Table ronde organisée dans le cadre du Blue Maritime Summit à Marseille sur les enjeux de la décarbonation du secteur de la croisière - Photo CE
L'industrie maritime se transforme.
Tout comme l'aéronautique, le transport maritime s'est engagé dans la voie de la décarbonation. La feuille de route de l’Organisation maritime internationale (OMI) est claire : réduire en 2030 de 40% les émissions de carbone par rapport à 2008 et atteindre la neutralité carbone en 2050.
Des objectifs ambitieux qui imposent aux armateurs, aux chantiers, ainsi qu'à toute la chaîne de valeurs liées aux énergies alternatives une marche forcée et une obligation de résultats malgré les contraintes, techniques, logistiques, industrielles et financières.
Pour suivre ce plan d'actions, l'écosystème travaille sur plusieurs leviers - renouvellement des flottes, utilisation de nouveaux carburants, branchement à quai des navires et optimisations des itinéraires - pour réduire ses émissions carbones mais également les émissions d'oxydes d'azote Nox et d'oxydes de souffre (SOx).
Tout comme l'aéronautique, le transport maritime s'est engagé dans la voie de la décarbonation. La feuille de route de l’Organisation maritime internationale (OMI) est claire : réduire en 2030 de 40% les émissions de carbone par rapport à 2008 et atteindre la neutralité carbone en 2050.
Des objectifs ambitieux qui imposent aux armateurs, aux chantiers, ainsi qu'à toute la chaîne de valeurs liées aux énergies alternatives une marche forcée et une obligation de résultats malgré les contraintes, techniques, logistiques, industrielles et financières.
Pour suivre ce plan d'actions, l'écosystème travaille sur plusieurs leviers - renouvellement des flottes, utilisation de nouveaux carburants, branchement à quai des navires et optimisations des itinéraires - pour réduire ses émissions carbones mais également les émissions d'oxydes d'azote Nox et d'oxydes de souffre (SOx).
Biocarburant, carburants de synthèses : quelles pistes ?
Des problématiques prises à bras le corps par le géant mondial CMA CGM. "Nous travaillons sur l'aérodynamisme et l'hydrodynamisme du bateau, sur le ratio entre longueur et largeur du bateau. Nous étudions tout ce qui peut réduire la consommation de carburant. Nous optimisons aussi nos routes grâce à notre programme Smart Ship qui analyse via des algorithmes, et l'intelligence artificielle les meilleurs itinéraires, le tout piloté depuis nos Fleet Centers." explique Anne-Sophie Cochelin, directrice RSE du Groupe.
Reste que le nerf de la guerre se situe dans les cales du navires. Il s'agit du carburant. Tout l'enjeu est de passer de carburants, aujourd'hui fossiles, à une très grande majorité, de carburants bas carbone, soit d'origine biologique, soit d'origine de synthèse produit à partir d'hydrogène vert.
La durée de vie d’un navire étant de plus de 25 ans, la question est d'autant plus stratégique pour les navires actuellement en construction qui devront répondre aux objectifs de l'OMI en 2050.
Pour l'heure, le GNL (gaz naturel liquéfié) est l’une des options alternatives privilégiées par les navires de croisières. Mais il reste un carburant de transition. En comparaison au fioul lourd (HFO), l'utilisation du GNL permet des réductions substantielles des émissions de soufre, d'oxydes d'azote - la plupart des particules fines - et jusqu'à 20% pour le CO2. Il reste donc du chemin à parcourir.
D'autres options existent, les carburants de synthèses, les biocarburant, et le Methanol qui semble être l'une des options les plus plausibles pour l'avenir.
Reste que le nerf de la guerre se situe dans les cales du navires. Il s'agit du carburant. Tout l'enjeu est de passer de carburants, aujourd'hui fossiles, à une très grande majorité, de carburants bas carbone, soit d'origine biologique, soit d'origine de synthèse produit à partir d'hydrogène vert.
