TourMaG.com - Quand on voit le résultat de la grève qui a mis à genoux la Compagnie on a l'impression d'un formidable gâchis... qu'en pensez-vous ?
Maurice Perrin : "Elle a été déclenchée à un moment choisi d’avance, alors que le président de l’Exécutif de Corse allait annoncer dans son discours de rentrée le 1er septembre la remise à plat de la politique des transports au dernier trimestre 2004, tant pour l’aérien que pour le maritime.
Elle a pour la 2e fois de l’année contribué à remplir les navires jaunes (*) dans une année de fort recul conjoncturel comparable à 1996, de pression concurrentielle indécente, avec une offre supplémentaire de 700 000 places et des dizaines de milliers de places à 1€ pour les véhicules et 5€ pour les passagers, d’envolée des prix des carburants, portant un nouveau coup au tourisme en Corse.
Ce conflit d’autant plus long qu’il était très minoritaire, que les médiateurs de la première heure ont fait échouer la négociation en prenant partie, génère un immense gâchis, mais également une réaction unie et démocratique de l’ensemble du corps social de l’entreprise SNCM qui s’est traduite en un symbole très fort avec les personnels de toutes catégories rassemblés sur NAPOLEON BONAPARTE jeudi dernier."
TourMaG.com - Que deviennent précisément les accords avec le STC suite à la réponse de l'Intersyndicale ?
M.P. :"L’accord avec l’intersyndicale est lui dûment signé par les syndicats et la direction. C’est un accord d’entreprise qui rappelle les règles de fonctionnement interne de la compagnie, limite les risques d’interprétations abusives et sert de garde-fou après l’intervention de plus d’un millier de salariés.
Le fait que le STC les accepte et renvoie au débat politique à l’assemblée de Corse et à l’État pour la recherche d’une évolution organique et juridique de la compagnie (Corse-matin de samedi), montre qu’il ne peut faire autrement que de tenir compte de l’expression de masse des salariés de toutes les catégories très intégrés dans le tissu régional en Corse comme sur le continent.
S’étant écarté depuis fin 2003 de la défense de l’ensemble des emplois avec le refus du volet social voté par 72% des marins, chacun peut constater qu’il aurait pu faire l’économie de ce conflit pour l’île et la SNCM en passant par ses relais naturels élus à l’Assemblée de Corse."
TourMaG.com - On parle aujourd'hui d'un déficit d'exploitation de 21 millions d'euros et d'un coût de 4,5 Mie pour cette grève en particulier. Comment la Sncm peut-elle combler ce "trou" alors que l'Union européenne veille au grain ?
M.P. :"La recapitalisation de la SNCM était calculée au plus juste fin 2001. Elle est arrivée tard, c’est la 1ere et la seule depuis 25 ans, et est encore incomplète. La décision européenne prévoit que la SNCM doit s’adapter et assurer sa viabilité par ses propres moyens.
La CFE-CGC et ses élu(e)s veulent d’abord faire la part de du structurel et du conjoncturel dans l’origine des difficultés. (Fin 1999 le député Jean-François MATTEI pouvait dire au ministre des Transports que la reprise des trafics avait ramené l’équilibre des comptes). De plus, il y a eu trouble à l’ordre public, pour l’essentiel pour des causes externes à l’entreprise.
Les distorsions de concurrence lourdes dont bénéficie l’aspirant au monopole jaune (*) auraient dues être régulées par les pouvoirs publics, à défaut les politiques au plus haut niveau auraient dus se saisir de cette question, nous l’avions rappelé à François GOULARD le 13 mai dernier.
Ces distorsions et le dumping réglementaire fiscal et social, avec un accroissement de l’offre de 700 000 places dans le dispositif dit de « tornade jaune » permettent à un opérateur dont la Holding est passée hors CEE de viser par la guerre économique la destruction du système décidé en 2001 par la Corse, validé par le gouvernement et Bruxelles.
Les solutions sont donc à rechercher à plusieurs niveaux :
Maurice Perrin : "Elle a été déclenchée à un moment choisi d’avance, alors que le président de l’Exécutif de Corse allait annoncer dans son discours de rentrée le 1er septembre la remise à plat de la politique des transports au dernier trimestre 2004, tant pour l’aérien que pour le maritime.
