Le modèle de la croisière à prix bradés compensés par les ventes à bord est en train de craquer de toutes parts. A trop baisser les tarifs, on attire logiquement une clientèle aux moyens plus limités, qui ne consomme que très peu sur les navires / Photo DR
Cela a commencé il y a quelques jours…
D'abord avec l'annonce de la défaillance de Classic International Cruises.
Un nom peu connu, mais des navires célèbres : Princess Danae, bien sûr, et aussi Princess Daphné, Arion, Athena, Funchal.
Des paquebots anciens mais confortables et plein de charme, souvent affrétés sur le marché français, par sa filiale NDS et les Croisières Notre Temps, mais aussi par de nombreuses agences.
Les informations le plus pessimistes s'accumulent : salaires, carburant, fournisseurs divers non payés, navires bloqués, croisières annulées, et la filiale française, NDS, qui voit son existence compromise.
Quant à l'APST, sa garantie porte sur les clients directs, et nombreuses sont les agences intermédiaires ou affréteuses. On plaint Terre Entière et quelques autres.
Ici et là, on relève que ces événements se produisent quelques mois seulement après le décès en mai dernier du fondateur de la compagnie portugaise, Georges Potamianos.
D'abord avec l'annonce de la défaillance de Classic International Cruises.
Un nom peu connu, mais des navires célèbres : Princess Danae, bien sûr, et aussi Princess Daphné, Arion, Athena, Funchal.
Des paquebots anciens mais confortables et plein de charme, souvent affrétés sur le marché français, par sa filiale NDS et les Croisières Notre Temps, mais aussi par de nombreuses agences.
Les informations le plus pessimistes s'accumulent : salaires, carburant, fournisseurs divers non payés, navires bloqués, croisières annulées, et la filiale française, NDS, qui voit son existence compromise.
Quant à l'APST, sa garantie porte sur les clients directs, et nombreuses sont les agences intermédiaires ou affréteuses. On plaint Terre Entière et quelques autres.
Ici et là, on relève que ces événements se produisent quelques mois seulement après le décès en mai dernier du fondateur de la compagnie portugaise, Georges Potamianos.
Prendre des parts de marché et remplir des cabines
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Je me souviens d'une longue rencontre avec lui en 1985 à Lisbonne : à l'époque, je revendais dans la brochure Scanditours les croisières norvégiennes du Funchal.
J'avais apprécié cet homme particulièrement chaleureux et droit, passionné par les navires anciens, par le bonheur des passagers et de ses partenaires-clients, rigoureux et soucieux de la qualité des rapports commerciaux. L'expression "se retourner dans sa tombe" me semble, dans le cas présent, tout à fait appropriée.
Si sa succession semble ne pas avoir été de la même qualité, il semble bien que l'évolution actuelle du marché de la croisière n'ait guère facilité la vie de Classic International Cruises.
Et voilà que, quelques jours plus tard, tombe l'annonce du "redimensionnement" de la filiale française de Royal Caribbean International. Sous cette subtilité sémantique, s'annonce le licenciement probable des 2/3 de l'équipe française.
Là aussi, les commentaires vont bon train.
Certains remarquent que le groupe est coutumier des décisions rapides : en Espagne, RCI avait quitté il y a quelques années son agent général Latitude Quatro pour créer sa propre filiale.
J'avais apprécié cet homme particulièrement chaleureux et droit, passionné par les navires anciens, par le bonheur des passagers et de ses partenaires-clients, rigoureux et soucieux de la qualité des rapports commerciaux. L'expression "se retourner dans sa tombe" me semble, dans le cas présent, tout à fait appropriée.
Si sa succession semble ne pas avoir été de la même qualité, il semble bien que l'évolution actuelle du marché de la croisière n'ait guère facilité la vie de Classic International Cruises.
Et voilà que, quelques jours plus tard, tombe l'annonce du "redimensionnement" de la filiale française de Royal Caribbean International. Sous cette subtilité sémantique, s'annonce le licenciement probable des 2/3 de l'équipe française.
Là aussi, les commentaires vont bon train.
Certains remarquent que le groupe est coutumier des décisions rapides : en Espagne, RCI avait quitté il y a quelques années son agent général Latitude Quatro pour créer sa propre filiale.
A trop baisser les tarifs, on attire une clientèle aux moyens plus limités
En France, même scénario, à quelques nuances près, avec Latitudes Sud, et création d'une filiale aux ambitions très élevées et à l'équipe pléthorique. Mais il y d'autres raisons, des raisons de marché.
