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SNCM : la haute saison sera assurée et l’argent des résas est sur un compte bloqué

Entretien avec le président du Directoire de la SNCM


La haute saison sera assurée, affirme Olivier Diehl, président du directoire de la SNCM, lors d’un entretien accordé à TourMaG.com, vendredi 19 juin 2015. Les objectifs fixés par la nouvelle équipe de management portent leurs fruits. L’activité a été recentrée sur le port de Marseille, les dessertes Corse et Maghreb rééquilibrées et le retour à l’équilibre financier est en vue. Le point avec Olivier Diehl.


Rédigé par le Lundi 22 Juin 2015

"Lété s’annonce serein, avec une offre qui a été revue et surtout rééquilibrée et de nouveaux services mis en place," selon O.Diehl - DR : SNCM
"Lété s’annonce serein, avec une offre qui a été revue et surtout rééquilibrée et de nouveaux services mis en place," selon O.Diehl - DR : SNCM
TourMaG.com - Comment s’annonce l’été pour la SNCM ?

Olivier Diehl :
Il s’annonce serein, avec une offre qui a été revue et surtout rééquilibrée et de nouveaux services mis en place, comme les menus ou la carte des vins.

4 cargos mixtes permettront d’assurer la délégation de service public (DSP) entre Marseille et les ports corses d’Ajaccio, Bastia, Ile Rousse et Porto Vecchio.

Deux autres ferries ont été placés prioritairement sur la desserte du Maghreb (Tunisie et Algérie, ndlr), mais ils viendront également en appui de l’offre corse durant les périodes de pointe.

Il reste donc des dispos sur cette offre supplémentaire.

TourMaG.com - Pour rassurer ses partenaires distributeurs, la SNCM a ouvert un compte dédié aux sommes encaissées pour les billets émis et placé sous l'autorité des administrateurs judiciaires, jusqu'au départ des clients. Cependant, des agents de voyages nous ont fait part de leurs craintes de voir cet argent utilisé à d’autres fins…

Olivier Diehl :
Auparavant, toute la trésorerie de la SNCM tombait sur un seul compte, mais ça n’est plus le cas. Nous avons opté pour la séparation des flux de trésorerie afin de sécuriser les paiements.

Il y a donc un compte pour la trésorerie naturelle, qui contient environ 29M€, le compte dédié aux billets émis avec 21M€, un autre pour la trésorerie des compagnies que nous représentons : la CMN, la CTN et l'ENTMV, pour les derniers départs, réservés avant la fin de notre partenariat.

Nous avons même ouvert un compte spécialement pour l’entretien et la réparation des bateaux.

Pour en revenir aux billets émis, toutes les réservations figurent sur un listing tenu à jour à destination des administrateurs judiciaires. Dès que l’argent arrive sur le compte de trésorerie naturelle, il est transféré vers le compte bloqué.

Nous ne pouvons en aucun cas l’utiliser, cela engage la responsabilité pénale de la compagnie, comme celle des administrateurs judiciaires.

Depuis la mise en redressement judiciaire, plus aucun paiement ne se fait sans l’approbation des administrateurs.

TourMaG.com - Vous annoncez un été serein, mais ne craignez-vous pas un nouveau conflit social, comme celui de l’été 2014 ?

Olivier Diehl :
Le mouvement de grève de l’an dernier, particulièrement dur, était aussi plutôt atypique. C’était la première fois qu’une grève éclatait durant la haute saison, et elle n’était pas dirigée contre la direction de la compagnie.

Elle portait principalement sur les promesses du gouvernement quant à l’acquisition de 4 nouveaux bateaux, et non pas sur les conditions de travail ou les salaires.

Pour l’été 2015, je ne vois aucun terrain conflictuel avec les syndicats concernant l’entreprise. Le report de la décision du tribunal de commerce au 25 septembre les a plutôt rassurés.

TourMaG.com - Un revirement de la position de l’Union européenne, qui se disait encline à effacer les dettes des aides d’Etat, soit 650M€, pourrait-il relancer le conflit ?

