Sur le papier, le but de Grandeur Nature est d'organiser, programmer et promouvoir des centres de vacances au profit des enfants et adolescents de 4 à 17 ans en grandes difficultés sociale et familiale - Photo-Libre.fr
Visiblement, pour gagner de l'argent dans le tourisme, il est inutile de s'embêter à créer une entreprise et à tout mettre en œuvre pour la guider vers le succès.
Non, la solution la plus simple consiste plutôt à monter une association.
Et, surtout, n'avoir aucun scrupule... C'est en tout cas l'enseignement qui peut être tiré de l'étude d'un cas précis : Grandeur Nature.
Il s'agit d'une association immatriculée en avril 1990 dont des statuts ont été déposés le 21 septembre 2004 auprès des services de la sous-préfecture de Rambouillet, dans les Yvelines (78).
Il y est précisé que la structure a pour but "l'organisation, la programmation, la promotion de centres de vacances au profit des enfants et adolescents de 4 à 17 ans en grandes difficultés sociale et familiale."
Il y est ajouté que "l'association se reconnaît une mission d'intégration des enfants et des adolescents confiés (…) dans des centres de vacances ouverts à tous les publics afin de garantir une insertion personnalisée et contrôlée, sur des structures permettant une mixité sociale accrue."
Des objectifs on ne peut plus louables et qui, sur le papier du moins, ne paraissent en aucun cas contestables. Sauf que, dans les faits, l'activité de l'association n'a pas grand chose de philanthropique.
Non, la solution la plus simple consiste plutôt à monter une association.
Et, surtout, n'avoir aucun scrupule... C'est en tout cas l'enseignement qui peut être tiré de l'étude d'un cas précis : Grandeur Nature.
Il s'agit d'une association immatriculée en avril 1990 dont des statuts ont été déposés le 21 septembre 2004 auprès des services de la sous-préfecture de Rambouillet, dans les Yvelines (78).
Il y est précisé que la structure a pour but "l'organisation, la programmation, la promotion de centres de vacances au profit des enfants et adolescents de 4 à 17 ans en grandes difficultés sociale et familiale."
Il y est ajouté que "l'association se reconnaît une mission d'intégration des enfants et des adolescents confiés (…) dans des centres de vacances ouverts à tous les publics afin de garantir une insertion personnalisée et contrôlée, sur des structures permettant une mixité sociale accrue."
Des objectifs on ne peut plus louables et qui, sur le papier du moins, ne paraissent en aucun cas contestables. Sauf que, dans les faits, l'activité de l'association n'a pas grand chose de philanthropique.
Un rôle de distributeur de voyages
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Grandeur Nature joue un rôle d'intermédiaire entre des services d'action sociale, des collectivités locales ou des associations spécialisées et des centres de vacances pour un public de jeunes.
Concrètement, elle achète des séjours aux organisateurs et les revend ensuite aux centres sociaux ou collectivités locales qui s'occupent de mineurs ou de jeunes majeurs "en difficulté" placés en foyer ou en institutions spécialisées.
Sans oublier, bien sûr, de prendre une marge au passage.
Dans les faits, "Grandeur Nature joue donc le rôle de distributeur de voyages", en conclut une avocate spécialisée dans le secteur du tourisme.
L'association est donc soumise aux articles L211-1 et L211-18 du Code du Tourisme. Le premier mentionne les personnes physiques ou morales qui doivent s'immatriculer au Registre des Opérateurs de Voyages et de Séjours d'Atout France comme le prévoit le deuxième article mentionné.
Or, Grandeur Nature n'apparaît pas dans ce registre. Par ailleurs, il n'est fait mention de cette éventuelle immatriculation dans aucun des documents émis par cette association. Elle semble donc exercer en toute illégalité sur ce point.
Précisons également que Grandeur Nature ne dispose pas non plus de garantie financière comme l'obligent pourtant les articles L211-18 et R211-26 du Code du Tourisme. Difficile donc, pour ses clients et ses partenaires d'obtenir un remboursement en cas de défaillance.
