristique en un sujet anxiogène (grèves, manque de personnel, incendies, canicules…), quand le départ approche, la mécanique du plaisir est souvent contrariée par une autre mécanique, plutôt négative cette fois, transformant en thriller le film qui se déroule dans l’imaginaire d’un futur touriste.
En général, plus le voyage approche, plus l’angoisse s’intensifie, allant parfois jusqu’à déclencher une paralysie chez le futur voyageur.
Certes, tous les sujets ne traversent pas avec autant d’intensité ces deux phases. Mais, dans leur version nuancée, les deux sont irrémédiablement liées à l’avant voyage.
On veut tellement visionner la réalité avant d’être mis en contact avec elle, qu’on la fantasme dans ses bons et ses mauvais aspects.
Parallèlement aux gestes et aux mouvements indispensables au voyage « réel », un autre déplacement s’accomplit. Il se situe entièrement au niveau mental, et notamment avant le voyage.
Constituant une période d’autant plus délicate que le cerveau est extrêmement actif voire obsessionnel par rapport au projet de voyage, celui-ci déclenche deux types de sensations de nature opposée :
1 - Le plaisir du projet de voyage : Une majorité de voyageurs sont dynamisés, voire totalement euphorisés dès lors qu’ils ont des billets d’avion dans la poche. Peu importe la date de départ, la perspective de partir suffit souvent à leur insuffler énergie et optimisme, tout en leur permettant d’afficher leur statut privilégié de « partant ».
Pour intensifier le plaisir, deux outils s’imposent : d’une part, le futur voyageur en parle beaucoup et, par la parole, parvient à décupler les sensations d’ordre positif. D’autre part, il multiplie les recherches d’images afin de nourrir son imaginaire de compléments visuels susceptibles d’augmenter son information mais surtout d’accroître son futur plaisir.
Le cerveau est alors le siège d’un défilé permanent d’images. Et plus on en a, mieux c’est.
L’imaginaire est d’autant mieux alimenté que les images fournies par les écrans sont aujourd’hui légions. On en use, on en abuse, quitte à en saturer ses centres de mémoire et à faire se télescoper images positives et négatives.
En fait, le futur touriste cherche à visualiser la réalité avant de la voir afin de déclencher en lui une mécanique de plaisir.
2. L’angoisse du départ : à l’inverse, surtout par les temps qui courent et transforment le sujet touristique en un sujet anxiogène (grèves, manque de personnel, incendies, canicules…), quand le départ approche, la mécanique du plaisir est souvent contrariée par une autre mécanique, plutôt négative cette fois, transformant en thriller le film qui se déroule dans l’imaginaire d’un futur touriste.
En général, plus le voyage approche, plus l’angoisse s’intensifie, allant parfois jusqu’à déclencher une paralysie chez le futur voyageur.
Certes, tous les sujets ne traversent pas avec autant d’intensité ces deux phases. Mais, dans leur version nuancée, les deux sont irrémédiablement liées à l’avant voyage.
On veut tellement visionner la réalité avant d’être mis en contact avec elle, qu’on la fantasme dans ses bons et ses mauvais aspects.
Pendant le voyage : une surimpression continue d’images vraies et fantasmées
Une fois parti, on pourrait supposer que le voyage physique prend l’avantage sur les représentations et que la majorité des voyageurs ouvrent pleinement leurs sens à la découverte de la nouveauté et cherchent à inscrire dans leur mémoire un maximum d’images. Mais, il n’en est rien.
Pour beaucoup d’individus, le voyage physique est doublé par un voyage parallèle continu découlant de la masse d’images souvent parfaitement nuisibles à leur pleine appréciation de « l’ici et maintenant ».
Comment se manifeste cette catégorie d’images sur les comportements touristiques ?
