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Grève, reprise : les aéroports dans un étau

la chronique de Jean-Louis Baroux


Alors que le trafic aérien reprend des couleurs, les aéroports se retrouvent dans une situation compliquée où ils doivent faire face à des conflits sociaux qui pourraient fortement handicaper le retour de l'activité. Voici l'analyse de Jean-Louis Baroux


Rédigé par le Jeudi 9 Juin 2022

Grève, reprise : c'est au moment où les aéroports ont le plus besoin d’argent pour relancer leur activité, payer plus cher leurs sous-traitants et remettre les installations en fonctionnement qu’ils ont le moins de cash - Depositphotos.com Auteur BalkansCat
Grève, reprise : c'est au moment où les aéroports ont le plus besoin d’argent pour relancer leur activité, payer plus cher leurs sous-traitants et remettre les installations en fonctionnement qu’ils ont le moins de cash - Depositphotos.com Auteur BalkansCat
Le trafic est reparti mais il va certainement être freiné par les congestions que les passagers devront subir dans les aéroports. Cela n’a d’ailleurs pas trainé. KLM a été dans l’obligation de suspendre ses ventes pendant plus d’une semaine car l’aéroport d’Amsterdam, pourtant réputé pour son efficacité, n’arrivait pas à écluser le flot de passagers.

Aéroports de Paris a fait face de son côté à une grève des personnels au sol le 09 juin, ce qui oblige les compagnies à diminuer leur offre de 25% sur demande de la DGAC.

Et ce n’est sans doute pas fini. Au fur et à mesure que l’on s’approche de la très haute saison en Europe, les tensions ne vont que s’accroître.

Lire aussi : Aérien : pourquoi l'été sera chaotique en France ?

Cela fera les affaires des écologistes, moins il y a de vols, plus les clients aériens sont mécontents et moins il y aura d’émissions de CO². Cette situation était-elle prévisible ? Oui sans doute à la condition de croire à la très forte demande de transport aérien, laquelle a été comprimée, comme dans une cocotte-minute pendant deux ans. Alors, il faut bien que la vapeur s’échappe.

Crise : les aéroports ont cherché la variable d'ajustement dans le personnel

Mais il est certainement plus facile de remettre en service des avions que des terminaux aéroportuaires.

Comme cela a été pointé par le Directeur Europe de l’ACI lors du dernier Paris Air Forum, les aéroports n’ont pas été supportés par leurs gouvernements au même niveau que les transporteurs nationaux. Ils ont donc dû se débrouiller.

Et ils ont cherché la variable d’ajustement dans le personnel, en particulier dans le personnel sous-traité. Or les grands aéroports européens ne peuvent pas fonctionner sans l’apport des services réalisés par des sociétés tierces.

Et ces dernières sont sélectionnées sur la base de leur prix de vente. Autrement dit, moins elles vendent cher leur prestation auprès des aéroports et plus elles ont de chances d’être sélectionnées. Sauf que ces prestataires de services sont essentiellement des sociétés de main d’œuvre. Alors ils sont amenés à payer leurs collaborateurs au bas des échelles de salaires. Et lorsque la pandémie est arrivée ils ont massivement dégraissé leurs effectifs à commencer par les CDD. Ces derniers n’ont pas vraiment envie de revenir dans ce secteur d’activité.

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L’affaire se complique encore car les personnels employés dans les aéroports doivent faire l’objet d’une accréditation qui est parfois longue à obtenir surtout pour les agents dédiés à l’Inspection Filtrage. C’est ainsi que se sont créés des goulots d’étranglement qui seront très difficiles à résorber.

C'est au moment où les aéroports ont le plus besoin d'argent qu'ils ont le moins de cash

Nul doute que cela va entrainer des conflits sociaux à répétition, des perturbations aux moments les plus délicats, le tout rejaillissant sur l’image du transport aérien.

Dès lors, les transporteurs, premiers pénalisés, vont se retourner contre les aéroports et réclamer une baisse de leurs redevances ou à tout le moins une cote part des bénéfices engrangés par les redevances des commerces et des parkings.

Seulement les grandes plateformes aéroportuaires ont énormément besoin de toutes ces ressources pour se refaire une santé financière largement mise à mal par l’arrêt des exploitations et les généreuses distributions de bénéfices réclamés par leurs actionnaires au premier rang desquels les Etats.

Ainsi c’est au moment où les aéroports ont le plus besoin d’argent pour relancer leur activité, payer plus cher leurs sous-traitants et remettre les installations en fonctionnement qu’ils ont le moins de cash. Ils ne peuvent pas compter sur les gouvernements qui ont largement assez à faire pour maintenir à flot les compagnies aériennes, et ils n’arriveront pas, si les conflits sociaux se multiplient à retrouver le chiffre d’affaires dont ils ont besoin.

Certes si comme on peut le penser le transport aérien reprend sa marche en avant et s’il se met à privilégier la rentabilité et non la course au volume, les choses rentreront progressivement dans l’ordre. Mais ce n’est pas gagné en tous cas pas cette année.

Voilà pourquoi il devient de plus en plus urgent que dans ce secteur d’activité si prometteur et pourtant si difficile, les acteurs perdent leur fâcheuse habitude de reporter sur le voisin les dysfonctionnements, même si ce dernier en est responsable.

Petit à petit on voit poindre une solidarité qui n’existait pas auparavant. Si elle est cultivée par tous les acteurs, tous y gagneront, les clients au premier rang.

Jean-Louis Baroux - DR
Jean-Louis Baroux - DR
Jean-Louis Baroux est l'ancien président d'APG (Air Promotion Group) et le créateur du CAF (Cannes Airlines Forum) devenu le World Air Forum.

Grand spécialiste de l'aérien, il a signé aux éditions L'Archipel ''Compagnies Aériennes : la faillite du modèle'', un ouvrage que tous les professionnels du tourisme devraient avoir lu.

Les droits d'auteur de l'ouvrage seront reversés à une association caritative. On peut l'acquérir à cette adresse : www.editionsarchipel.com.


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Tags : aeroport, baroux
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Commentaires

1.Posté par Milo nivreo le 10/06/2022 08:11 | Alerter
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Avant COVID le transport aérien a bien profité sur le dos des employés : intérim, salaires de misère conditions de travail difficiles (pour ne pas dire terribles souvent). Tant de bénéfices pour les actionnaires, dirigeants et tant de petits prix pour les passagers qui n'hésitent plus a traiter le personnel comme des sous-merdes (sutout les agents d'escale). Comment s'etonner que ces métiers n'attirent plus ? Comme dans l'hôtellerie/restauration sacrifier weekends, vacances scolaires, jours fériés, bosser en horaires décalés avec des conditions difficiles et des relations clients qui tournent souvent au cauchemars et tout ça pour un salaire pathétique non ça ne donne pas envie. Pour ces secteurs le manque de personnel et ses conséquences sont juste un petit rappel : sans les salariés sur lesquels ils pissent ils ne sont rien et il est grand temps de mieux les traiter.

2.Posté par marc le 10/06/2022 09:17 | Alerter
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pourtant jamais ADP n'a prélevé autant de taxes auprès des compagnies aériennes

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