Travel Europe : "il n'existe aucune alternative à la fermeture" [ABO]

Comme nous vous l'annoncions en exclusivité vendredi, le redressement judiciaire de Travel Europe n'ira pas à son terme.

En fin de semaine dernière, les dirigeants ont pris la parole devant les 116 salariés du géant autrichien du voyage pour leur annoncer la nouvelle.

Aucune solution financière n'a été trouvée, malgré des discussions, avec un "partenaire solide" afin d'apporter de l'argent pour permettre de restructurer l'entreprise.


Il y a bien eu la rumeur d'un sauveur investisseur français (?) de dernière minute, mais cela ne change rien. Travel Europe a dû fermer ses portes ce lundi 27 janvier 2025.

"L'administrateur judiciaire a signalé au tribunal que les négociations avec l'investisseur initialement intéressé avaient échoué.

Il est peu probable qu'une restructuration de l'entreprise insolvable soit possible en raison du manque de fonds frais," nous a confié Klaus Schaller, le directeur régional ouest de l'Association de protection des créanciers KSV1870.

La justice autrichienne a mis à jour ce mardi matin le dossier du tour-opérateur indiquant que "l'entreprise reçoit l'ordre de fermer ses portes."

Une bien triste nouvelle, pour un tour-opérateur très largement revendu chez les autocaristes français.

"Les négociations de financement menées dans le cadre des efforts de redressement avec divers investisseurs ont échoué.

De plus, aucune nouvelle liquidité n'a pu être mise à disposition par les créanciers financiers.

L'entreprise doit maintenant être fermée. Une demande correspondante a déjà été déposée auprès du tribunal vendredi dernier," nous rapporte Tristan Prem, de l'Association de protection des créanciers, Creditreform.

Et il suffit de lire nos confrères autrichiens, pour se rendre compte que, malheureusement, l'aventure de Travel Europe a bel et bien pris fin cette semaine.

D'ailleurs l'AFP (Austria Presse Agentur) locale reprend un communiqué de la direction du tour-opérateur qui explique que "malgré des discussions intensives avec deux partenaires du secteur, il n'était malheureusement pas possible de créer la sécurité nécessaire à la poursuite des opérations dans le délai très limité disponible."

L'agence nous confirme avoir eu la validation de la fermeture de l'entreprise par la direction.

Un arrêt définitif de l'activité a donc été proclamé ce lundi 27 janvier 2025, par la justice du pays.

Dans le même temps, l'équipe du tour-opérateur s'évertue à garantir la meilleure gestion possible des affaires pour ses clients, salariés et fournisseurs.

Pour le directeur de l'association de créanciers, Klaus Schaller il n'y a plus de place au doute.

"Je ne suis pas en mesure de commenter la déclaration de M. Anton Gschwentner.

En raison des exigences du droit de l’insolvabilité et de la situation actuelle des liquidités de l’entreprise, il n’y a pas d’alternatives à cette fermeture.

Une poursuite des activités n’aurait été possible que si un investisseur avait accepté de la financer. Selon l’administrateur judiciaire, un tel investisseur n’est actuellement pas disponible," poursuit le responsable de KSV 1870.

Le directeur général du groupe a bien tenté de rejeter la faute sur les représentants des créanciers, en vain. Le tribunal a validé la sentence, elle est irrévocable.

Autant d'affirmations de la part de différentes sources officielles qui interpellent au regard des propos rapportés par certains titres de la presse professionnelle en France. Selon des confrères, un mystérieux investisseur français signerait demain une prise de participation majoritaire dans le capital, permettant de sauver 90% des effectifs.

Pourtant, les dernières informations nous disent le contraire. Il y aurait bien eu des discussions avec un groupe d’investisseurs français ont échoué dès la mi-janvier.

La direction de la société débitrice a ensuite engagé d'autres discussions avec un investisseur potentiel au Royaume-Uni et en France.

Cependant, ces discussions n'ont pas non plus abouti aux résultats escomptés, d'après Creditreform.

"L'entreprise est formellement fermée et liquidée par l'administrateur judiciaire.

Il se peut que quelques commandes soient encore achevées, dont on peut attendre un excédent, mais sinon, l'activité commerciale est arrêtée.

Dans le cadre de la liquidation, les filiales pourraient également être vendues dans leur intégralité, mais je n'ai pas d'informations à ce sujet," nous affirme Tristan Prem, le référent en matière d’insolvabilité pour le Tyrol.

Ce sera tout l'enjeu des prochains jours et semaines : savoir ce qu'il advient de Visit Europe.

Pour l'heure, les salariés ne savent toujours pas quel sort les attend. L'entité française est totalement indépendante et en bien meilleure santé que sa maison mère.

"Ils sont adhérents. Nous ne sommes pas inquiets. En cas de sinistre, ce ne seront pas de gros chiffres, puisque la société travaille essentiellement en BtoB. De plus, la filiale française n’est pas dans la même situation financière que la maison-mère.

Elle est saine. Tout comme FTI, nous nous sentons concernés, surtout par rapport aux agences de voyages qui pourraient être impactées.

Les difficultés d'un producteur ne renvoient pas une bonne image de la profession, ce n'est jamais bon," nous avait alors confié Mumtaz Teker, le président de l’Association Professionnelle de Solidarité du Tourisme, début janvier.

Et tout comme FTI, l'avenir de Visit Europe s'écrit en pointillé. Le tour-opérateur va se retrouver privé de produits et face à une défiance du marché. D'ailleurs, l'annonce du redressement début janvier, avait entrainé un ralentissement des réservations et provoqué quelques départs.

Peut être qu'un investisseur ou un acteur sera intéressé par la reprise d'une belle marque de l'industrie ?

En attendant, Travel Europe n'est plus. Avec un passif de 30 millions d'euros dont 12,4 millions d'euros étaient en grande partie jugés irrécupérables, selon l'Association alpine des créanciers (AKV), le poids de la dette était devenu bien trop important.

Une somme globale qui comprend les indemnités de licenciement des 116 salariés, toujours selon Klaus Schaller, cité par nos confrères de Tirol.orf.

L'issue de la procédure ne faisait pas beaucoup de doute dans l'esprit des professionnels avec lesquels nous avons échangé, depuis l'annonce du 7 janvier.

Si Travel Europe était un mastodonte du secteur, -son chiffre d'affaires a dépassé les 95 millions d'euros-, il s'est mué en colosse aux pieds d'argile, gravement affaibli par la crise sanitaire.

Bien qu'en France l'année 2023 a été celle de tous les records, ce n'est pas du tout le cas pour le TO autrichien.

Les recettes étaient encore de moitié inférieures à celles d'avant covid, à 45,839 millions d'euros.

Une reprise trop lente, doublée du déclenchement de la guerre en Ukraine, lui a fait perdre plusieurs millions, en raison d'un investissement réalisé sur le marché russe, devenu depuis inaccessible.

En face des dettes du groupe se trouve un montant d'actif de seulement 3 millions d'euros. Une somme bien faible, au regard du passif et des 1 900 créanciers touchés par la faillite.