Olivier Diehl :
Nous sommes dans un Etat de droit, à la justice indépendante. Le circuit est très balisé et je ne pense pas que le tribunal se réunisse plus tôt que prévu, même si Bruxelles décide de faire une déclaration.

TourMaG.com - Quel est votre sentiment suite à ce report de la décision ?

Olivier Diehl :
Le tribunal de commerce n’a pas pris de décision alors que les trois offres incluaient la reprise d’environ 800 personnes et que le plan social était financé par les actionnaires.

Désormais, ma seule inquiétude est de savoir si le 25 septembre, les candidats souhaiteront toujours reprendre 800 emplois et si le plan social sera toujours financé par l’actionnaire.

Autre ombre au tableau, sur laquelle nos avocats se préparent à plancher : quel sera l’impact de la loi Macron sur le cas de la SNCM, alors que les décrets doivent être votés cet été.

TourMaG.com - Le report de la décision après la haute saison ne risque-t-il pas de décourager certains repreneurs ?

Olivier Diehl :
Il est certain qu’il vaut mieux reprendre une entreprise qui est en haut de sa trésorerie. Au 25 septembre, elle sera encore appétente.

Notre problématique va être de la maintenir jusqu’au mois de novembre, entre la cession et la mise en place du plan social.

TourMaG.com - C’est-à-dire ?

Olivier Diehl :
Les candidats à la reprise ont jusqu’au 2 septembre pour déposer leur offre.

Le 25, le tribunal se réunira mais il devrait mettre la décision en délibéré jusqu’au 10 octobre environ. Il faudra compter une quinzaine de jours pour que la cession soit mise en application et encore un bon mois pour la mise en place d’un plan social.

La fin du mois d'octobre sera une période dangereuse, où nous devrons faire tourner l’ancienne SNCM alors que le repreneur ne sera pas encore arrivé.

TourMaG.com - Envisagez-vous le scénario d’une liquidation de la compagnie ?

Olivier Diehl :
Nous ne pouvons écarter aucune hypothèse, mais notre objectif premier reste d’accompagner un plan de cession avec un repreneur qui ne soit pas dans la continuité économique de la compagnie, comme l’Union européenne l’a demandé.

C’est pour cela que nous avons mis en place un audit débouchant sur un plan de restructuration de la SNCM, dès le milieu de l’année 2014, avec l’arrivée de la nouvelle équipe de management.

Un discours a été engagé avec les partenaires sociaux, de juin à novembre 2014, tous les 15 jours à la préfecture des Bouches-du-Rhône.

Nous leur avons clairement expliquer notre vision pour l’avenir de la compagnie : la société a besoin de ses 2 pieds pour exister, la Corse et le Maghreb. Elle peut vivre avec 6 navires, mais pas avec 1500 salariés.

TourMaG.com - Comment amener cette discontinuité à la compagnie ?

Olivier Diehl :
La réduction du nombre de salariés, des actifs ou encore le changement de nom font partie des critères nécessaires.

La modification du business model également. Nous avons notamment réduit l’offre en stoppant les lignes au départ de Toulon et de Nice, pour offrir des produits sur lesquels nous sommes capables de rentabiliser l’activité.

Nous avons préféré arrêter de surenchérir sur ces ports pour nous concentrer sur notre positionnement naturel à Marseille, notamment sur l’activité Maghreb. Il me semble plus judicieux de récupérer la clientèle perdue au profit de la CTN ou d’Algérie Ferries, plutôt que de vendre des billets bradés à 10€ au départ de Toulon.

Dans tous les cas, cette saison, nous n’aurons pas recours à des prix cassés. Ceux des traversées vers la Corse sont compris dans les grilles tarifaires de la DSP.

Ils seront certainement plus souples sur l’offre complémentaire des ferries, mais pas question de vendre des voyages à 1€.

TourMaG.com - La délégation de service public (DSP) qui court jusqu’en 2016 peut-elle être un frein à cette discontinuité économique ?

