Le secteur de l'hôtellerie-restauration souffre depuis des années d’une pénurie de personnel. - Depositphotos
« Il nous a manqué 100 000 emplois pour la saison 2019 », résume, en un chiffre, Hervé Bécam, vice-président de l’UMIH, organisation patronale du secteur de l’hôtellerie-restauration. Une réalité qui n’est pas nouvelle. Le marché de l’hôtellerie-restauration est en tension. « Mais ça n’a jamais été aussi prégnant que cette année », assure le vice-président de l’UMIH.
« Ces postes non pourvus ont une conséquence sur le volume d’activité des professionnels du secteur . Ils ont dû réduire la capacité à accueillir les clients. Certains ont pris des mesures drastiques en fermant leur établissement pour un, deux services, voire des journées complètes », poursuit-il.
« Il y a une véritable carence, à tous les niveaux », confirme Karine Gaudinet-Guérin, responsable des relations extérieures de l’Institut de Formation des Etablissements Touristiques et Hôteliers (IFETH).
Pour Alain Jacob, à la tête du cabinet de recrutement AJ Conseils, le marché est en faveur des travailleurs : « Il est difficile de recruter, surtout des postes dans l’encadrement. Idem, quand on arrive à un niveau de séniorité en termes de compétences. Recruter un chef de cuisine, c’est impossible », assure-t-il.
Alain Jacob fait un autre constat : « Le rapport au travail à changer. Il y a une facilité à quitter un poste qui rend encore plus difficile le recrutement . »
« Le turnover est trois fois supérieur dans notre secteur d’activité, comparé aux autres. Il est structurel. C’est un demi handicap pour l’entreprise et une valeur supplémentaire pour le salarié, de pouvoir changer d’employeur aisément. L’entreprise, elle, devra former à nouveau un salarié à ses méthodes et son activité, renchérit Hervé Bécam. Les jeunes ne veulent pas s’engager, à l’instar de la digitalisation et de l’importance des réseaux sociaux, ce sont des problématiques que l’on prend de plein fouet. »
« Ces postes non pourvus ont une conséquence sur le volume d’activité des professionnels du secteur . Ils ont dû réduire la capacité à accueillir les clients. Certains ont pris des mesures drastiques en fermant leur établissement pour un, deux services, voire des journées complètes », poursuit-il.
« Il y a une véritable carence, à tous les niveaux », confirme Karine Gaudinet-Guérin, responsable des relations extérieures de l’Institut de Formation des Etablissements Touristiques et Hôteliers (IFETH).
Pour Alain Jacob, à la tête du cabinet de recrutement AJ Conseils, le marché est en faveur des travailleurs : « Il est difficile de recruter, surtout des postes dans l’encadrement. Idem, quand on arrive à un niveau de séniorité en termes de compétences. Recruter un chef de cuisine, c’est impossible », assure-t-il.
Alain Jacob fait un autre constat : « Le rapport au travail à changer. Il y a une facilité à quitter un poste qui rend encore plus difficile le recrutement . »
« Le turnover est trois fois supérieur dans notre secteur d’activité, comparé aux autres. Il est structurel. C’est un demi handicap pour l’entreprise et une valeur supplémentaire pour le salarié, de pouvoir changer d’employeur aisément. L’entreprise, elle, devra former à nouveau un salarié à ses méthodes et son activité, renchérit Hervé Bécam. Les jeunes ne veulent pas s’engager, à l’instar de la digitalisation et de l’importance des réseaux sociaux, ce sont des problématiques que l’on prend de plein fouet. »
De nombreux freins au recrutement
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Comment un candidat choisit-il un emploi dans le tourisme ?
La formation, la rémunération, les conditions de travail, les horaires sont autant de facteurs qui complexifient le recrutement depuis des années.
« Les rémunérations ne sont pas extrêmement élevées dans l’industrie du tourisme, mais je ne suis pas certaine qu’il y ait un écart important avec la grande distribution, par exemple. Ce n’est pas le premier frein. Ce que je demande à mes étudiants c’est : êtes-vous prêts à travailler quand tout le monde est en vacances ? », affirme Karine Gaudinet-Guérin de l’IFETH.
Dans sa région, les Alpes-Maritimes, Anthony Vignal recherche un poste de responsable de salle ou chef de rang avec une rémunération entre 1500 et 1600€ net par mois. Autodidacte, il a commencé sa carrière comme serveur il y a 7 ans et a gravi les échelons. « Je sais que j’ai un bon CV, aujourd’hui retomber à 1200€ par mois, ce n’est pas envisageable », explique-t-il.
