"J'ai peur que la culture du voyage s'estompe dans la société, nous devons retrouver sa dimension initiatique," selon Jean Pinard du CRT Occitanie - Crédit photo : Depositphotos @zirconicusso
TourMaG - Dans une 1ère partie de l'interview, vous avez aussi parlé de refondation des Organisations de gestion des destinations (OGD). Qu'entendez-vous par là ?
Jean Pinard : J'utilise le terme refondation pour l'économie, les organisations et les politiques touristiques.
Aujourd'hui, nous devons réduire les externalités du tourisme, cela passe par le transport principalement. Tout en sachant qu'il n'y a pas de voyages sans transport.
Il faut augmenter les fréquences et remplir les trains. Nous devons trouver des solutions sur cette problématique.
La question des calendriers scolaires devrait être posée.
Quand vous voyez que les enfants reprennent en plein milieu de la semaine, ne serait-il pas mieux que nous ayons plus de gens sur le chemin des vacances fin août, alors que les températures sont moins élevées ?
Il y aurait tout intérêt à organiser une sorte de Grenelle du tourisme, afin de faire sortir 10 mesures permettant de réduire les injustices, le rendre accessible au plus grand nombre, etc.
Nous vivons l'année "0" de la refondation de l'économie touristique.
Jean Pinard : J'utilise le terme refondation pour l'économie, les organisations et les politiques touristiques.
Aujourd'hui, nous devons réduire les externalités du tourisme, cela passe par le transport principalement. Tout en sachant qu'il n'y a pas de voyages sans transport.
Il faut augmenter les fréquences et remplir les trains. Nous devons trouver des solutions sur cette problématique.
La question des calendriers scolaires devrait être posée.
Quand vous voyez que les enfants reprennent en plein milieu de la semaine, ne serait-il pas mieux que nous ayons plus de gens sur le chemin des vacances fin août, alors que les températures sont moins élevées ?
Il y aurait tout intérêt à organiser une sorte de Grenelle du tourisme, afin de faire sortir 10 mesures permettant de réduire les injustices, le rendre accessible au plus grand nombre, etc.
Nous vivons l'année "0" de la refondation de l'économie touristique.
"La révolution de nos structures est de passer de la communication à l'information"
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TourMaG - Vous menez une politique de promotion d'un tourisme plus local, pour que les habitants de l'Occitanie visitent leur propre région. Ont-ils été au rendez-vous ?
Jean Pinard : Je continue à penser que la croissance de l'économie touristique sera portée par les marchés de proximité, beaucoup plus que par ceux lointains.
Nous sommes au début d'une refondation totale de l'économie touristique. Les voyages vont durer, mais nous devons prendre en compte les phénomènes de prise de conscience, de gestion des ressources et de la pollution.
Je prône un équilibre autour de 3 marchés : celui national, européen et de proximité.
Il y a un enjeu sociétal pour l'économie touristique à faire sortir les gens de chez eux. Une dernière étude révèle que 66% du temps libre des Français est consacré à des écrans. Nous devons les sortir de cette spirale, sinon l'économie touristique va s'écrouler ou du moins en pâtir.
Le gros chantier pour les organismes de gestion des destinations, comme les CRT, pour y arriver, c'est de différencier la communication et l'information.
La révolution de nos structures est de passer de la communication à l'information.
TourMaG - Dans le 1er papier, vous êtes revenu sur le "train à 1 euro" de la Région Occitanie. L'Espagne et l'Allemagne ont expérimenté cette démarche, durant l'été, pas la France. Comment jugez-vous cette absence de débat chez nous ?
Jean Pinard : L'Occitanie n'a pas à rougir par rapport à ce que fait l'Espagne, l'Allemagne ou l'Autriche, même si ce ne sont que des TER.
Je pense qu'un pays comme la France devrait proposer aux gamins qui ont 18 ans un billet de train gratuit durant l'été, pour découvrir toute la France.
Il y a aussi des choix à faire dans les orientations sociales, quand je vois l'ANCV continue à proposer le paiement des autoroutes par les chèques-vacances, je trouve ça honteux.
C'est un détournement de l'usage originel des chèques-vacances. Ils ne sont pas faits pour payer des autoroutes, c'est à vomir au regard des bénéfices de ces entreprises et au fait qu'elles ne participent en rien à dans le financement du tourisme, alors qu'ils en sont les plus gros bénéficiaires.