Olivier Diehl :
Lorsque la SNCM a été placée en redressement judiciaire, en novembre dernier, et que la commission et le tribunal européens ont exigé une discontinuité économique pour le repreneur, personne ne parlait de la résiliation de la DSP.

Celle-ci a été décidée par le tribunal administratif de Bastia en avril 2015, qui a condamné la manière dont l’Office des Transports de la Corse a attribué la DSP. L’OTC, comme la CMN et la SNCM ont fait appel de cette décision.

TourMaG.com - Discontinuité économique, retour à la rentabilité : vos objectifs sont clairs…

Olivier Diehl :
En effet, nous travaillons sur deux dossiers principaux : régler la problématique de l’Europe, en actant qu’il y a bien discontinuité économique et mener à bien le plan de restructuration.

Pour cela, comme je l’ai dit, nous avons rééquilibré les pôles Maghreb et Corse, travaillé sur les destinations desservies, pour assurer un retour à la rentabilité. Le mois de mai 2015 est quasiment à l’équilibre, la perte opérationnelle a été divisée par 4 par rapport à 2014 ou 2013.

Bien évidemment, il est difficile de comparer 2014 et 2015, puisque l’activité de l’an dernier a été marquée par plusieurs grèves et que, cette année, nous ne partons plus de Toulon ni de Nice.

Nous verrons les résultats des mois suivants, mais nous tablons sur 170M€ de chiffre d’affaires avec la DSP pour 2015.

TourMaG.com - On parle de 80% de parts de marché pour votre concurrent Corsica Ferries. Quelles sont les parts de la SNCM ?

Olivier Diehl :
Des parts de marché dans quel domaine ? Le transport de passagers vers la Corse ? Vers le Maghreb ? Le fret vers la Corse ? Le Maghreb ?

Il ne faut pas oublier que la mission principale de la DSP reste bien d’approvisionner la Corse en marchandises. Les cargos mixtes qui desservent l’Ile Rousse transportent très régulièrement des produits dangereux. Qui va assurer ce transport si la SNCM disparait ?

Et puis, il faut être pragmatique : le port de Marseille est un hub pour le passage des marchandises. Pourquoi vouloir le déplacer vers Toulon ?

TourMaG.com - Le groupe STEF TFE, qui possède la CMN, a déclaré qu’il déposera une offre de reprise auprès du tribunal du commerce de Marseille début septembre. La Méridionale a été plutôt discrète depuis le début du redressement judiciaire. Comment percevez-vous ce soudain intérêt de la part du groupe ?

Olivier Diehl :
Je ne suis pas anti-CMN, mais je pose la question : cette société fera-t-elle le meilleur repreneur ? Est-elle le meilleur atout pour le port de Marseille ? Déploiera-t-elle les efforts nécessaires pour développer le Maghreb ?

J’attends désormais que le groupe lève le voile sur ces interrogations, qu’il trouve les bons partenaires.

Mais je ne vois pas l’intérêt d’avoir un duopole sur la desserte de la Corse entre la CMN et Corsica Ferries. C’est pour cela que j’oeuvre à la survie de la SNCM, pour que la concurrence s’établisse entre 3 compagnies maritimes.

On nous décrit toujours comme le mauvais élève et la CMN comme le bon, alors que la compagnie positionne des bateaux qui entrent dans le cadre de la DSP sur ses lignes vers la Sardaigne.

Ma mission et celle de la nouvelle équipe de management est de préserver les intérêts de la SNCM, que l’été soit serein, les comptes tendant vers l’équilibre et surtout d’assurer la fiabilité de la compagnie aux yeux de nos clients, que le service soit constant.

TourMaG.com - Un mot sur les agences Aliso Voyages, filiale de la SNCM ?

Olivier Diehl :
Le réseau Aliso a une activité bien distincte de celle de la SNCM. Nous avons toutefois procédé à un changement drastique dans le comportement de son activité en responsabilisant les agents sur les coûts, les ventes et le chiffre d’affaires.

Tous disposent d’un véritable savoir-faire en terme de billetterie maritime, notamment vers le Maghreb. C’est un atout, une belle opportunité pour un repreneur.

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