De plus, d'après les divers témoignages récoltés par TourMaG.com et à la suite d'une comparaison entre les tarifs pratiqués par Grandeur Nature et ceux affichés par les organisateurs des séjours distribués, l'association aurait la fâcheuse habitude de "sur-marger".
Concrètement, elle achète des séjours aux organisateurs et les revend ensuite aux centres sociaux ou collectivités locales qui s'occupent de mineurs ou de jeunes majeurs "en difficulté" placés en foyer ou en institutions spécialisées.
Sans oublier, bien sûr, de prendre une marge au passage.
Dans les faits, "Grandeur Nature joue donc le rôle de distributeur de voyages", en conclut une avocate spécialisée dans le secteur du tourisme.
L'association est donc soumise aux articles L211-1 et L211-18 du Code du Tourisme. Le premier mentionne les personnes physiques ou morales qui doivent s'immatriculer au Registre des Opérateurs de Voyages et de Séjours d'Atout France comme le prévoit le deuxième article mentionné.
Or, Grandeur Nature n'apparaît pas dans ce registre. Par ailleurs, il n'est fait mention de cette éventuelle immatriculation dans aucun des documents émis par cette association. Elle semble donc exercer en toute illégalité sur ce point.
Précisons également que Grandeur Nature ne dispose pas non plus de garantie financière comme l'obligent pourtant les articles L211-18 et R211-26 du Code du Tourisme. Difficile donc, pour ses clients et ses partenaires d'obtenir un remboursement en cas de défaillance.
De plus, d'après les divers témoignages récoltés par TourMaG.com et à la suite d'une comparaison entre les tarifs pratiqués par Grandeur Nature et ceux affichés par les organisateurs des séjours distribués, l'association aurait la fâcheuse habitude de "sur-marger".
Jusqu'à 63,5 % de taux de marge
Ainsi, suivant les offres, le taux de marge peut varier de 7 % à 63,5 % ! Pour une association sans but lucratif mais avec des objectifs "sociaux", cela paraît étonnant.
Apparemment, elle jouerait sur la méconnaissance, à propos du secteur du tourisme, des fonctionnaires chargés de gérer les budgets destinés aux vacances des enfants en difficulté sociale pour qu'ils partent en vacances pour s'octroyer ces marges irréalistes sans être dérangée.
"Quand nous recevons la plaquette de Grandeur Nature, nous nous disons "enfin quelqu'un qui comprend nos besoins et connaît nos problématiques !" ", explique un travailleur social qui souhaite conserver son anonymat.
D'autres se souviennent, en parlant du Président de l'association, d'un personnage "assez jovial" à qui "on a envie de faire confiance".
Le problème c'est qu'il est difficile de comprendre où finit la masse d'argent gagné par l'association. Par définition, celle-ci ne doit pas enrichir directement ou indirectement l'un de ses membres et réinvestir ses éventuels excédents d'exploitation dans son activité.
Sauf que Grandeur Nature ne dispose pas de site Internet et ne fait pas de communication. Elle diffuse seulement ses catalogues par courrier électronique.
Et les brochures qu'elle propose affichent un design très simple comparable à des travaux de collégiens sur un logiciel de traitement de texte.
Par ailleurs, il est étonnant de constater que son bureau n'est composé que de deux personnes : M. Thierry Tissier en tant que Président de l'association... et la femme de ce dernier, Mme Isabelle Tisser en tant que Secrétaire.
Apparemment, elle jouerait sur la méconnaissance, à propos du secteur du tourisme, des fonctionnaires chargés de gérer les budgets destinés aux vacances des enfants en difficulté sociale pour qu'ils partent en vacances pour s'octroyer ces marges irréalistes sans être dérangée.
"Quand nous recevons la plaquette de Grandeur Nature, nous nous disons "enfin quelqu'un qui comprend nos besoins et connaît nos problématiques !" ", explique un travailleur social qui souhaite conserver son anonymat.
D'autres se souviennent, en parlant du Président de l'association, d'un personnage "assez jovial" à qui "on a envie de faire confiance".
