Fin mai, lors du séminaire du comité de direction d’Atout France, la nouvelle structuration du réseau international du GIE a été annoncée - Photo Atout France
Depuis quelques mois, le sort d'Atout France inquiète l'écosystème du tourisme.
Il faut dire que son avenir concerne beaucoup de monde : ses collaborateurs en première ligne, mais aussi les partenaires, la tutelle, etc.
Sur les réseaux sociaux, chacun y va d’ailleurs de son commentaire ou de son opinion et notamment depuis la diffusion, via la presse, d'un courrier anonyme en avril dernier, qui a eu l'effet d'une bombe pour les équipes comme à l'extérieur de la « Maison de la France ».
Un « symbole de la lâcheté » comme l'a qualifié dans nos colonnes l'ancienne directrice générale d'Atout France, Caroline Leboucher, dont le mandat s'est terminé le 16 juin dernier.
Si l'ensemble du secteur du tourisme a condamné la méthode, le courrier lève tout de même le voile sur certains problèmes latents auxquels sont confrontés des salariés du GIE. Il met aussi en exergue les relations difficiles qu'une partie d'entre eux ont entretenu avec la direction générale et les ressources humaines.
Plusieurs nous l'ont confirmé, de façon anonyme et par peur des représailles : le dialogue des débuts a laissé la place à d'autres méthodes de management, voire de micro management, sous couvert de gestion budgétaire.
« Passage en force », « flicage », « perte d'autonomie et d'initiative », « infantilisation »... Après la méthode Mantei, « qui pouvait être autoritaire mais laissait la place à l'humain », la méthode Leboucher, semblable à celle qui pourrait être appliquée dans un ministère, a fragilisé, voire « brisé » certains collaborateurs d'Atout France.
Il faut dire que son avenir concerne beaucoup de monde : ses collaborateurs en première ligne, mais aussi les partenaires, la tutelle, etc.
Sur les réseaux sociaux, chacun y va d’ailleurs de son commentaire ou de son opinion et notamment depuis la diffusion, via la presse, d'un courrier anonyme en avril dernier, qui a eu l'effet d'une bombe pour les équipes comme à l'extérieur de la « Maison de la France ».
Un « symbole de la lâcheté » comme l'a qualifié dans nos colonnes l'ancienne directrice générale d'Atout France, Caroline Leboucher, dont le mandat s'est terminé le 16 juin dernier.
Si l'ensemble du secteur du tourisme a condamné la méthode, le courrier lève tout de même le voile sur certains problèmes latents auxquels sont confrontés des salariés du GIE. Il met aussi en exergue les relations difficiles qu'une partie d'entre eux ont entretenu avec la direction générale et les ressources humaines.
Plusieurs nous l'ont confirmé, de façon anonyme et par peur des représailles : le dialogue des débuts a laissé la place à d'autres méthodes de management, voire de micro management, sous couvert de gestion budgétaire.
« Passage en force », « flicage », « perte d'autonomie et d'initiative », « infantilisation »... Après la méthode Mantei, « qui pouvait être autoritaire mais laissait la place à l'humain », la méthode Leboucher, semblable à celle qui pourrait être appliquée dans un ministère, a fragilisé, voire « brisé » certains collaborateurs d'Atout France.
Dix plaintes aux Prud'hommes et deux au pénal
Après cinq années à la tête du GIE, la directrice générale quitte le navire.
Sous son mandat, 10 plaintes déposées aux Prud'hommes de la part de cadres-dirigeants - certains ne sont plus en poste - dont au moins 8 sont en cours de jugement, ainsi que deux autres au pénal pour harcèlement moral qui concernent aussi la DRH, selon nos informations.
Si l'une des plaintes a été jugée et requalifiée de « licenciement pour faute grave » à « licenciement pour causes réelles et sérieuses » et n'a pas suscité d'appel, une seconde a permis à un ex-collaborateur d'Atout France, ancien directeur régional de la zone ASEAN, de gagner son procès en première instance et jusqu'en Cassation..
Dans cette affaire, Atout France a déjà dû verser quelque dizaines de milliers d'euros de dommages et intérêts, mais pourrait avoir à en verser davantage, selon nos informations.
Cinq autres plaignants devraient passer prochainement en conciliation et pour Atout France, la note pourrait être salée, avec les frais d'avocat et une potentielle condamnation.
