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Léa : "l'ubérisation ne crée pas d'emplois mais... de la précarité !"

La life de l'agent de voyages (pas si) blonde


Léa, notre agent de voyages pas si blonde, revient sur l'ubérisation de l'économie. Après l'hébergement, les transports, et la livraison de repas à domicile, le phénomène s'empare aussi de la profession d'agent de voyages...


Rédigé par le Mardi 26 Janvier 2016

Vous croyez que ces faux-jobs d’indépendants sont réservés aux métiers de l’entretien, de la restauration, de la livraison ou de la communication ? Tenez-vous prêts : l’ubérisation arrive dans nos agences ! - Dessin Raf
Vous croyez que ces faux-jobs d’indépendants sont réservés aux métiers de l’entretien, de la restauration, de la livraison ou de la communication ? Tenez-vous prêts : l’ubérisation arrive dans nos agences ! - Dessin Raf
A l’origine, on t’explique qu’Uber, ça va être magnifique.

On te promet que le chauffeur de taxi malodorant et raciste (qui arrive chez toi avec 16€ au compteur et qui écoute RTL à fond) va se transformer d’un coup de baguette magique en un beau mec jeune et musclé.

Un mec au costard neuf qui arrivera chez toi en 2 minutes, te proposera de l’eau et des bonbons, qui sera sympa et qui te tiendra la porte…

Alors tu finis par ne plus jamais essayer de trouver un taxi et tu mets Uber dans les applis favorites de ton iPhone.

Un autre jour, tu pars avec trois copines en week-end à Rome (comme dans la musique d’attente de feu Donatello) et tu te rends compte que deux chambres d’hôtels minuscules vont te revenir 3 fois plus cher qu’un joli petit appartement en plein centre.

Tu testes Airbnb et tu deviens accro au site de « mise en relation » pour organiser tes escapades en Europe et (avoue-le…), tu as mis ton appart’ en sous-loc sur la plate-forme quand tu es partie en vacances au mois d’août. (C’est interdit, c’est mal, mais ça t’a rapporté 900 € pour 10 jours).

Toi, tu n’as jamais essayé, mais tu as plein de copains qui ne jurent que par Blablacar pour partir en week-end (ou pour rentabiliser un peu leurs petits déplacements…).

On appelle ça le business collaboratif, l’ubérisation de l’économie, et sur le papier, c’est parfait :

- les chauffeurs d’Uber sont ponctuels, accueillants, respectueux et moins chers que les taxis

- tes hébergements Airbnb t’ont toujours séduite (il faut dire que 15 ans à décrypter des brochures de TO, ça t’aide à flairer les pièges des annonces d’appart moches) et aucun de tes copains n’a rencontré le moindre problème avec Blablacar.

Comment ces entreprises fonctionnent ?

Et puis, depuis quelques semaines, tu vois fleurir près de ton agence de beaux jeunes gens musclés en collants cyclistes.

Foodora et Deliveroo envahissent les rues de Paris et tu vois ces grands gaillards pédaler ferme pour livrer des petits plats partout dans Paris.

Toi-même, tu as commandé des petits plats pour te nourrir à l’agence et quand tu vois ces athlètes débarquer en clamant « un poisson aux épices pour Léa… régalez-vous bien », tu te dis que si ces garçons ont ton adresse et ton téléphone, ils pourraient s’en souvenir pour te recontacter « à l’occasion », tu leur masserais bien leurs muscles endoloris.

Mais tu te demandes comment marchent ces entreprises…

Airbnb et Blablacar, tu sais : l’utilisateur-consommateur donne sa CB sur une appli, il paye la plate-forme qui va ensuite reverser la somme (en retenant une commission ou des frais de mise en relation) au prestataire.

Un peu le même principe qu’une centrale de paiements de réseau, sauf qu’avant de se faire payer, il joue un rôle d’entonnoir qui va trier des offres et te permettre de faire ton choix.

