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Exclusif - Surcharge Air France-Amadeus : sursis jusqu'au 10 juillet pour les agences de voyages

Amadeus ne voulait plus du Private Channel - le GDS attendra pour passer pleinement sur le NDC d'Air France - les négos jusqu'au bout de la nuit - Une surcharge de 12 euros sur chaque segment en jeu


Les accords provisoires entre Amadeus et Air France (Private Channel) ont pris fin ce 1er juillet 2020 à minuit. Alors que le GDS ne voulait plus de cette solution, un accord... provisoire a été trouvé entre les deux parties, ou comment reculer pour mieux sauter. Une surcharge de 12 euros par segment est en jeu.


Rédigé par le Mardi 30 Juin 2020

Amadeus ne voulait plus du Private Channel... - Crédit photo : Depositphotos @baranq
Amadeus ne voulait plus du Private Channel... - Crédit photo : Depositphotos @baranq
Dans le tourisme, une tempête en chasse vite une autre...

Après l'épidémie de covid-19 et l'arrêt total de l'industrie, les relations entre les compagnies et la distribution pourraient redevenir encore un peu plus tendues.

En mars, il y a eu la guerre des agences de voyages pour ne pas verser le BSP à IATA. Puis en avril, la bronca pour le remboursement des billets. En mai c'était les plans de vols qui posaient problème. Alors, quid de la nouvelle polémique pour ce mois de juin ?

"La solution NDC de la compagnie n'est pas prête. Si aucune solution n'est trouvée entre nous et Amadeus, une surcharge de 12 euros par segment à partir du 1er juillet sera appliquée," révélait Jean-Pierre Mas, le 23 juin dernier.

Or, d'après nos informations, un accord provisoire a été trouvé entre les deux parties, au-delà de la fin même du Private Channel.

C'est dans le temps additionnel que les responsables d'Amadeus et Air France se sont serrés la main, à plus d'une heure du matin, ce 1er juillet 2020.

Attention, l'extension de la validité du Private Channel est prévue jusqu'au 10 juillet 2020.

En l'état, aucune surcharge ne sera appliquée aux agences de voyages et ce, jusqu'à la finalisation de l'accord final... Une situation ubuesque qui a dû être accueillie par un grand ouf de soulagement dans les réseaux de distribution.

Amadeus a mis la pression sur Air France...

Pour comprendre pourquoi les négociateurs ont accepté de repousser l'accord au-delà de la ligne d'arrivée, il suffit de regarder dans le rétro.

A l'image de Sabre qui claqué la porte de Lufthansa Group en mai 2020, Amadeus aurait usé de la même stratégie pour mener les négociations avec AF, au sujet du Private Channel prenant fin le 1er juillet 2020.

"Amadeus a décidé de mettre fin au contrat de Private Channel qui le liait à Air France-KLM d’ici au 30 juin," indique un attaché presse d'Air France.

Des rumeurs persistantes sur le retard conséquent pris par la compagnie nationale pour mettre en place NDC ont été balayées d'un revers de la main.

"Le souhait d’Air France-KLM est que ce contrat de private channel soit étendu au-delà du 30 juin afin que les agents qui souhaitent utiliser Amadeus comme agrégateur NDC puissent le faire dans de bonnes conditions, lorsque Amadeus sera prêt techniquement pour NDC avec Air France," précise le représentant de la compagnie.

Ainsi du côté du transporteur, NDC est prêt, mais ce serait Amadeus qui ne le serait pas. Un jeu de poker menteur qui dure depuis quelques mois déjà.

Pour rappel, la solution de Private Channel est une réponse provisoire trouvée entre les deux parties, du fait du retard pris par la compagnie pour développer la technologie.

La première ratification de l'accord a été faite en avril 2018. Depuis, deux nouvelles signatures ont dû être apposées par les parties, mais il ne devait pas y en avoir de troisième.

"Air France était très en retard sur ses plannings de développement de la norme, puis la crise du covid-19 est arrivée, accentuant la situation. C'est à Air France de prendre une décision," clame Fabrice Dariot, le président de Bourse des Vols.

La réponse ce mercredi matin est plutôt celle d'un Normand.

"Impossible d’émettre des billets pour des personnes handicapées, les open jaw ne fonctionnent pas"

Alors que les Français partiront seulement en France et en Europe, imaginez un peu l'impact qu'aurait pu avoir une surcharge de 12 euros par vol, sur l'attractivité des agences, qu'elles soient physiques ou en ligne.

Une distorsion concurrentielle qui inquiétait alors fortement le président des Entreprises du Voyage (EDV).

"Ils ne sont clairement pas prêts (Air France, ndlr) et ne se remettent pas en question. Nous sommes inquiets, mais la balle est du côté d'Air France," peste Jean-Pierre Mas.

Une situation perçue différemment pour des acteurs comme Misterfly ou Resaneo.

Les spécialistes BtoB de l'aérien se sont connectés directement auprès d'Air France. Pour eux, il n'y a pas de retard, même si la solution n'est pas non plus parfaite.

"Je ne dis pas que c'est merveilleux, mais ils travaillent dans le bon sens. Peut-être aussi que des clients (comprendre des agences ou réseaux, ndlr) ne sont pas prêts à être NDC et qu'il y a des manques dans le business travel, mais pas au niveau loisir. Nous n'avons aucun problème," rapporte François Garrabos, le directeur des transports de Resaneo.

Toutefois, il convient de relativiser. En effet, les acteurs n'auraient accès qu'à des bribes de la norme développée par le transporteur. Les vols secs ne poseraient pas de problème particulier. Il en va autrement pour les forfaits et le transport qui s'y rattache.

Un observateur très avisé du tourisme nous informe que la norme NDC d'Air France ne fonctionnerait pas correctement en mode producteur-distributeur. "Il est impossible par exemple d’émettre des billets pour des personnes handicapées, les open jaw ne fonctionnent pas, etc.", nous confie-t-il.

Sauf que n'est pas éditeur de solutions technologiques qui veut. C'est un secteur nécessitant d'importantes ressources humaines, mais aussi financières.

Au 21e siècle, les compagnies seront-elle leurs propres distributeurs ?

"C'est un métier nouveau pour Air France, de technologie pure et de bande de données. Le problème étant que la norme est exigeante et que très peu de compagnies savent faire ce métier-là.

Elles ont déjà du mal à faire voler correctement leurs avions, alors pour le reste...
", dénonce le patron de Bourse des vols.

La technologie n'est pas tellement dans l'ADN des transporteurs, puisqu'ils avaient créé dans les années 70 le premier GDS, pour permettre de mutualiser et externaliser les compétences.

Mais les décennies passant, les opérateurs technologiques ont pris de l'importance, devenant non seulement incontournables, mais aussi des mastodontes du tourisme.

Une position de force que les transporteurs ont essayé de contourner à l'arrivée de ce nouveau siècle.

C'est alors qu'apparaît NDC, présentée comme une solution dans l'air du temps, avec des contenus plus enrichis lors de la vente de billets d'avion. Elle doit permettre de révolutionner les obsolètes GDS.

"C'est surtout une manière pour les compagnies de mettre la pression sur Amadeus, Sabre et autres, car elles considèrent que les GDS leur facturent trop cher les émissions.

Les transporteurs ne voulaient plus ça, ils voulaient une distribution plus directe,
" résume Fabrice Dariot.

A trop vouloir, les compagnies en ont oublié que vendre des billets d'avion, cela nécessite des compétences pas seulement humaines, mais aussi techniques et de gros investissements financiers.

La crise covid pourrait bien remettre tout ce petit monde à sa place...

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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