Le problème c'est qu'il est difficile de comprendre où finit la masse d'argent gagné par l'association. Par définition, celle-ci ne doit pas enrichir directement ou indirectement l'un de ses membres et réinvestir ses éventuels excédents d'exploitation dans son activité.
Sauf que Grandeur Nature ne dispose pas de site Internet et ne fait pas de communication. Elle diffuse seulement ses catalogues par courrier électronique.
Et les brochures qu'elle propose affichent un design très simple comparable à des travaux de collégiens sur un logiciel de traitement de texte.
Par ailleurs, il est étonnant de constater que son bureau n'est composé que de deux personnes : M. Thierry Tissier en tant que Président de l'association... et la femme de ce dernier, Mme Isabelle Tisser en tant que Secrétaire.
Pas vraiment des partenaires
Le Président de Grandeur Nature affirme travailler avec des "partenaires" qui lui "font confiance depuis 20 ans", comme l'assurent les brochures. Mais les organisateurs des séjours vendus ne sont pas vraiment tous des "partenaires".
En fait, l'association fait plutôt appel à certains prestataires de manière ponctuelle, sans aucune convention. C'est le cas de Sport Elite Jeune (SEJ) dont Grandeur Nature propose des camps d'entraînement de football.
Contacté par TourMaG.com, Christophe Mariani, Directeur de SEJ assure qu'il n'a aucun partenariat avec Grandeur Nature. "Ils font appel à nous quand ils ont des jeunes à placer. Principalement en août depuis 4 ou 5 ans", explique-t-il.
Même son de cloche du côté de Les Compagnons des Jours Heureux (CJH), autre organisateur de vacances dont Grandeur Nature propose la production. Elle a accueilli des jeunes envoyés par l'association en 2010 et 2012.
"C'est le responsable de Grandeur Nature qui nous contacte directement et nous demande s'il nous reste des places. Mais nous n'avons pas de partenariat", nous assure Evelyne Aubry, collaboratrice de CJH.
Aucune de ces deux structures ne nous a fait part de problèmes lors ou à la suite de l'accueil des jeunes placés par Grandeur Nature.
Mais ce n'est pas le cas de tout ceux qui ont eu affaire à cette association. Avec, en tête de liste Jean-Marc Folliet, Directeur et fondateur de Cap Juniors.
A priori, il s'agit, à ce jour, du seul professionnel du tourisme qui a assigné Grandeur Nature en justice. Pour l'absence de règlement des séjours réservés.
"Ils ont perdu. Ils ont payé. Mais depuis, ils continuent d'opérer sans que personne ne l'inquiète", déplore M. Folliet.
En fait, l'association fait plutôt appel à certains prestataires de manière ponctuelle, sans aucune convention. C'est le cas de Sport Elite Jeune (SEJ) dont Grandeur Nature propose des camps d'entraînement de football.
Contacté par TourMaG.com, Christophe Mariani, Directeur de SEJ assure qu'il n'a aucun partenariat avec Grandeur Nature. "Ils font appel à nous quand ils ont des jeunes à placer. Principalement en août depuis 4 ou 5 ans", explique-t-il.
Même son de cloche du côté de Les Compagnons des Jours Heureux (CJH), autre organisateur de vacances dont Grandeur Nature propose la production. Elle a accueilli des jeunes envoyés par l'association en 2010 et 2012.
"C'est le responsable de Grandeur Nature qui nous contacte directement et nous demande s'il nous reste des places. Mais nous n'avons pas de partenariat", nous assure Evelyne Aubry, collaboratrice de CJH.
Aucune de ces deux structures ne nous a fait part de problèmes lors ou à la suite de l'accueil des jeunes placés par Grandeur Nature.
Mais ce n'est pas le cas de tout ceux qui ont eu affaire à cette association. Avec, en tête de liste Jean-Marc Folliet, Directeur et fondateur de Cap Juniors.
