Difficile anniversaire pour la Tunisie, qui a connu de fortes manifestations. Depuis début janvier 2018, la population tunisienne et essentiellement la jeunesse proteste contre le coût de la vie et le taux de chômage (cf notre encadré). Au cœur des revendications, le demande de retrait de la récente loi de finance.
Des manifestations qui ont attiré un certain nombre de casseurs.
Le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme en Tunisie (HCDH), cité par le journal tunisien Le Temps, évoque « des pillages, du vandalisme et de la violence, y compris des dégâts causés à des commissariats de police et à des magasins », rappelant qu’à côté, la majeure partie des manifestants « font preuve de retenue et de calme ».
De son côté, le Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT) a dénoncé une attitude critique du président envers la presse internationale et « l'arrestation, pendant quelques heures, d'un journaliste de Libération et un de RFI », indiquant que ces arrestations n’avaient été suivies d’aucune conséquence notable. « Nous mettons en garde, ce sont de petites choses mais on sonne l’alarme pour que la démocratie perdure ».
« Les jeunes sont en colère contre le chômage et la hausse des prix. A côté de ces manifestants, des casseurs en profitent mais la situation est normale », ajoute le SNJT, rejoint par différents observateurs qui évoquent l'attitude de la police, qui encadre sans répression et surtout, la liberté de la presse.
L’expression d’une jeune démocratie en colère, en somme… Mais il semble que, depuis la France, l’image soit un peu déformée.
Des manifestations qui ont attiré un certain nombre de casseurs.
Le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme en Tunisie (HCDH), cité par le journal tunisien Le Temps, évoque « des pillages, du vandalisme et de la violence, y compris des dégâts causés à des commissariats de police et à des magasins », rappelant qu’à côté, la majeure partie des manifestants « font preuve de retenue et de calme ».
De son côté, le Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT) a dénoncé une attitude critique du président envers la presse internationale et « l'arrestation, pendant quelques heures, d'un journaliste de Libération et un de RFI », indiquant que ces arrestations n’avaient été suivies d’aucune conséquence notable. « Nous mettons en garde, ce sont de petites choses mais on sonne l’alarme pour que la démocratie perdure ».
« Les jeunes sont en colère contre le chômage et la hausse des prix. A côté de ces manifestants, des casseurs en profitent mais la situation est normale », ajoute le SNJT, rejoint par différents observateurs qui évoquent l'attitude de la police, qui encadre sans répression et surtout, la liberté de la presse.
L’expression d’une jeune démocratie en colère, en somme… Mais il semble que, depuis la France, l’image soit un peu déformée.
Une dramatisation médiatique ?
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Sans condamner, Wahida Jaiet, directrice de l'Office National du Tourisme Tunisien (ONTT) en France pointe du doigts certaines interprétations.
« Chacun s'exprime à sa manière. La presse a peut-être exagéré la diffusion de certaines images qui ont interpellé les gens. Certains commentaires on pu exacerber le volet émotionnel » avance-t-elle, avant de réaffirmer la légitimité des protestations : « Il ne s'agit que de grogne sociale, de l'expression d'une population qui exerce, simplement, son droit à manifester.
Quoi de plus démocratique ? Des voyous ont profité des manifestations pour piller, mais ces dérapages existent dans toutes les grandes métropoles ».
Plus en colère, Rym Ben Fadhel Belajouza, directrice générale de Seabel dénonce « un acharnement des médias français. On a l’impression que le pays est à feu et à sang, alors que c’est très localisé, en banlieue de Tunis et dans le Nord-Ouest », comprendre : loin des zones touristiques. Et d’évoquer des « coups de fils affolés » et des mails de questionnements, totalement injustifiés de son point de vue.
Même son de cloche chez Royal First Travel, agence essentiellement tournée vers la Tunisie. « Il y a une récupération des médias en France analyse René Trabelsi, gérant de l’agence. On doit rassurer les clients, il y a un léger ralentissement mais aucune annulation, juste des questions.
On explique, ça n’est qu’un mouvement social, les problèmes de violence ont lieu le soir, le reste du temps on ne voit rien. Je reviens de Djerba et il n'y avait rien : le mouvement est vraiment concentré sur des zones éloignées des zones touristiques ».
