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Aérien : les services à bord justifient-ils réellement le grand écart du prix du billet ?

La chronique de Jean-Louis Baroux


Alors que les compagnies aériennes justifient leurs mauvais résultats par l'augmentation des prix du pétrole, Jean-Louis Baroux s'interroge sur l'écart grandissant des tarifs entre les classes Eco, Affaires et Première. Des différences qui fluctuent parfois de 5 000€, mais qui ne justifient pas pour autant la qualité des services à bord, faisant du client qui a vraiment payé le tarif, un passager triplement frustré...


Rédigé par le Lundi 10 Décembre 2012

En classe affaires : Air France 5 621€, British Airways 3 712€ et United Airlines en business/first 3 900€. La question pour le client reste : comment justifier ces écarts de tarifs ? - DR : AF - Ronan Guillou
En classe affaires : Air France 5 621€, British Airways 3 712€ et United Airlines en business/first 3 900€. La question pour le client reste : comment justifier ces écarts de tarifs ? - DR : AF - Ronan Guillou
Voici arrivé le temps des promotions d’hiver.

Je note au hasard : 494€ TTC entre Paris et les Antilles chez Air Caraïbes, 153€ TTC toujours Paris - Algérie avec Aigle Azur, et même Emirates s’y met : 657€ TTC par exemple pour aller à Bangkok.

J’ai même relevé un 80£ pour un aller-retour entre Londres Heathrow et New York. Et je continue à m’interroger sur la capacité de ces offres à payer les coûts, même directs, de ces prestations.

Il faut 18 heures de vol pour faire un aller-retour entre Paris et Fort de France, à 494€ TTC le prix du billet, cela laisse un peu plus de 27€ par heure de vol et encore la compagnie devra là-dessus payer les taxes aéroport et les différentes redevances aux contrôles aériens, aux autorités aéronautiques et j’en passe.

Bien entendu, la compagnie garde pour elle la surcharge carburant qu’elle met pourtant dans les taxes.

Le résultat est d’ailleurs similaire pour Emirates qui vend 26€ TTC son heure de vol entre Paris et Bangkok.

Qaund les prix promotionnels deviennent la base

Bien évidemment aucun de ces tarifs ne peut supporter les coûts de revient des compagnies aériennes, fussent-elles gérées avec la plus grande parcimonie.

Seulement voilà, cela met de mauvaises références dans l’esprit des clients, pour qui les prix promotionnels annoncés deviennent la base.

A tel point qu’ils se sentent volés si d’aventure ils doivent payer plus cher, voire un prix simplement normal.

Or qu’est-ce qu’un prix normal ? C’est un tarif qui couvre l’ensemble des charges de la compagnie y compris, bien entendu, son carburant.

Il ne sert à rien de nous rebattre les oreilles avec la sempiternelle augmentation des prix du pétrole pour expliquer les mauvais résultats du transport aérien.

Il suffit, comme tout bon commerçant peut le comprendre, d’intégrer cette charge dans le prix du billet, un point c’est tout.

Alors je dirais qu’on voit difficilement une compagnie équilibrer ses charges et dégager un profit normal, disons de l’ordre de 8% à 10% en vendant son heure de vol au-dessous de 50€ TTC en long courrier et de 80€ TTC à 100€ TTC en court courrier. C’est le double de ce qui est proposé aux clients.

Les prestations sur la ligne transatlantique sont simplement indignes

A l’opposé de ces promotions, il y a les prix en première et business classe.

En prenant comme référence par exemple le Paris - New York, aller le 14 décembre et retour le 20 décembre, on trouve les tarifs suivants : en première classe : Air France 11 148€ TTC, British Airways 6 502€ TTC (escale à Londres).

En classe affaires : Air France 5 621€, British Airways 3 712€ (toujours transit Londres) et United Airlines en business/first 3 900€.

Alors la question reste pour le client décidé à se payer ce type de transport : comment justifier ces écarts de tarifs.

Par exemple, quelle prestation peut fournir Air France pour compenser les 5 527€ entre la Business et la First ?

Alors certes, les clients première classe sont traités séparément, tout au moins ce devrait être le cas, mais British Airways mélange allègrement tous ses clients à leur arrivée aux Etats Unis : pas de « fast track », pas de navettes spéciales pour les passagers Business et First lorsque les avions ne sont pas au contact.

Certes les sièges sont différents et on est assuré de trouver un lit plat en Première. Mais progressivement cela devient la norme en classe affaires.

Restent les prestations servies à bord. Tout de même, les clients passent aux alentours de 8 heures de vol et les compagnies ont le temps de les choyer. J’ajoute que le prix du catering, même de grande qualité, est ridicule par rapport à la différence tarifaire.

Eh bien, disons-le, les prestations sur la ligne transatlantique qui devrait être la ligne « drapeau » pour ces compagnies, sont tout simplement indignes. Restent les accès aux salons aéroportuaires.

Il existe une réelle différence entre les salons First et Business chez pratiquement tous les transporteurs lorsque l’on est à leur base principale. Mais à destination les passagers sont là encore mélangés.

Le client qui a vraiment payé le tarif est frustré

Alors où est la « value for money » ? Comment les compagnies aériennes peuvent-elles continuer à ne pas fournir à leur clientèle une différence de service palpable qui justifierait la différence de prix.

