Sanaa capitale du Yémen - LdM.
Pays de la Reine de Saba, les Anciens l’appelaient l’Arabie Heureuse.
Les rares voyageurs qui s’étaient hasardés dans ces contrées avant nous avaient rapporté des descriptions extraordinaires. Montagnes mystérieuses, cités interdites, harems secrets, seigneurs despotes vivant dans de somptueux palais et se livrant à de sanglantes guerres tribales, têtes ennemies coupées en place publique...
Jusque dans les années 1960 la vigilance des imams avait maintenu le Yémen jusque dans un obscurantisme total, verrouillé, interdit aux étrangers.
De révolutions en attentats, de guerres civiles en coups d’Etat, le pays sortait de la nuit des temps miraculeusement préservé et terriblement déconcertant. En 1980 il s’ouvrait même au tourisme de luxe avec l’ouverture d’un Sheraton à Sanaa.
Les rares voyageurs qui s’étaient hasardés dans ces contrées avant nous avaient rapporté des descriptions extraordinaires. Montagnes mystérieuses, cités interdites, harems secrets, seigneurs despotes vivant dans de somptueux palais et se livrant à de sanglantes guerres tribales, têtes ennemies coupées en place publique...
Jusque dans les années 1960 la vigilance des imams avait maintenu le Yémen jusque dans un obscurantisme total, verrouillé, interdit aux étrangers.
De révolutions en attentats, de guerres civiles en coups d’Etat, le pays sortait de la nuit des temps miraculeusement préservé et terriblement déconcertant. En 1980 il s’ouvrait même au tourisme de luxe avec l’ouverture d’un Sheraton à Sanaa.
Des gratte-ciel moyenâgeux
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Le tourisme yéménite piégé par le terrorisme
Nous sommes en décembre 1981 à 2300 mètres d’altitude. Le ciel est bleu, le thermomètre affiche 26 °c. Dans son écrin de montagnes, Sanaa apparaît comme la plus belle ville du monde arabe.
Souvent surmontées d’un minaret les maisons étroites et hautes se pressent les unes contre les autres. Faites de pierres de taille, de briques décorées de motifs à la chaux, de pisé, d’arabesques en stuc, de vitraux elles peuvent atteindre les 9 étages. Prodige d’architecture. Les parties les plus nobles sont en haut, là où se retrouvent les hommes et les invités pour mâcher le qat.
Les étages du bas sont réservés aux animaux et au fourrage. Les femmes ont leur domaine, à mi-hauteur. La ville se vante d’avoir les premiers « gratte-ciel » du monde. Quelques-uns datent de 1 000 an et plus !
Découvrir Sanaa c’est se mêler à une marée humaine. Gorge séchée par la poussière, il faut marcher en évitant les boites de conserves rouillées, les plastiques en tous genres et pléthore de détritus non identifiables qui recouvrent les ruelles d’une solide épaisseur. Sanaa est une somptueuse poubelle.
J’ai longuement flâné dans la vieille ville, seule femme à visage découvert dans un monde où elles glissent telles des fantômes sous leurs voiles noirs superposés.
De leur côté les hommes arborent la tenue traditionnelle blanche avec, coincée à la taille leur djanbia, - célèbre poignard incurvé symbole du Yémen - et, pour beaucoup, kalachnikov en bandoulière. Ma présence m’est apparue comme intrusive dans cette foule compacte, nullement hostile, carrément indifférente.
Souvent surmontées d’un minaret les maisons étroites et hautes se pressent les unes contre les autres. Faites de pierres de taille, de briques décorées de motifs à la chaux, de pisé, d’arabesques en stuc, de vitraux elles peuvent atteindre les 9 étages. Prodige d’architecture. Les parties les plus nobles sont en haut, là où se retrouvent les hommes et les invités pour mâcher le qat.