Un effet de loupe médiatique mais aussi politique, selon lui. « Les élections (municipale, et législative en 2019 NDLR) approchent, et l’opposition s’empare du désordre. Mais c’est le jeu démocratique ! ». Une opposition assez divisée, à qui le gouvernement a proposé en fin de semaine dernière une série de mesures sociales en direction des plus pauvres... Calmant peu à peu les manifestants.
« Chacun s'exprime à sa manière. La presse a peut-être exagéré la diffusion de certaines images qui ont interpellé les gens. Certains commentaires on pu exacerber le volet émotionnel » avance-t-elle, avant de réaffirmer la légitimité des protestations : « Il ne s'agit que de grogne sociale, de l'expression d'une population qui exerce, simplement, son droit à manifester.
Quoi de plus démocratique ? Des voyous ont profité des manifestations pour piller, mais ces dérapages existent dans toutes les grandes métropoles ».
Plus en colère, Rym Ben Fadhel Belajouza, directrice générale de Seabel dénonce « un acharnement des médias français. On a l’impression que le pays est à feu et à sang, alors que c’est très localisé, en banlieue de Tunis et dans le Nord-Ouest », comprendre : loin des zones touristiques. Et d’évoquer des « coups de fils affolés » et des mails de questionnements, totalement injustifiés de son point de vue.
Même son de cloche chez Royal First Travel, agence essentiellement tournée vers la Tunisie. « Il y a une récupération des médias en France analyse René Trabelsi, gérant de l’agence. On doit rassurer les clients, il y a un léger ralentissement mais aucune annulation, juste des questions.
On explique, ça n’est qu’un mouvement social, les problèmes de violence ont lieu le soir, le reste du temps on ne voit rien. Je reviens de Djerba et il n'y avait rien : le mouvement est vraiment concentré sur des zones éloignées des zones touristiques ».
Un effet de loupe médiatique mais aussi politique, selon lui. « Les élections (municipale, et législative en 2019 NDLR) approchent, et l’opposition s’empare du désordre. Mais c’est le jeu démocratique ! ». Une opposition assez divisée, à qui le gouvernement a proposé en fin de semaine dernière une série de mesures sociales en direction des plus pauvres... Calmant peu à peu les manifestants.
2018, un grand cru pour le tourisme
Des heurts qui se terminent bien avant Pâques et le début du déferlement touristique attendu en Tunisie.
« Je suis très optimiste affirme René Trabelsi Les réservations sont en hausse de manière exponentielle : pratiquement 80% par rapport à l'année précédente ! Il y a même déjà des réservations pour l'été, et des demandes de groupes, ce qu'on ne voyait plus depuis 7 ans ».
Des groupes qui sont, pour l'ONTT, un segment clé à reconquérir. Au delà du retour du public familial habituel, l'organisme compte sur « le MICE, la thalasso et surtout les groupes et les seniors » pour accompagner la reprise.
Même son de cloche chez les hôteliers. Les statistiques nationales officielles prévoient environ + 83% de nuitées supplémentaires au national. « C'est toujours 43% de moins qu'en 2014 » modère Rym Ben Fadhel Belajouza, avant d'annoncer une croissance de +40 voire 50% pour Seabel par rapport à l'année passée, et « une progression à deux chiffres, notamment à Djerba ».
Les professionnels du tourisme notent, de manière générale, un mouvement dynamique. Les tour-opérateurs ont lancé leur programmation et les réservations sont lancées. Dans tous les métiers, on révise la capacité d'accueil à la hausse et même pour l'hiver, l'année 2018 semble bien partie pour être celle qui va consolider le retour de 2017.
Le début d'année est une période creuse « mais déjà, il y a en janvier une hausse de +25,4% par rapport à la même période en 2017 » se félicite l'ONTT. « La croissance annuelle de 2017 affichait +46% et il y a d'ores et déjà il y a une confirmation de la relance ». Qui concerne plutôt le public étranger, puisque les Français ont tendance à réserver plus tard, mais les voyants sont au vert.