Mais comment sont payés les cyclistes aux jolis mollets et aux cuisses puissantes de Deliveroo et Foodora ?

Les « bikers » (c’est comme ça qu’on les appelle) poireautent dans des zones stratégiques (tout près des concentrations de restaurants).

Ils sont bipés par les restaurants quand les plats sont prêts (pour ne pas avoir à attendre aux restaurants) et profitent des pistes cyclables pour arriver à destination aussi vite que possible (et ils n’ont pas besoin de choisir une place de parking).

C’était simple mais il fallait y penser. N’empêche que la boite a levé 100 millions d’euros.

Quand ces boites cherchent à « recruter », elles ont le culot de poster des « offres d’emplois » libellées jeunes, cool, fun : « vous êtes sportif, vous avez un vélo et un smartphone, vous êtes souriant ».

Et là, l’étudiant, le chômeur, l’intermittent, le précaire ou juste le salarié qui a des fins de mois difficiles se lancent : on leur promet 25€ de l’heure, des primes s’ils sont ponctuels, des surprimes s’ils bossent la nuit et le week-end… Soit.

Mais cet argent n’est pas un salaire : les bikers doivent s’immatriculer en autoentrepreneurs.

Je n’ai rien contre l’auto-entrepreneuriat, mais...

On a beau me reprocher régulièrement d’être une gauchiste échevelée, je n’ai rien contre l’auto-entrepreneuriat, cette invention sarkozyste.

L’auto-entrepreneuriat permet à des créatifs dynamiques d’exercer une activité plus ou moins indépendante.

Ainsi, ma copine Elodie s’est immatriculée pour monter une petite boutique sur internet. Elle y vend ses propres créations de bijoux fantaisie.

Emma (mon autre copine) a un blog mode et tendances. Elle est un peu connue dans le milieu et elle est geek depuis toujours.

Elle s’est immatriculée pour fournir des services de community management pour des petites boites de mode et gère les comptes Instragram, Pinterest et Facebook de petits créateurs pour quelques centaines d’euros par mois… Ca lui permet d’arrondir ses maigres piges pour les magazines de mode !

Mais l’ubérisation sauvage est dangereuse pour tous les indépendants qui n’ont droit ni à un arrêt maladie, ni à des congés.

Je suis tombée par hasard sur le blog de Jérôme et il m’a ouvert les yeux sur le fait que les entreprises se dédouanent de leurs responsabilités d'employeur en ayant recours à ces auto-entrepreneurs ubérisés.

Vous croyez que ces faux jobs d’indépendants sont réservés aux métiers de l’entretien, de la restauration, de la livraison ou de la communication ?

Tenez-vous prêts : l’ubérisation arrive dans nos agences !

L'ubérisation arrive dans nos agences

J’ai repéré une annonce de job ubérisé dans la presse pro.

Je lis : « Nous croyons aux nouveaux modèles de travail adaptés aux situations de vie personnelle de chacun et vecteurs de plus de souplesse et d’indépendance. Nous préférons pour le moment rester anonyme [tu m’étonnes…] mais ne manquerons pas de vous en dire plus sur nous si votre profil nous intéresse. »

L’agence te demande d’être « professionnel aguerri » pour « répondre aux demandes d’une clientèle exigeante » et l’offre se termine par « vous serez rémunéré sur la marge générée (pas de salaire fixe) ». Ben voyons…

Je ne suis pas juriste, mais votre modèle est hors la loi : vous n’avez pas le droit de faire faire des devis gratuitement par des « collaborateurs non-salariés ».

Et ça n’est pas tout ! Dans un récent article, j’apprends avec stupeur que « TUI France va créer des (jobs de) "Home Workers". Des travailleurs indépendants, apporteurs d'affaires et rémunérés au pourcentage ».

TUI est « en train d'examiner tous les aspects juridiques » et compte « commenc(er) à sélectionner dans quelques semaines ».

Et notre Oncle Dom de conclure « TUI crée des emplois » ! Non, Tonton Dom. TUI ne crée pas d’emploi. Il crée de la précarité.

