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III. Déploiement européen, crises et alliances marquent les années 1970 à 2000 pour Air France

La saga d'Air France


La longue histoire d’Air France est jalonnée de crises et d’embellies. Années sombres, années de renaissance. Au commencement est la fusion des compagnies aériennes pionnières françaises. La naissance officielle est annoncée le 7 octobre 1933. Il faudra attendre la fin de la Première Guerre mondiale pour voir l’envolée de la compagnie, nationalisée le 26 juin 1945. TourMaG.com vous propose une synthèse de la longue histoire d’Air France, en relevant quelques uns de ses faits marquants.


Rédigé par le Mardi 5 Mars 2019

Le Boeing 747 ne vole pas plus vite qu’un B707, mais il vole plus loin et surtout avec trois fois plus de passagers, près de 500 - DR : Christophe Leroux, Air France
Le Boeing 747 ne vole pas plus vite qu’un B707, mais il vole plus loin et surtout avec trois fois plus de passagers, près de 500 - DR : Christophe Leroux, Air France
Dans les années 70, les constructeurs voient de plus en plus gros.

Grâce aux gros porteurs - Boeing 747 (dès 1970) et Airbus 300, dont elle est compagnie de lancement, Air France accentue son rayonnement international.

Le Boeing 747 ne vole pas plus vite qu’un B707, mais il vole plus loin et surtout avec trois fois plus de passagers, près de 500. Il est alors le plus gros avion commercial jamais mis en service.

Le 19 novembre 1975, Pierre Giraudet est nommé Président d’Air France. Il restera 9 ans à ce poste.

Ingénieur des Ponts et Chaussées, il a notamment dirigé les travaux d’extension de l’aéroport d’Orly et la construction de l’aérogare d’Orly Ouest.

Il marquera la compagnie de son empreinte en l’engageant dans une modernisation technique et commerciale.

Avec des coûts d’exploitation plus faibles et des cabines plus vastes, les jets permettent de réduire les tarifs.

Désireux de conquérir une clientèle touristique qui lui échappe, Air France introduit les « Vols Vacances » durant l’été 1979. Les services sont simplifiés et les prix à peine supérieurs à ceux des compagnies charters.

Cette politique s’inscrit dans une logique de renouveau commercial et le trafic s’envole, avec l’émergence d’une nouvelle clientèle en quête de voyage plaisir.

Si Air France rayonne sur le monde, elle est plus discrète sur l’Europe.

Un déploiement européen

Marceau Long, juriste éminent, prend la présidence d’Air France en juillet 1984. C’est sous son impulsion que s’opère la prise de conscience européenne de la compagnie.

A Roissy, la première aérogare arrive à saturation. L’ouverture de la nouvelle aérogare parisienne Roissy-CDG 2 (1982) va servir de base pour partir à la conquête de l’Europe, avec une flotte de moyen-courriers composée de Boeing 737 puis d’Airbus 320.

Plus rationnelle, plus souple d’utilisation que CDG 1, la nouvelle aérogare a aussi mission de réduire les coûts.

A la fin des années 1980, Air France enregistre 82 escales en Europe. Elle se hisse au troisième rang mondial pour le trafic passagers.

Consciente de l’enjeu que représente la maîtrise d’un grand réseau de réservation, Air France se lance en 1987 dans le projet Amadeus.

Né de la réunion d’Air France, de Lufthansa, d’Iberia et de SAS, Amadeus constitue rapidement le premier réseau de réservation informatisé européen.

En 1987, Jaques Friedmann accède à la présidence d'Air France. Il sera remplacé l’année suivante par Bernard Attali, qui restera 5 ans.

La prochaine décennie s’annonce sous de sombres auspices.

Les années noires

Bernard Attali doit affronter les crises du début des années 90, avec la « Guerre du Golfe » (1990-1991) et les stratégies musclées de ses concurrents.

Sans accepter la logique de déréglementation annoncée par Bruxelles, il tente d’y préparer la compagnie.

Instaurée d’abord aux Etats-Unis, la déréglementation gagne l’Europe. C’est l’open sky. Le ciel européen s’ouvre à la concurrence.

Les conflits, l’interruption de certaines liaisons, la peur du terrorisme impactent durement les transporteurs aériens. Les majors souffrent.

Air France qui a misé sur une augmentation du trafic, se retrouve en surcapacité. Ce seront les années noires de la compagnie nationale.

Bernard Attali veut instaurer des plans de sauvetage mal accueillis par l’ensemble du personnel, mis à l’écart des décisions.

En octobre 1993, un conflit social extrêmement dur paralyse la compagnie pendant plusieurs semaines. Ce sera l’un des plus durs de son histoire.

Le 27 octobre 1993, c’est dans la tourmente que Christian Blanc succède à Bernard Attali, démissionnaire.