Nombre d'entre elles concernent des litiges avec des collaborateurs encore en poste, la plupart directeurs de bureaux à l'international qui n'ont pas supporté la nouvelle politique de mobilité internationale.
Après 18 mois de concertation, selon la direction, et le recours à des cabinets externes, une feuille de route a été présentée devant le CSE. Ce dernier a rendu un avis défavorable (mais consultatif), par manque de précisions sur la cartographie des postes disponibles et les modalités fiscales et financières de cette mobilité.
« Tout ce que nous avions proposé ne semblait pas donner satisfaction. J'ai donc décidé d'en rester à l'application stricte des contrats des collaborateurs expatriés », nous expliquait fin mai Caroline Leboucher à ce sujet.
Autrement dit, pour certains de ces salariés, cette application stricte s'est traduite par une proposition de retour au siège à Paris, à des postes « sous-dimensionnés » selon ces cadres-dirigeants et aux fonctions très éloignées de leur métier actuel, « et sans fiche de poste à l'appui dans certains cas, ni d'informations précises sur la rémunération, etc. », nous indique-t-on.
Aucun de ceux avec lesquels nous avons pu échanger n'était contre un changement de poste, tant qu'il s'agissait bien d'expatriation.
« C'est écrit dans nos contrats : nous avons signé des contrats de travail à l'expatriation. Jamais dans l'histoire d'Atout France, on a vu des salariés expatriés être obligés de revenir au siège », ajoute un autre.
Autre option : demeurer sur place en contrat de droit local. « A aucun moment, nous n'avons pu émettre ne serait-ce qu'un seul choix, il n'y a eu aucun échange », nous explique l'un deux.
Tous dénoncent un manque de considération, des propositions peu précises avec des délais de réponse très courts, et parfois un acharnement de la direction envers des salariés confrontés à des problèmes de santé.
Sous son mandat, 10 plaintes déposées aux Prud'hommes de la part de cadres-dirigeants - certains ne sont plus en poste - dont au moins 8 sont en cours de jugement, ainsi que deux autres au pénal pour harcèlement moral qui concernent aussi la DRH, selon nos informations.
Si l'une des plaintes a été jugée et requalifiée de « licenciement pour faute grave » à « licenciement pour causes réelles et sérieuses » et n'a pas suscité d'appel, une seconde a permis à un ex-collaborateur d'Atout France, ancien directeur régional de la zone ASEAN, de gagner son procès en première instance et jusqu'en Cassation..
Dans cette affaire, Atout France a déjà dû verser quelque dizaines de milliers d'euros de dommages et intérêts, mais pourrait avoir à en verser davantage, selon nos informations.
Cinq autres plaignants devraient passer prochainement en conciliation et pour Atout France, la note pourrait être salée, avec les frais d'avocat et une potentielle condamnation.
Nombre d'entre elles concernent des litiges avec des collaborateurs encore en poste, la plupart directeurs de bureaux à l'international qui n'ont pas supporté la nouvelle politique de mobilité internationale.
Après 18 mois de concertation, selon la direction, et le recours à des cabinets externes, une feuille de route a été présentée devant le CSE. Ce dernier a rendu un avis défavorable (mais consultatif), par manque de précisions sur la cartographie des postes disponibles et les modalités fiscales et financières de cette mobilité.
« Tout ce que nous avions proposé ne semblait pas donner satisfaction. J'ai donc décidé d'en rester à l'application stricte des contrats des collaborateurs expatriés », nous expliquait fin mai Caroline Leboucher à ce sujet.
Autrement dit, pour certains de ces salariés, cette application stricte s'est traduite par une proposition de retour au siège à Paris, à des postes « sous-dimensionnés » selon ces cadres-dirigeants et aux fonctions très éloignées de leur métier actuel, « et sans fiche de poste à l'appui dans certains cas, ni d'informations précises sur la rémunération, etc. », nous indique-t-on.
Aucun de ceux avec lesquels nous avons pu échanger n'était contre un changement de poste, tant qu'il s'agissait bien d'expatriation.
« C'est écrit dans nos contrats : nous avons signé des contrats de travail à l'expatriation. Jamais dans l'histoire d'Atout France, on a vu des salariés expatriés être obligés de revenir au siège », ajoute un autre.