Les étages du bas sont réservés aux animaux et au fourrage. Les femmes ont leur domaine, à mi-hauteur. La ville se vante d’avoir les premiers « gratte-ciel » du monde. Quelques-uns datent de 1 000 an et plus !
Découvrir Sanaa c’est se mêler à une marée humaine. Gorge séchée par la poussière, il faut marcher en évitant les boites de conserves rouillées, les plastiques en tous genres et pléthore de détritus non identifiables qui recouvrent les ruelles d’une solide épaisseur. Sanaa est une somptueuse poubelle.
J’ai longuement flâné dans la vieille ville, seule femme à visage découvert dans un monde où elles glissent telles des fantômes sous leurs voiles noirs superposés.
De leur côté les hommes arborent la tenue traditionnelle blanche avec, coincée à la taille leur djanbia, - célèbre poignard incurvé symbole du Yémen - et, pour beaucoup, kalachnikov en bandoulière. Ma présence m’est apparue comme intrusive dans cette foule compacte, nullement hostile, carrément indifférente.
L’ouverture du Sheraton, un évènement national
Le Sheraton domine Sanaa. Il se dresse un peu isolé, oasis de calme et de luxe, contraste bienfaiteur après la pollution, le bruit, le choc culturel.
Son inauguration organisée durant l’été 1980 fut un événement national. Plus de 3 000 Yéménites massés sur la route et le parking avaient tenu à assister au spectacle de son ouverture.
300 chambres, 300 employés. Personnel ô combien cosmopolite : philippins, indiens, yéménites font bon ménage avec leurs collègues venus du Royaume-Uni, de Turquie, du Sri Lanka, d’Afghanistan, du Liban, de Syrie, du Bangladesh, du Pakistan. Et tout fonctionne parfaitement sous la houlette d’un directeur allemand.
En 1980, au Yémen, on ne trouve rien hormis le qat drogue locale considérée à la fois comme économie de basse et fléau national. Alors au Sheraton les steaks viennent des Etats-Unis, l’agneau de Nouvelle-Zélande, les fruits et les légumes de Tunisie du Maroc ou du Liban. Le mercredi sera le jour du poisson qui arrivera tout frais de Paris par le vol direct d’Air France.
L’idée force de ce voyage d’étude est de séjourner au Sheraton, base de départ pour une série d’excursions d’une demi-journée ou d’une journée.
Son inauguration organisée durant l’été 1980 fut un événement national. Plus de 3 000 Yéménites massés sur la route et le parking avaient tenu à assister au spectacle de son ouverture.
300 chambres, 300 employés. Personnel ô combien cosmopolite : philippins, indiens, yéménites font bon ménage avec leurs collègues venus du Royaume-Uni, de Turquie, du Sri Lanka, d’Afghanistan, du Liban, de Syrie, du Bangladesh, du Pakistan. Et tout fonctionne parfaitement sous la houlette d’un directeur allemand.
En 1980, au Yémen, on ne trouve rien hormis le qat drogue locale considérée à la fois comme économie de basse et fléau national. Alors au Sheraton les steaks viennent des Etats-Unis, l’agneau de Nouvelle-Zélande, les fruits et les légumes de Tunisie du Maroc ou du Liban. Le mercredi sera le jour du poisson qui arrivera tout frais de Paris par le vol direct d’Air France.
L’idée force de ce voyage d’étude est de séjourner au Sheraton, base de départ pour une série d’excursions d’une demi-journée ou d’une journée.
Des palais en équilibre sur des pitons rocheux
C’est le moment de vous présenter Abu Taleb. Etudes en Europe, anglais impeccable, courtois, cultivé. Il représentait voici près de 40 ans le Yémen du futur. Il dirigeait la plus importante des quatre agences réceptives du pays.
Un courageux Abu Taleb. Il avait ouvert en 1972 la première agence de voyage du pays alors qu’il n’y avait pas de routes goudronnées. Un seul taxi circulait dans Sanaa et quelques chauffeurs armés jusqu’aux dents, sans permis, sans assurance et sans immatriculation, acceptaient de transporter les rares visiteurs. « Il m’a fallu 8 ans pour leur inculquer le sens de la ponctualité » nous avait dit ce pionnier du tourisme.