L’embellie avec un grand « oui » au référendum Christian Blanc

Le plan Christian Blanc prévoit un gain de productivité de 30% en 3 ans, assorti de mesures sévères comme le gel des salaires, la remise en question des acquis sociaux et la réorganisation de la structure en centres de profits responsables de leurs recettes et de leurs coûts - DR : Wikimedia Commons
Le plan Christian Blanc prévoit un gain de productivité de 30% en 3 ans, assorti de mesures sévères comme le gel des salaires, la remise en question des acquis sociaux et la réorganisation de la structure en centres de profits responsables de leurs recettes et de leurs coûts - DR : Wikimedia Commons
Haut fonctionnaire, proche de Michel Rocard, le Premier Ministre de l'époque, Christian Blanc a démontré en Nouvelle-Calédonie ses qualités de fin négociateur en apportant une solution politique au grave conflit qui secouait l’île (1988).

Il sait que l’adhésion du personnel est nécessaire pour toute action de redressement.

Les « Programmes pour l’entreprise » de Bernard Attali annulés, il présente à l’ensemble du personnel son « Projet pour l’Entreprise », qui vise à redresser la compagnie.

83% des salariés participent au référendum. Approbation massive. Le oui l’emporte à 81 % ! Il faut le mettre en pratique et le plus difficile reste à accomplir.

Le plan Christian Blanc prévoit un gain de productivité de 30% en 3 ans, assorti de mesures sévères comme le gel des salaires, la remise en question des acquis sociaux et la réorganisation de la structure en centres de profits responsables de leurs recettes et de leurs coûts.

Ces mesures sont accompagnées d’une remise en question de toutes les fonctions du personnel et de la renégociation des 81 conventions existantes.

Parmi les axes approuvés figure un actionnariat volontaire des salariés.

L’État actionnaire unique doit, de son côté, verser ses premières subventions - 10 milliards de francs si le plan est approuvé par la Commission européenne.

Il s’est engagé à recapitaliser à hauteur de 20 milliards de francs. C’est près de la moitié de la dette de la compagnie, qui est de l’ordre de 37 milliards, auxquels il faudra ajouter les résultats négatifs de l’année, estimés à 5 milliards de francs.

Toutes les compagnies ont été touchées par la crise, UTA et Air Inter comprises.

Pour sauver l’aérien, l’Etat prône le rapprochement. Présidée par Christian Blanc, une société holding « Groupe Air France » est créée en septembre 1994.

Le renouveau va se traduire dans l’approche commerciale qui réorganise ses classes et réinvestit le haut de gamme. Le réseau est réorganisé autour du hub de Roissy CDG 2, inauguré en 1996.

Air France transfère son siège social à Roissy, au cœur de son exploitation.

Les résultats sont au rendez-vous. Le 30 mai 1997, Christian Blanc annonce les premiers résultats positifs d'Air France depuis 1989.

De nouveau bénéficiaire, la compagnie ouvre deux ans plus tard son capital. 72% des salariés deviennent actionnaires de l’entreprise.

La « nouvelle Air France » s’envole vers le 21e siècle avec une nouvelle stratégie, une croissance rentable et, fidèle à sa nouvelle signature publicitaire, elle entend « Faire du ciel le plus bel endroit de la Terre ».

Stratégie d’alliances sous un ciel qui s’assombrit

Le 22 septembre 1997, Jean Cyril Spinetta devient le nouveau Président-directeur général du Groupe Air France. Il restera 11 ans à ce poste.

Entre autres missions, il aura à préparer la privatisation et à réaliser le rapprochement avec la société néerlandaise KLM.

Air France s’est adaptée au contexte international. Elle s’est redéployée en Asie et en Afrique.

En France, elle a racheté des compagnies régionales (BritAir et Régional) et joué la complémentarité avec la SNCF, en connectant le TGV au hub de Paris-Charles de Gaulle.

En 2000, elle prend le contrôle de Regional Airlines et consolide ainsi sa prise de contrôle du transport régional.

La montée en puissance d’Air France tient aussi à stratégie d’alliances. Dès 2000, elle est au cœur de SkyTeam, une alliance globale fondée avec Delta Airlines, Aeromexico et Korean Air.

A partir de cette alliance qui regroupera une vingtaine de compagnies membres, Air France envisage un déploiement des lignes vers les Etats-Unis accompagné de tarifs promotionnels.

Mais le ciel s’assombrit à nouveau. Les attentats du World Trade Center (2001), l’entrée en guerre des États-Unis en Irak (2003) vont lourdement impacté le tourisme et les transporteurs.

Le trafic recule, le prix du pétrole grimpe. L’industrie aérienne est précipitée dans l’une des plus graves crises de son histoire.

Fin 2003, dans une communication au Syndicat National des Agences de Voyages (SNAV), Jean Cyril Spinetta évoque la dure réalité conjoncturelle, les marchés déprimés, une économie incertaine, les attentats qui freinent le tourisme, l’augmentation des coûts en matière d’assurances et de sécurité.

Il déclare : « si nous pouvons aujourd’hui surmonter honorablement ces obstacles, c’est grâce à notre stratégie, hubs, réseau, alliance Sky Team mais aussi grâce à notre réactivité et à notre pragmatisme ».

Retrouvez tous les articles consacrés à la saga Air France en cliquant sur ce lien.

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Michèle Sani Publié par Michèle Sani Journaliste - TourMaG.com
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