« Le retour des Anglais est timide parce que TUI et Thomas Cook sont généralement frileux note un observateur. Mais les Allemands et les Belges reviennent ».
Le tourisme russe, lui a déjà posé ses jalons note Rym Ben Fadhel Belajouza. « Prévoyants, ils protègent leurs contingents. Habituellement ça débute en mai, mais cette année les 1ers contrats ont été signés en novembre ! ». Seulement voilà. Les touristes russes ne dépensent pas, et ne bouge pas de l'hôtel. « Les Français partagent, ils vont en thalasso, font des excursions, ils achètent des souvenirs au souk, ils sortent... Ils sont prompts à dépenser et à participer à la vie économique » avance René Trabelsi.
Et de fait, c'est la clé, comme l'indiquaient de jeunes djerbiens que nous avons rencontré autour du 11 janvier 2018, lorsque les manifestations étaient au plus haut.
« On ne renoncerait pas à la démocratie, évidemment : on peut s'exprimer, la presse est libre... Mais il y a aussi la hausse des prix et les frustrations. A la place des Européens, on a vu arriver des Algériens (selon la ministre tunisienne du tourisme, Selma Elloumi Rekik, le nombre de touristes algériens en Tunisie entre janvier et septembre a bondi de 60% en 2017, NDLR) mais ils ont peu de revenus, les Russes dépensent moins et puis la culture est différente. Avec les Français, le contact est plus simple, et ils font marcher l'économie ».
Tous attendent le retour des touristes français, considéré comme l'une des solutions au coût de la vie dénoncé... lors des manifestations.
« Je suis très optimiste affirme René Trabelsi Les réservations sont en hausse de manière exponentielle : pratiquement 80% par rapport à l'année précédente ! Il y a même déjà des réservations pour l'été, et des demandes de groupes, ce qu'on ne voyait plus depuis 7 ans ».
Des groupes qui sont, pour l'ONTT, un segment clé à reconquérir. Au delà du retour du public familial habituel, l'organisme compte sur « le MICE, la thalasso et surtout les groupes et les seniors » pour accompagner la reprise.
Même son de cloche chez les hôteliers. Les statistiques nationales officielles prévoient environ + 83% de nuitées supplémentaires au national. « C'est toujours 43% de moins qu'en 2014 » modère Rym Ben Fadhel Belajouza, avant d'annoncer une croissance de +40 voire 50% pour Seabel par rapport à l'année passée, et « une progression à deux chiffres, notamment à Djerba ».
Les professionnels du tourisme notent, de manière générale, un mouvement dynamique. Les tour-opérateurs ont lancé leur programmation et les réservations sont lancées. Dans tous les métiers, on révise la capacité d'accueil à la hausse et même pour l'hiver, l'année 2018 semble bien partie pour être celle qui va consolider le retour de 2017.
Le début d'année est une période creuse « mais déjà, il y a en janvier une hausse de +25,4% par rapport à la même période en 2017 » se félicite l'ONTT. « La croissance annuelle de 2017 affichait +46% et il y a d'ores et déjà il y a une confirmation de la relance ». Qui concerne plutôt le public étranger, puisque les Français ont tendance à réserver plus tard, mais les voyants sont au vert.
« Le retour des Anglais est timide parce que TUI et Thomas Cook sont généralement frileux note un observateur. Mais les Allemands et les Belges reviennent ».
Le tourisme russe, lui a déjà posé ses jalons note Rym Ben Fadhel Belajouza. « Prévoyants, ils protègent leurs contingents. Habituellement ça débute en mai, mais cette année les 1ers contrats ont été signés en novembre ! ». Seulement voilà. Les touristes russes ne dépensent pas, et ne bouge pas de l'hôtel. « Les Français partagent, ils vont en thalasso, font des excursions, ils achètent des souvenirs au souk, ils sortent... Ils sont prompts à dépenser et à participer à la vie économique » avance René Trabelsi.
Et de fait, c'est la clé, comme l'indiquaient de jeunes djerbiens que nous avons rencontré autour du 11 janvier 2018, lorsque les manifestations étaient au plus haut.