Selon l’annuaire des Vendeurs à Domicile Indépendants, ce système « répond aux exigences des consommateurs qui recherchent des services de proximité générateurs de lien social, de convivialité et d'individualisation des prestations. » Mouais… je ne suis pas convaincue.

Dans sa cérémonie de vœux, le président du SNAV, Jean-Pierre Mas a déclaré réfléchir à l'évolution du statut d'apporteur d'affaires, « des travailleurs indépendants de plus en plus utilisés dans le tourisme et qui bénéficient d'un vide juridique ».

Moi, je ne trouve pas qu’ils en bénéficient, mais plutôt qu’ils en souffrent.

Et vous, vous en pensez quoi ?

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Commentaires

1.Posté par Nadimi le 27/01/2016 00:23 | Alerter
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Parfait cet article !
Merci léa, tellement (malheureusement) vrai...

2.Posté par Edward le 27/01/2016 09:28 | Alerter
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Je n'ai pas toujours été d'accord avec ce que je lisais sous votre plume, Léa, mais aujourd'hui je partage totalement votre analyse. L' "ubérisation" détruira à terme un grand nombre d'emplois pour les remplacer par des travailleurs indépendants qui rameront comme des damnés pour ne même pas gagné l'équivalent d'un smic... Ca promet!

3.Posté par christian Jean le 27/01/2016 09:55 | Alerter
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Article réaliste et bien écrit.
Comme quoi une bonne connaissance de son sujet peu parfois prévaloir sur une carte de presse ...

4.Posté par Pour sur le 27/01/2016 09:59 | Alerter
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Pour faire la suite de Léa et d'Edward, ces même travailleurs indépendant consommeront de moins en moins compte tenu de leur revenu, générant ainsi d'autres pertes d'emplois par ailleurs et ainsi de suite CQFD !
Et nous aurons ensuite nos chers hommes et femmes politiques qui inventeront d'autres mesures coutant un max et creusant encore plus notre déficit....

Il serait tellement plus simple de déjà faire respecter les lois qui existent sur les diverses réglementations qui régissent tous ces métiers. Mais manifestement tout le monde s'en fout et on continue de foncer à tombeau ouvert vers un précipice qui s'approche de + en +...........

5.Posté par Mon Tour Motos le 27/01/2016 10:19 | Alerter
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Il n'y a pas que les auto-entrepreneurs... Quelque puisse être sa forme juridique, une TPE dépendant (trop) d'une plateforme de mise en relation est fragilisée. Et à niveau supérieur, nombre d'hoteliers sont eux aussi trop dépendants des Booking et autres Expedia (pour ne citer qu'eux)
D'ailleurs "l'uberisation" n'est finalement qu'une transposition aux VTC de la "Booking-isation".
Et désormais, il y a des plateformes de mise en relation pour tout le monde dans le tourisme...

6.Posté par AGVFAN le 27/01/2016 11:02 | Alerter
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quelques remarques :
-au final , c'est toujours le client qui a raison ... donc si le service apporté par le "mec en costard neuf" est meilleur , c'est lui qui gagnera , tôt ou tard ... (les couts sont un autre sujet , sachant qu' à date le mec en costard propose service et cout donc c'est compliqué ....) -
- pourquoi Lea ne peut -elle proposer à ses clients "le bel appartement airbnb en centre ville " plutot que les 2 minuscules chambres d'hotel " puisqu 'elle avoue elle -même que sa "compétence" d'agent de voyages (= sa valeur ajoutée ) lui permet de séparer le bon grain de l'ivraie .... : sous entendu le traditionnel pourrait lui aussi intégrer le collaboratif (en tant qu'outils comme les autres ...) ,plutot que de le l'ignorer ou le combattre ????