Le financement global des OGD est de l'ordre de 1,2 milliard d'euros, Total et Vinci, largement bénéficiaires de l'activité touristique, pourraient participer à ces budgets.
Le marketing de destination ne devrait pas être payé par l'impôt, mais par ceux qui ont un intérêt à voir le tourisme se développer sur le territoire. L'organisation touristique française est dépassée, ça ne marche plus.
Jean Pinard : Je continue à penser que la croissance de l'économie touristique sera portée par les marchés de proximité, beaucoup plus que par ceux lointains.
Nous sommes au début d'une refondation totale de l'économie touristique. Les voyages vont durer, mais nous devons prendre en compte les phénomènes de prise de conscience, de gestion des ressources et de la pollution.
Je prône un équilibre autour de 3 marchés : celui national, européen et de proximité.
Il y a un enjeu sociétal pour l'économie touristique à faire sortir les gens de chez eux. Une dernière étude révèle que 66% du temps libre des Français est consacré à des écrans. Nous devons les sortir de cette spirale, sinon l'économie touristique va s'écrouler ou du moins en pâtir.
Le gros chantier pour les organismes de gestion des destinations, comme les CRT, pour y arriver, c'est de différencier la communication et l'information.
La révolution de nos structures est de passer de la communication à l'information.
TourMaG - Dans le 1er papier, vous êtes revenu sur le "train à 1 euro" de la Région Occitanie. L'Espagne et l'Allemagne ont expérimenté cette démarche, durant l'été, pas la France. Comment jugez-vous cette absence de débat chez nous ?
Jean Pinard : L'Occitanie n'a pas à rougir par rapport à ce que fait l'Espagne, l'Allemagne ou l'Autriche, même si ce ne sont que des TER.
Je pense qu'un pays comme la France devrait proposer aux gamins qui ont 18 ans un billet de train gratuit durant l'été, pour découvrir toute la France.
Il y a aussi des choix à faire dans les orientations sociales, quand je vois l'ANCV continue à proposer le paiement des autoroutes par les chèques-vacances, je trouve ça honteux.
C'est un détournement de l'usage originel des chèques-vacances. Ils ne sont pas faits pour payer des autoroutes, c'est à vomir au regard des bénéfices de ces entreprises et au fait qu'elles ne participent en rien à dans le financement du tourisme, alors qu'ils en sont les plus gros bénéficiaires.
Le financement global des OGD est de l'ordre de 1,2 milliard d'euros, Total et Vinci, largement bénéficiaires de l'activité touristique, pourraient participer à ces budgets.
Le marketing de destination ne devrait pas être payé par l'impôt, mais par ceux qui ont un intérêt à voir le tourisme se développer sur le territoire. L'organisation touristique française est dépassée, ça ne marche plus.
"J'ai peur que la culture du voyage s'estompe dans la société"
TourMaG - Vous avez peur qu'une génération se désintéresse du tourisme ? En raison de l'omniprésence des écrans, du coût et de la complexité à trouver les informations.
Jean Pinard : Oui, j'ai peur que la culture du voyage s'estompe dans la société.
Nous devons revenir à la notion du Grand Tour, mais version moderne et démocratisée à l'ensemble de la population. Pour ces jeunes générations, nous devons retrouver la dimension initiatique du voyage et nous devons l'accompagner.
De plus, nous devons maintenir l'accès à la nature, c'est de notre responsabilité. Je crois à la fonction initiatique du voyage, si nous aidons les jeunes dans ce sens, alors nous allons aider une nouvelle génération à consommer le voyage différemment.
La réflexion doit être collective, entre le gouvernement, les socio-pros et les OGD. Ce n'est pas le cas actuellement. Quelque chose doit changer et inventer quelque chose qui n'existe pas.
TourMaG - Face à ce constat, le secteur a une nouvelle secrétaire d'Etat, avec Olivia Grégoire. Elle est pour le moment plutôt discrète. Quels messages voudriez-vous lui faire passer ?
Jean Pinard : Je n'attends pas grand-chose d'un ministre du tourisme, d'une façon générale, car notre économie est très décentralisée.