Alors pour garnir leur première classe elles « upgradent » les clients de la classe affaires ou elles attribuent tout simplement les sièges aux personnels de la compagnie.

En fait le client qui a vraiment payé le tarif est triplement frustré : il n’est pas reconnu, il n’est pas bien traité en vol et dans des services au sol peu différenciés et il est entouré de clients qui ne paient pas ce qu’on lui a demandé.

Comment veut-on, dans ces conditions, que les clients se précipitent pour garnir l’avant des avions ? D’ailleurs il ne suffit pas d’occuper les sièges, encore faut-il les payer en bonne monnaie, nécessaire à l’équilibre économique des compagnies.

Il reste un énorme travail à faire. La clientèle existe. Il n’y a jamais eu autant de personnes riches dans le monde. Mais tous les passagers ne sont pas stupides et ils réclament d’en avoir tout simplement pour leur argent.

Jean-Louis Baroux, est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative
. Plus d’informations : www.editionsarchipel.com

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Tags : baroux
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Commentaires

1.Posté par Pierre le 19/12/2012 10:03 | Alerter
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En partie d'accord avec vous,mais il n'y a pas tres longtemps dans cette rubrique les tarifs etaient jugés trop elevés.
En fait chaque compagnie etablit ses tarifs suivant ses couts de revient,d'autres baissent leurs prix pour attirer le client,en general ça ne dure pas longtemps,
Bref il est tres compliqué d'etablir et de comparer les différents tarifs,mais pour ce qui est des prix affichés en France et dans tous les domaines,vous pouvez etre sur que la note sera toujours exorbitante

2.Posté par sxbrf le 19/12/2012 16:24 | Alerter
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La première des choses enseignée en Marketing c'est que le prix et le cout sont à dissocier. C'est pour ça que pour le même nombre de km il est possible d'avoir des prix différents. Exemple : tarif pour les US et l’Afrique n'ont rien à voir à distance égale.

De plus, pour répondre pourquoi la first CDG NYC coute plus chère avec AF, je citerai Donatella Versace qui agacé par le temps de transit à Heathrow dit « pourquoi prendre le concorde si c'est pour perdre le temps au sol »

3.Posté par justbiou le 23/12/2012 00:17 | Alerter
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M. Barroux est un professionnel compétent du transport aérien et sa rubrique n'en est que plus surprenante.

Le b. a.- BA du transport aérien, qu’il connaît parfaitement bien, est que le siège d'avion est un produit non stockable. Si Monsieur Peugeot ou Monsieur Renault fabriquent trop d'automobiles en hiver ils peuvent les stocker sur un parc en attendant la reprise des ventes au printemps. Tout le monde sait bien qu’il n'en est pas de même dans le transport aérien.

Supposons que sur Paris-Madrid le coût d'un siège soit de 100 € et que les prévisionnistes de la compagnie aérienne ( = yield management) estiment que le vol risque de partir avec 20 sièges vides, il n'est pas choquant que ces 20 sièges soient bradés à un prix inférieur au prix de revient, par exemple 50 €. Cela rapportera toujours plus que des sièges vides.

Les low cost basent leur politique commerciale sur cette réalité. La différence est qu'ils fonctionnent dans l’autre sens : les 10 premiers sièges sont vendus à 20 €, les 10 suivant à 30 €, etc. et les 10 derniers à 200 €.
D’autres stratégies ont été essayées, par exemple le Skytrain de Laker, mais elles n’ont pas tenu la route.

On peut discuter à perte de vue comme le fait M. Barroux mais il est indispensable de partir de prémisses correctes. Je suis d’ailleurs sûr que votre autre chroniqueur, Jean Belotti, partagerait le point de vue ci-dessus et non celui de M. Barroux.

Si la compagnie vendait tous ses sièges à leur coût réel les hauts tarifs dégringoleraient et les bas tarifs disparaîtraient ! Au final les avions voleraient à moitié vides car de nombreux consommateurs ne pourraient pas payer ce « tarif moyen » et l’avion coûterait tout aussi cher pour la compagnie.

Le chroniqueur évoque très rapidement la question des coûts. Parlons des sujets tabous comme le fait un hebdomadaire cette semaine : les frais de personnel des grandes compagnies européennes (BA, LH, AF,…) sont trop élevés.

Un des moyens de baisser ces coûts serait de créer un Pavillon International Français à Port-aux-Français. Dans le contexte politique actuel ce n'est pas imaginable.

En revanche, il ne serait pas surprenant que le gouvernement néerlandais crée un Pavillon International Néerlandais enregistré à Aruba ou Curaçao et dont profiterait KLM.

Les paris sont ouverts !

4.Posté par Voyagevoyage le 12/01/2013 09:06 | Alerter
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C'est énorme de dire que le problème vient des frais de personnel. Dans mon entreprise nous conciderons que le personnel est une richesse et pas une charge!!! Même si il y a un coût c'est grave aux salaires versés que la "terre tourne". En revanche oui le problème est que les clients ne comprennent plus les prix et veulent toujours payer moins cher sans rien comprendre aux conséquences! Donc rétablissons plutôt des prix dans la norme. Chacun préfère que les salaires des "autres" baissent pour faire baisser les prix de vente, mais que faire si c'est de votre salaire qu'il s'agit?

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