7.Posté par Pour sur le 27/01/2016 11:18 | Alerter
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@ AGVFAN,
désolé mais le client n'a pas toujours raison dans la mesure où quelque part, il creuse à moyen terme sa propre tombe.....
Le client achète ses chaussures à -40 % sur le net
Son chausseur vient à disparaitre
Il se trouve que le chausseur en question achetait régulièrement des produits de l'entreprise du client
Du coup étant au chômage, le chausseur n'achète plus rien.

Cette situation étant multipliée par x centaines de milliers de pax sur différents corps de métier, à terme, le client initial quel qu'il soit devient chômeur. CQFD

8.Posté par Transfert le 27/01/2016 11:22 | Alerter
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Voilà un article qu'il conviendrait de faire passer à nos politiques de tout bord.....

9.Posté par AGVFAN le 27/01/2016 11:42 | Alerter
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@pour sur : le chausseur disparait s'il n'offre pas de service complémentaire à internet ; c'est ce qui est arrivé aux "disquaires" ; à lui de trouver/prouver sa valeur ajoutée et s'il n'y en a pas à reinventer son métier (chaussure sur mesure, café-chaussure , chausseur à domicile etc ....)

10.Posté par Herve ROCLE le 27/01/2016 11:44 | Alerter
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Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout de cette logique.
Plus besoin d'avoir un BTS de tourisme, plus besoin de s’épuiser à trouver un garant financier, plus de TVA, plus d’impôts sur les sociétés, plus de comptes annuels à déposer. que chacun teste ses capacités, les bons réussiront et grandiront dans une structure unipersonnelle et quand ils seront fatigués de tout gérer seul, ils voudront embaucher du personnel, il leur faudra alors créer une entreprise pour développer leur business. Mais il leur faudra alors garantie financière, TVA, Impôts sur les sociétés, comptes annuels à déposer....

les bidouilleurs resteront bidouilleurs ou mourront, les entrepreneurs entreprendront...
une manière de réinventer la société. c'est peut être la solution pour que les jeunes sans expérience fassent autre chose que d'être exploités dans des jobs précaires au smic ou pire dans des stages...

L'alternative serait la liberté d'entreprendre, des formalités simplifiées et moins de charges pour les entreprises... bref les solutions sont connues, il faut juste les mettre en place...


11.Posté par marie le 27/01/2016 13:03 | Alerter
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j aimerais vous rappeller que des jeunes sont sans aucune ressource des lors qu ils n ont pas de travail de 24 mois ... ce sont des jeunes de 18 à 25 ans qui n ont aucun soutien familial,qui n ont aucune ressource de remplacement qui n ont que leur jeunesse a offrir en pature pour se nourrir ,alors que cela soit le sport ou le travail en ligne ,ou le do it your self est la seule et unique alternative pour garder la tete hors de l eau? il a ete souleve de garantir une protection sociale suffisante a tous pour permettre a ces metiers de se developper c est veritablement la seule alternative pour sortir de la précarité et de la paupérisation . J ajoutte que les seniors sont tres recherches pour des jobs de commerciaux puisqu ils peuvent travailler sans mettre en péril leur pension de retraite . Ceci n est pas toujours a la portée des salariés du voyage ,travail precaire et carriere courte ,souvent chargée de famille qui sont des femmes ... plus d info sur www.revenudebase.info un projet de societe qui libere le travail

12.Posté par Ayla le 27/01/2016 14:55 | Alerter
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C'est vrai, c'est vachement mieux de rester au chômage plutôt que faire preuve d'initiative et de débrouillardise et de savoir être souple quand c'est nécessaire.
Si la France était capable de fournir des emplois décents a toute sa population, alors je serais d'accord avec cet article. Dans l’état des choses, vive la libre entreprise qui permet aux uns et aux autres de gagner leur vie...

