Vendre des séjours aux Maldives revient-il à cautionner les exactions du pouvoir en place ou, au contraire, à mettre en lumière la situation du pays ? - Photo : sborisov-Fotolia.com
Après 30 années de dictature, les Maldives avaient entamé un tournant démocratique à la fin des années 2000 qui avait abouti, en 2008, à la première élection d'un président au suffrage universel dans l'histoire du pays : Mohamed Nasheed.
Mais, 4 ans plus tard, en 2012, celui-ci devait quitter le pouvoir, contraint par un coup d'état et des émeutes, après avoir fait arrêter, sans motif valable, un juge de la Cour Suprême.
A la suite de nouvelles élections, Abdul Yameen, demi-frère d'Abdul Gayoom, ex-dictateur des Maldives, chassé en 2008, devenait à son tour président. Mais dans des conditions troubles.
C'est à partir de là que les problèmes politiques sont revenus en force dans le pays. Atteintes aux droits de l'Homme, dérive sécuritaire... Et même arrestation, en pleine rue, de Mohamed Nasheed, l'ancien président, en 2013. Il sera condamné à 13 ans de prison, à l'issue d'un procès qui ne semble pas avoir été mené équitablement.
Dès 2014, le nouveau pouvoir en place rétablit la charia aux Maldives. Le pays est aujourd'hui considéré comme l'une des zones desquelles le plus de combattants de Daesh en Irak et en Syrie sont issus.
La peine de mort a fait son retour. Même pour les enfants, à partir de 7 ans. Ils ne sont pas exécutés immédiatement mais doivent attendre leur majorité pour cela.
Par ailleurs, les femmes accusées d'adultère sont fouettées. L'état d'urgence est instauré dans le pays depuis novembre 2015, ce qui prive les citoyens de nombreux droits fondamentaux et conduit à l'emprisonnement arbitraire d'opposants politiques.
Elle avait un temps pointé le bout de son nez, mais, désormais, la démocratie a bel et bien disparu des Maldives.
Mais, 4 ans plus tard, en 2012, celui-ci devait quitter le pouvoir, contraint par un coup d'état et des émeutes, après avoir fait arrêter, sans motif valable, un juge de la Cour Suprême.
A la suite de nouvelles élections, Abdul Yameen, demi-frère d'Abdul Gayoom, ex-dictateur des Maldives, chassé en 2008, devenait à son tour président. Mais dans des conditions troubles.
C'est à partir de là que les problèmes politiques sont revenus en force dans le pays. Atteintes aux droits de l'Homme, dérive sécuritaire... Et même arrestation, en pleine rue, de Mohamed Nasheed, l'ancien président, en 2013. Il sera condamné à 13 ans de prison, à l'issue d'un procès qui ne semble pas avoir été mené équitablement.
Dès 2014, le nouveau pouvoir en place rétablit la charia aux Maldives. Le pays est aujourd'hui considéré comme l'une des zones desquelles le plus de combattants de Daesh en Irak et en Syrie sont issus.
La peine de mort a fait son retour. Même pour les enfants, à partir de 7 ans. Ils ne sont pas exécutés immédiatement mais doivent attendre leur majorité pour cela.
Par ailleurs, les femmes accusées d'adultère sont fouettées. L'état d'urgence est instauré dans le pays depuis novembre 2015, ce qui prive les citoyens de nombreux droits fondamentaux et conduit à l'emprisonnement arbitraire d'opposants politiques.
Elle avait un temps pointé le bout de son nez, mais, désormais, la démocratie a bel et bien disparu des Maldives.
"Ce pays devient un vrai problème"
Dans ce contexte, que doivent faire les tour-opérateurs et les agences de voyages ? Faut-il continuer à vendre une destination qui, d'un point de vue touristique, possède des atouts fantastiques ou faut-il la boycotter ?
Les professionnels français du tourisme s'expriment peu sur le sujet. Pourtant, début juillet 2016, relayant un article de 7x7.press, Jean-François Rial, président-directeur général (PDG) de Voyageurs du Monde reconnaît, sur Twitter, que "ce pays devient un vrai problème". (Voir ci-dessus)
Contacté par TourMaG.com, il n'a pas souhaité en dire plus.
Mais certains ont déjà tranché. Il faut arrêter de produire et de vendre des séjours aux Maldives. C'est ce qu'ont affirmé plusieurs députés européens, tous partis confondus, dans un appel lancé aux professionnels du tourisme fin 2015.
Parmi eux, Michèle Rivasi, députée européenne Europe Ecologie-Les Verts (EELV) : "Il y a une telle dictature aux Maldives qu'il faut que le secteur du tourisme se bouge."
Jusqu'à présent, leur appel ne semble pas vraiment avoir été suivi par les tour-opérateurs et les agences du voyages français.