La durée de vie d’un navire étant de plus de 25 ans, la question est d'autant plus stratégique pour les navires actuellement en construction qui devront répondre aux objectifs de l'OMI en 2050.
Pour l'heure, le GNL (gaz naturel liquéfié) est l’une des options alternatives privilégiées par les navires de croisières. Mais il reste un carburant de transition. En comparaison au fioul lourd (HFO), l'utilisation du GNL permet des réductions substantielles des émissions de soufre, d'oxydes d'azote - la plupart des particules fines - et jusqu'à 20% pour le CO2. Il reste donc du chemin à parcourir.
D'autres options existent, les carburants de synthèses, les biocarburant, et le Methanol qui semble être l'une des options les plus plausibles pour l'avenir.
Le prix et l'approvisionnement : deux freins majeurs
Actuellement, les armateurs ont fait le choix du GNL : "Parmi les carburants fossiles, c'est le GNL qui est le plus propre" rappelle Alexandre Tocatlian Head of Business Development chez Gaz Transport & Technigaz (GTT) spécialisé dans la conception de réservoir pour navire "mais pour 2050 cela ne suffira pas pour atteindre les objectifs de l'OMI"
Car si tous s'accordent pour s'orienter vers des carburants plus durables, reste deux problèmes de poids : le prix et l'approvisionnement.
"Le seul carburant qui est plus dense énergétiquement que le fuel, c'est le GNL. Il faut 0,9 tonne de GNL pour avoir la même énergie qu'une tonne de fuel et il faut deux tonnes de méthanol pour avoir l'équivalent. Donc quand on parle de prix, il faut bien parler en tonne équivalente" poursuit Alexandre Tocatlian.
A ce petit jeu, le méthanol vert se situe aux alentours de 2400 dollars / tonne équivalente, quand le tarif du fuel lourd tourne autour de 500 dollars par tonne, et celui du bio-GNL (produit à partir de sources renouvelables) atteint les 1500 dollars par tonne.
Les données disponibles indiquent que le méthanol vert permet de réduire les émissions de CO₂ jusqu'à 95 %, celles d'oxyde d'azote de 80 % et celles d'oxyde de soufre et de particules fines de 20 %.
Car si tous s'accordent pour s'orienter vers des carburants plus durables, reste deux problèmes de poids : le prix et l'approvisionnement.
"Le seul carburant qui est plus dense énergétiquement que le fuel, c'est le GNL. Il faut 0,9 tonne de GNL pour avoir la même énergie qu'une tonne de fuel et il faut deux tonnes de méthanol pour avoir l'équivalent. Donc quand on parle de prix, il faut bien parler en tonne équivalente" poursuit Alexandre Tocatlian.
A ce petit jeu, le méthanol vert se situe aux alentours de 2400 dollars / tonne équivalente, quand le tarif du fuel lourd tourne autour de 500 dollars par tonne, et celui du bio-GNL (produit à partir de sources renouvelables) atteint les 1500 dollars par tonne.
Les données disponibles indiquent que le méthanol vert permet de réduire les émissions de CO₂ jusqu'à 95 %, celles d'oxyde d'azote de 80 % et celles d'oxyde de soufre et de particules fines de 20 %.
Quels investissements dans l'innovation ?
Autre problématique, la question de l'approvisionnement des navires. Wassim Daoud Corporate Social Responsibility and Sustainability chez Ponant l'explique : "Nous ne trouvons toujours pas de GNL dans l'hémisphère sud. Nous avons donc dû concevoir des itinéraires autour du GNL.
Les promesses et tous les contrats que nous avons essayé de nouer avec des partenaires locaux, en Argentine, au Chili, au Brésil, ou en Australie, et Nouvelle-Zélande, ont avorté. Quid avec les autres nouveaux fuels ?
Nous voyons qu'en Chine, par exemple, ou en Asie, nous pouvons trouver des prix plus intéressants sur ces carburants alternatifs, comme les e-fuels ou les biofuels. Ils accélèrent aussi dans la construction navale pour développer de nouvelles technologies. Il faut donc se poser la question, avoir une réflexion collective, pour savoir dans quelle direction va l'industrie avec les chantiers navals et toute la chaîne de valeurs pour pouvoir garder l'innovation et la technologie en Europe."