Classic International Cruises et Royal Caribbean : deux événements de nature bien différente ? Sans doute. Mais dans les deux cas, un point commun : la difficulté croissante à commercialiser des croisières à des tarifs économiquement viables.
Ne nous trompons pas, la progression impressionnante du nombre de passagers de croisière n'est pas due seulement à l'attractivité d'un produit modernisé et ouvert à un public plus large. Elle est aussi due à un "business model" basé sur un seul objectif : prendre des parts de marché et remplir des cabines.
Quitte à vendre des voyages à bord de navires ultra-modernes et très récents, dont la décoration n'a rien à envier aux paquebots les plus luxueux, pour quelques centaines d'euros chez certains.
Les économies d'échelle réalisées par ces géants de la mer ne suffisent toutefois pas à rendre une telle braderie rentable : on se rattrape donc sur les ventes à bord, certains navires devenant de magnifiques centres commerciaux flottants.
Les navires anciens, plus petits, moins "glamour", ne peuvent s'aligner sur les nouveaux géants : leur coût par passager est supérieur et leur charme est un argument insuffisant pour justifier un tarif normal lorsque face à eux, une compagnie se permet de vendre à prix cassés des croisières sur des paquebots flambant neufs.
Mais il en va de même pour ceux qui, à bord de paquebots eux aussi géants, ultramodernes et luxueux, tentent de percer sur un marché pollué par une débâcle tarifaire inconsidérée.
Classic International Cruises et Royal Caribbean : deux événements de nature bien différente ? Sans doute. Mais dans les deux cas, un point commun : la difficulté croissante à commercialiser des croisières à des tarifs économiquement viables.
Ne nous trompons pas, la progression impressionnante du nombre de passagers de croisière n'est pas due seulement à l'attractivité d'un produit modernisé et ouvert à un public plus large. Elle est aussi due à un "business model" basé sur un seul objectif : prendre des parts de marché et remplir des cabines.
Quitte à vendre des voyages à bord de navires ultra-modernes et très récents, dont la décoration n'a rien à envier aux paquebots les plus luxueux, pour quelques centaines d'euros chez certains.
Les économies d'échelle réalisées par ces géants de la mer ne suffisent toutefois pas à rendre une telle braderie rentable : on se rattrape donc sur les ventes à bord, certains navires devenant de magnifiques centres commerciaux flottants.
Les navires anciens, plus petits, moins "glamour", ne peuvent s'aligner sur les nouveaux géants : leur coût par passager est supérieur et leur charme est un argument insuffisant pour justifier un tarif normal lorsque face à eux, une compagnie se permet de vendre à prix cassés des croisières sur des paquebots flambant neufs.
Mais il en va de même pour ceux qui, à bord de paquebots eux aussi géants, ultramodernes et luxueux, tentent de percer sur un marché pollué par une débâcle tarifaire inconsidérée.
Le business model est en train de craquer de toute part
C'est peut-être ce qui arrive à Royal Caribbean. Si, pour être parmi ceux qui comptent sur un marché, on doit en passer par une diminution délirante des prix et la perspective de perdre de l'argent, alors c'est que ce marché est pourri.
Car le modèle de la croisière à prix bradés compensés par les ventes à bord est en train de craquer de toute part. A trop baisser les tarifs, on attire logiquement une clientèle aux moyens plus limités, qui ne consomme que très peu sur les navires.
Le phénomène est flagrant chez certaines compagnies : les enfants gratuits et les adultes à basse contribution ne pourront dépenser à bord un argent qu'ils n'ont pas.
Alors on n'achète pas les excursions, on ne va pas ou presque pas dans les bars, on ne s'offre pas les bijoux, colifichets et autres gadgets en vente à chaque bout de coursive. On boit un coup dans les petits cafés des escales, mais à bord, on boit de l'eau aux repas.
Quant à la clientèle aisée qui aimait l'ambiance festive et animée de ces grands paquebots et dépensait effectivement beaucoup durant sa croisière, elle commence à se détourner de certaines compagnies, lassée par une ambiance qu'elle juge trop populaire et surtout trop bruyante à ses yeux.
Du coup, la croisière risque de perdre sur tous les tableaux : en pratiquant la braderie permanente et les promos sans fin, on rend l'existence des croisières sur des navires anciens de plus en plus improbable.
Mais en plus, les compagnies, en pratiquant des tarifs artificiellement bas, empêchent d'autres compagnies challenger d'entrer sur notre marché en leur rendant impossible la pratique d'une tarification correspondant à leur niveau de prestations.
