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À Chemnitz aussi, l’Allemagne mise sur la culture et le « tourisme durable » 🔑

Chemnitz sera l’une des « capitales européennes de la culture « en 2025


C’est à Chemnitz, ville industrielle de l’ex-RDA, que les responsables du tourisme allemand ont organisé du 21 au 23 avril 2024, leur 50e Germany Travel Mart (GMT). Objectif : doper la venue de touristes étrangers.


Rédigé par le Lundi 22 Avril 2024

Une cérémonie d’ouverture jeune et joyeuse pour ce 50e Germany Travel Mart (GMT) à Chemnitz (@PB)
Une cérémonie d’ouverture jeune et joyeuse pour ce 50e Germany Travel Mart (GMT) à Chemnitz (@PB)
L’Allemagne a mis les petits plats dans les grands pour son 50e Germany Travel Mart (GTM).

Quelque 380 « buyers » (autrement dit opérateurs touristiques) de 38 pays étrangers ont été invités pendant trois jours à Chemnitz, dans le Land (région) de Saxe, cet Est de l’Allemagne qui fut englobé dans le bloc communiste jusqu’après la chute du Mur de Berlin à la fin 1989.

Ce GTM s’est tenu alors que le tourisme allemand a enregistré de bons résultats en 2023, quoiqu’encore en retrait par rapport à 2019.

Avec 80,9 millions de nuitées passées sur son sol par des touristes internationaux, elle a récupéré 88% de son score d’avant Covid, l’inflation permettant toutefois une hausse des recettes de 3%.

Avec 3,5 millions de nuitées, la France est le 5e marché (derrière les Pays-Bas, la Suisse, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne), a souligné Petra Hedorfer, la directrice générale de l’Office allemand du tourisme (ONAT).

« En 2024, nous comptons arriver à 3,8 millions de nuitées », assure Bénédicte Richer, la directrice France de l’ONAT, que de récentes études confortent dans l’espoir d’arriver dès 2025 à 4 millions de nuitées passées par des touristes français en Allemagne.

« Incontestablement, la destination Allemagne est bien positionnée en France », insiste Bénédicte Richer, tout en constatant « l’approche assez classique » des Français, portés en priorité sur les city breaks à Berlin et à Munich et, plus largement, sur le mix de culture et de nature qu’offre l’Allemagne.


« Green Germany »

Petra Hedorfer a insisté sur l’engagement allemand en faveur du tourisme durable (@PB)
Petra Hedorfer a insisté sur l’engagement allemand en faveur du tourisme durable (@PB)
Cela tombe bien. Même si l’Allemagne est d’abord une destination pour le tourisme d’affaires, le tourisme de loisirs y est fortement soutenu par la visite de ses « villes vibrantes », par son offre culturelle et par ses « beautés naturelles ».

Ces aspects-là seront amplement mis en avant cette année encore, mais l’Allemagne insistera aussi, plus que jamais, sur le « tourisme durable ». Dans ce domaine, elle estime avoir une longueur d’avance.

Si pendant ce GMT, les responsables du tourisme allemand n’ont pas cessé de marteler : «  quand vous venez, restez un peu plus », ce n’est pas seulement pour augmenter le nombre de nuitées passées sur place par les touristes internationaux. C’est aussi dans l’espoir de réduire l’empreinte carbone des séjours sur son territoire et donc de son industrie touristique.

Depuis de longues années, l’Allemagne pense en effet sa politique touristique en ayant en tête la mise en œuvre des 17 objectifs de développement durable inscrits à l’agenda 2030 des Nations Unies.

C’est dans cet esprit qu’elle travaille, par exemple, au développement de son offre de transports publics, à la modernisation de ses infrastructures ferroviaires, à l’augmentation du nombre d’ICE (le TGV allemand) comme de celui des dessertes régionales.

Lire aussi : Aérien : les capacités allemandes en chute libre à cause du train ?

« L’Allemagne est facilement accessible en train depuis la France. Une fois sur place, il est très aisé de se déplacer en transports publics, à vélo et à pied car nos villes sont à taille humaine », renchérit Bénédicte Richer, prompte à ajouter : « voyager en Allemagne, c’est voyager engagé. Et cet argument commence à faire mouche auprès du public français ».

Des expériences dans la nature mais pas que…

À Chemnitz, le petit lac au pied de l’ancien monastère de Schloßberg (@PB)
À Chemnitz, le petit lac au pied de l’ancien monastère de Schloßberg (@PB)
Pour « transformer cet intérêt en décision de prendre ses vacances en Allemagne », les responsables de l’ONAT se sont employés, à grands renforts d’images séduisantes, de convaincre les professionnels présents que l’Allemagne était une destination verte et culturelle incontournable.