A priori, il s'agit, à ce jour, du seul professionnel du tourisme qui a assigné Grandeur Nature en justice. Pour l'absence de règlement des séjours réservés.
"Ils ont perdu. Ils ont payé. Mais depuis, ils continuent d'opérer sans que personne ne l'inquiète", déplore M. Folliet.
Les jeunes paient les pots cassés
De nombreux autres producteurs ont eu de problèmes avec Grandeur Nature mais ne sont pas allés jusqu'au procès. La liste est longue.
Y figure notamment Action Séjours qui organise des séjours linguistiques. "Nous avons travaillé avec Grandeur Nature pendant deux ans, il y a 5 ou 6 ans. Il ne nous ont jamais payés", se souvient Serge Courault, Directeur.
Pour Eval Voyages, agence spécialisée dans le tourisme des juniors, la mésaventure s'est déroulée selon un scénario différent mais avec les mêmes conséquences.
"J'ai perdu 15 000 € pour des séjours réservés par Grandeur Nature en février 2012, martèle d'emblée Nasser Rohmer, Directeur Général. Nous avions signé un convention.
Un séjour avait été organisé avec plus de 17 enfants. Il a été annulé environ un mois et demi avant le début des vacances, de manière unilatérale."
Des deux côtés de la chaîne, les griefs sont légion. D'autres acteurs contactés dénoncent l'absence d'informations fournies par Grandeur Nature aux organisateurs sur des situations parfois compliquées de certains jeunes ou l'absence d'intervention en cas de difficultés.
Mais aussi le paiement de prestations avec les acomptes des saisons suivantes, l'absence de remboursement de séjours annulés et des clauses contractuelles liées au Conditions générales de ventes (CGV) incohérentes.
Par conséquent, face à ces pratiques, les professionnels concernés prennent leurs précautions. "Depuis ce problème, nous n'organisons rien sans règlement", conclut Nasser Rohmer.
Il a ainsi décidé de mettre en place des protocoles de partenariat beaucoup plus stricts pour ses relations commerciales avec des intermédiaires associatifs ou non.
Ce qui, du coup, empêche certaines structures d'avoir accès à ses offres. Et donc prive de vacances certains enfants qui en auraient pourtant bien besoin... Sans que cela n'émeuve vraiment les institutionnels.
Y figure notamment Action Séjours qui organise des séjours linguistiques. "Nous avons travaillé avec Grandeur Nature pendant deux ans, il y a 5 ou 6 ans. Il ne nous ont jamais payés", se souvient Serge Courault, Directeur.
Pour Eval Voyages, agence spécialisée dans le tourisme des juniors, la mésaventure s'est déroulée selon un scénario différent mais avec les mêmes conséquences.
"J'ai perdu 15 000 € pour des séjours réservés par Grandeur Nature en février 2012, martèle d'emblée Nasser Rohmer, Directeur Général. Nous avions signé un convention.
Un séjour avait été organisé avec plus de 17 enfants. Il a été annulé environ un mois et demi avant le début des vacances, de manière unilatérale."
Des deux côtés de la chaîne, les griefs sont légion. D'autres acteurs contactés dénoncent l'absence d'informations fournies par Grandeur Nature aux organisateurs sur des situations parfois compliquées de certains jeunes ou l'absence d'intervention en cas de difficultés.
Mais aussi le paiement de prestations avec les acomptes des saisons suivantes, l'absence de remboursement de séjours annulés et des clauses contractuelles liées au Conditions générales de ventes (CGV) incohérentes.
Par conséquent, face à ces pratiques, les professionnels concernés prennent leurs précautions. "Depuis ce problème, nous n'organisons rien sans règlement", conclut Nasser Rohmer.
Il a ainsi décidé de mettre en place des protocoles de partenariat beaucoup plus stricts pour ses relations commerciales avec des intermédiaires associatifs ou non.
Ce qui, du coup, empêche certaines structures d'avoir accès à ses offres. Et donc prive de vacances certains enfants qui en auraient pourtant bien besoin... Sans que cela n'émeuve vraiment les institutionnels.