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FUTUROSCOPIE - Les rapports au vĂȘtement : une grille de lecture originale 🔑

Qui sont vos clients ? Une nouvelle série de Futuroscopie


Bien que l’habit ne fasse pas toujours le moine, il le fait en partie. Le vêtement du touriste, et l’ensemble des mises en scĂšne dont il est l’objet et le sujet, rĂ©vĂšlent de nombreuses personnalitĂ©s et de nombreuses dominantes comportementales essentielles qu’il n’est jamais inutile de comprendre. En voici quelques-unes, indiquant que le sujet est bien plus sĂ©rieux qu’il en a l’air
 et que le territoire ( ville, montagne, plage
) dans lequel le touriste Ă©volue n’est pas le seul dĂ©terminant du choix des vĂȘtements que l’on porte en vacances



Rédigé par le Lundi 11 Juillet 2022

Malgré l’occidentalisation vestimentaire évidente de la population mondiale, il permet tout d’abord de repérer quelques variantes culturelles entre les différentes nationalités - Photo JS
Malgré l’occidentalisation vestimentaire évidente de la population mondiale, il permet tout d’abord de repérer quelques variantes culturelles entre les différentes nationalités - Photo JS
Revenir sur l’histoire complexe et longue du vêtement, laquelle est d’ailleurs toujours en cours, serait trop long. Le vêtement joue bien entendu un rôle essentiel dans la société, notamment à travers sa fonction de distinction.

Bien que les choses changent, on affiche encore son statut social à travers ses parures. La fonction esthétique est également motrice des habitus vestimentaires.

Quant aux phénomènes de mode, nul ne niera leur importance dans la catégorisation d’une population. Pourtant, les habitudes vestimentaires des touristes n’ont jamais été réellement étudiées, alors qu’elles nous semblent particulièrement révélatrices de certaines caractéristiques de la population touristique.


Les différences culturelles de base : confort ou Ă©lĂ©gance

Premier point : le vêtement a une particularité, il se voit. Impossible de le cacher, il fait partie de l’apparence de chacun d’entre nous...

Ainsi, malgré l’occidentalisation vestimentaire évidente de la population mondiale, il permet tout d’abord de repérer quelques variantes culturelles entre les différentes nationalités. Traditionnellement, les Germaniques optent pour des vêtements confortables alors qu’Italiens et Espagnols privilégient élégance et fantaisie.

Les Français pour leur part semblent sauvegarder une certaine idée du « bon goût », alors que les Britanniques oscillent entre excentricité et tradition.

Quant aux Asiatiques, il semblerait qu’ils soient plus repérables à leur garde-robe et à la façon de la porter, qu’à leur faciès. Ainsi, les spécialistes distinguent les Japonais des jeunes Chinois branchés à ce « petit plus », ce détail, ce « temps d’avance » qu’affichent les habitants du pays du Soleil Levant. Mais, les non spécialistes ont encore du mal à trancher !

Le discours implicite de la chaussure

La chaussure semble également revêtir une importance capitale. Le « bon touriste » est celui qui a choisi la bonne marque de chaussures. Inutile de chercher plus loin : dans les immenses cortèges qui arpentent les sentiers de randonnée, les halls d’aéroports ou les rues, l’étude du « soulier » fournit des résultats implacables.

Là encore, le confort pour les Germaniques, l’élégance pour les Latins, mais surtout l’écrasante domination des marques de sport, désormais partagées par toutes les générations et nationalités, indiquant si besoin en était la montée en puissance de l’uniformisation de l’humanité et la victoire de l’occidentalisation.

Sauf que les « tongues », d’inspiration égyptienne ou asiatique, défient le soulier occidental et se comptent par milliards sur les plages !

Les modes vacancières : un discours Ă©phĂ©mĂšre

Bien que les années de crise économique et la progression des valeurs immatérielles sur les valeurs matérielles aient produit leurs effets sur le suivi des modes vestimentaires, les collections estivales n’en finissent pas d’éclabousser les pages des magazines et les vitrines des boutiques. Impossible de s’y soustraire.