La rémunération est l’un des facteurs qui l’a poussé vers le secteur. « Sans diplôme, l’hôtellerie restauration permet d’accéder à des postes mieux rémunérer que la vente par exemple », précise-t-il.
Autre frein : l’orientation. « Aujourd’hui, ni l’Education Nationale, ni les parents n’ont un discours qui permet de sortir de ce marasme », affirme Hervé Bécam.
Pour autant, certains établissements tirent leur épingle du jeu. « Les établissements à thème, dans la lignée de la chaîne de restaurants italiens "Mama" ou des hôtels Mama Shelter n’ont pas de problèmes à recruter », remarque le fondateur de AJ Conseils.
« Ces nouvelles formes d’hôtellerie séduisent les jeunes générations, l’ambiance est décontractée, on ne fait pas la distinction entre les clients et le personnel. Ils sont également en avance sur tout ce qui est numérique. »
« Les rémunérations ne sont pas extrêmement élevées dans l’industrie du tourisme, mais je ne suis pas certaine qu’il y ait un écart important avec la grande distribution, par exemple. Ce n’est pas le premier frein. Ce que je demande à mes étudiants c’est : êtes-vous prêts à travailler quand tout le monde est en vacances ? », affirme Karine Gaudinet-Guérin de l’IFETH.
Dans sa région, les Alpes-Maritimes, Anthony Vignal recherche un poste de responsable de salle ou chef de rang avec une rémunération entre 1500 et 1600€ net par mois. Autodidacte, il a commencé sa carrière comme serveur il y a 7 ans et a gravi les échelons. « Je sais que j’ai un bon CV, aujourd’hui retomber à 1200€ par mois, ce n’est pas envisageable », explique-t-il.
La rémunération est l’un des facteurs qui l’a poussé vers le secteur. « Sans diplôme, l’hôtellerie restauration permet d’accéder à des postes mieux rémunérer que la vente par exemple », précise-t-il.
Autre frein : l’orientation. « Aujourd’hui, ni l’Education Nationale, ni les parents n’ont un discours qui permet de sortir de ce marasme », affirme Hervé Bécam.
Pour autant, certains établissements tirent leur épingle du jeu. « Les établissements à thème, dans la lignée de la chaîne de restaurants italiens "Mama" ou des hôtels Mama Shelter n’ont pas de problèmes à recruter », remarque le fondateur de AJ Conseils.
« Ces nouvelles formes d’hôtellerie séduisent les jeunes générations, l’ambiance est décontractée, on ne fait pas la distinction entre les clients et le personnel. Ils sont également en avance sur tout ce qui est numérique. »
Quid de la formation ?
« Il faut arrêter de dénigrer les métiers manuels. Il y a une méconnaissance de nos métiers , explique Karine Gaudinet-Guérin, responsable relations extérieures IEFT. Il serait intéressant de porter la parole dans les collèges et lycées. Nous avons encore des étudiants, qui n’ont jamais entendu parler des métiers du tourisme. Certains pensent qu’il n’y a pas de travail dans le secteur. »
« Peut-être faut-il changer le nom, parler de Travel ? Cela parlerait-il plus aux jeunes ? », réfléchit Karine Gaudinet-Guérin.
De son côté, l’UMIH planche sur un « plan emploi », dont les préconisations ont été remises au gouvernement début 2019. « L’accès à la formation de qualité dans des temps raccourcis est une base de réponse. Par exemple, un CAP de serveur pourrait engager un jeune et une entreprise sur un temps plus court, de moins de deux ans », avance Hervé Bécam.
« Il faudrait mettre des passerelles avec des secteurs de service, voire de l’industrie qui eux souffrent et les former. Nous manquons d’écoles hôtelières. », préconise Alain Jacob.
« Peut-être faut-il changer le nom, parler de Travel ? Cela parlerait-il plus aux jeunes ? », réfléchit Karine Gaudinet-Guérin.
De son côté, l’UMIH planche sur un « plan emploi », dont les préconisations ont été remises au gouvernement début 2019. « L’accès à la formation de qualité dans des temps raccourcis est une base de réponse. Par exemple, un CAP de serveur pourrait engager un jeune et une entreprise sur un temps plus court, de moins de deux ans », avance Hervé Bécam.
« Il faudrait mettre des passerelles avec des secteurs de service, voire de l’industrie qui eux souffrent et les former. Nous manquons d’écoles hôtelières. », préconise Alain Jacob.
Améliorer les conditions de travail
Des journées découpées, des heures supplémentaires, le travail le week-end… les conditions de travail peuvent rebuter plus d’un candidat.