Elle a pour la 2e fois de l’année contribué à remplir les navires jaunes (*) dans une année de fort recul conjoncturel comparable à 1996, de pression concurrentielle indécente, avec une offre supplémentaire de 700 000 places et des dizaines de milliers de places à 1€ pour les véhicules et 5€ pour les passagers, d’envolée des prix des carburants, portant un nouveau coup au tourisme en Corse.
Ce conflit d’autant plus long qu’il était très minoritaire, que les médiateurs de la première heure ont fait échouer la négociation en prenant partie, génère un immense gâchis, mais également une réaction unie et démocratique de l’ensemble du corps social de l’entreprise SNCM qui s’est traduite en un symbole très fort avec les personnels de toutes catégories rassemblés sur NAPOLEON BONAPARTE jeudi dernier."
TourMaG.com - Que deviennent précisément les accords avec le STC suite à la réponse de l'Intersyndicale ?
M.P. :"L’accord avec l’intersyndicale est lui dûment signé par les syndicats et la direction. C’est un accord d’entreprise qui rappelle les règles de fonctionnement interne de la compagnie, limite les risques d’interprétations abusives et sert de garde-fou après l’intervention de plus d’un millier de salariés.
Le fait que le STC les accepte et renvoie au débat politique à l’assemblée de Corse et à l’État pour la recherche d’une évolution organique et juridique de la compagnie (Corse-matin de samedi), montre qu’il ne peut faire autrement que de tenir compte de l’expression de masse des salariés de toutes les catégories très intégrés dans le tissu régional en Corse comme sur le continent.
S’étant écarté depuis fin 2003 de la défense de l’ensemble des emplois avec le refus du volet social voté par 72% des marins, chacun peut constater qu’il aurait pu faire l’économie de ce conflit pour l’île et la SNCM en passant par ses relais naturels élus à l’Assemblée de Corse."
TourMaG.com - On parle aujourd'hui d'un déficit d'exploitation de 21 millions d'euros et d'un coût de 4,5 Mie pour cette grève en particulier. Comment la Sncm peut-elle combler ce "trou" alors que l'Union européenne veille au grain ?
M.P. :"La recapitalisation de la SNCM était calculée au plus juste fin 2001. Elle est arrivée tard, c’est la 1ere et la seule depuis 25 ans, et est encore incomplète. La décision européenne prévoit que la SNCM doit s’adapter et assurer sa viabilité par ses propres moyens.
La CFE-CGC et ses élu(e)s veulent d’abord faire la part de du structurel et du conjoncturel dans l’origine des difficultés. (Fin 1999 le député Jean-François MATTEI pouvait dire au ministre des Transports que la reprise des trafics avait ramené l’équilibre des comptes). De plus, il y a eu trouble à l’ordre public, pour l’essentiel pour des causes externes à l’entreprise.
Les distorsions de concurrence lourdes dont bénéficie l’aspirant au monopole jaune (*) auraient dues être régulées par les pouvoirs publics, à défaut les politiques au plus haut niveau auraient dus se saisir de cette question, nous l’avions rappelé à François GOULARD le 13 mai dernier.
Ces distorsions et le dumping réglementaire fiscal et social, avec un accroissement de l’offre de 700 000 places dans le dispositif dit de « tornade jaune » permettent à un opérateur dont la Holding est passée hors CEE de viser par la guerre économique la destruction du système décidé en 2001 par la Corse, validé par le gouvernement et Bruxelles.
Les solutions sont donc à rechercher à plusieurs niveaux :
- Gestion de l’entreprise
- Rééquilibrage avec le concédant à partir du cahier des charges qui lie la compagnie et la CTC pour 2002-2006, non aggravation de la situation par le concédant de la situation (pénalités, retenues etc…)
- Application par l’Etat des mesures de remboursement de charges ENIM et non ENIM prévues par les CIM, qui sont de plus très en retrait de ce que pratique l’Italie pour ses pavillons
- Toutes mesures ponctuelles permettant de passer le cap conjoncturel
Nous attendons la première copie du plan de la direction. A partir de sa connaissance des comptes de la SNCM depuis 1996, la CFE-CGC est prête à participer à la recherche de solutions intelligentes et créatrices dans un cadre qui préserve l’essentiel du périmètre actuel et les emplois dans les 2 régions.
