La chronique de Jean-Louis Baroux sur le contrôle aérien le 18 Juin appelle quelques précisions sur les affirmations et l’argumentaire développés. En effet, le sujet, complexe, mérite qu’on ne fasse pas que le survoler et ne se limite pas à l’étalage des conditions de travail des contrôleurs aériens français.
Il est d’ailleurs intéressant d’ouvrir un vrai débat entre représentants de ces deux composantes essentielles du transport aérien que sont les compagnies aériennes d’un côté et les prestataires européens de navigation aérienne d’un autre. Ces deux entités doivent se développer conjointement, plutôt que l’une contre l’autre.
C’est un des enjeux du développement du transport aérien civil en Europe dans les années à venir.
Ne croyons pas que les syndicats représentatifs de la DGAC décident de gaieté de cœur de quasi-paralyser le trafic dans une période de récession économique. Ce préavis fut une responsabilité lourde.
Pour preuve, le syndicat professionnel autonome majoritaire des contrôleurs aériens (le SNCTA) n’a déclenché un préavis que 3 fois en 20 ans. Preuve aussi que les revendications ne sont pas anodines.
Pour revenir à l’article de JL Baroux, il est amusant de noter que l’argumentaire sur SES (Single European Sky) de Siim Kallas, commissaire européen aux transports, est repris quasiment sans discernement.
Premièrement, une précision : SES est DEJA entré en vigueur depuis le début des années 2000. Nous en sommes à la mise en service de SES 2, deuxième paquet législatif. Par contre, c’est bien la version suivante, SES 2+, accompagnée par un plan de réduction très important des redevances, qui provoque la contestation de TOUS les prestataires de navigation aérienne. A des degrés divers, certes.
Il est d’ailleurs intéressant d’ouvrir un vrai débat entre représentants de ces deux composantes essentielles du transport aérien que sont les compagnies aériennes d’un côté et les prestataires européens de navigation aérienne d’un autre. Ces deux entités doivent se développer conjointement, plutôt que l’une contre l’autre.
C’est un des enjeux du développement du transport aérien civil en Europe dans les années à venir.
Ne croyons pas que les syndicats représentatifs de la DGAC décident de gaieté de cœur de quasi-paralyser le trafic dans une période de récession économique. Ce préavis fut une responsabilité lourde.
Pour preuve, le syndicat professionnel autonome majoritaire des contrôleurs aériens (le SNCTA) n’a déclenché un préavis que 3 fois en 20 ans. Preuve aussi que les revendications ne sont pas anodines.
Pour revenir à l’article de JL Baroux, il est amusant de noter que l’argumentaire sur SES (Single European Sky) de Siim Kallas, commissaire européen aux transports, est repris quasiment sans discernement.
Premièrement, une précision : SES est DEJA entré en vigueur depuis le début des années 2000. Nous en sommes à la mise en service de SES 2, deuxième paquet législatif. Par contre, c’est bien la version suivante, SES 2+, accompagnée par un plan de réduction très important des redevances, qui provoque la contestation de TOUS les prestataires de navigation aérienne. A des degrés divers, certes.
L'Europe se cherche
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Prenons ensuite l’exemple sur les « raccourcis de 50 km » générés par SES.
De quels raccourcis parle-t-on ? Les chiffres annoncés ci et là sont TOUS différents : 50km ici, 43 nautiques ailleurs. Sauf à penser que nous pourrons désormais tirer une ligne droite entre départ et destination en faisant fi des procédures de départ/arrivée, du contournement des zones (parfois énormes) d’entraînement militaire aérien, on peut certifier que les gains seront bien moindres en distance, carburant, coût direct et émission de CO2. A croire que la Commission Européenne embellit ses rapports pour les rendre plus « glamour » aux yeux de tous.
Pour autant, les prestataires de navigation aérienne ne peuvent s’exonérer d’une réflexion pour rationaliser l’espace aérien et effectivement tenter de passer au-dessus des questions de souveraineté. Le programme SESAR en est le meilleur exemple. Mais sur ces questions comme sur de nombreuses autres, l’Europe se cherche.
Se rajoute à cela, une lutte des divers gros prestataires de navigation aérienne pour pérenniser leurs ressources.
En terme plus concret, « pérenniser ses ressources » signifie garder le maximum de routes aériennes dans les espaces qu’ils contrôlent et… les redevances qui vont avec ! Bref, la compétition entre prestataires va à l’encontre des simplifications voulues par la Commission Européenne. Comme quoi, la concurrence dans la navigation aérienne n’a pas que du bon…
De quels raccourcis parle-t-on ? Les chiffres annoncés ci et là sont TOUS différents : 50km ici, 43 nautiques ailleurs. Sauf à penser que nous pourrons désormais tirer une ligne droite entre départ et destination en faisant fi des procédures de départ/arrivée, du contournement des zones (parfois énormes) d’entraînement militaire aérien, on peut certifier que les gains seront bien moindres en distance, carburant, coût direct et émission de CO2. A croire que la Commission Européenne embellit ses rapports pour les rendre plus « glamour » aux yeux de tous.
Pour autant, les prestataires de navigation aérienne ne peuvent s’exonérer d’une réflexion pour rationaliser l’espace aérien et effectivement tenter de passer au-dessus des questions de souveraineté. Le programme SESAR en est le meilleur exemple. Mais sur ces questions comme sur de nombreuses autres, l’Europe se cherche.
Se rajoute à cela, une lutte des divers gros prestataires de navigation aérienne pour pérenniser leurs ressources.