La France va faire une belle saison touristique, mais sera derrière l'Espagne et d'autres pays au niveau des recettes. S'il n'y a pas de réflexion sur l'organisation, nous n'arriverons jamais à mener à bien ce débat de la performance.
L'organisation la plus performante pour être celle qui s'applique sur des logiques de destinations, avec des financements privés et pas seulement publics. Pour revenir au train, en Occitanie ce sont les impôts qui financent l'opération du train à 1 euro, en Espagne ce sont les super profits.
La transition écologique devrait être financée par les entreprises qui polluent.
Jean Pinard : Oui, j'ai peur que la culture du voyage s'estompe dans la société.
Nous devons revenir à la notion du Grand Tour, mais version moderne et démocratisée à l'ensemble de la population. Pour ces jeunes générations, nous devons retrouver la dimension initiatique du voyage et nous devons l'accompagner.
De plus, nous devons maintenir l'accès à la nature, c'est de notre responsabilité. Je crois à la fonction initiatique du voyage, si nous aidons les jeunes dans ce sens, alors nous allons aider une nouvelle génération à consommer le voyage différemment.
La réflexion doit être collective, entre le gouvernement, les socio-pros et les OGD. Ce n'est pas le cas actuellement. Quelque chose doit changer et inventer quelque chose qui n'existe pas.
TourMaG - Face à ce constat, le secteur a une nouvelle secrétaire d'Etat, avec Olivia Grégoire. Elle est pour le moment plutôt discrète. Quels messages voudriez-vous lui faire passer ?
Jean Pinard : Je n'attends pas grand-chose d'un ministre du tourisme, d'une façon générale, car notre économie est très décentralisée.
La France va faire une belle saison touristique, mais sera derrière l'Espagne et d'autres pays au niveau des recettes. S'il n'y a pas de réflexion sur l'organisation, nous n'arriverons jamais à mener à bien ce débat de la performance.
L'organisation la plus performante pour être celle qui s'applique sur des logiques de destinations, avec des financements privés et pas seulement publics. Pour revenir au train, en Occitanie ce sont les impôts qui financent l'opération du train à 1 euro, en Espagne ce sont les super profits.
La transition écologique devrait être financée par les entreprises qui polluent.
Ecologie : "Il faut être punitif..."
TourMaG - Peut-être faudrait-il que les régions et les territoires arrêtent de financer les lignes des compagnies low cost...
Jean Pinard : Je ne dis pas que l'avion est le mal.
Il est nécessaire, il fait partie des transports permettant d'organiser le voyage. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'y a aucune logique économique à maintenir des lignes low cost à 30 euros.
Une liaison à bas coûts n'existe pas sans subvention des acteurs locaux.
TourMaG - Pour que le tourisme prenne une trajectoire plus verte, qui doit mener ces réflexions ? Les villes, les régions ou le gouvernement ?
Jean Pinard : Tous ceux qui pensent que l'écologie ne doit pas être punitive, se trompent.
La nature est punitive.
Il faut être punitif, envers ceux qui engendrent les effets extrêmes de la nature, suite au dérèglement climatique. Il est indispensable de prendre les devants pour l'économie touristique, afin d'accompagner les professionnels.
Nous ne sommes pas à la fin du progrès, mais avons besoin de l'intelligence collective pour nous adapter. Je ne pense pas que les efforts sont si importants à faire que cela...
Jean Pinard : Je ne dis pas que l'avion est le mal.
Il est nécessaire, il fait partie des transports permettant d'organiser le voyage. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'y a aucune logique économique à maintenir des lignes low cost à 30 euros.
Une liaison à bas coûts n'existe pas sans subvention des acteurs locaux.
TourMaG - Pour que le tourisme prenne une trajectoire plus verte, qui doit mener ces réflexions ? Les villes, les régions ou le gouvernement ?
Jean Pinard : Tous ceux qui pensent que l'écologie ne doit pas être punitive, se trompent.
La nature est punitive.
Il faut être punitif, envers ceux qui engendrent les effets extrêmes de la nature, suite au dérèglement climatique. Il est indispensable de prendre les devants pour l'économie touristique, afin d'accompagner les professionnels.
Nous ne sommes pas à la fin du progrès, mais avons besoin de l'intelligence collective pour nous adapter. Je ne pense pas que les efforts sont si importants à faire que cela...