Autre option : demeurer sur place en contrat de droit local. « A aucun moment, nous n'avons pu émettre ne serait-ce qu'un seul choix, il n'y a eu aucun échange », nous explique l'un deux.
Tous dénoncent un manque de considération, des propositions peu précises avec des délais de réponse très courts, et parfois un acharnement de la direction envers des salariés confrontés à des problèmes de santé.
Le micmac des cotisations sociales
A cela s'ajoutent des problèmes relatifs au paiement des cotisations sociales, notamment pour le chômage et les retraites.
« Un vrai micmac » qui dure depuis près de 15 ans et qui n'est pas encore totalement réglé à ce jour, explique l'un deux.
« Les contrats des salariés de droit privé ont été mal montés », ajoute un autre collaborateur. Notamment ceux signés en 2008 et 2009, du temps de la Maison de la France et réalisés sous l'égide de l’État.
Un problème antérieur donc à l'arrivée de Caroline Leboucher et de l'actuelle DRH, Julie Chamourat, mais qui perdure, et qui a même provoqué une scission au sein du CSE.
Et pourtant, « il n'y a pas 50 statuts chez Atout France pour les salariés de droit privé, nous explique-t-on.
Hormis les collaborateurs en contrat local, soit vous êtes expatrié, soit vous êtes détaché, mais dans les deux cas, vous relevez du droit français. L'employeur étant basé en France, le contrat de travail étant signé en France, les cotisations maladie, chômage, etc. sont dues au titre du droit français. C'est la loi. Il n'y a pas de statut hybride ».
« La raison pour laquelle ces problèmes ne sont pas réglés, c'est l'argent, ajoute un autre. Atout France ne veut pas régulariser la situation pour ne pas avoir à payer pour les arriérés ».
Doit-on également voir dans cette situation la solution de Caroline Leboucher pour éviter un PSE au début de son mandat ? Face au galimatias administratif actuel, la DG a-t-elle voulu éviter de casser ces anciens contrats et en même temps le PSE, en espérant que la situation perdurerait comme au temps de son prédécesseur ?
Quoi qu'il en soit, face à l'absence de paiement des cotisations chômage, quel choix pour ces salariés qui refusent leur affectation dans ce nouveau plan de mobilité ? Certainement pas celui de prétendre au chômage.
« On parle d'une poignée de salariés, commente une source proche du dossier. Mais n'y avait-il pas un moyen de trouver un terrain d'entente, de négocier plutôt que d'imposer ? ».
Alors face à l'option d'un retour à Paris, vécu pour beaucoup comme « une rétrogradation », une partie des collaborateurs ont opté pour les Prud'hommes... à contre cœur. Car pour ces expatriés, Atout France est bien plus qu'un job. « Nous sommes des ambassadeurs de la France », martèlent-ils.
Certains ont plus de 20 ans de carrière au sein de la maison et estiment avoir tout donné pour elle. « J'ai souvent fait passer ma carrière avant ma vie de famille », relate l'un deux. <
« On donne de notre personne, dans des villes parfois difficiles à vivre, très polluées, commente un second, en Chine, en Inde. Les week-ends, on ne peut pas rendre visite à notre famille. Certaines semaines, à l'occasion d'événements importants, nos journées commencent à 6h pour s'achever à 23h. Quand on parle des expatriés, on a l'image des soirées Ferrero Rocher chez l'ambassadeur, mais ce n'est pas la réalité ».
Alors que Caroline Leboucher évoque dans nos colonnes « des conditions salariales avantageuses », les personnes que nous avons pu interroger recadrent les faits : « se loger en France n'a pas le même coût qu'à New York ou à Singapour ».
Idem pour les frais médicaux ou de scolarité des enfants. « On nous dépeint parfois comme des nantis, mais n'oublions pas que hormis une augmentation récente de 100€ bruts, nous n'avons pas été augmentés depuis 15 ans, souligne un autre collaborateur, alors que le coût de la vie a nettement augmenté ».
« Un vrai micmac » qui dure depuis près de 15 ans et qui n'est pas encore totalement réglé à ce jour, explique l'un deux.
« Les contrats des salariés de droit privé ont été mal montés », ajoute un autre collaborateur. Notamment ceux signés en 2008 et 2009, du temps de la Maison de la France et réalisés sous l'égide de l’État.