Des semaines à rallonge, des heures supplémentaires non payées, c’est ce qu’a vécu Anthony Vignal. « C’est habituel dans le secteur. Un salaire au SMIC pour 60 à 80h par semaine, c’est la proposition classique. On a beau dire qu’on ne regarde pas nos heures mais, là, on double la base des 35 heures. Et puis il faut réclamer pour se faire payer », déplore -t-il.
« Aujourd’hui pour un candidat, le concept et les perspectives d’évolution pèsent dans leur choix, ensuite il y a les questions de salaire, d’avantages liés à la mutuelle et la destination », complète Alain Jacob.
« Le marché du travail à l'étranger est plus intéressant. Ici, les salaires sont un très gros freins. Il faudrait également une implication plus importante des employeurs dans le bien-être des employés» .
« La partie opérationnelle souffre de cette pénurie, elle est confrontée à une grosse pression et enchaîne les heures de travail. Cela peut vite décourager », constate Adam Montesinos, apprentis dans l'hôtellerie.
Concernant les conditions et la qualité de vie au travail, l’UMIH affirme avoir entamé des discussions avec les partenaires sociaux. « Pour les postes liés au ménage dans les hôtels, il y a un déficit de candidature, utiliser des lits mécanisés permet d’améliorer les postures des employés. En cuisine, la chaleur est un problème. Les restaurateurs s’équipent de plus en plus de ventilations plus performantes », énumère Hervé Bécam, vice-président de l’UMIH.
Des semaines à rallonge, des heures supplémentaires non payées, c’est ce qu’a vécu Anthony Vignal. « C’est habituel dans le secteur. Un salaire au SMIC pour 60 à 80h par semaine, c’est la proposition classique. On a beau dire qu’on ne regarde pas nos heures mais, là, on double la base des 35 heures. Et puis il faut réclamer pour se faire payer », déplore -t-il.
« Aujourd’hui pour un candidat, le concept et les perspectives d’évolution pèsent dans leur choix, ensuite il y a les questions de salaire, d’avantages liés à la mutuelle et la destination », complète Alain Jacob.
« Le marché du travail à l'étranger est plus intéressant. Ici, les salaires sont un très gros freins. Il faudrait également une implication plus importante des employeurs dans le bien-être des employés» .
« La partie opérationnelle souffre de cette pénurie, elle est confrontée à une grosse pression et enchaîne les heures de travail. Cela peut vite décourager », constate Adam Montesinos, apprentis dans l'hôtellerie.
Concernant les conditions et la qualité de vie au travail, l’UMIH affirme avoir entamé des discussions avec les partenaires sociaux. « Pour les postes liés au ménage dans les hôtels, il y a un déficit de candidature, utiliser des lits mécanisés permet d’améliorer les postures des employés. En cuisine, la chaleur est un problème. Les restaurateurs s’équipent de plus en plus de ventilations plus performantes », énumère Hervé Bécam, vice-président de l’UMIH.
Le Brexit, une aubaine pour l'emploi en France ?
Autre piste pour Alain Jacob : « Sortir du rapport hiérarchique vertical induit par le contrat de travail. Les plateformes de mise en relation des travailleurs indépendants et des entreprises peuvent répondre aux besoins ponctuels dans certains cas. »
Enfin, sur une autre typologie de poste, pour faciliter l’embauche de saisonniers, le fondateur d’AJ Conseil préconise de leur proposer des solutions d’hébergement.
Toujours en négociation avec les partenaires sociaux. L’Umih cherche à valoriser et dynamiser l’épargne salariale . « C’est un facteur d’attractivité si on sait bien le vendre », assure le vice-président.
D’autres pistes de réflexion sont à l’étude.
Une opportunité pour le marché hexagonal : Le brexit pourrait encourager les professionnels Français, qui ont peur de perdre leurs avantages sociaux, à rentrer en France. « Cela ne réglera pas le problème, mais ponctuellement gonflera le vivier », conclut Alain Jacob.
Enfin, sur une autre typologie de poste, pour faciliter l’embauche de saisonniers, le fondateur d’AJ Conseil préconise de leur proposer des solutions d’hébergement.
Toujours en négociation avec les partenaires sociaux. L’Umih cherche à valoriser et dynamiser l’épargne salariale . « C’est un facteur d’attractivité si on sait bien le vendre », assure le vice-président.
D’autres pistes de réflexion sont à l’étude.
Une opportunité pour le marché hexagonal : Le brexit pourrait encourager les professionnels Français, qui ont peur de perdre leurs avantages sociaux, à rentrer en France. « Cela ne réglera pas le problème, mais ponctuellement gonflera le vivier », conclut Alain Jacob.