L’été est synonyme de vacances, donc de nouvelles modes. Coloris, modèles, étoffes, maquillage, parfums... le look de l’été est savamment étudié par les designers et autres fabricants de tendances, obsédés par la nécessité de ne pas rater l’un des rendez-vous commerciaux les plus importants de l’année.

Omni présent dans le monde occidental, ce rituel tient cependant aussi en partie à une nécessité de profiter de la belle saison pour redonner primauté au corps, aux apparences et pour s’adonner à une sorte de renaissance...

UNE TYPOLOGIE PUISÉE DANS LES VALISES

Passons maintenant aux typologies de touristes.

Pour la mettre en place, la méthode est simple : on observe, on photographie, on compare. Et, avec un brin de subtilité, on découvre une typologie extrêmement détaillée, tout en nuances, traduisant cependant deux étapes du voyage, lesquelles sont parfois dissonantes.

En effet, l’observation du vêtement sur place renseigne sur la personnalité du voyageur et sa conception du voyage. L’observation du bagage, pour sa part, renseigne sur l’attitude pré vacancière et sur les multiples mécanismes qui se mettent en marche dès lors qu’il s’agit d’affronter un départ. Afin de ne pas compliquer notre analyse, nous avons mêlé les deux approches.

1. L’excédent de bagages des voyageurs angoissés

Une première catégorie facile à repérer se compose d’individus aux valises boursoufflées, débordant d’un surplus de vêtements dont une partie se révélera inutile.

Faisant le bonheur des compagnies aériennes et de leurs surtaxes, ces voyageurs passent un temps infini à vider leurs gardes robes et à remplir leurs valises afin d’éviter toutes déconvenues de nature vestimentaire.

Mélangeant anoraks et maillots de bain, ils sont parés contre tous les caprices climatiques et prêts à se couler dans tous les déguisements nécessaires à une activité sportive ou culturelle, y compris celles qui sont imprévues.

Cette tendance obsessionnelle à voyager lourdement équipés, se retrouve parmi des individus hommes et femmes plutôt angoissés par les départs, souvent néophytes en matière de voyages. Mais, pas seulement ! Craignant de ne pas trouver sur place les vêtements indispensables, et par conséquent de rater leurs voyages, ce sont aussi des réfractaires à toute forme d’aventures.

Le vêtement est une carapace dont ils ont besoin pour se protéger. Mieux vaut donc prévoir toutes les formes de carapaces ! Fortement encombrés, ces anxieux ont également tendance à acquérir de nouveaux accessoires et vêtements sur place, afin de ne manquer de rien.

2. Les valises bondées des « fashionistas instagrameurs »

D’autres touristes encombrent aussi leurs valises de toutes sortes de vêtements et en changent plusieurs fois par jour. Mais, pas pour les mêmes raisons.

Ce sont les « fashionistas » pour qui le vêtement revêt une importance primordiale. Soumis aux diktats de la mode, ces spécialistes du total look se recrutent parmi une population très conditionnée par les tendances marketing créées par les marques de prĂȘt-à-porter. Inspirés par les top modèles, ils affichent des panoplies vestimentaires copiées sur les magazines et passent beaucoup de leur temps de vacances à mettre au point et entretenir leurs apparences.

« Fashion addicts » invétérés, ce sont, une fois sur place, des shoppers intensifs puisant dans le commerce local de nouveaux atours dont ils se revêtent immédiatement. Ils sont souvent contraints à acquérir des bagages supplémentaires, aussi sophistiqués que possible, afin d’afficher d’emblée leurs différences. Ce sont plus souvent des femmes que des hommes. Ils sont cependant marginaux. On les retrouve dans les stations d’hiver et estivales branchĂ©es.