Un problème antérieur donc à l'arrivée de Caroline Leboucher et de l'actuelle DRH, Julie Chamourat, mais qui perdure, et qui a même provoqué une scission au sein du CSE.
Et pourtant, « il n'y a pas 50 statuts chez Atout France pour les salariés de droit privé, nous explique-t-on.
Hormis les collaborateurs en contrat local, soit vous êtes expatrié, soit vous êtes détaché, mais dans les deux cas, vous relevez du droit français. L'employeur étant basé en France, le contrat de travail étant signé en France, les cotisations maladie, chômage, etc. sont dues au titre du droit français. C'est la loi. Il n'y a pas de statut hybride ».
« La raison pour laquelle ces problèmes ne sont pas réglés, c'est l'argent, ajoute un autre. Atout France ne veut pas régulariser la situation pour ne pas avoir à payer pour les arriérés ».
Doit-on également voir dans cette situation la solution de Caroline Leboucher pour éviter un PSE au début de son mandat ? Face au galimatias administratif actuel, la DG a-t-elle voulu éviter de casser ces anciens contrats et en même temps le PSE, en espérant que la situation perdurerait comme au temps de son prédécesseur ?
Quoi qu'il en soit, face à l'absence de paiement des cotisations chômage, quel choix pour ces salariés qui refusent leur affectation dans ce nouveau plan de mobilité ? Certainement pas celui de prétendre au chômage.
« On parle d'une poignée de salariés, commente une source proche du dossier. Mais n'y avait-il pas un moyen de trouver un terrain d'entente, de négocier plutôt que d'imposer ? ».
Alors face à l'option d'un retour à Paris, vécu pour beaucoup comme « une rétrogradation », une partie des collaborateurs ont opté pour les Prud'hommes... à contre cœur. Car pour ces expatriés, Atout France est bien plus qu'un job. « Nous sommes des ambassadeurs de la France », martèlent-ils.
Certains ont plus de 20 ans de carrière au sein de la maison et estiment avoir tout donné pour elle. « J'ai souvent fait passer ma carrière avant ma vie de famille », relate l'un deux. <
« On donne de notre personne, dans des villes parfois difficiles à vivre, très polluées, commente un second, en Chine, en Inde. Les week-ends, on ne peut pas rendre visite à notre famille. Certaines semaines, à l'occasion d'événements importants, nos journées commencent à 6h pour s'achever à 23h. Quand on parle des expatriés, on a l'image des soirées Ferrero Rocher chez l'ambassadeur, mais ce n'est pas la réalité ».
Alors que Caroline Leboucher évoque dans nos colonnes « des conditions salariales avantageuses », les personnes que nous avons pu interroger recadrent les faits : « se loger en France n'a pas le même coût qu'à New York ou à Singapour ».
Idem pour les frais médicaux ou de scolarité des enfants. « On nous dépeint parfois comme des nantis, mais n'oublions pas que hormis une augmentation récente de 100€ bruts, nous n'avons pas été augmentés depuis 15 ans, souligne un autre collaborateur, alors que le coût de la vie a nettement augmenté ».
Les salariés expatriés, des nantis ?
La communication de la direction d'Atout France en ce sens passe mal. De même que le fait de laisser à penser que ce sont ces mêmes salariés expatriés qui seraient à l'origine du courrier anonyme.
« La lettre ouverte diffusée traduit avant tout une forte résistance au changement mue par le maintien d’intérêts particuliers au mépris des obligations contractuelles de mobilité des salariés expatriés concernés », exprimait officiellement le GIE dans une communication.
« Pour quelles raisons des salariés qui ont lancé une action aux Prud'hommes à visage découvert feraient-ils une telle chose ? », estiment les personnes interrogées. Cette bataille de la communication dessert Atout France « et beaucoup de salariés en souffrent », nous explique-t-on.
Mais comment le GIE en est-il arrivé là ? Cette situation de blocage peut-elle se justifier seulement par une baisse des budgets alloués à l'opérateur et à un pilotage depuis la tutelle à Bercy ?
En 2019, « j'ai été accueillie avec une feuille de route qui comprenait un plan d'économies de 4 millions d'euros, c'est-à-dire une réduction de 14% des frais de fonctionnement en un an, en plein Covid, nous rappelait en mai dernier Caroline Leboucher. Je n'ai pas fait de PSE, j'ai réduit au minimum les départs par rapport à ce que la tutelle m'avait demandé initialement, c'est-à-dire une réduction de 30% de la masse salariale du réseau international.
