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FUTUROSCOPIE - Les imaginaires touristiques en pleine recomposition 🔑

DĂ©cryptage de Josette Sicsic, Futuroscopie


Plus que beaucoup d’autres secteurs, le tourisme fonctionne sur des imaginaires individuels et collectifs qui ont enregistrĂ©Ì des dĂ©cennies de reprĂ©sentations souvent idĂ©alisĂ©es, à partir desquelles naissent et grandissent « les envies du monde ». Or aujourd’hui, aprĂšs toutes les crises qui ont bouleversĂ© notre quotidien (pandĂ©mie, confinements, catastrophes climatiques, guerres), les imaginaires touristiques sont eux aussi bouleversĂ©s. Dans un monde en transition, ils subissent des modifications d’intensitĂ© diffĂ©rente certes, et parfois lentes Ă  s’installer mais affectant notre vision du voyage. Dans les quelques semaines Ă  venir, pour vous Ă©clairer, nous allons donc Ă©tudier ces mutations



Rédigé par le Mercredi 21 Décembre 2022

Inutile d’avoir un imaginaire surpeuplĂ© d’images touristiques, puisque ce seront les algorithmes qui manipuleront les cerveaux donc les imaginaires des touristes - Depositphotos.com Auteur Patryk_Kosmider
Inutile d’avoir un imaginaire surpeuplĂ© d’images touristiques, puisque ce seront les algorithmes qui manipuleront les cerveaux donc les imaginaires des touristes - Depositphotos.com Auteur Patryk_Kosmider

 Mais, d’abord, quelques prĂ©cisions sur le sujet. L’iconographie touristique est une rĂ©alitĂ©Ì omniprĂ©sente. Elle fleurit sur les murs, les Ă©crans, les pages des livres et des magazines... et s’inscrit dans nos mĂ©moires, sous la forme de reprĂ©sentations plus ou moins conscientes, ce qui en fait la complexitĂ©Ì. La rĂ©alitĂ©Ì des images touristiques est en effet beaucoup plus singulière qu’elle en a l’air.

Comme le touriste dont nous évoquons rĂ©guliĂšrement la « complexité » (voir dossier « Qui sont vos clients »), elle est composée d’images qui sont multiples, contradictoires, positives, négatives, rĂ©elles, fictives, exagĂ©rĂ©es, dĂ©formĂ©es... Il n’est donc pas aisé de faire un tri à partir duquel un voyagiste par exemple, pourra à coup sĂ»r construire une stratĂ©gie de communication capable de sĂ©duire le plus grand nombre.

La partie est d’autant moins aisĂ©e que les imaginaires sont individuels.
Chacun d’entre nous porte en lui des reprĂ©sentations issues de ses propres lectures, des films qu’il a vus, des pays dans lesquels il a voyagĂ©Ì, de son environnement familial, son bagage intellectuel... qui ne peuvent pas facilement se catĂ©goriser.

Mais, il porte aussi en lui des reprĂ©sentations inhĂ©rentes à la civilisation dans laquelle il vit, donc de nature anthropologique : ce sont les images symboliques, lesquelles varient d’une civilisation à une autre et influencent les imaginaires. Un asiatique par exemple ne met pas dans la montagne ou dans la couleur blanche les mêmes valeurs symboliques qu’un Européen. Pour compliquer le tout, ne nĂ©gligeons pas le fait que ces images sont souvent inconscientes !


Or, selon Gaston Bachelard, « les images représentent une façon d’entrer en relation avec l’espace et la matiĂšre qui génère du sens, sans pour autant déterminer strictement des comportements et des configurations. Elles permettent aux individus et aux groupes de se représenter un lieu en tant que destination touristique appréhendable ; elles créent le désir, rendent un lieu attractif, contribuent à concrétiser un projet de voyage.

De plus, ces images interviennent non seulement au moment du choix de la destination, mais également sur place
». Et, nul n’ignore que négatives, elles détournent le visiteur potentiel d’une destination ou d’un site !