En terme plus concret, « pérenniser ses ressources » signifie garder le maximum de routes aériennes dans les espaces qu’ils contrôlent et… les redevances qui vont avec ! Bref, la compétition entre prestataires va à l’encontre des simplifications voulues par la Commission Européenne. Comme quoi, la concurrence dans la navigation aérienne n’a pas que du bon…
L'UE veut baisser les coûts de redevance uniformément
JL Baroux nous affirme que la Commission Européenne voudrait que le nouveau système soit géré par un ensemble unique européen, ce qui, d’après lui, serait la seule façon de réussir l’opération. Plus loin, il conseille aux contrôleurs français de négocier cette intégration.
Ce que JL Baroux ne sait pas, c’est que la Commission Européenne ne veut pas d’un ensemble unique européen, jugé notamment trop monopolistique et refusé, en outre, par le puissant prestataire allemand… mais souhaite baisser les coûts de redevance uniformément en demandant d’externaliser la plupart des fonctions supports : maintenance, surveillance, informations météo… Siim Kallas, dans sa conférence de presse du 12 Juin 2013 présentant son projet SES 2+, note même à ce sujet des « good opportunities for business ».
Ce que JL Baroux ne sait pas non plus, c’est qu’il y a 3-4 ans, le syndicat autonome majoritaire des contrôleurs aériens a soutenu un projet de prestataire unique de contrôle aérien, projet qui n’a pas abouti sous des pressions diverses.
Preuve que les contrôleurs aériens français ne sont pas aussi autistes qu’on veut bien le faire croire, et qu’ils ne sont pas uniquement préoccupés par la défense de leurs avantages présentés comme outrageux.
Ce que JL Baroux ne sait pas, c’est que la Commission Européenne ne veut pas d’un ensemble unique européen, jugé notamment trop monopolistique et refusé, en outre, par le puissant prestataire allemand… mais souhaite baisser les coûts de redevance uniformément en demandant d’externaliser la plupart des fonctions supports : maintenance, surveillance, informations météo… Siim Kallas, dans sa conférence de presse du 12 Juin 2013 présentant son projet SES 2+, note même à ce sujet des « good opportunities for business ».
Ce que JL Baroux ne sait pas non plus, c’est qu’il y a 3-4 ans, le syndicat autonome majoritaire des contrôleurs aériens a soutenu un projet de prestataire unique de contrôle aérien, projet qui n’a pas abouti sous des pressions diverses.
Preuve que les contrôleurs aériens français ne sont pas aussi autistes qu’on veut bien le faire croire, et qu’ils ne sont pas uniquement préoccupés par la défense de leurs avantages présentés comme outrageux.
Les avantages sont ils vraiment outrageux ?
Parlons justement de ces avantages. Sont-ils vraiment outrageux ? Ils le seraient s’ils étaient très supérieurs à ceux de leurs collègues européens travaillant dans des prestataires de taille et de complexité équivalentes. Or, que remarque-t-on ?
Que nos collègues travaillent certes 10% à 20% de plus en moyenne (170 jours par an contre 155 en France), mais sont payés 50% de plus en moyenne. Que nombre d’entre eux, dont les Allemands, partent en retraite à 55 ans (avec des pensions très importantes) quand nous partirons à 59 ans (voire plus ?) très bientôt. Sans parler d’autres avantages encore plus « outrageux »…
Nous ne plaignons pas mais nous tentons de nous faire entendre. Et nous n’acceptons pas d’être cloués au pilori sans discernement et demandons à être « comparés » à des gens qui exercent le même métier que nous, métier à responsabilités, voué à devenir de plus en plus complexe à mesure que le ciel se densifie.
Enfin, affirmer que le contrôle aérien européen est TOTALEMENT inefficace, c’est ne voir de façon étriquée, que la vision comptable de notre métier. Or le cœur de celui-ci, c’est la SECURITE, et que je sache, cette mission première est pleinement remplie. Oui, le contrôle aérien doit travailler à être plus efficace économiquement, mais pas n’importe comment ! Les acteurs du transport aérien ont tout intérêt à ne pas perdre ceci de vue, sous peine de grosses déconvenues dans les années à venir.
Stéphane LONNE, contrôleur aérien au CRNA/SO (Bordeaux) depuis 1995.
Que nos collègues travaillent certes 10% à 20% de plus en moyenne (170 jours par an contre 155 en France), mais sont payés 50% de plus en moyenne. Que nombre d’entre eux, dont les Allemands, partent en retraite à 55 ans (avec des pensions très importantes) quand nous partirons à 59 ans (voire plus ?) très bientôt. Sans parler d’autres avantages encore plus « outrageux »…
Nous ne plaignons pas mais nous tentons de nous faire entendre. Et nous n’acceptons pas d’être cloués au pilori sans discernement et demandons à être « comparés » à des gens qui exercent le même métier que nous, métier à responsabilités, voué à devenir de plus en plus complexe à mesure que le ciel se densifie.
Enfin, affirmer que le contrôle aérien européen est TOTALEMENT inefficace, c’est ne voir de façon étriquée, que la vision comptable de notre métier. Or le cœur de celui-ci, c’est la SECURITE, et que je sache, cette mission première est pleinement remplie. Oui, le contrôle aérien doit travailler à être plus efficace économiquement, mais pas n’importe comment ! Les acteurs du transport aérien ont tout intérêt à ne pas perdre ceci de vue, sous peine de grosses déconvenues dans les années à venir.
Stéphane LONNE, contrôleur aérien au CRNA/SO (Bordeaux) depuis 1995.