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Voyages : l'assurance annulation « sans motif/sans justif », un produit miracle ? 🔑

Que répondre aux clients qui veulent annuler leur voyage par peur ?


Pouvoir annuler un voyage et obtenir un remboursement sans batailler pour cocher les bonnes cases, est-ce possible ? Après la pandémie et alors que les conflits armés se multiplient, nombreuses sont les agences à entendre cette requête de la part de leurs clients, inquiets à l'idée de partir en voyage. Mais de quels recours disposent-ils ? Car si les assurances « sans motif et sans justif' » existent depuis de nombreuses années, le produit ne semble pas faire des miracles au sein des agences de voyages... Pourquoi ? TourMaG a posé la question.


Rédigé par le Lundi 30 Octobre 2023

Si l'assurance annulation « sans motif/sans justif » existe depuis des années, elle reste un produit onéreux, vendu de 15 à 20% de plus qu’un produit d’assurance classique - DR : Depositphotos.com, Golden Sikorka
Si l'assurance annulation « sans motif/sans justif » existe depuis des années, elle reste un produit onéreux, vendu de 15 à 20% de plus qu’un produit d’assurance classique - DR : Depositphotos.com, Golden Sikorka
C’est une suggestion de Léa, notre agent de voyages pas si blonde qui nous a mis sur la piste : « proposer des produits d’assurance « sans motif/sans justif ».

Le client a changé d’avis, ne veut plus partir ? C’est possible… avec une prime de 10% du montant du voyage et une franchise de 10 à 20% en cas d’annulation »,
suggérait la semaine dernière notre chroniqueuse vedette.

Un produit qui pourrait faciliter le quotidien des agents de voyages alors que le conflit israélo-palestinien connaît un nouvel épisode de violences depuis le 7 octobre 2023, entraînant des demandes d’annulations de voyages dans les pays frontaliers.

« Ça existe déjà ! » répondent les assureurs. A l’instar de Koala qui a créé en 2020, « Koala Flex », une annulation sans justif' ni motif, qu’importe la raison.

« En somme, le produit permet de se poser la question : "Suis-je dans les meilleures conditions de partir ?" tandis qu'une assurance annulation traditionnelle est davantage "je ne peux plus partir, puis-je me faire rembourser ?". Cette flexibilité nouvelle offre de belles perspectives », explique Léo Tordjman, co-fondateur et COO de Koala.

D’autres assureurs proposaient déjà des produits sans justif' mais avec motif. « C’est la règle de base de l’assurance. Elle ne peut rembourser qu’au titre d’un motif garanti », souligne Manuela Batt, la directrice communication, marketing et formations chez Assurever.


Un produit plus cher et avec une franchise importante

Mais alors, quid de la peur qui encourage les vacanciers à annuler leur voyage au Moyen-Orient ?

« Personne ne couvre la peur. Même avec la meilleure volonté du monde, ça ne passerait pas. Les assureurs ne vont pas accepter de perdre de l’argent. Ils vont mettre une restriction d’entrée de jeu », affirme Bertrand Thorel, directeur général de Valeurs Assurances.

« Les assurances ne peuvent pas tout couvrir. Honnêtement, ce n’est pas de bon conseil de proposer un produit miracle en période de crise », note Bertrand Thorel.

Si cette assurance miracle existe depuis des années, elle reste un produit onéreux, vendu de 15 à 20% de plus qu’un produit d’assurance classique.

« Toute initiative est bonne à prendre pour améliorer notre image, proposer des solutions à nos clients et être le plus flexible possible. Mais le produit est cher, il faut expliquer au client que s’il annule, il va payer 20 ou 30% et qu’il payera malgré tout 10% du prix du voyage s’il part.

A l’heure où les clients nous mettent beaucoup en concurrence et nous demandent de justifier notre valeur ajoutée, ajouter 10% au prix d’un voyage cela me semble beaucoup »
, affirme Frédéric d’Hauthuille, fondateur et dirigeant de Monde Authentique.

Jean-Charles Franchomme, co-fondateur du HelpDesk des Pros du tourisme et fondateur du Collectif de défense des métiers du voyages (CDMV) pointe également le prix de cette assurance. « C’est difficile à caser. Sur un dossier dépassant les 2 000 ou 2 500€ pour une famille de 5, on arrive facilement à 400€ d’assurance. C’est un budget.

« Si on disait : « c’est 400€, mais quoiqu’il arrive vous êtes remboursés, ça irait. Mais bien souvent les clients ne comprennent pas qu’il existe une franchise. Là encore ça chiffre vite »
, complète-t-il.

Assurances : « il y a tellement de conditions que je ne préfère pas les vendre »

Les assurances multirisques dîtes « classiques » apparaissent tout aussi intéressantes. « « Sans motif, sans justification » est cher et rembourse mal quand d’autres produits proposent la même couverture à 5%. C’est du marketing, affirme Bertrand Thorel, DG de Valeurs Assurances.

Nous n’en avons pas besoin, nous avons des garanties « tous risques », pour lesquelles nous avons listé le motif, mais sans justif. Elles coûtent entre 2,5% et 3% et avec une franchise à 10% avec un mini de 50€. Elles couvrent les attentats, actes de terrorisme, catastrophes naturelles dans un rayon de 100 km autour de votre lieu de villégiature. Cette assurance est bien suffisante pour des événements liés au Proche-Orient », poursuit-il.

L’assurance peut également être source de mécontentement des clients.

« Quand on propose une assurance aux gens, ils ont le sentiment d’être hyper couverts. Dès l’instant où il y a une annulation, on leur dit : « Attention, vous avez pris l’assurance hors covid , or vous me parlez d’un cas de Covid. Attention, vous avez pris une assurance « toutes causes », or il y a une franchise de 30%. »

Les clients sont déçus, il y a tellement de petites lignes, de conditions, que je ne préfère pas les vendre. Quand un client me dit « j’ai la visa Premier », je n’insiste pas, ça me fera un dossier en moins à gérer en cas de problème »,
explique Jean-Charles Franchomme.

La meilleure option ? « Miser sur la flexibilité des fournisseurs »

L'annulation sans motif ni justif' garanti est peut-être tout simplement un produit plus adapté à une clientèle affaires ? « C’est plus simple pour eux d’annuler un déplacement sans avoir à demander à leur prospect de leur envoyer un mail pour justifier qu’il ne pouvait pas les recevoir confirme Manuela Batt. Pour la société, c’est une dépense qui peut lui faire gagner de l’argent ».

« Ce sont des produits à manier avec précaution se méfie François Piot, PDG de Prêt-à-Partir. Ils peuvent, très rapidement, et encore plus par les temps qui courent, créer des déficits importants chez les assureurs. Ce n’est pas un chèque en blanc, ça retombe toujours sur le client. Si notre sinistralité est mauvaise, derrière nos primes augmentent, nous pouvons même connaître des résiliations. »

Selon Bertrand Thorel, la meilleure option reste « la flexibilité du tour-opérateur, qu’il accepte le report sans prendre de frais d’annulation et que l’assureur accepte de bouger sa prime ou de la rembourser. Ce serait plus intelligent. »

C’est la démarche appliquée par le réseau Prêt-à-Partir. « En ce moment, nous avons quelques demandes d’annulations en Egypte ou en Jordanie, car les gens ont peur de partir. Nous traitons au cas par cas avec les fournisseurs.

Leur sentiment peut être légitime, mais malheureusement ils ont signé des contrats et nous sommes obligés de les respecter. Aujourd’hui, il ne se passe rien en Egypte »,
constate François Piot.


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