3. La comparaison permanente : Quelques-uns, les plus nombreux, ne voient une destination qu’à travers le filtre de la comparaison avec d’autres destinations connues. Quel que soit le pays où ils se trouvent, celui-ci devient : « c’est comme… en Tunisie, en Egypte, en Inde… » ou « c’est pas du tout comme… en Inde, Thaïlande, Tunisie... ! »
4. Le voyage augmenté : D’autres encore ne découvrent un site que par rapport au supplément de connaissance qu’ils peuvent en tirer. Ils fouillent donc systématiquement sur leur smartphone, leurs « applis »… au lieu de regarder autour d’eux tout simplement et augmentent en paroles et en images leur escapade.
5. Les champions du direct : Certains encore ne voient les sites autour d’eux que par rapport à la perspective du récit qu’ils peuvent en faire, en direct, de préférence ! Ce sont les photographes traditionnels bien sûr mais ce sont aussi désormais les bloggeurs, les instagrammeurs, les membres très actifs des réseaux sociaux et les mobinautes de tout poil plus soucieux de « faire voir que de voir ! »
6. L’évasion sur écran : Enfin, notons que d’autres, aidés en cela par leur technologie, passent plus de temps à s’informer sur des articles d’actualité et à lire leurs emails professionnels ou privés qu’à jouir du spectacle qui s’offre à eux. Plus à l’aise dans le décalage, ils n’ont qu’une obsession : être ailleurs que là où ils sont ! Un comble quand on sait que certains ont payé des fortunes pour faire un voyage !
Pour beaucoup d’individus, le voyage physique est doublé par un voyage parallèle continu découlant de la masse d’images souvent parfaitement nuisibles à leur pleine appréciation de « l’ici et maintenant ».
Comment se manifeste cette catégorie d’images sur les comportements touristiques ?
3. La comparaison permanente : Quelques-uns, les plus nombreux, ne voient une destination qu’à travers le filtre de la comparaison avec d’autres destinations connues. Quel que soit le pays où ils se trouvent, celui-ci devient : « c’est comme… en Tunisie, en Egypte, en Inde… » ou « c’est pas du tout comme… en Inde, Thaïlande, Tunisie... ! »
4. Le voyage augmenté : D’autres encore ne découvrent un site que par rapport au supplément de connaissance qu’ils peuvent en tirer. Ils fouillent donc systématiquement sur leur smartphone, leurs « applis »… au lieu de regarder autour d’eux tout simplement et augmentent en paroles et en images leur escapade.
5. Les champions du direct : Certains encore ne voient les sites autour d’eux que par rapport à la perspective du récit qu’ils peuvent en faire, en direct, de préférence ! Ce sont les photographes traditionnels bien sûr mais ce sont aussi désormais les bloggeurs, les instagrammeurs, les membres très actifs des réseaux sociaux et les mobinautes de tout poil plus soucieux de « faire voir que de voir ! »
6. L’évasion sur écran : Enfin, notons que d’autres, aidés en cela par leur technologie, passent plus de temps à s’informer sur des articles d’actualité et à lire leurs emails professionnels ou privés qu’à jouir du spectacle qui s’offre à eux. Plus à l’aise dans le décalage, ils n’ont qu’une obsession : être ailleurs que là où ils sont ! Un comble quand on sait que certains ont payé des fortunes pour faire un voyage !
Au retour, le récit de voyages s’installe et se nuance
Une fois rentré, qu’est-ce que le voyageur va faire des images qu’il a accumulées dans sa mémoire et son smartphone ?
Constituant le meilleur moyen de combattre l’effacement et la dissipation des souvenirs, il effectue un nouveau départ mental basé sur un récit, donc sur la restitution par des paroles et de plus en plus des images de ce qu’il a vu et fait.
Pièce maîtresse du dispositif de l’évasion, le récit constitue un exercice plus complexe qu’il n’y paraît compte tenu de la profusion d’outils dont le voyageur dispose désormais : vidéo, images, sons...