« On ne renoncerait pas à la démocratie, évidemment : on peut s'exprimer, la presse est libre... Mais il y a aussi la hausse des prix et les frustrations. A la place des Européens, on a vu arriver des Algériens (selon la ministre tunisienne du tourisme, Selma Elloumi Rekik, le nombre de touristes algériens en Tunisie entre janvier et septembre a bondi de 60% en 2017, NDLR) mais ils ont peu de revenus, les Russes dépensent moins et puis la culture est différente. Avec les Français, le contact est plus simple, et ils font marcher l'économie ».
Tous attendent le retour des touristes français, considéré comme l'une des solutions au coût de la vie dénoncé... lors des manifestations.
Les tunisiens le reconnaissent : les manifestations sont le reflet d’une situation interne à leur pays, mais ne concernent nullement les touristes.
« Dans le mécontentement il n’y a aucune thématique étrangère, au contraire » souligne un membre de l’Ambassade de Tunisie à Paris.
Depuis la révolution entre fin 2010 et début 2011, les mouvements de protestations ne sont pas interdits en Tunisie. les droits de manifester, de protester et de s’exprimer sont un aspect de sa démocratie. La liberté d’expression est un acquis incontournable de la révolution tunisienne. Les tunisiens l'ont inscrit dans leur Constitution et en aucun cas ils ne feraient marche arrière. Ce qui est interdit, en revanche, ce sont les actes de vandalisme et de violence qui dégénèrent.
Mais le choc des images tend à amplifier les aspects négatifs de la situation.
Le pays connaît des difficultés socio-économiques majeures. Les attentes n’ont pas été réalisées par les gouvernements qui se sont succédés depuis le 14 janvier 2011. Il y a de vraies raisons de contestations et de revendications sociales, notamment ses 650 000 chômeurs, dont 40 % de diplômés supérieurs. La nouvelle loi de Finances allégeant les subventions sur certains produits a été très mal ressentie et a mit le feu aux poudres.
La Tunisie est un petit marché qui ne peut pas à lui seul assurer sa relance économique. Elle doit s’ouvrir sur l’étranger. Elle a besoin de plans qui sortent des cadres traditionnels de coopération.
Elle ne cesse de signaler ces difficultés auprès des autorités françaises. Elle attire leur attention sur la nécessité de développer des programmes de coopération et d’investissement, de trouver les moyens d’agir ici afin de trouver des solutions et de rétablir la situation là-bas.
Est-elle entendue ?
Michèle Sani, notre spécialiste Tunisie
« Dans le mécontentement il n’y a aucune thématique étrangère, au contraire » souligne un membre de l’Ambassade de Tunisie à Paris.
Depuis la révolution entre fin 2010 et début 2011, les mouvements de protestations ne sont pas interdits en Tunisie. les droits de manifester, de protester et de s’exprimer sont un aspect de sa démocratie. La liberté d’expression est un acquis incontournable de la révolution tunisienne. Les tunisiens l'ont inscrit dans leur Constitution et en aucun cas ils ne feraient marche arrière. Ce qui est interdit, en revanche, ce sont les actes de vandalisme et de violence qui dégénèrent.
Mais le choc des images tend à amplifier les aspects négatifs de la situation.
Le pays connaît des difficultés socio-économiques majeures. Les attentes n’ont pas été réalisées par les gouvernements qui se sont succédés depuis le 14 janvier 2011. Il y a de vraies raisons de contestations et de revendications sociales, notamment ses 650 000 chômeurs, dont 40 % de diplômés supérieurs. La nouvelle loi de Finances allégeant les subventions sur certains produits a été très mal ressentie et a mit le feu aux poudres.
La Tunisie est un petit marché qui ne peut pas à lui seul assurer sa relance économique. Elle doit s’ouvrir sur l’étranger. Elle a besoin de plans qui sortent des cadres traditionnels de coopération.
Elle ne cesse de signaler ces difficultés auprès des autorités françaises. Elle attire leur attention sur la nécessité de développer des programmes de coopération et d’investissement, de trouver les moyens d’agir ici afin de trouver des solutions et de rétablir la situation là-bas.
Est-elle entendue ?
Michèle Sani, notre spécialiste Tunisie