13.Posté par Pascal le 27/01/2016 15:21 | Alerter
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Bravo Léa pour ton article,
N'en déplaise à AGVFAN : au final ce n'est pas le client qui a toujours raison mais le plus riche qui s'enrichit toujours plus.
Il y va de la macro économie comme de la thermodynamique : l'entropie (le désordre) finit toujours par créer de la néguentropie (l'ordre figé)
L'ubérisation participe et accélère le fait que, fin 2015, 1% de la population mondiale détient 50% des richesses mondiales.
Prenons l'exemple de Free: avant on payait cher France Telecom pour un service reconnu mondialement comme bon, et le patron de FT n'était pas dans les 500 fortunes de France. Puis Free est arrivée (je fais court), on peut payer 3X moins cher (notre vie en a t elle été bouleversée pour autant?...), mais il y a 25000 emplois en moins en France dans les télécoms et le plus grand maquereau virtuel (remember 3615 ULLA!) est devenu la 5ème fortune de France.
Si c'est ça le progrès......

14.Posté par Papadopoulos le 28/01/2016 13:12 | Alerter
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Bonjour à toutes et à tous,
La parallèle entre les métiers est un peu trop rapide. Pourquoi? Voyons ensemble.
Certains opérateurs du tourisme (réseau des villages de vacances notamment) embauchent des commerciaux à mi-temps (rémunéré en salaire fixe sur la base du SMIC) et avec une partie avec un pourcentage sur la marge générée par les ventes qu'il fait. Jusqu'à là, rien d'anormal. Il gère son temps comme il veut (il n'a pas des horaires fixes comme une agence), il utilise ses propres moyens de travail (PC, Téléphone, Voiture) et l'entreprise qui l'emploie, lui rembourse selon des barèmes convenus. C'est la mode de BYOD (Bring Your Own Device) utilisée par les anglo saxons qui considèrent qu'un salarié il est plus performant en utilisant un PC et un téléphone qui connaît et il est plus soigneux d'une voiture quand c'est sa propre voiture. C'est pas faux, d'ailleurs. Jusqu'à là tout est clair. Mais en regardant de plus près, ce sont des salariés précaires: ils ont un fixe de misère, il bossent à plein temps et comme leur cible est souvent les Comités d'Entreprise, les ventes sont plus que saisonnières ou ponctuelles. Un bon mois, le commercial pour arriver à un salaire correct (1800€), mais 4 à 5 mois par an, il touche entre 800 et 900 € (hors remboursement de frais). Il n'a pas droit aux RTT comme ses collègues à plein temps, pas de tickets restaurant et les congés c'est que 10 à 13 jours / an.
Prenons maintenant l'exemple d'un autoentrepreneur qui travaille pour le compte d'une agence. Il sera rémunéré au pourcentage de ses ventes (groupes ou indiv). 5% minimum de comm' sur le prix client (si non il s'est fait avoir et j'expliquerai plus tard pourquoi). Il va chasser qui? Les dossiers à 500€? Ou les dossiers à 6000€? La clientèle qui est habituée à payer 6000€ deux fois par an pour aller 10 jours aux Seychelles et une semaine au ski, a des exigences: ne pas perdre le temps de venir en ville, se garer pour venir à l'agence chercher son joli carnet de voyage. Avoir un interlocuteur unique qui peut joindre la nuit quand ils sont à Los Angeles et qu'ils ont besoin d'assistance. Avoir des "bons tuyaux" fournis par son interlocuteur. etc...etc...etc... Oui, vous me direz-vous, mais on peut fournir tout ça en agence. Rares sont les agences qui peuvent prendre en charge un appel à 2 heures du mat', apporter le carnet de voyage au bureau du client et lui suggérer une prochaine destination en même temps, parce qu'il a eu des bons retours d'autres clients. Se faire recommander auprès des amis du client, etc... etc... Quel patron confierait la gestion d'un compte client à plusieurs dizaines de milliers d'euros à une personne qui vend essentiellement de la brochure TO ou à un jeune débutant? Comment sont gérés les litiges avec ce genre de clients?
Toute cette ubérisation concerne essentiellement la chasse aux gros poissons et moins celle à un service moins cher.
Faisons les calculs: un commercial offshore se fixe un objectif mensuel de ventes de 10 dossiers (ou l'équivalent en CA) à 5000€ avec une marge de 13% soit . Commissionné à 5%, ca fait 500€ x 10 = 5000€ C'est son CA en tant qu'entrepreneur. Ses charges sont entre 55 et 60%. Il lui reste un salaire net de 2000€ / mois.
Et l'agence dans tout ça? L'objectif du patron de l'agence n'est pas que le commercial "cannibalise" la clientèle de l'agence (au démarrage ce sera du cannibalisme, car il faut commencer avec les contacts en portefeuille), mais après ce sera un cercle de plus en plus élargi qui apportera du cash à l'agence. La question à se poser n'est pas "il faut le faire ou pas?". C'est sûr que ce sera fait, si ce n'est pas par vous, ce sera par votre concurrent. Mais : "quand, comment et vers quelle cible?".
Il y a toutefois un risque dans ce montage. Ou plutôt deux:
- pour l'agence le risque est que le jour où le commercial se barre à la concurrence, il se barre avec sa clientèle.
- pour le commercial, c'est qu'en tant qu'autoentrepreneur il ne peut pas avoir un seul client qui le rémmunere, si non c'est du travail déguisé. Et les URSSAF n'aime pas du tout ça. Il faut avoir au moins, deux voire trois clients réguliers.
Quand on parle du statut du commercial free-lance, c'est sur ce dernier point que ça bloque: est-ce que le commercial travaille exclusivement pour un seul client? Y'a-t-il un lien de subordination entre le donneur d'ordre (le patron de l'agence) et le commercial? Si ou, c'est que c'est du travail déguisé. Les URSSAF sont clair et précis sur ce point.
La difficulté est de trouver un équilibre entre les clients du commercial (et quand je dis client, je pense à l'agence à qui il apporte du business) et sa rémunération. D'où le fait qu'un contrat de collaboration entre une agence et un commercial doit comporter un clause d'exclusivité qui est rémunérée, ce qui donne un taux de 3% + 2% d'exclusivité, soit 5% évoqués plus haut.
CQFD