J'ai préféré transformer cela en 30% de baisse des frais de fonctionnement, tels les frais de mission, les soirées, les déplacements, les déménagements, etc. Nous avons réduit les locaux, mais finalement, pour s'inscrire dans ce qui est attendu et dans les directives interministérielles ».
Après ce plan d'économies est venu le temps de la restructuration du réseau international, qui a démarré dès 2022 pour se traduire, au 1er juillet prochain, par le lancement des nouvelles directions régionales.
Mais là encore, les points de friction sont nombreux. A commencer par le fait que ces six nouveaux directeurs, à l'inverse des anciens coordinateurs de zones, auront un lien hiérarchique avec les directeurs des bureaux internationaux.
« Un lien qui n'a toujours pas été défini, nous explique-t-on, tout comme la fiche de poste de ces nouveaux directeurs ».
Quel rôle auront-ils sur leurs N-1 ? Interviendront-ils dans la gestion des budgets, des collaborateurs ? Pour l'heure, Atout France n'a pas répondu à notre demande sur le sujet.
« La lettre ouverte diffusée traduit avant tout une forte résistance au changement mue par le maintien d’intérêts particuliers au mépris des obligations contractuelles de mobilité des salariés expatriés concernés », exprimait officiellement le GIE dans une communication.
« Pour quelles raisons des salariés qui ont lancé une action aux Prud'hommes à visage découvert feraient-ils une telle chose ? », estiment les personnes interrogées. Cette bataille de la communication dessert Atout France « et beaucoup de salariés en souffrent », nous explique-t-on.
Mais comment le GIE en est-il arrivé là ? Cette situation de blocage peut-elle se justifier seulement par une baisse des budgets alloués à l'opérateur et à un pilotage depuis la tutelle à Bercy ?
En 2019, « j'ai été accueillie avec une feuille de route qui comprenait un plan d'économies de 4 millions d'euros, c'est-à-dire une réduction de 14% des frais de fonctionnement en un an, en plein Covid, nous rappelait en mai dernier Caroline Leboucher. Je n'ai pas fait de PSE, j'ai réduit au minimum les départs par rapport à ce que la tutelle m'avait demandé initialement, c'est-à-dire une réduction de 30% de la masse salariale du réseau international.
J'ai préféré transformer cela en 30% de baisse des frais de fonctionnement, tels les frais de mission, les soirées, les déplacements, les déménagements, etc. Nous avons réduit les locaux, mais finalement, pour s'inscrire dans ce qui est attendu et dans les directives interministérielles ».
Après ce plan d'économies est venu le temps de la restructuration du réseau international, qui a démarré dès 2022 pour se traduire, au 1er juillet prochain, par le lancement des nouvelles directions régionales.
Mais là encore, les points de friction sont nombreux. A commencer par le fait que ces six nouveaux directeurs, à l'inverse des anciens coordinateurs de zones, auront un lien hiérarchique avec les directeurs des bureaux internationaux.
« Un lien qui n'a toujours pas été défini, nous explique-t-on, tout comme la fiche de poste de ces nouveaux directeurs ».
Quel rôle auront-ils sur leurs N-1 ? Interviendront-ils dans la gestion des budgets, des collaborateurs ? Pour l'heure, Atout France n'a pas répondu à notre demande sur le sujet.
Les contrats locaux sont-ils légaux ?
L'autre point sensible de cette nouvelle organisation du réseau, c'est la multiplication des contrats locaux, au détriment des contrats d'expatriation.
« Il est très difficile de casser un contrat local. Alors quels choix de mobilité restent-ils aux salariés expatriés s'ils ne peuvent plus pourvoir des postes de directeur en Inde, en Russie ou au Canada parce que les directeurs actuels ont été engagés en contrat local ? » s'interroge un collaborateur.
« On dirait que tout ceci a été fait exprès pour nous décourager, poursuit-il, comme le fait d'envoyer les arrêtés de nomination le vendredi avant les vacances de Noël ou de proposer des postes dans des endroits totalement opposés aux collaborateurs, sans autre option possible.
Je pense que nous sommes sur la fin d'un cycle prévu et amené par Caroline Leboucher, qui a exécuté sa mission, mais s'est pris les pieds dans le tapis sur les problèmes sociaux ».