Enfin, vous avez bien compris que ce sont des instagrameurs invétérés qui passent une partie de leur voyage à se photographier et à poster leurs photos sur leur réseau préféré, portant à son comble le narcissisme.

3. L’insoutenable légèreté du voyageur décomplexé

A l’inverse, une population de voyageurs est facilement indentifiable à travers l’extrême légèreté de son bagage : sacs à dos, valises minuscules, ce type de voyageurs a deux caractéristiques : d’une part, le vêtement a peu d’importance pour lui, d’autre part, il n’entend pas s’encombrer de contraintes matérielles jugées inutiles (on trouve des vêtements partout, merci la mondialisation !) et de nature à détériorer les conditions dans lesquelles il aspire à voyager.

Souvent jeune, ce type de voyageur affirme aussi, à travers l’immense légèreté de son bagage, une maîtrise indiscutable des déplacements. Il est averti, autonome, à l’aise en toutes situations, relativement peu exigeant en matière de confort. Privilégiant l’utile, il va sans dire que l’élégance ne fait pas vraiment partie de ses préoccupations.

Plus souvent voyageur que voyageuse, souvent en quête d’économie (tarif low-cost oblige !) il s’encombre cependant volontiers de son ordinateur portable qui tient une place essentielle dans ses bagages. Les chaussures confortables sont aussi un de ses accessoires privilégiés.

Et, n’oublions pas qu’il a aussi tendance à revenir encore plus « light » qu’à l’aller car il abandonne volontiers le peu de linge dont il dispose sur place.

Mais, attention : le voyageur « light » peut aussi, au contraire, n’éprouver aucune difficulté financière. Sachant qu’il aura toujours la possibilité de s’offrir une nouvelle cravate en cas d’oubli, il cherche simplement, en priorité, lui aussi, la légèreté !

4. Les « conservateurs » : un look immuable, oĂč qu’ils se trouvent

Enfin, en puisant dans les valises d’une population autant féminine que masculine, on remarque l’étonnante capacité de certains touristes à refuser d’arborer d’autres codes vestimentaires que leurs codes habituels.

Portant les mêmes oripeaux, quels que soit le contexte et la destination vers laquelle ils se déplacent, leurs valises, remplies plus ou moins vite, reproduisent à l’identique leur garde-robe habituelle.

Laquelle est le reflet de leur personnalité et de leur porte-monnaie. Elle peut donc être soit raffinée et détaillée, voire luxueuse, soit simple et dépouillée, soit sportive, soit stricte, soit empreinte de coquetterie, soit totalement calquée sur les gravures des magazines... Mais, cette incapacité à changer de peau et à se couler dans le même moule quel que soit le contexte, provient de 2 traits de personnalitĂ©. Lesquels ?

- Les paresseux : Soucieux de limiter au maximum leurs efforts, ils limitent par la même occasion leurs préparatifs de voyages. Ce qui les entraînent à puiser dans leurs garde-robes leurs vêtements habituels qu’ils portent jusqu’à l’usure. Partisans du moindre effort, ils sont paradoxalement des voyageurs peu soucieux de confort, flexibles, faciles à contenter... Ce sont aussi ceux qui, par manque d’imagination, ont du mal à se projeter « ailleurs », donc Ă  s’imaginer « autre »

- Les pressés : Ceux-là n’ont tout simplement pas eu le temps de se livrer à une activité qu’ils jugent chronophage. Pressés, ils bourrent leur bagage de leurs effets habituels. Une attitude pré-vacancière qui ne se vérifie pas forcément dans leur consommation de voyages. Pressés au départ, au point de garder leurs costumes de travail, ces vacanciers voyageurs peuvent aussi par la suite aspirer à une extrême lenteur

SUITE : demain


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Josette Sicsic
Josette Sicsic
Journaliste, consultante, confĂ©renciĂšre, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les consĂ©quences sur le secteur du tourisme.

AprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualitĂ© oĂč elle dĂ©code le prĂ©sent pour prĂ©voir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com


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