La Saxe où se tenait ce 50e GTM est, à cet égard, un exemple édifiant. Ce Land (région) ne manque pas de richesses culturelles et architecturales dans des villes comme Dresde et Leipzig.

La Saxe offre aussi beaucoup « d’expériences dans la nature » grâce ses lacs, ses forêts et les surprenants paysages de la Suisse saxonne.

Dans ce contexte, la décision de faire de Chemnitz, ville industrielle de 250 000 habitants située à une heure de route de Dresde et de Leipzig, l’une des « capitales européennes de la culture2025 » peut surprendre. A tort.

Non seulement, les amateurs patrimoine y trouveront leur compte, notamment en suivant la route des châteaux (elle passe par Klaffenbach, Rabenstein, Kriebstein…), mais les amoureux de belle nature seront forcément séduits.

De beaux espaces de verdure bucolique les attendent dans le parc du Kuchwald ; ils pourront agréablement marcher ou pédaler dans le nouveau quartier Heckert ou se promener autour d’un charmant petit lac au pied de l’ancien monastère bénédictin du Schlossberg : c’était l’ancien étang à carpes créé par les moines en 1493 !

Chemnitz, une ville et des transformations

Dès 1945, les communistes au pouvoir s’employèrent peu à peu à reconstruire Chemnitz dans le style caractéristique des ex-pays de l’est - Photo PB
Dès 1945, les communistes au pouvoir s’employèrent peu à peu à reconstruire Chemnitz dans le style caractéristique des ex-pays de l’est - Photo PB
Si Chemnitz va être « capitale européenne de la culture », c’est aussi pour valoriser les transformations de cette ville qui feront l’objet d’une grande exposition internationale d’avril à novembre 2025.

Dès la fin du XVllle siècle, Chemnitz vit en effet s’installer ses premières filatures de coton. Peu à peu, des mines puis des usines métallurgiques s’y ajoutèrent tout au long du XIXe siècle, en faisant la « ville aux 800 cheminées » et la « Manchester saxonne ».

Si une partie de la population y vivait dans la pauvreté et des conditions d’hygiène désastreuses, la ville de plus en plus peuplée -autour de 300 000 habitants dans les années 1920 - était prospère.

Cela explique qu’au début du XXe siècle y aient poussé de magnifiques édifices Art nouveau comme la piscine ou la galerie commerciale des frères Schocken dessinée par un grand architecte proche du Bahaus, Erich Mendelsohn. Et aussi un second Hôtel de Ville qui mixe style médiéval et somptueux éléments décoratifs Art nouveau.

A la fin de la Seconde guerre mondiale, le rôle stratégique de Chemnitz dans l’industrie allemande en fit une cible : les Alliés la bombardèrent, la laissant à 80% en ruines.

Occupée par les Soviétiques en 1945, l’est de l’Allemagne devint la RDA (République Démocratique Allemande). Les communistes au pouvoir s’employèrent peu à peu à reconstruire Chemnitz dans le style caractéristique des ex-pays de l’est.

Partout donc, de larges avenues et, au centre-ville, un mélange décomplexé de bâtiments historiques reconstruits ou conservés - par exemple la « tour rouge » qui est tout ce qui reste des remparts édifiés pour protéger la ville au Moyen-Age -, d’imposants édifices publics et des équipements sportifs, tous de style « réalisme socialiste » et d’énormes barres HLM souvent colorées mais assez moches.

En 1953, Chemnitz fut même renommée Karl-Marx-Stadt, bien que le vieux Karl n’y ait jamais mis les pieds.

Karl Marx veille toujours

Marx à Chemnitz, une tête en bronze de 40 tonnes (@PB)
Marx à Chemnitz, une tête en bronze de 40 tonnes (@PB)
Si, aujourd’hui, Chemnitz a repris son nom d’origine, elle a, en revanche, conservé sur l’une de ses principales avenues, Bruckenstrasse, la plus grande statue de Karl Marx au monde : une tête de bronze de 40 tonnes familièrement surnommée « Nischel » !

Haute de 7 mètres, elle avait été inaugurée en 1971 ! La ville a également conservé d’autres statues et bas-reliefs typiques de l’art réaliste cher aux Soviétiques.

Chemnitz a aussi gardé, pour bonne partie, sa structure urbaine de l’ère soviétique. Cette ville constitue donc un intéressant témoignage d’une époque révolue et d’une utopie qui a soulevé d’immenses espoirs avant de se fracasser sur l’incurie de ses réalisations. Elle ne se résume cependant pas à cela, grâce aux édifices médiévaux, gothiques ou Art nouveau qui ont réussi à traverser les siècles.