Dans un dossier qui prend rang d’affaire d’Etat et qui concerne la continuité du territoire entre nos 2 régions, l’Europe ne devrait pas appliquer de la façon la plus stricte des conditions draconiennes alors que les règles du jeu sont incohérentes et incomplètes, inadaptées au fait insulaire et qu’elle a pointé dans sa décision du 9 juillet 2003 le risque de monopole en cas de disparition de la SNCM."
TourMaG.com - On a évoqué une restructuration de l'entreprise avec la suppression des dessertes au départ de Nice. Qu'en pensez-vous ?
M.P. :"L’activité Marseille-Corse de Service Public, Nice-Corse sur le secteur « libre » soumis à l’aide sociale par passager transporté, et l’activité Maghreb sont complémentaires pour maintenir la SNCM en dessus d’une taille critique.
Les NGV ont permis de ne pas laisser à la concurrence quelque 500 000 passagers par an jusqu’à 2001, et 400 000 en 2002 et 2003. Ce dossier après le nouveau choc pétrolier doit être travaillé au fond, même si la décision paraît déjà prise par certains interlocuteurs au plus haut niveau de l’Etat ?
Quitter Nice, c’est inévitablement aller vers un plan social, c’est asseoir le monopole jaune, lui permettre de toucher encore plus d’argent public sans aucun contrôle et sans aucune exigence de retombées économiques et d’emplois en Corse !
Les clients pendant la grève ont déjà été confrontés à l’abus de monopole avec le retour au plein tarif de la saison comme l’a relevé le STC d’Ajaccio. Ceci préfigure ce qui se passera à l’avenir sir les pouvoirs publics en Corse comme à Paris et en Europe continuent à être défaillants sur l’harmonisation des règles du jeu de la concurrence."
TourMaG.com - Aujourd'hui rien ne semble réglé quant à la paix sociale dans l'entreprise et demain le STC pourra déclencher une nouvelle grève quand bon lui semble... Comment retrouver un apaisement pour pouvoir faire repartir le développement et la croissance de la Sncm sur de nouvelles bases ?
M.P. :"L’opinion publique informée peut-être l'arbitre de ces conflits déclenchés dans des buts strictement politiques, le volet social peut être traité par d’autres moyens. De la crise et de la mise en marche de forces responsables doivent sortir des solutions.
Il faut que l’on sorte de ce débat «dérisoire et surréaliste» comme l’a évoqué France3 Corse vendredi dernier, où l’on parle de créer des emplois supplémentaires dans une région alors qu’il faut conjurer le danger de ne pas en supprimer de nouveaux après le plan social de 2003.
L’ensemble des questions posées à l’Etat, à la région Corse qui va traiter de la définition de son futur système de transports, et à la SNCM doivent trouver des issues pendant la période hors saison qui commence, afin de permettre le retour des clients dont la Corse le tourisme et les compagnies ont besoin dès fin 2004 et en 2005.
Soumis à nombre d’incertitudes depuis 1996, les personnels ont montré très majoritairement leur sens des responsabilités tant dans l’acceptation du projet industriel validé par la commission européenne, que dans la dernière crise, il faut aussi leur redonner espoir. L’actionnaire doit jouer son rôle, le management doit s’appuyer sur les compétences et les énergies de la compagnie."
TourMaG.com - L'avenir de la Sncm n'est-il pas ailleurs qu'en Corse, quand on voit les pressions dont fait l'objet la Compagnie ?
M.P. :"Le redéploiement vers les marchés du Maghreb, notamment fait partie des atouts de la compagnie, mais il s’agit à l’heure actuelle d’activités complémentaires. Ceci dit le débat public que certains ont voulu boucler avant qu’il ait commencé doit avoir lieu en Corse comme en Paca.
Les élus de l’intersyndicale et les personnels ont dit tout haut ce que la plus grande partie de la population pense. Ils peuvent le faire parce qu’ils connaissent et respectent la Corse, parce qu’ils défendent avec la Société Nationale maritime Corse Méditerranée, une société spécifiquement créée pour la desserte de la Corse, un lien essentiel entre l’île et le continent, parce qu’ils sont porteurs de démocratie en Corse comme sur le continent."
Navires jaunes, monopole jaune (*) : Corsica Ferries, la cie concurrente (Ndlr).
Propos recueillis par Jean da LUZ - jdaluz@tourmag.com