Recruter une clientèle qui ne dépense plus rien, tout en perdant celle qui vous faisait vivre, c'est se tirer une balle dans le pied, c'est du sabordage.
Ce modèle est soutenu, parfois même imposé, par les agences web spécialisées sur la croisière, qui pour la plupart utilisent essentiellement le tarif comme argument de vente, et entre les mains desquelles certaines compagnies semblent s'être abandonnées.
Beau résultat. L'avenir nous dira prochainement si, par la force des choses, ce "business model" incohérent finira par s'effondrer. L'avis de tempête n'est pas loin.
Car le modèle de la croisière à prix bradés compensés par les ventes à bord est en train de craquer de toute part. A trop baisser les tarifs, on attire logiquement une clientèle aux moyens plus limités, qui ne consomme que très peu sur les navires.
Le phénomène est flagrant chez certaines compagnies : les enfants gratuits et les adultes à basse contribution ne pourront dépenser à bord un argent qu'ils n'ont pas.
Alors on n'achète pas les excursions, on ne va pas ou presque pas dans les bars, on ne s'offre pas les bijoux, colifichets et autres gadgets en vente à chaque bout de coursive. On boit un coup dans les petits cafés des escales, mais à bord, on boit de l'eau aux repas.
Quant à la clientèle aisée qui aimait l'ambiance festive et animée de ces grands paquebots et dépensait effectivement beaucoup durant sa croisière, elle commence à se détourner de certaines compagnies, lassée par une ambiance qu'elle juge trop populaire et surtout trop bruyante à ses yeux.
Du coup, la croisière risque de perdre sur tous les tableaux : en pratiquant la braderie permanente et les promos sans fin, on rend l'existence des croisières sur des navires anciens de plus en plus improbable.
Mais en plus, les compagnies, en pratiquant des tarifs artificiellement bas, empêchent d'autres compagnies challenger d'entrer sur notre marché en leur rendant impossible la pratique d'une tarification correspondant à leur niveau de prestations.
Recruter une clientèle qui ne dépense plus rien, tout en perdant celle qui vous faisait vivre, c'est se tirer une balle dans le pied, c'est du sabordage.
Ce modèle est soutenu, parfois même imposé, par les agences web spécialisées sur la croisière, qui pour la plupart utilisent essentiellement le tarif comme argument de vente, et entre les mains desquelles certaines compagnies semblent s'être abandonnées.
Beau résultat. L'avenir nous dira prochainement si, par la force des choses, ce "business model" incohérent finira par s'effondrer. L'avis de tempête n'est pas loin.
MINI BIO
François WEIL /photo JDL
François Weill, ancien président de l'AFCC, a été PDG de Hurtigruten France. Il a effectué la plus grande partie de sa carrière dans l'industrie de la croisière.
Commercial chez Paquet, il a été l’agent général de plusieurs compagnies maritimes avant de fonder Scanditours, TO des pays nordiques. Racheté par Kuoni, François Weill devient à 46 ans consultant puis professeur associé à l’Université de Marne-la- Vallée dans le cadre d’un IUP Tourisme.
Il prend alors la tête d'Hurtigruten la compagnie de l’Express Côtier qui souhaite se relancer sur le marché français. Quelques centaines de milliers de pax plus tard, l'aventure se termine par une sucess story en janvier 2010. Auparavant, il a assumé la présidence de France Ferries et Croisières où il succède en 2007 à George Azouze, patron de Costa qui, à son tour, reprend le siège 3 ans plus tard.
François Weill, a un doctorat en philosophie et a repris ses activités de consultant.
Contact : fw@francoisweill.fr
Commercial chez Paquet, il a été l’agent général de plusieurs compagnies maritimes avant de fonder Scanditours, TO des pays nordiques. Racheté par Kuoni, François Weill devient à 46 ans consultant puis professeur associé à l’Université de Marne-la- Vallée dans le cadre d’un IUP Tourisme.
Il prend alors la tête d'Hurtigruten la compagnie de l’Express Côtier qui souhaite se relancer sur le marché français. Quelques centaines de milliers de pax plus tard, l'aventure se termine par une sucess story en janvier 2010. Auparavant, il a assumé la présidence de France Ferries et Croisières où il succède en 2007 à George Azouze, patron de Costa qui, à son tour, reprend le siège 3 ans plus tard.
François Weill, a un doctorat en philosophie et a repris ses activités de consultant.
Contact : fw@francoisweill.fr