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COP21 : les contrôles aux frontières vont-ils perturber le tourisme en France ?

285 points de contrôle du 13 novembre au 13 décembre 2015


Afin de protéger les quelque 80 chefs d'Etat et de gouvernement ainsi que les 160 délégations étrangères attendus, la France va rétablir les contrôles à ses frontières pendant la COP21. Une mesure qui entrera même en vigueur deux semaines avant le début de la conférence. Mais ses modalités de mise en oeuvre restent encore floues et pourraient perturber l'activité des aéroports français.


Rédigé par Pierre Coronas le Mardi 10 Novembre 2015

Dans les jours qui précèdent l’événement et pendant la COP21, la France va rétablir les contrôles à ses frontières - Photo : shahfarshid-Fotolia.com
Dans les jours qui précèdent l’événement et pendant la COP21, la France va rétablir les contrôles à ses frontières - Photo : shahfarshid-Fotolia.com
Pendant un mois, du 13 novembre au 13 décembre 2015, la France va rétablir les contrôles aux frontières pour la COP21. Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, l'a annoncé vendredi 6 novembre 2015 sur RMC et BFMTV. Il confirmait ainsi une information publiée une semaine plus tôt par BastaMag.net.

Il ne s'agit pas d'une fermeture des frontières mais d'une mesure qui prévoit des vérifications de l'identité et des bagages des voyageurs qui pénètrent sur le territoire français.

Elles seront réalisées sur 285 points de contrôle. Parmi eux, environ 200 seront fixes, dans les ports ou les aéroports principalement. Pour le reste, il s'agira de contrôles aléatoires pour lesquels des centaines d'agents de la police aux frontières (PAF) et de la douane seront mobilisés.

Problème : moins de 5 jours avant le début de ces contrôles aux frontières, personne ne sait vraiment comment les contrôles vont se dérouler.

"Nous n'avons aucune information au sujet des modalités de mise en œuvre prévues par le gouvernement pour cette mesure", déplore Bertrand Eberhard, adjoint au délégué général de l'Union des Aéroports Français (UAF).

Selon nos informations, la PAF aurait pour consigne de cibler une partie des vols en provenance de pays de l'Union européenne (UE). Les critères de sélection et les aéroports de départ privilégiés restent inconnus.

Contrôle de tous les vols à l'arrivée impossible

Même si du point de vue de la sécurité son efficacité peut questionner, cette solution semble la plus adaptée à la problématique et aux délais de mise en œuvre. En effet, si le Gouvernement avait souhaité un contrôle systématique aux frontières dans les aéroports pour l'ensemble du trafic intra-européen il se serait heurté à deux difficultés.

La première est opérationnelle. Les aménagements des aéroports français sont prévus pour des cheminements passagers hors-contrôle sur les arrivées de vols internes à l'UE. Les modifier pour conduire les voyageurs aux postes de la PAF entraînerait "un ralentissement des flux et de longues files d'attente", estime Bertrand Eberhard.

Deuxième difficulté : le manque de personnel pour procéder à des contrôles d'identité systématiques. Les délais seraient trop courts pour les mobiliser dans les aéroports français.

En revanche, pour la partie « sûreté » de la mesure, il n'y aura, a priori, aucun problème. "En matière de transport aérien, les contrôles de sûreté sont systématiques, peu importe la provenance et la destination des vols", assure Bertrand Eberhard.

Des contrôles déjà effectués dans certains trains

Peu d'informations également pour la partie terrestre des passages aux frontières. Celle-ci concerne notamment le trafic des autocars dont l'activité s'est fortement développée ces dernières semaines avec l'entrée en vigueur de la Loi Macron. Mais aussi des trains.

Chez Lyria, la mesure ne devrait pas changer grand chose puisqu'il y a "déjà des contrôles douaniers sur le trafic entre la France et la Suisse après les passages aux frontières", explique une porte-parole de la compagnie ferroviaire.

Et du côté de Thalys, la sécurité à bord des rames est déjà renforcée depuis l'attaque du 21 août 2015 sur la ligne Amsterdam-Paris. Des policiers belges, français, irlandais et allemands sont désormais présents à bord des trains Thalys.

"Ils ont le droit de contrôler les bagages et l'identité des voyageurs pendant les trajets, confirme un représentant de la société.

En revanche, il serait impossible de procéder à un contrôle systématique de tous les passagers dès lors que la frontière française est franchie."

Quant à Eurolines, la mesure ne devrait pas engendrer "de changement majeur car le personnel n'est pas habilité à effectuer des contrôles auprès de nos passagers, estime Nicolas Boutaud, directeur commercial de la compagnie d'autocars.

Si contrôles il y a, ils se feront au niveau des frontières, ou au départ des cars par les agents habilités à le faire. Cela pourrait causer quelques retards ponctuellement, mais nous en avertirons nos passagers."

"Un bon coup de projecteur" pour la Seine-Saint-Denis

Le but des contrôles aux frontières est, selon Bernard Cazeneuve, d'assurer la protection des 80 chefs d’État et de gouvernement et des 160 délégations étrangères attendus pour la COP21. 30 à 40 000 personnes devraient se déplacer pour l'occasion.

Pour le ministre de l'Intérieur, la mesure est indispensable "dans un contexte de menace terroriste ou de risque de trouble à l'ordre public".

Mais pas de quoi inquiéter le comité départemental du tourisme (CDT) de Seine-Saint-Denis, département où se tiendra la COP21 du 30 novembre au 11 décembre 2015, sur le site de l'aéroport Paris-Le Bourget.

"Nous n'avons aucune crainte relative à des manifestations d'activistes ou des risques de débordements autour de la conférence. Par ailleurs, la sécurité sera nettement renforcée autour de l'aéroport du Bourget et dans les transports", affirme Clothilde Lassègue, chargée de la communication pour Seine-Saint-Denis Tourisme.

Au contraire, l'événement constitue "un bon coup de projecteur" pour Mathilde Christnacht, responsable du développement. (Lire : COP 21 : le tourisme industriel de la Seine-Saint-Denis mis à l'honneur)

Le conseil départemental en profitera d'ailleurs pour faire découvrir son territoire aux participants de la COP21, en association avec le CDT 93. Trois parcours de visites y sont [programmés] pour présenter les sites et les entreprises de Seine-Saint-Denis engagés dans la protection de l'environnement.

Une décision exceptionnelle ?

Cette mesure consistant à contrôler les individus qui pénètrent sur le territoire français fait figure d'exception dans le cadre du fonctionnement habituel des accords de Schengen. Ceux-ci ont, en effet, aboli les frontières intérieures entre les États qui ont signé la Convention du même nom.

Mais, en l’occurrence, elle est décrétée dans un contexte événementiel. Celui de la COP21 pour laquelle de nombreux chefs d’États et de gouvernements se déplacent.

Un cadre dans lequel, elle est, en fait souvent mise en œuvre, comme le relève Laurent Borredon, journaliste du Monde, sur son blog.

La France avait déjà rétabli les contrôles aux frontières à l'occasion du sommet de l'OTAN de Strasbourg en 2009 et pour le G8 de Deauville en 2011. Cela avait également été le cas partiellement pour le G20 de Cannes fin 2011, seulement à la frontière avec l'Italie.

A l'étranger, deux pays qui ont précédemment accueilli les conférences sur le climat, l'ont déjà adoptée : le Danemark en 2009 et la Pologne en 2013.

Quant à la Belgique, elle a, un temps, prévu de rétablir les contrôles à ses frontières pendant le G7 en juin 2014. Mais son Gouvernement y a finalement renoncé, estimant que les risques étaient trop faibles.

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