En effet, au-delà du prix et des difficultés d'approvisionnement, l'écosystème va devoir faire des choix industriels et techniques pour s'orienter vers la ou les meilleure(s) des directions.
Un avis partagé par Laurent Tessier, directeur technique chez Royal Caribbean Group : "Les chantiers européens sont des centres d'expertise et peuvent fédérer les énergies. Nous sommes concurrents, mais nous avons un point commun, c'est le chantier à Saint-Nazaire pour beaucoup d'armateurs. Nous pourrions partager et faire en sorte d'avancer, de dynamiser ces projets de recherche et ces projets d'innovation".
Les promesses et tous les contrats que nous avons essayé de nouer avec des partenaires locaux, en Argentine, au Chili, au Brésil, ou en Australie, et Nouvelle-Zélande, ont avorté. Quid avec les autres nouveaux fuels ?
Nous voyons qu'en Chine, par exemple, ou en Asie, nous pouvons trouver des prix plus intéressants sur ces carburants alternatifs, comme les e-fuels ou les biofuels. Ils accélèrent aussi dans la construction navale pour développer de nouvelles technologies. Il faut donc se poser la question, avoir une réflexion collective, pour savoir dans quelle direction va l'industrie avec les chantiers navals et toute la chaîne de valeurs pour pouvoir garder l'innovation et la technologie en Europe."
En effet, au-delà du prix et des difficultés d'approvisionnement, l'écosystème va devoir faire des choix industriels et techniques pour s'orienter vers la ou les meilleure(s) des directions.
Un avis partagé par Laurent Tessier, directeur technique chez Royal Caribbean Group : "Les chantiers européens sont des centres d'expertise et peuvent fédérer les énergies. Nous sommes concurrents, mais nous avons un point commun, c'est le chantier à Saint-Nazaire pour beaucoup d'armateurs. Nous pourrions partager et faire en sorte d'avancer, de dynamiser ces projets de recherche et ces projets d'innovation".
Des projets de navires à voiles
Les nouveaux projets à l'image de Ponant avec Swap2Zero ou encore Orient Express Silenseas s'orientent, eux, vers le développement de technologie vélique.
"Tous nos itinéraires ont été créés autour des zones venteuses. 80% de notre énergie de déplacement sera produite par la voile grâce à des gréements SolidSail" explique Clément Mousset, Directeur de la stratégie chez Silenseas "Le mât de notre navire fera plus de 100 m de tirant d'air, et il pourra se rabattre quasiment de moitié pour atteindre 57 m et passer notamment sous le pont Verrazzano-Narrows de New York. Il sera doté d'une quille qui nous permettra aussi de remonter au vent. Il utilisera également une propulsion hybride fonctionnant au gaz naturel liquéfié (GNL)"
Ponant qui possède déjà dans sa flotte un trois-mât éponyme, travaille également à la conception d'un navire zéro émission baptisé pour l'heure Swap2Zero : "Nos futurs bateaux zéro émission seront essentiellement vélique. Nous travaillons sur le cycle de vie total du navire pour être dans notre objectif de zéro émission, de la conception à la fin de vie. Mais il ne faut pas oublier qu'en tant que croisiériste, nous transportons des clients qu'il faut faire voyager en toute sécurité et quelles que soient les conditions météo. Nous ne connaissons pas les prévisions météo 2 ou 3 ans en avance. Même si nous travaillons tous les itinéraires, notre expérience montre que nous devons être capables d'assurer cette sécurité en ayant d'autres énergies alternatives. "
"Tous nos itinéraires ont été créés autour des zones venteuses. 80% de notre énergie de déplacement sera produite par la voile grâce à des gréements SolidSail" explique Clément Mousset, Directeur de la stratégie chez Silenseas "Le mât de notre navire fera plus de 100 m de tirant d'air, et il pourra se rabattre quasiment de moitié pour atteindre 57 m et passer notamment sous le pont Verrazzano-Narrows de New York. Il sera doté d'une quille qui nous permettra aussi de remonter au vent. Il utilisera également une propulsion hybride fonctionnant au gaz naturel liquéfié (GNL)"
Ponant qui possède déjà dans sa flotte un trois-mât éponyme, travaille également à la conception d'un navire zéro émission baptisé pour l'heure Swap2Zero : "Nos futurs bateaux zéro émission seront essentiellement vélique. Nous travaillons sur le cycle de vie total du navire pour être dans notre objectif de zéro émission, de la conception à la fin de vie. Mais il ne faut pas oublier qu'en tant que croisiériste, nous transportons des clients qu'il faut faire voyager en toute sécurité et quelles que soient les conditions météo. Nous ne connaissons pas les prévisions météo 2 ou 3 ans en avance. Même si nous travaillons tous les itinéraires, notre expérience montre que nous devons être capables d'assurer cette sécurité en ayant d'autres énergies alternatives. "
Le mix énergique sera t-elle la solution ?