D'autant plus que certains contrats de droit local pourraient être remis en cause. Rappelez-vous la décision de justice qui a donné raison (jusqu'à la Cour de Cassation) à un ex-salarié d'Atout France. Ce dernier a réussi à prouver que son contrat local n'avait pas d'existence juridique étant donné qu'Atout France ne dispose pas de filière à l'étranger. Le cas pourrait-il faire jurisprudence au sein du réseau international du GIE ?
Enfin, plusieurs salariés s'interrogent sur la pertinence du nouveau découpage du réseau international par régions. « Pourquoi avoir regroupé l'Amérique du Nord avec la Scandinavie ? s'interroge le directeur régional basé à New-York. Va-t-il gérer ses équipes en Europe avec 8 heures de décalage horaire ? »..
« Et que dire d'intégrer Israël dans le Moyen-Orient ? » s'étonne un autre.
« Il est très difficile de casser un contrat local. Alors quels choix de mobilité restent-ils aux salariés expatriés s'ils ne peuvent plus pourvoir des postes de directeur en Inde, en Russie ou au Canada parce que les directeurs actuels ont été engagés en contrat local ? » s'interroge un collaborateur.
« On dirait que tout ceci a été fait exprès pour nous décourager, poursuit-il, comme le fait d'envoyer les arrêtés de nomination le vendredi avant les vacances de Noël ou de proposer des postes dans des endroits totalement opposés aux collaborateurs, sans autre option possible.
Je pense que nous sommes sur la fin d'un cycle prévu et amené par Caroline Leboucher, qui a exécuté sa mission, mais s'est pris les pieds dans le tapis sur les problèmes sociaux ».
D'autant plus que certains contrats de droit local pourraient être remis en cause. Rappelez-vous la décision de justice qui a donné raison (jusqu'à la Cour de Cassation) à un ex-salarié d'Atout France. Ce dernier a réussi à prouver que son contrat local n'avait pas d'existence juridique étant donné qu'Atout France ne dispose pas de filière à l'étranger. Le cas pourrait-il faire jurisprudence au sein du réseau international du GIE ?
Enfin, plusieurs salariés s'interrogent sur la pertinence du nouveau découpage du réseau international par régions. « Pourquoi avoir regroupé l'Amérique du Nord avec la Scandinavie ? s'interroge le directeur régional basé à New-York. Va-t-il gérer ses équipes en Europe avec 8 heures de décalage horaire ? »..
« Et que dire d'intégrer Israël dans le Moyen-Orient ? » s'étonne un autre.
Des budgets serrés peuvent-ils tout justifier ?
Certains d’entre eux regrettent la fin de la double tutelle entre le Ministère de l’Économie et celui des Affaires étrangères.
« Il y avait un important réseau international, et les ambassadeurs ont toujours apprécié le travail mené par les salariés d'Atout France à l'international, parce qu'ils sont extrêmement agiles et opérationnels sur les événements, les campagnes, etc.
Mais quand Bercy - le maître du budget - dit que l'objectif est de couper 30% du réseau, on peut s'attendre à un refus du côté du ministère des Affaires étrangères. D'où probablement ce changement de tutelle voulu par l’État », analyse une source proche du dossier.
A ce sujet, rappelons que la fermeture de certains bureaux, notamment en Israël ou en Afrique du Sud, était aussi l'un des points de tension soulignés par le courrier anonyme.
Alors que Caroline Leboucher nous a certifié qu'il ne s'agissait pas de bureaux, mais « d'activités », Laurent Roumani, directeur du bureau d'Israël jusqu'en 2023, a tenu à y apporter des précisions. « Il s’agissait bien d'un « bureau » de représentation même si j’étais la seule personne détachée en Israël. La qualification de « bureau » est d’ailleurs expressément retenue dans le rapport d'activité 2018 d'Atout France co-signé par le président et la directrice générale elle-même, indique-t-il.
Quant à la fermeture de ce bureau en Israël, contrairement à ce qui est suggéré, elle est totalement indépendante des événements consécutifs au 07 octobre 2023. Mon départ en retraite a, en effet, été acté dès le mois de juin 2023 - donc quatre mois avant la guerre. Et la décision de fermer le bureau en Israël a été prise dans cette période, donc bien avant le 07 octobre 2023 ».