En gros, on distingue cependant trois types de récits :
7. Le récit instantané : Parmi les attitudes les plus répandues, il y a celles consistant à raconter en détail à ses proches, ce que l’on a vu et ressenti. Dès le retour. Accompagnant leurs paroles d’images, les voyageurs parviennent souvent ainsi à justifier leur escapade aux yeux de leurs proches. Ils en profitent aussi pour la revivre en accéléré et renouer avec les sensations positives qu’ils ont éprouvées. Ce récit colle en général assez bien avec la réalité.
8. Le récit spectacle : Puis, la mémoire fait son œuvre et certains en profitent pour modifier leur récit et l’adapter à la personnalité de leur auditoire et à l’ambiance du moment. Pour cela, ils ont préparé des images et un narratif de tonalités différentes donnant lieu à des commentaires et des questions de la part de l’auditoire. Sujets à des exagérations ou des oublis, ces voyages que l’on fait parfois longtemps après un retour constituent, avec photos et objets souvenirs, les rares traces de l’expérience vécue.
9. Le récit fantasmé : Et enfin, il y a ces récits fantasmés qui ne traduisent pas la réalité mais une partie de la réalité telle que l’on aurait voulu qu’elle soit. On réinvente le voyage, on l’embellit, ou on l’enlaidit. Selon son humeur ou l’humeur générale. On en fait un produit à géométrie très variable qui en dit plus sur la personnalité du voyageur que sur son voyage…
Constituant le meilleur moyen de combattre l’effacement et la dissipation des souvenirs, il effectue un nouveau départ mental basé sur un récit, donc sur la restitution par des paroles et de plus en plus des images de ce qu’il a vu et fait.
Pièce maîtresse du dispositif de l’évasion, le récit constitue un exercice plus complexe qu’il n’y paraît compte tenu de la profusion d’outils dont le voyageur dispose désormais : vidéo, images, sons...
En gros, on distingue cependant trois types de récits :
7. Le récit instantané : Parmi les attitudes les plus répandues, il y a celles consistant à raconter en détail à ses proches, ce que l’on a vu et ressenti. Dès le retour. Accompagnant leurs paroles d’images, les voyageurs parviennent souvent ainsi à justifier leur escapade aux yeux de leurs proches. Ils en profitent aussi pour la revivre en accéléré et renouer avec les sensations positives qu’ils ont éprouvées. Ce récit colle en général assez bien avec la réalité.
8. Le récit spectacle : Puis, la mémoire fait son œuvre et certains en profitent pour modifier leur récit et l’adapter à la personnalité de leur auditoire et à l’ambiance du moment. Pour cela, ils ont préparé des images et un narratif de tonalités différentes donnant lieu à des commentaires et des questions de la part de l’auditoire. Sujets à des exagérations ou des oublis, ces voyages que l’on fait parfois longtemps après un retour constituent, avec photos et objets souvenirs, les rares traces de l’expérience vécue.
9. Le récit fantasmé : Et enfin, il y a ces récits fantasmés qui ne traduisent pas la réalité mais une partie de la réalité telle que l’on aurait voulu qu’elle soit. On réinvente le voyage, on l’embellit, ou on l’enlaidit. Selon son humeur ou l’humeur générale. On en fait un produit à géométrie très variable qui en dit plus sur la personnalité du voyageur que sur son voyage…
En conclusion
Bien que ces attitudes soient relativement classiques depuis que le voyage existe, notons pour finir qu’elles ont été favorisées par le matériel numérique dont on dispose aujourd’hui, soit les tablettes et autres smartphones permettant rapidement d’avoir accès à des pléthores d’images et de clichés capables d’alimenter indéfiniment l’imaginaire du voyageur, d’étoffer ses voyages mentaux, voire de les transformer.
Quand plusieurs réalités se superposent, que reste-t-il de la réalité qu’il convient de promouvoir et de vendre ?
Quand plusieurs réalités se superposent, que reste-t-il de la réalité qu’il convient de promouvoir et de vendre ?
Journaliste, consultante, conférencière, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les conséquences sur le secteur du tourisme.
Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.
Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com
Après avoir développé pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualité où elle décode le présent pour prévoir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.
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