Cela vaut le coup de visiter Chemnitz. et ce d’autant plus que depuis les années 1990, pour revitaliser le tissu urbain et retenir (voire même attirer) une population qui, faute de travail, avait tendance à déserter l’ex-Allemagne de l’Est, de très importants investissements ont été réalisés dans le « dernier centre-ville d’Allemagne ».

Sur sa place, l’Hôtel de Ville construit en 1911 voisine toujours avec celui du XVe siècle, mais grâce a un concours international d’architectes, le quartier tout autour a complètement changé et réussit à attirer une belle jeunesse.

Y ont en effet poussé des bars, des restaurants et des galeries commerciales comme le Kaufhof Departement Store, la Galerie Roter Turm et le magasin Peek&Cloppenburg.

100 projets, plus de 1 000 événements

Un des joyaux du musée de la sculpture religieuse sur bois de Chemnitz (@PB)
Un des joyaux du musée de la sculpture religieuse sur bois de Chemnitz (@PB)
Chemnitz ne manque pas d’autres centres d’intérêt, à commencer par son musée de l’industrie réinstallé récemment dans un beau bâtiment en briques : on peut y voir de nombreuses machines, dont une puissante machine à vapeur qui fonctionne certains jours.

La ville peut s’enorgueillir aussi de son musée consacré à la sculpture religieuse sur bois, une spécialité saxonne dès le Moyen-âge. Il a été aménagé dans l’ancien monastère Schlossberg où sont exposées de très belles pièces polychromes, extrêmement expressives.

Quant au musée d’Histoire naturelle, il met en valeur de nombreux éléments de la forêt pétrifiée ensevelie dans le sol de cette région après l’explosion d’un volcan il y a 280 millions d’années.

Ajoutons encore l’opéra, sorti de terre à la fin du XIXe siècle, qu’il a fallu reconstruire après 1945. Doté de moyens techniques considérables, son bâtiment accueille aujourd’hui non seulement des opéras, mais aussi des pièces de théâtre, des ballets, des concerts de l’orchestre philharmonique local et des spectacles de marionnettes.

Tout cela aurait largement suffi à justifier le sacre de Chemnitz comme « capitale européenne de la culture ». Pour 2025, y sont annoncés la mise en œuvre de 100 projets et de 1 000 événements, parmi lesquels une grande exposition Munch et aussi une exposition nommée « Réalités européennes » au Musée Gunzenhauser.

Chemnitz, une ville qui ne laisse personne indifférent

Sur la place de l’hôtel de ville  (@PB)
Sur la place de l’hôtel de ville (@PB)
De quoi booster le tourisme sans aucun doute ! Mais aussi, même si cela n’a pas été dit au GMT, de quoi redynamiser et peut-être redonner foi en l’avenir aux habitants de Chemnitz et de sa région.

Si cette ville est actuellement gérée par un maire SPD (social démocrate) et le Land de Saxe dirigé par un ministre-président CDU (chrétien-démocrate), ce coin de l’ex-Allemagne de l’Est n’en a pas moins connu, il y a quelques années, des émeutes anti-migrants à la suite d'un faits divers sordide.

Depuis, le parti d’extrême-droite Alternative Fur Deutschland (AFD) s’implante en Saxe avec un succès croissant... En effet, si la vie est agréable dans une ville comme Chemnitz, le manque de travail et de perspectives pour les jeunes créé des ressentiments.

Bien loin de ces considérations politiques locales, les « buyers » (dont six Français : Euridice Opéra, Evaneos, Worldia, Tango Voyages, Escapade, Voyage Privé) semblent avoir été séduits par l’offre allemande. Et par Chemnitz.

« C’est une belle ville », estime Daniela Bocanegra de Evaneos. Cette jeune femme participe au GTM car Evaneos cherche des partenaires pour développer des « destinations de proximité » à découvrir notamment en train.

L’Allemagne lui semble, à ce titre, un pays intéressant et Chemnitz une ville à inscrire dans un parcours. Parce que c’est une ville incroyablement verte où les jeunes peuvent marcher, faire du vélo, de l’escalade...

Rémy Jousse de Tango Voyages, agence spécialisée dans les voyages sur-mesure pour les entreprises, semble lui aussi décidé à proposer Chemnitz mais comme un « complément » à une découverte de villes comme Dresde ou Leipzig, car c’est, dit-il, une « curiosité historique ».

Si les regards diffèrent sur cette ville étonnante, elle ne laisse donc personne indifférent !

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