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Christophe Hay : hôtelier cinq étoiles, chef étoilé et ... paysan !

A Blois, "Fleur de Loire", un cinq étoiles en partenariat avec Sisley


Christophe Hay, ce chef qui joue dans la cour des plus grands, pilote désormais "Fleur de Loire", un hôtel de luxe installé au bord de la Loire, dans l'ancien hospice de Blois. Il se refuse à en faire "un lieu inaccessible" et combine sur place une table gastronomique et un restaurant également de qualité mais plus abordable.


Rédigé par le Jeudi 13 Juin 2024

Christophe Hay, un homme du terroir (@ © Maïkya Studio/ Fleur de Loire)
Christophe Hay, un homme du terroir (@ © Maïkya Studio/ Fleur de Loire)
Ce bâtiment en forme de U aux allures de château observe la ville de Blois plonger ses racines dans l’eau du plus long fleuve de France.

C'est sur ordre de Gaston d’Orléans, fils d’Henri IV et Marie de Médicis, qu'il a été construit. Devenu par la suite hospice puis, plus récemment, Ehpad, il abrite depuis deux ans un hôtel cinq étoiles de 44 chambres, dont 11 suites, baptisé "Fleur de Loire".

A sa tête, Christophe Hay. Ce chef doublement étoilé n'y règne pas seulement sur la table gastronomique qui porte son nom. Le patron de cet hôtel à la décoration soignée, c'est bel et bien lui.

C'est lui aussi qui règne sur l'autre restaurant (car il y en a deux), sur la pâtisserie et sur le Spa haut de gamme.

"Ici, je suis chez moi", dit-il avec une certaine satisfaction.


Christophe Hay, un homme qui sait saisir les "opportunités"

"Fleur de Loire" regarde vers le fleuve (@Alexandre Moulard/ Fleur de Loire)
"Fleur de Loire" regarde vers le fleuve (@Alexandre Moulard/ Fleur de Loire)
Christophe Hay est un homme qui aime (et qui sait) saisir les opportunités. "Ma vie a été faite d'opportunités", résume-t-il, d'ailleurs. Pour "Fleur de Loire", c'est une fois encore l'occasion qui a, si l'on peut dire, fait le larron.

Après des études au lycée hôtelier de Blois, ce disciple de Paul Bocuse a vécu cinq ans aux Etats-Unis. C'est « Monsieur Paul » qui lui avait demandé d’aller à Orlando, en Floride, s’occuper de son restaurant. Il y a appris l'anglais et bien d'autres choses qui lui sont fort utiles aujourd'hui.

Rentré ensuite à Paris, il y a vécu une seconde expérience tout aussi formatrice. Il a été le chef exécutif pour les cuisines de l’Hôtel de Sers, l’Hôtel Edouard 7 et le Bel-Ami. Là, il a appris à monter une équipe, à faire l’ouverture d’un restaurant, à concocter un business plan, à mener un établissement pour le compte d’investisseurs. Toutes choses également bien utiles pour la suite.

En 2013, Christophe Hay est finalement revenu au "pays". Non pas à Vendôme où il est né le 13 juin 1977, mais tout près, à Montlivault (Loir-et-Cher), parce qu'un ami lui avait signalé une petite auberge à vendre.

Il y a investi ses économies et emprunté le reste à la banque, pour ouvrir "La maison d’à côté" en mai 2014 avec une équipe de huit personnes. En 2015, il a décroché sa première étoile. C’est dès cette époque qu'il a commencé à cultiver son jardin pour alimenter sa cuisine.

En 2016, il complète son offre en créant à côté 12 chambres et un bistrot afin d'offrir une gastronomie accessible à tous. En 2019, il ouvre un second restaurant, avec la même promesse de qualité, baptisée "La table d'à côté", entre Orléans et à la Sologne. En janvier 2019, il a aussi décroché sa deuxième étoile. "J'ai alors accédé, se souvient-il, à une nouvelle clientèle. Nous sommes moins de 80 chefs à avoir deux étoiles en France".

Déjà, à cette époque, Christophe Hay déployait une cuisine inventive, magnifiant les produits de la Beauce, du Berry et du Val de Loire, notamment les poissons -mulet, brochet, anguille- du plus long fleuve de France. Mais aussi les légumes et "les graines".

Comme le succès avait, tout de suite, été au rendez-vous, lorsque s'est présentée l'opportunité d'un nouveau projet à Blois, Christophe Hay n'a pas hésité longtemps. Il a revendu ses établissements de Montlivault pour se lancer dans cette nouvelle aventure.

Après un investissement personnel de 9 millions d'€ - et de 15 millions pour le propriétaire des murs-, "Fleur de Loire" a ouvert en juin 2022 avec une équipe de 130 personnes.

