Au Rwanda, le pari d’un tourisme élitiste 🔑

Soudain, les voilà, après deux heures d’ascension ardue dans les pierres volcaniques et la végétation, à 3 000 m d’altitude : les gorilles des montagnes !

Huit femelles et leurs petits, tapis dans l’herbe autour du mâle dominant, un « dos argenté » de 22 ans et de plus de 200 kg. Stupéfaction et émotion garanties à la vue de ces géants des forêts, placides et si humains.

Ils ne sont pas nombreux les touristes français à pouvoir découvrir ce spectacle : pas plus de 10 000 en 2019, à peine 13 000 en 2023. La raison est simple : le prix.

Le Rwanda s’est délibérément positionné sur un segment ultra Premium. Avec l’alibi écologique dans une main – moins il y aura de visiteurs, plus la nature sera a priori préservée – et le désir de maximiser les revenus dans l’autre.

Car tout se paie au Rwanda, et souvent très cher. L’excursion pour voir les gorilles au parc national des volcans : 1 500 $ par personne ! Celle pour pister les chimpanzés du parc national Nyungwe, au sud du Rwanda : 240 $.

Le prix des chambres d’hôtels est à l’unisson, pas moins de 800 $ la nuit au Wilderness Magashi Camp, dans le parc Akagera, à l’est du pays, où l’on peut voir les fameux big five – le Rwanda possède une savane mais elle est moins riche en faune que celle de ses voisins tanzaniens et kenyans.

Et 750 $ en all inclusive au Cleo Lake Kivu Hotel, sur les rives du lac Kivu, à l’ouest du pays. On ne parle même pas du tarif des deux hôtels One&Only, l’un dans le parc des volcans, l’autre dans celui de Nyugwe. Au bas mot, rien à moins de 3 500/4 000 $ la nuit, en pension complète, tout de même.

A ces tarifs là, et bien qu’il existe des hébergements moins chers, le ticket d’accès dans le pays est élevé, notamment si l’on ajoute le prix d’entrée des parcs et du 4x4 avec chauffeur – c’est conseillé, même si l’on peut louer un véhicule et circuler librement… on roule à droite au Rwanda.

Sans surprise, la clientèle nord-américaine est la plus représentée (52 500 pax en 2023), suivie par les Britanniques, les Belges (le Rwanda est une ancienne colonie du plat pays) et les Français.

Un Hexagone sur lequel le pays fonde des espoirs depuis qu’existe la ligne Bruxelles-Paris CDG - Kigali, opérée trois fois par semaine par RwandAir.

Un vol de nuit de 8h30 sans décalage horaire – en été, la meilleure saison pour s’y rendre, le Rwanda est à la même heure que la France. Présent à ITB Berlin, Visit Rwanda a organisé son premier webinaire à destination des professionnels du tourisme français en février dernier.

L’agence serait peut-être bien inspirée de venir à l’IFTM, histoire de nouer d’autres partenariats et de mettre à bord d’avions pas toujours remplis de nouveaux clients triés sur le volet.

Mais revenons aux gorilles ! Ils sont le nec plus ultra d’un voyage au Rwanda. Le « pays des mille collines » est aussi doté de hauts sommets. Parmi elles, à 3 711 m, se trouve le volcan Visoke.

C’est sur les pentes de ce cône, frontalier avec la République Démocratique du Congo (RDC), que vivent les 1 000 gorilles des montages, partagés entre le Rwanda, la RDC et l’Ouganda. Près de l’entrée du parc, The Ellen DeGeneres Campus of the Dian Fossey Gorilla Fund raconte la passion de la primatologue américaine, dès les années 1960, pour ces singes et le travail remarquable qu’elle mena dans la région pour les étudier et protéger.

Au sud-ouest, Nyungwe est l’autre parc national de référence. Sur 1 000 km², il abrite près de 500 chimpanzés et une immense colonie de singes colobes, « marée » blanche et noire à l’instinct grégaire que l’on peut croiser avec de la chance.

Le parc est aussi connu pour être une des sources lointaines du Nil. On peut y rejoindre un pont suspendu au milieu de la canopée, admirer la spectaculaire cascade Ndambarare et effectuer un trek de trois jours, avec nuits en cabane forestière.

A l’ouest toujours, le lac Kivu est le troisième point fort du pays. L’une des plus grandes étendues d’eau d’Afrique s’apparente à une Riviera touristique. Depuis les côtes, la vue sur lac et ses îles est idyllique. Tôt le matin, on peut voir les pêcheurs rentrer au port sur leurs curieuses embarcations, trois longues barques liées entre elles pour pouvoir étendre dessous un large filet. Ces « araignées lacustres » sont le symbole du Kivu.

D’une région à l’autre, on sillonne le pays entier. Routes de hautes vallées ou à flancs de collines. Villages à plus de 1 000 m d’altitude. Champs de riz, de bananiers, de thé et de café. Enfants en uniforme scolaire au bord des routes.

Femmes portant des brassées de manioc sur la tête. Vélos chargés de sacs poussés par des hommes… Le Rwanda, pays le plus dense d’Afrique où près de 80% de la population a moins de 35 ans, livre son incroyable énergie humaine, celle d’un pays pauvre où l’on gagne sa vie à la sueur de son corps.

Reste Kigali, la capitale, 1,5 million d’habitants. Impossible de s’y retrouver dans son dédale de quartiers grimpant à l’assaut de collines. Pas de centre, ou plutôt des centres : la gare routière, barnum bruyant et pollué ; l’hôtel de ville, tendance business et shopping.

On ira voir bien sûr le mémorial du génocide, rappel de ce drame absolu qui a vu la mort de plus 800 000 Tutsis, tués par les Hutus.

La ville s’offre aussi un vernis lifestyle. On croisera le chemin de structures en vue : le Nyamirambo Women’s Center ; le Nyo Arts Center ; le show room de Rwanda Clothing… Ils sont les ambassadeurs d’un pays qui font du Rwanda une destination « must do »… à condition d’en avoir les moyens.

Y aller
Vols à Paris CDG vers Kigali avec RwandAir. Classe Business de 30 sièges.

Formalités et infos
Passeport valide, aucune vaccination exigée.

Monnaie
Le franc rwandais (RWF). 1€ = 1 404 RWF.

Meilleure saison
Juin à septembre (saison sèche).

En savoir plus
Visit Rwanda