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En effet la propulsion à voile ne pourra pas s'adapter à toutes les zones explique Anne-Sophie Cochelin de la CMA - CGM qui a noué un partenariat avec le cargo à voile Neoline : "le vélique c'est très intéressant sur une transatlantique, cela l'est beaucoup moins sur une ligne Nord - Sud. Je pense qu'il ne faut pas essayer de chercher le fuel qui conviendra à tout le monde sur toutes les lignes du monde, mais le fuel le plus adapté à la ligne, à la taille du bateau, à ce que les ports peuvent nous offrir et aux réglementations locales. Et c'est cette équation extrêmement complexe qu'il nous faut résoudre pour ensuite faire les bons choix d'investissement"
Et c'est sur cette combinaison que les compagnies de croisières semblent miser : "Les croisiéristes, avec qui nous travaillons sur les futurs navires, souhaitent des moteurs tri-fuel, c'est-à-dire dual fuel rétrofitables pour un troisième fuel. Le navire pourra ainsi naviguer pendant 10, 15, 20 ans sur du diesel et GNL, mais il pourra facilement être rétrofitables au méthanol. Cela ne peut pas se faire toutes les semaines, mais ces bateaux seront capables de switcher du GNL au méthanol en fonction de la zone où ils naviguent." détaille Alexandre Tocatlian de GTT.
Ce qui fait dire à Wassim Daoud que les flottes du futur seront composés de "bateaux avec différentes énergies et peut-être un mix énergétique comme on l'a aujourd'hui à terre où nous allons pouvoir mixer le vélique, le solaire, l'électrique, et différents types de diesel ou de gaz, ou pourquoi pas l'hydrogène".
Une chose est sûre, la décarbonation de la croisière avance, mais elle reste encore à écrire !
Et c'est sur cette combinaison que les compagnies de croisières semblent miser : "Les croisiéristes, avec qui nous travaillons sur les futurs navires, souhaitent des moteurs tri-fuel, c'est-à-dire dual fuel rétrofitables pour un troisième fuel. Le navire pourra ainsi naviguer pendant 10, 15, 20 ans sur du diesel et GNL, mais il pourra facilement être rétrofitables au méthanol. Cela ne peut pas se faire toutes les semaines, mais ces bateaux seront capables de switcher du GNL au méthanol en fonction de la zone où ils naviguent." détaille Alexandre Tocatlian de GTT.
Ce qui fait dire à Wassim Daoud que les flottes du futur seront composés de "bateaux avec différentes énergies et peut-être un mix énergétique comme on l'a aujourd'hui à terre où nous allons pouvoir mixer le vélique, le solaire, l'électrique, et différents types de diesel ou de gaz, ou pourquoi pas l'hydrogène".
Une chose est sûre, la décarbonation de la croisière avance, mais elle reste encore à écrire !