Comme avec Laurent Roumani, l'interview de Caroline Leboucher publiée sur TourMaG en début de semaine a suscité des réactions. « Caroline Leboucher réécrit l'histoire », commente un collaborateur.
Une partie de ces salariés du bout du monde regrettent le manque d'empathie et de lien social de la part de la direction, au cours des dernières années chez Atout France. Parmi les exemples qui reviennent : l'absence de pot de départ ou tout simplement d'une occasion de dire au revoir à ses collègues lors de la fermeture d'un bureau, d'un départ à la retraite ou tout simplement d'un changement de carrière.
Encore une fois, un budget serré justifie-t-il de laisser des collaborateurs avec 20 ans de maison sortir par la petite porte ?
« Il y avait un important réseau international, et les ambassadeurs ont toujours apprécié le travail mené par les salariés d'Atout France à l'international, parce qu'ils sont extrêmement agiles et opérationnels sur les événements, les campagnes, etc.
Mais quand Bercy - le maître du budget - dit que l'objectif est de couper 30% du réseau, on peut s'attendre à un refus du côté du ministère des Affaires étrangères. D'où probablement ce changement de tutelle voulu par l’État », analyse une source proche du dossier.
A ce sujet, rappelons que la fermeture de certains bureaux, notamment en Israël ou en Afrique du Sud, était aussi l'un des points de tension soulignés par le courrier anonyme.
Alors que Caroline Leboucher nous a certifié qu'il ne s'agissait pas de bureaux, mais « d'activités », Laurent Roumani, directeur du bureau d'Israël jusqu'en 2023, a tenu à y apporter des précisions. « Il s’agissait bien d'un « bureau » de représentation même si j’étais la seule personne détachée en Israël. La qualification de « bureau » est d’ailleurs expressément retenue dans le rapport d'activité 2018 d'Atout France co-signé par le président et la directrice générale elle-même, indique-t-il.
Quant à la fermeture de ce bureau en Israël, contrairement à ce qui est suggéré, elle est totalement indépendante des événements consécutifs au 07 octobre 2023. Mon départ en retraite a, en effet, été acté dès le mois de juin 2023 - donc quatre mois avant la guerre. Et la décision de fermer le bureau en Israël a été prise dans cette période, donc bien avant le 07 octobre 2023 ».
Comme avec Laurent Roumani, l'interview de Caroline Leboucher publiée sur TourMaG en début de semaine a suscité des réactions. « Caroline Leboucher réécrit l'histoire », commente un collaborateur.
Une partie de ces salariés du bout du monde regrettent le manque d'empathie et de lien social de la part de la direction, au cours des dernières années chez Atout France. Parmi les exemples qui reviennent : l'absence de pot de départ ou tout simplement d'une occasion de dire au revoir à ses collègues lors de la fermeture d'un bureau, d'un départ à la retraite ou tout simplement d'un changement de carrière.
Encore une fois, un budget serré justifie-t-il de laisser des collaborateurs avec 20 ans de maison sortir par la petite porte ?
Deux sénateurs interpellent la ministre
Si l'ex-directrice générale a rempli sa mission et ses objectifs, ce ne sera donc pas sans dommages collatéraux sur une partie de ses collaborateurs.
« L'expatriation, par définition, est temporaire. Et, on le sait, un retour de mobilité n'est jamais simple. C'est valable dans toutes les entreprises, dans tous les secteurs », nous expliquait-t-elle le mois dernier.
« Ce qui est hallucinant, c'est qu'il n'y a eu aucun mot ou déclaration publique de la part du président d'Atout France sur la situation du GIE », souligne un collaborateur.
Les pouvoirs publics de leur côté, ont apporté leur réponse, par la voix du Premier ministre Gabriel Attal : une consultation prévue à la rentrée 2024, et menée par Olivia Grégoire, la ministre déléguée en charge du tourisme, suivie d'une réforme de l'opérateur début 2025.
Mais depuis cette annonce début mai, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République, couplée à la possibilité d'un changement de gouvernement en cas de nouvelle majorité politique, pourrait venir contrecarrer les plans initiaux.