Nous voici prêts à découvrir le grandiose qui est quotidien dans ce pays. Nous grimpons dans une Toyota surélevée à la décoration très personnalisée. Le chauffeur se révèle ponctuel et même respectueux de la réglementation.
D’innombrables terrasses exiguës façonnent les montagnes aux contours tourmentés. Ce spectacle unique est l’héritage laissé par les paysans yéménites des siècles passés. Par un travail inouï, ils aménageaient les pentes en terrasses, véritables chef d’œuvre d’harmonie. Ils en faisaient des vergers et des jardins suspendus avec pour alliés un climat doux et une irrigation naturelle.
En 1981 l’Arabie Heureuse n’est plus. Les vergers ont disparu. Comme les plantations de café qui firent les beaux jours de Mohkha au bord de la mer Rouge, ils ont cédé la place au qat.
Au pays de la Reine de Saba en 1981, un petit groupe d’agents de voyages a vu des hommes marcher avec des fers aux pieds, des paysans battre le blé à la main, des hommes faire la queue devant l’écrivain public qui officie assis en tailleur sur le sol... Il s’est émerveillé au spectacle de palais en équilibre sur des pitons rocheux, de cités forteresse émerger de montagnes inaccessibles.
Une mystérieuse jeune fille a soulevé son voile pour me proposer en anglais de la suivre prendre le thé dans sa maison. J’ai refusé. Je le regrette encore.
Quant à Monsieur Taleb j’ignore ce qu’il est devenu dans ce pays magnifique qui semble marqué à jamais par les révolutions, les attentats, les enlèvements, les guerres civiles, les coups d’Etat.
Un courageux Abu Taleb. Il avait ouvert en 1972 la première agence de voyage du pays alors qu’il n’y avait pas de routes goudronnées. Un seul taxi circulait dans Sanaa et quelques chauffeurs armés jusqu’aux dents, sans permis, sans assurance et sans immatriculation, acceptaient de transporter les rares visiteurs. « Il m’a fallu 8 ans pour leur inculquer le sens de la ponctualité » nous avait dit ce pionnier du tourisme.
Nous voici prêts à découvrir le grandiose qui est quotidien dans ce pays. Nous grimpons dans une Toyota surélevée à la décoration très personnalisée. Le chauffeur se révèle ponctuel et même respectueux de la réglementation.
D’innombrables terrasses exiguës façonnent les montagnes aux contours tourmentés. Ce spectacle unique est l’héritage laissé par les paysans yéménites des siècles passés. Par un travail inouï, ils aménageaient les pentes en terrasses, véritables chef d’œuvre d’harmonie. Ils en faisaient des vergers et des jardins suspendus avec pour alliés un climat doux et une irrigation naturelle.
En 1981 l’Arabie Heureuse n’est plus. Les vergers ont disparu. Comme les plantations de café qui firent les beaux jours de Mohkha au bord de la mer Rouge, ils ont cédé la place au qat.
Au pays de la Reine de Saba en 1981, un petit groupe d’agents de voyages a vu des hommes marcher avec des fers aux pieds, des paysans battre le blé à la main, des hommes faire la queue devant l’écrivain public qui officie assis en tailleur sur le sol... Il s’est émerveillé au spectacle de palais en équilibre sur des pitons rocheux, de cités forteresse émerger de montagnes inaccessibles.
Une mystérieuse jeune fille a soulevé son voile pour me proposer en anglais de la suivre prendre le thé dans sa maison. J’ai refusé. Je le regrette encore.
Quant à Monsieur Taleb j’ignore ce qu’il est devenu dans ce pays magnifique qui semble marqué à jamais par les révolutions, les attentats, les enlèvements, les guerres civiles, les coups d’Etat.