Fleur de Loire : "Une vraie expérience touristique"

Un cinq étoiles à la décoration sobre mais très travaillée (@Alexandre Moulard/ Fleur de Loire)
Un cinq étoiles à la décoration sobre mais très travaillée (@Alexandre Moulard/ Fleur de Loire)
Hôtel cinq étoiles tourné vers le fleuve, "Fleur de Loire" entend offrir bien plus que cela : "une vraie expérience touristique", dit Christophe Hay.

Ouvert sur le Val de Loire, ses châteaux, ses vignobles et ses jardins, son cinq étoiles dispose donc d'un spa, en partenariat avec Sisley, une entreprise ultra-luxe originaire de la région, d'un kiosque à pâtisserie – un concept qu'il aimerait dupliquer ailleurs– et de deux restaurants : la table gastronomique à son nom et un second restaurant, plus abordable quoiqu'aussi de grande qualité.

Tout en travaillant à "développer sans cesse le côté qualitatif ", Christophe Hay se refuse en effet à en faire "un lieu guindé et inaccessible". Sa "grande fierté", c'est de proposer à "Fleur de Loire" un menu gastronomique à 260 € et d'afficher, dans l'autre restaurant, baptisé "Amour blanc", un menu d'appel à 37 € le midi. Bien mieux encore, le kiosque à pâtisserie propose des douceurs à partir de 6,50 €.

Chacun -ou presque- peut ainsi découvrir sa cuisine plus inventive que jamais. Son offre diversifiée lui attache d'ailleurs une belle clientèle locale, présente toute l'année, à côté d'une clientèle plus parisienne, plus européenne et parfois même américaine.

Fidèle à ses racines

Christophe Hay est un passionné des poissons de la Loire. Ici, son plat signature emblématique, une carpe à la Chambord, sauce au vin rouge (© Maïkya Studio/ Fleur de Loire)
Christophe Hay est un passionné des poissons de la Loire. Ici, son plat signature emblématique, une carpe à la Chambord, sauce au vin rouge (© Maïkya Studio/ Fleur de Loire)
Plus il avance dans la vie, plus cet homme qui vient d'un milieu modeste (son père était boucher et la famille de sa mère composée d’agriculteurs) a le sentiment de rester fidèle à ses racines. "Je ne me suis pas créé une histoire. Dans mon enfance, j'ai appris le goût de l'effort, du travail, l'amour du travail de la ferme, des bêtes, le goût aussi des produits de la ferme", dit-il.

Aujourd'hui, pour alimenter ses restaurants, Christophe Hay dispose d'un 1,5 hectare de jardin potager, de 3 hectares de truffière et d'un cheptel de 90 bœufs Wagyu. Il développe un conservatoire de l’asperge sur 3.000m2 et un conservatoire de la pomme. Il a aussi une serre pour les agrumes.

Grâce à tout cela, lui et son équipe sont autonomes pour leurs restaurants presque la moitié de l’année.

On savait Christophe Hay passionné par les poissons de la Loire auxquels il a consacré un premier -et bientôt un second- livre. Ces poissons à la chair d’une grande qualité avaient peu été mis en valeur jusqu’à présent. Il a voulu réparer cet oubli. Mais, au passage, on découvre qu'il s’intéresse aussi de très près à l’agriculture de demain.

L'avenir passe par les graines

Ce fils de boucher qui, dans son enfance, a sans doute mangé pas mal de viande, est persuadé qu'à l'avenir il faudra en manger moins. Beaucoup moins même.

"Nous devrons remplacer les protéines animales par des protéines végétales et travailler la qualité des produits plus que le volume", assure-t-il. Et d'ajouter : "Je veux que, dans ce domaine, les choses bougent, et j'y travaille".

Comme il ne peut pas tout produire lui-même, il achète ce qui lui manque dans la région Centre]b où se développe de nouveau la culture des lentilles, des pois chiche et autres graines promises, selon lui, à un bel avenir.

"J’aime valoriser les produits d’un terroir, le travail du sol et des humains. Je tiens à valoriser ces produits régionaux dans ma cuisine", insiste cet homme qui déteste l'expression "locavore". Lui se définit comme un "territoiriste".

Evidemment, lorsque cet homme du terroir a besoin de vanille, de chocolat ou de café, cette conviction trouve ses limites. Mais, ces denrées-là, il se les procure alors auprès de petits producteurs auxquels il est allé rendre personnellement visite, en particulier du côté de Oaxaca, au sud du Mexique.

De cette Amérique latine à laquelle il est attachée, nous vient d'ailleurs, rappelle-t-il, une bonne partie des végétaux que nous consommons aujourd'hui : les pommes de terre bien sûr, mais aussi les tomates ou les maïs. Des végétaux qui, en l'en croire, seront les grandes vedettes de la cuisine de demain.

PAULA BOYER Publié par Paula Boyer Responsable rubrique LuxuryTravelMaG - TourMaG.com
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