Amicalement,

Papa

15.Posté par Prat Caroline le 28/01/2016 16:30 | Alerter
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Bonjour Léa,

Je suis l’auteur de l’annonce anonyme de job que vous citez comme étant « ubérisée ». Mon nom est Caroline Prat et je suis la fondatrice et la gérante d’un petit tour operateur spécialiste, www.voyageinedit.com

« Peut-on parler d’ubérisation du tourisme ? », m’a demandé un journaliste à ce sujet ce matin.
« Non », ai-je d’abord répondu. Pour moi, l’ubérisation, c’est aller chercher des particuliers sans réelle expertise d’un métier (des gens comme vous et moi qui savent conduire une voiture ou un vélo) et les mettre en situation de concurrence avec des professionnels établis (des taxis ou des livreurs professionnels).

Mon annonce pour recruter des experts indépendants avait pour but de recruter des professionnels du voyage. Cela ne choque personne aujourd’hui qu’une petite société externalise la gestion de sa comptabilité et de son site Internet, ou qu’une société sous-traite une partie plus technique de son activité à un prestataire extérieur.

De la même manière, une agence de voyage devrait pouvoir externaliser une partie de son activité lorsqu’elle n’a pas un volume d’affaire suffisant pour embaucher un spécialiste en CDI dans ce domaine.
Pourquoi, si personne au sein de mon équipe Voyage Inédit ne connaît le Bhoutan, n’aurais-je pas le droit d’externaliser une demande de circuit dans ce pays à un travailleur indépendant, spécialiste du Bhoutan?
Pourquoi est-ce qu’une ex-agent de voyage qui voudrait reprendre un job à temps partiel après la naissance de ses enfants, ne pourrait-elle pas le faire de manière indépendante et à domicile ?
Pourquoi est-ce qu’un conseiller voyages spécialiste mis sur le carreau à 57 ans malgré une connaissance du monde encyclopédique, ne pourrait-il pas continuer à travailler à son compte si aucune société ne veut plus l’embaucher ?