Les professionnels français du tourisme s'expriment peu sur le sujet. Pourtant, début juillet 2016, relayant un article de 7x7.press, Jean-François Rial, président-directeur général (PDG) de Voyageurs du Monde reconnaît, sur Twitter, que "ce pays devient un vrai problème". (Voir ci-dessus)
Contacté par TourMaG.com, il n'a pas souhaité en dire plus.
Mais certains ont déjà tranché. Il faut arrêter de produire et de vendre des séjours aux Maldives. C'est ce qu'ont affirmé plusieurs députés européens, tous partis confondus, dans un appel lancé aux professionnels du tourisme fin 2015.
Parmi eux, Michèle Rivasi, députée européenne Europe Ecologie-Les Verts (EELV) : "Il y a une telle dictature aux Maldives qu'il faut que le secteur du tourisme se bouge."
Jusqu'à présent, leur appel ne semble pas vraiment avoir été suivi par les tour-opérateurs et les agences du voyages français.
"Le tourisme est un média"
"De manière générale, les tour-opérateurs sont contre l'arme du boycott", résume Julien Buot, directeur d'Agir pour un Tourisme Responsable (ATR).
Il explique qu'il n'existe pas d'harmonisation à l'échelle du label sur ce type de sujet. A titre personnel, il considère néanmoins que le boycott d'une destination peut, en fin de compte, avoir des effets pervers.
"Si l'on arrête de vendre des voyages dans un pays en particulier pour des questions politiques, on n'en parle plus et ce n'est pas forcément bon, poursuit Julien Buot.
J'estime que le tourisme est un média qui permet de mettre en lumière des destinations et de parler de sujets politiques et relatifs au non-respect des droits de l'Homme. Dès lors, boycotter, c'est censurer."
Un constat partagé par Michèle Rivasi qui, 8 mois après son appel, explique que "cela passera peut-être plus par l'information des clients que par une prise de conscience des tour-opérateurs et des agences de voyages."
D'ailleurs, d'après elle, la prise de position des députés européens a eu plus d'effet sur les voyageurs que sur les professionnels : "Certaines personnes n'étaient pas au courant de ce qui se passe aux Maldives. Avec notre appel, ils ont découvert la situation. Cela en a conduit certains à choisir une autre destination pour les vacances."
Il explique qu'il n'existe pas d'harmonisation à l'échelle du label sur ce type de sujet. A titre personnel, il considère néanmoins que le boycott d'une destination peut, en fin de compte, avoir des effets pervers.
"Si l'on arrête de vendre des voyages dans un pays en particulier pour des questions politiques, on n'en parle plus et ce n'est pas forcément bon, poursuit Julien Buot.
J'estime que le tourisme est un média qui permet de mettre en lumière des destinations et de parler de sujets politiques et relatifs au non-respect des droits de l'Homme. Dès lors, boycotter, c'est censurer."
Un constat partagé par Michèle Rivasi qui, 8 mois après son appel, explique que "cela passera peut-être plus par l'information des clients que par une prise de conscience des tour-opérateurs et des agences de voyages."
D'ailleurs, d'après elle, la prise de position des députés européens a eu plus d'effet sur les voyageurs que sur les professionnels : "Certaines personnes n'étaient pas au courant de ce qui se passe aux Maldives. Avec notre appel, ils ont découvert la situation. Cela en a conduit certains à choisir une autre destination pour les vacances."
"Nous sommes prestataires de services"
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Pour Jean-Pierre Mas, président des Entreprises du Voyage (ex-SNAV), le boycott d'une destination en particulier n'est pas la solution.
"Les députés européens qui appellent au boycott des Maldives par les professionnels du voyage ont-ils également appelé à boycotter, en les citant, les acteurs du prêt-à-porter, qui apposent leur marque sur des produits fabriqués par des enfants ?", questionne-t-il.
Ce à quoi Gérard La Rocca, fondateur d'Hôtels & Lagons, ajoute que "si on commence à prendre tout cela en compte, on aura du mal à travailler.
Le même type de questions peut se poser pour d'autres destinations comme la Birmanie, par exemple."
L'ancien patron de Tourinter cite également le cas de l'Autriche, où l'Extrême-Droite pourrait très bientôt arriver au pouvoir. Mais aussi celui de l'Iran, "infréquentable jusqu'à il y a peu et qui est aujourd'hui très à la mode."
La position de Gérard La Rocca sur le sujet est plutôt pragmatique. "Nous sommes des prestataires de services et ne faisons pas de politique, recadre-t-il. Je ne suis qu'un intermédiaire et j'essaie de faire ce que me demandent mes clients.
Nous les informons sur la réalité du pays. Nous y sommes obligés, du moins moralement. Mais ce n'est pas à nous, professionnels du tourisme, de prendre la décision d'un boycott, même si moralement nous sommes d'accord avec ce principe."
Il faut dire que, du côté d'Hôtels & Lagons, après une nette baisse des ventes au moment de l'arrivée au pouvoir du nouveau régime en 2012, les demandes repartent à la hausse pour les Maldives actuellement.