En parallèle, soulignons néanmoins les initiatives de deux sénateurs - Jean-Luc Ruelle et Pierre-Alain Roiron - qui ont tous deux interpellé Olivia Grégoire dans les questions orales du Sénat, sur la situation de l'opérateur d'État, à quelques semaines du coup d'envoi des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.
« Le fonctionnement de l'opérateur Atout France fait l'objet de nombreux questionnements et incompréhensions à l'échelle tant nationale que locale. Alors que le monde entier aura bientôt les yeux rivés sur notre pays, la stratégie déployée par l'opérateur chargé de la promotion touristique du pays ainsi que sa situation interne, sont quelques peu préoccupantes », a souligné Pierre-Alain Roiron.
Puis il a ajouté : « La restructuration des bureaux à l'étranger a engendré des perturbations majeures, avec des fermetures et des fusions qui ont de graves répercussions sur l'efficacité des campagnes de promotion à l'international.
À ce jour, le nombre de bureaux à l'étranger aurait été réduit d'un tiers. Ces changements compromettent nécessairement l'attractivité et la compétitivité de la France pour l'accueil des milliers de touristes attendus pour cet événement mondial ».
« L'expatriation, par définition, est temporaire. Et, on le sait, un retour de mobilité n'est jamais simple. C'est valable dans toutes les entreprises, dans tous les secteurs », nous expliquait-t-elle le mois dernier.
« Ce qui est hallucinant, c'est qu'il n'y a eu aucun mot ou déclaration publique de la part du président d'Atout France sur la situation du GIE », souligne un collaborateur.
Les pouvoirs publics de leur côté, ont apporté leur réponse, par la voix du Premier ministre Gabriel Attal : une consultation prévue à la rentrée 2024, et menée par Olivia Grégoire, la ministre déléguée en charge du tourisme, suivie d'une réforme de l'opérateur début 2025.
Mais depuis cette annonce début mai, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et la dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République, couplée à la possibilité d'un changement de gouvernement en cas de nouvelle majorité politique, pourrait venir contrecarrer les plans initiaux.
En parallèle, soulignons néanmoins les initiatives de deux sénateurs - Jean-Luc Ruelle et Pierre-Alain Roiron - qui ont tous deux interpellé Olivia Grégoire dans les questions orales du Sénat, sur la situation de l'opérateur d'État, à quelques semaines du coup d'envoi des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.
« Le fonctionnement de l'opérateur Atout France fait l'objet de nombreux questionnements et incompréhensions à l'échelle tant nationale que locale. Alors que le monde entier aura bientôt les yeux rivés sur notre pays, la stratégie déployée par l'opérateur chargé de la promotion touristique du pays ainsi que sa situation interne, sont quelques peu préoccupantes », a souligné Pierre-Alain Roiron.
Puis il a ajouté : « La restructuration des bureaux à l'étranger a engendré des perturbations majeures, avec des fermetures et des fusions qui ont de graves répercussions sur l'efficacité des campagnes de promotion à l'international.
À ce jour, le nombre de bureaux à l'étranger aurait été réduit d'un tiers. Ces changements compromettent nécessairement l'attractivité et la compétitivité de la France pour l'accueil des milliers de touristes attendus pour cet événement mondial ».
Vers une montée en puissance des régions ?
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Alors qu'une directrice générale par intérim a repris les rênes de la maison, la nomination du prochain (ou de la prochaine) DG ne devrait pas intervenir avant quelques mois, le temps qu'une procédure de recrutement soit mise en place, en lien avec la ministre et Bercy.
D'ici là, la réforme d'Atout France pourrait bien aiguiser les appétits. D'autant plus que le rapport Woerth sur la décentralisation recommande de faire des régions les « cheffes de file en matière de tourisme »...
Doit-on ainsi se préparer à une montée en puissance d'institutions comme la CAT, Régions de France ou encore ADN Tourisme au conseil d'administration d'Atout France ? Ces organismes pourraient-ils peser davantage dans les décisions de l'agence, et contrebalancer la tutelle unique de Bercy ?
Ce serait en tous cas dans la droite ligne des recommandations portées par Hervé Novelli au Président de la République...
D'ici là, la réforme d'Atout France pourrait bien aiguiser les appétits. D'autant plus que le rapport Woerth sur la décentralisation recommande de faire des régions les « cheffes de file en matière de tourisme »...
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Ce serait en tous cas dans la droite ligne des recommandations portées par Hervé Novelli au Président de la République...