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Quid de la responsabilité de l’agence en ligne ?

une nouvelle donne se prépare


Nous avons mis en exergue hier la responsabilité professionnelle des agences de voyages concernant la vente en ligne. Une chronique de Me Anne-Sophie POGGI, avocat de Level.com, confirme que la loi n° 2004-575 « sur la confiance dans l’économie numérique » (LEN) risque d'induire une nouvelle donne.


Rédigé par le Jeudi 4 Novembre 2004

l'Agence responsable et coupable ?
l'Agence responsable et coupable ?
« L’année 2004 est en passe de devenir une année charnière pour les agents de voyages « en ligne ».

A peine remis de l’accord signé par le SNAV et Air France sur la suppression des commissions de vente sur les billets d’avion, ceux-ci vont devoir faire face à une modification de leur régime de responsabilité.

Contre toute attente, cette réforme de leur régime de responsabilité n’est pas issue de l’ordonnance modifiant la loi du 13 juillet 1992 mais de la loi n° 2004-575 « sur la confiance dans l’économie numérique » (LEN) du 22 juillet 2004 dont l’article 15 instaure une responsabilité de plein droit des sites marchands à l’égard des consommateurs.

Désormais tout site marchand établi en France « est responsable de plein droit à l’égard de l’acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d’autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci » (article 15 de la loi LEN).

Nota : est regardée comme « établie » en France toute personne installée de manière stable et durable pour exercer effectivement son activité, quelque soit, s’agissant d’une personne morale, le lieu d’implantation de son siège social.

La distinction vente « vols secs » vente de « forfaits » n’est plus d’actualité

Ainsi, l’agent de voyages en ligne vendant des vols secs ne pourrait s’exonérer de sa responsabilité que si son inexécution résulte d’une cause qui lui est étrangère (faute de l’acheteur, fait d’un tiers étranger à la fourniture des prestations ou force majeure).

Dès lors, le régime de responsabilité des agents de voyage vendant en ligne devient identique quelque soit leur activité et l’ancienne distinction entre la vente de « vols secs » et la vente de « forfaits » n’est plus d’actualité.

La publication de cette loi en plein débat sur l’ordonnance modifiant la loi du 13 juillet 1992 devrait faire grand bruit.

Les agents de voyages en ligne qui négocient actuellement avec le ministère du tourisme pour que leur régime de responsabilité de plein droit instauré par la loi de 1992 soit assoupli risquent d’être étonnés par la lecture de la LEN.

Ainsi, non seulement ils n’ont aucunes garanties quant à l’issue des négociations sur la réforme de la loi de 1992 mais en plus, ils voient leur régime de responsabilité s’unifier à leur grand désavantage.

Pourtant Caroline Jaffuel, conseiller technique chargée des affaires juridiques auprès du ministre du Tourisme déclarait en janvier 2004 : « la responsabilité de plein droit instaurée en France par la loi de 1992 crée des distorsions de concurrence par rapport aux régimes plus souples mis en place dans les autres Etats-membres […] il faut donc réécrire la loi en s'alignant au plus près sur les dispositions de la directive européenne du 13 juin 1990 ».

Au surplus, cette modification du régime de responsabilité de l’agent de voyage en ligne rend quasiment inopérant le débat sur le statut juridique de l’agent de voyage.

Les tribunaux saisis devront trancher

Rappelons que la motivation essentielle du SNAV pour justifier la signature de l’accord du 23 juillet 2004 avalisant la suppression des commissions perçues lors de la vente de « vols secs » était qu’il permettait de maintenir le statut de mandataire aux agents de voyages dont l’intérêt majeur est de ne pas les rendre responsables de l’exécution des contrats de transport conclus par leur entremise.

Cependant, si l’on considère que l’agent de voyages en ligne est responsable de plein droit de l’exécution du contrat de transport, le fait qu’il ait ou non la qualité de mandataire n’a aucune conséquence quant à son régime de responsabilité.

Mais tout n’est pas encore perdu, le statut de mandataire des agents de voyage en ligne les autorise toujours à ne pas acheter pour revendre le vol sec au transporteur.

Du point de vue du juriste, il ne reste plus qu’à attendre comment les tribunaux saisis d’un cas d’espèce gèreront les dispositions contradictoires entre la loi de 1992 et la loi LEN. Du point de vue des agents de voyage en ligne, le combat pour leur survie ne fait que commencer.

Seules les compagnies d’assurance tireront leur épingle du jeu en proposant, principe de précaution oblige, une police d’assurance supplémentaire pour couvrir ce nouveau type de risque.»


Anne-Sophie POGGI
Avocat Associé
Cabinet Derriennic



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