"Les députés européens qui appellent au boycott des Maldives par les professionnels du voyage ont-ils également appelé à boycotter, en les citant, les acteurs du prêt-à-porter, qui apposent leur marque sur des produits fabriqués par des enfants ?", questionne-t-il.
Ce à quoi Gérard La Rocca, fondateur d'Hôtels & Lagons, ajoute que "si on commence à prendre tout cela en compte, on aura du mal à travailler.
Le même type de questions peut se poser pour d'autres destinations comme la Birmanie, par exemple."
L'ancien patron de Tourinter cite également le cas de l'Autriche, où l'Extrême-Droite pourrait très bientôt arriver au pouvoir. Mais aussi celui de l'Iran, "infréquentable jusqu'à il y a peu et qui est aujourd'hui très à la mode."
La position de Gérard La Rocca sur le sujet est plutôt pragmatique. "Nous sommes des prestataires de services et ne faisons pas de politique, recadre-t-il. Je ne suis qu'un intermédiaire et j'essaie de faire ce que me demandent mes clients.
Nous les informons sur la réalité du pays. Nous y sommes obligés, du moins moralement. Mais ce n'est pas à nous, professionnels du tourisme, de prendre la décision d'un boycott, même si moralement nous sommes d'accord avec ce principe."
Il faut dire que, du côté d'Hôtels & Lagons, après une nette baisse des ventes au moment de l'arrivée au pouvoir du nouveau régime en 2012, les demandes repartent à la hausse pour les Maldives actuellement.
Moins de 20 000 clients aux Maldives pour le SETO en 2014/2015
Du côté du Syndicat des entreprises du tour-opérating (SETO), les statistiques des TO membres montrent une chute du nombre de clients aux Maldives ces dernières années.
Après un pic en 2007/2008 (41 814 pax forfaits et vols secs confondus), les Maldives ont chuté dès 2008-2009 (31 455 voyageurs).
Les membres du SETO ont constaté une légère reprise en 2010-2011 avec près de 34 000 clients sur la destination. Mais la tendance est de suite repartie à la baisse avec 26 741 touristes en 2012-2013 et plus que 19 759 en 2014/2015.
"Il y a dans le monde des pratiques et des régimes exécrables dont je ne partage aucune des « valeurs », dans la mesure où ils en ont. C'est ainsi que j'ai systématiquement refusé de voyager en Afrique du Sud au temps de l'Apartheid ou d'aller en Birmanie", ajoute Jean-Pierre Mas.
C'est un ami photographe qui a conduit le président des Entrepreneurs du Voyage a faire évoluer sa position. Il l'a convaincu "que les Birmans avaient plus à gagner de l'échange des idées et des retombées économiques, même modestes du tourisme. L'évolution de la Birmanie lui a donné raison."
S'il concède qu'un professionnel du voyage peut refuser de promouvoir une destination en fonction de ses sensibilités, il rappelle que "sa mission est par ailleurs d'informer objectivement."
"Pour ma part, j'outrepasserai mes attributions en prétendant me transformer en directeur de conscience ou maître à penser des voyageurs", conclut Jean-Pierre Mas.
Le tourisme représente environ 80% du produit intérieur brut (PIB) des Maldives. De quoi faire du secteur un levier efficace pour faire pression sur le pouvoir et, peut-être, le forcer à respecter un peu plus son peuple.
Après un pic en 2007/2008 (41 814 pax forfaits et vols secs confondus), les Maldives ont chuté dès 2008-2009 (31 455 voyageurs).
Les membres du SETO ont constaté une légère reprise en 2010-2011 avec près de 34 000 clients sur la destination. Mais la tendance est de suite repartie à la baisse avec 26 741 touristes en 2012-2013 et plus que 19 759 en 2014/2015.
"Il y a dans le monde des pratiques et des régimes exécrables dont je ne partage aucune des « valeurs », dans la mesure où ils en ont. C'est ainsi que j'ai systématiquement refusé de voyager en Afrique du Sud au temps de l'Apartheid ou d'aller en Birmanie", ajoute Jean-Pierre Mas.
C'est un ami photographe qui a conduit le président des Entrepreneurs du Voyage a faire évoluer sa position. Il l'a convaincu "que les Birmans avaient plus à gagner de l'échange des idées et des retombées économiques, même modestes du tourisme. L'évolution de la Birmanie lui a donné raison."
S'il concède qu'un professionnel du voyage peut refuser de promouvoir une destination en fonction de ses sensibilités, il rappelle que "sa mission est par ailleurs d'informer objectivement."
"Pour ma part, j'outrepasserai mes attributions en prétendant me transformer en directeur de conscience ou maître à penser des voyageurs", conclut Jean-Pierre Mas.
Le tourisme représente environ 80% du produit intérieur brut (PIB) des Maldives. De quoi faire du secteur un levier efficace pour faire pression sur le pouvoir et, peut-être, le forcer à respecter un peu plus son peuple.