Outre l’analyse spatiale de l’image, d’autres en analysent la temporalité. Un grand mot pour évoquer les évolutions, les métamorphoses, les ruptures qui peuvent se produire dans les imaginaires par le truchement de nouveaux phénomènes géopolitiques, économiques, sociologiques, technologiques bien entendu et, touristiques.

Nul ne contestera que le TGV a modifié la représentation traditionnelle du train et que la crise climatique actuelle fait de nouveau Ă©voluer cette image. Tandis que le tourisme de masse, souvent évoqué et décrié, dĂ©truit les reprĂ©sentations de certains hauts lieux du patrimoine mondial comme Venise ou certains quartiers de Paris.

Quant à la pandémie a-t-elle déformé voire transformé les imaginaires liés à certaines destinations trÚs frappées par le Covid, et pendant combien de temps : la Californie, le Brésil, le Royaume-Uni ? La Chine, les USA sortiront-ils indemnes de cette crise sanitaire ?

Pour ce qui est de l’actualitĂ© nĂ©gative, on peut Ă©galement se demander pendant combien de temps, elle sera de nature Ă  influencer les imaginaires et Ă  les coloniser avec des images dissuasives ?

Imaginaires et technologie : un hacking des imaginaires

Par ailleurs, la multiplication des images via l’explosion du numĂ©rique, des smartphones et autres rĂ©seaux sociaux pose un autre problĂšme. A-t-elle transformĂ© la constitution des imaginaires mais surtout n’a-t-elle pas tendance Ă  les saturer et Ă  freiner les choix du touriste ?

Sera-t-il donc bien utile Ă  l’avenir, pour les opĂ©rateurs touristiques, de continuer d’utiliser Ă  outrance des boĂźtes mails et des rĂ©seaux sociaux de plus en plus envahissants et polluants pour diffuser des informations redondantes la plupart du temps ?

Enfin, qui dit technologie, dit intelligence artificielle et big data. Or, d’ores et dĂ©jĂ , quelques start-ups proposent de faire du marketing prĂ©dictif Ă  partir de collectes de donnĂ©es sur les comportements.

Inutile donc d’avoir un imaginaire surpeuplĂ© d’images touristiques, puisque ce seront les algorithmes qui manipuleront les cerveaux donc les imaginaires des touristes. La fusion de l’informatique et des neuro sciences pourrait bel et bien provoquer un hacking des cerveaux dans un avenir peu lointain !

Si bien que dans le monde de demain, les reprĂ©sentations touristiques Ă  la fois complexes, voire chaotiques, rendront les imaginaires moins limpides qu’ils le sont aujourd’hui. Ce qui aura pour tĂąche de complexifier le travail des marketeurs.

En fait, deux Ă©coles pourraient s’affronter. D’une part, on aura ceux qui auront Ă  cƓur de manipuler les imaginaires touristiques Ă  l’aide de tous les outils technologiques disponibles. De l’autre, subsisteront les partisans d’un monde oĂč l’imaginaire touristique de chacun le laissera libre de rĂȘver.


 En rĂ©sumĂ© : pour aborder ce sujet important, nous avons choisi de l’aborder à travers deux grands chapitres consacrĂ©s aux territoires et destinations, puis aux transports et hĂ©bergements. Et, dans chaque chapitre, nous nous sommes attachés à décrire trois types d’images qui se superposent dans les esprits et produisent des imaginaires :

- les images issues de la réalité de l’histoire du tourisme
- les images issues du symbolisme « officiel » propre à chaque culture
- les images issues de la modernité dans laquelle nous vivons.


Josette Sicsic
Josette Sicsic
Journaliste, consultante, confĂ©renciĂšre, Josette Sicsic observe depuis plus de 25 ans, les mutations du monde afin d’en analyser les consĂ©quences sur le secteur du tourisme.

AprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© pendant plus de 20 ans le journal Touriscopie, elle est toujours sur le pont de l’actualitĂ© oĂč elle dĂ©code le prĂ©sent pour prĂ©voir le futur. Sur le site www.tourmag.com, rubrique Futuroscopie, elle publie plusieurs fois par semaine les articles prospectifs et analytiques.

Contact : 06 14 47 99 04
Mail : touriscopie@gmail.com

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