J’ai eu beaucoup de réponses à mon annonce dans Tourmag. Dans la majorité des cas, les candidats cherchaient en réalité un CDI à temps plein et avait répondu « faute de mieux ». J’ai écarté ces candidatures pour ne garder que les quelques-unes venant de personnes pour qui l’auto-entreprenariat ou l’entreprise individuelle étaient un vrai choix. Ces personnes ne m’avaient pas attendu pour se mettre à leur compte, elles avaient conscience des avantages mais aussi de la précarité et des risques du statut, bref, elles avaient une bonne vision des revenus potentiels et des charges à payer.

Ce modèle est-il comme vous le dites « hors la loi » ? Pas vraiment puisque que mon agence de voyage immatriculée prend face aux clients l’entière responsabilité des erreurs qu’auraient commettre le consultant indépendant. On est simplement dans un gouffre juridique qui n’a plus lieu d’être.
Le changement va toujours dans le sens de l’intérêt des consommateurs. Et pour que le changement puisse aussi aller dans le sens des travailleurs, il faut accompagner le changement, éventuellement l’encadrer et non simplement s’y opposer.

Ce n’est pas l’ubérisation qui détruit de l’emploi, c’est l’absence de valeur ajoutée. Si un particulier qui s’improvise agent de voyage pouvait remplacer un agent de voyage sans difficulté, alors les agents de voyage tels que nous les connaissons aujourd’hui n’auraient plus de valeur ajoutée et perdraient leur emploi. Au contraire, l’excellent professionnel du voyage qui a su développé son expertise saura toujours négocier son statut et ses droits sociaux face à ceux qui voudraient l’ « ubériser ».

16.Posté par Joachim le 05/02/2016 11:20 | Alerter
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Bonjour Léa,

Merci pour cet article intéressant, dont je partage l'analyse. Il nous faut effectivement être vigilants quant à ces beaux discours, et être attentifs aux conséquences sociales de nos choix de consommation.

En revanche, le succès de ces plateformes d'uberisation montrent qu'elles répondent à une attente de la société. Et ce du côté des consommateurs, mais également pour les entreprises/professionnels. Le commentaire de Caroline Prat est intéressant. C'est l'absence de valeur qui détruit l'emploi. Et pour empêcher cette destruction, des mécanismes de protection ont été mis en place (licence Taxi, formation obligatoire des professionnels, etc.).

Ces mécanismes de protection volent en éclat aujourd'hui, avec une prise de conscience violente de la pauvreté du service rendu par les systèmes actuels.

L'enjeu réel devient finalement de trouver comment rendre social, équitable et durable le modèle d'entreprise Uber.

Avez-vous des idées pour cela ? Que pensez-vous du Compte Personnel d'Activité ?

17.Posté par Nelly le 03/12/2016 09:19 | Alerter
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Votre article est tout à fait vrai et j'ai eu la même critique lorsque j'ai vu l'offre de TUI, ce mastodonte qui s'y met !!

18.Posté par Le Consommacteur le 02/03/2017 08:59 | Alerter
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En clair, vous etes ravie d'utiliser des services collaboratifs en tant que cliente quand ils sont moins chers et (selon vous) plus performants que ceux des professionnels (et vois en faites carrement la pub dans votre article), mais quand vous decouvrez que l'un d'eux peut vous faire concurrence en tant que professionnelle de votre secteur, vous vous rebellez ?

La belle hypocrisie traditionnelle.

19.Posté par victoirine le 05/12/2017 11:27 | Alerter
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pour la protection sociale, il serait opportun que la législation ou les plateformes elles-mêmes (formation, assurances …) atténuent la distinction entre travail salarié et travail indépendant lié à une plateforme numérique et tiennent compte des difficultés spécifiques qui se posent au travail « uberisé » : http://www.officiel-prevention.com/formation/fiches-metier/detail_dossier_CHSCT.php?rub=89&ssrub=206&dossid=574

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